Texte intégral
Je voudrais très brièvement vous dire quelques mots à côté de l'ambassadeur de France, M. Bernard Emié, un homme déterminé, courageux, talentueux, qui représente bien notre pays, et à côté de mon ami Marwan Hamadé, qui représente encore mieux le Liban, lui, et avec lequel je me bats depuis plus de 25 ans, ce qui ne me rajeunit pas.
A chaque fois, ou très souvent il s'agit d'une visite de solidarité, d'amitié avec le peuple libanais, avec son gouvernement, dans une situation qui est toujours difficile, et qui est particulièrement difficile aujourd'hui, puisque ces événements qui hélas nous rassemblent, ont fait beaucoup de morts, plus qu'il n'y en a jamais eu depuis le début des guerres au Liban.
Au nom du président de la République, Nicolas Sarkozy, du gouvernement de la France et du peuple français, je viens ici saluer le courage, la détermination des Libanais et affirmer que la France est à leur coté pour défendre la souveraineté de ce pays, son unité et bien sûr la paix... perspective éternellement repoussée, jamais complètement atteinte dans ce pays.
Voilà le sens de ma visite au nom du président de la République, qui a téléphoné plusieurs fois à M. Fouad Siniora, le Premier ministre.
J'ai remis d'ailleurs à M. Siniora, un message du président de la République et je peux dire que ses termes, sans rien en révéler - car il ne revient pas au ministre des Affaires étrangères de révéler ces termes - étaient déterminés, très fraternels et très chaleureux.
Je voudrais également - cela va de soi, mais encore faut-il le faire - condamner les attentats qui, maintenant chaque jour, viennent frapper toutes les populations, tous les différents groupes religieux, ils constituent avec difficulté, mais aussi avec la ferveur qu'on leur connaît, le tissu de ce pays et la démocratie vivante qu'on espère la plus activité possible , représentée aujourd'hui au mieux par le Premier ministre, M. Fouad Siniora, et par son gouvernement.
Est-ce que dans ce pays, une fois pour toute, et dans cette région, on va comprendre que la politique n'est pas seulement l'assassinat, que cela n'est pas du tout l'assassinat ? Et ceux qui comprendront un jour cela auront fait un grand pas pour leur quiétude personnelle comme ils l'auront fait pour la démocratie dans toute la zone. Tous les attentats sont condamnables, particulièrement ceux qui atteignent la population civile de façon indiscriminée. Et bien sûr je condamne ce qui s'est passé dans le Nord du pays. Ne l'oublions pas, l'armée libanaise a été durement frappée, avec 33 morts. Et tout cela a commencé par des assassinats déterminés de soldats qui n'étaient pas en fonction. C'est plus qu'une provocation, c'est un crime. Et puis les populations civiles, évidemment, comme d'habitude, sont frappées. Dans ce camp en particulier, on les voit fuir dans des conditions qui sont toujours mauvaises, et qui sont souvent épouvantables.
N'oublions pas qu'à chaque fois que ces attaques sont commises, que ces attentats sont perpétrés, ce sont en premier des populations civiles qui en pâtissent.
J'ai en mémoire, avant de répondre à vos questions, beaucoup de réactions de la communauté internationale, en particulier celle du président du Conseil de sécurité des Nations unies, et la très ferme position de la Ligue arabe. Je dirais surtout - bien que cela ne respecte pas un ordre hiérarchique, c'est un ordre un peu plus sentimental - la condamnation par les Palestiniens eux-mêmes et par leurs organisations de ce qui s'est passé dans le camp. Cela a commencé par des vols, par des simples attaques de mafia qui ont entraîné une réaction bien légitime de l'armée. Je salue l'armée libanaise, dans sa force et dans sa détermination. Ce n'est pas une tâche facile, surtout lorsqu'il s'agit d'opérer au milieu des populations civiles et dans un camp que l'on appelle un camp de réfugiés. Nous comprenons donc la nécessité pour le gouvernement de rétablir l'ordre sur le territoire, tout en évidemment restant attentif, je le répète, au sort des populations civiles. C'est le rôle d'un gouvernement légitimement élu, que de rétablir l'ordre sur son territoire, c'est même la plus importante et la première de ses tâches.
Il paraît que j'ai oublié dans la communauté internationale un certain nombre de gens qui se manifestent. Je ne veux pas les oublier, j'ai parlé du président du Conseil de sécurité des Nations unies, de la Ligue arabe, mais tous les pays, individuellement ont condamné cette attaque contre l'intégrité et l'ordre enfin rétabli au Liban.
La communauté internationale continue à être attentive. Peut être joue-t-on sur sa lassitude ou sur sa crainte pour qu'elle ne s'obstine pas ou qu'elle ne poursuive pas simplement, très tranquillement, le processus au Conseil de sécurité, qui vise à mettre en place un tribunal international pour déterminer les responsabilités dans l'assassinat de Rafic Hariri.
Ne comptez pas sur la communauté internationale, en tout cas pas sur la France pour renoncer à cela. Et je sais parler non pas seulement au nom de mon pays, mais également au nom de cette communauté qui reste extrêmement déterminée. Nous le sommes donc, non seulement s'agissant de ce tribunal, mais également de la pleine application de la résolution 1701, et pour que notre présence, la présence française soit affirmée dans la FINUL. C'est le souhait du président de la République et de notre gouvernement.
Je crois avoir devant vous tracé les grandes lignes qui ont toujours été celles de la France, quels que soient les gouvernements, pour affirmer notre soutien, et notre présence déterminée aux côtés des populations libanaises. La France a des responsabilités particulières, elle les assumera. La communauté internationale a choisi une ligne de conduite, dont elle ne se départira pas.
C'est dans les périodes difficiles qu'on connaît ses amis. Je souhaiterais pour ce pays que je connais si bien, où j'ai travaillé dans tous les camps, de toute part, comme médecin et comme représentant d'une certaine notion politique de l'humanitaire, je souhaiterais bien pouvoir rire et saluer l'arrivée des beaux jours dans des conditions différentes. Mais hélas, c'est ainsi qu'on juge ses amis, aussi dans les périodes les plus conflictuelles et les plus dangereuses. La France est l'amie du Liban.
Q - On a beaucoup entendu dire que la politique de la France après M. Chirac va changer envers le Liban. Et comment vous voyez la solution au Liban ?
R - Et voilà deux questions simples, la première réponse est évidemment simple, elle n'a pas changé. Nous affirmons, le président de la République, M. Nicolas Sarkozy, affirme la même politique de fraternité, de soutien, au peuple libanais. Les conditions mêmes de cette dernière crise ont changé par rapport à la précédente. D'une crise à l'autre, il n'y a pas les mêmes ingrédients, même si globalement hélas, c'est toujours un peu semblable. Comment je vois la sortie de la crise ? Je crois que la communauté internationale ne doit jamais accepter la menace et le terrorisme, jamais. Et nous sommes déterminés avec, je l'espère, la majorité du Conseil de sécurité, pour combattre l'impunité grâce à un tribunal à caractère international chargé de juger les assassins de Rafic Hariri. La sortie de la crise actuelle, elle, appartient au Liban et à ses amis. Ce n'est pas nous qui allons renoncer à notre fraternité, notre soutien renouvelé et déterminé et à long terme.
Il y a un gouvernement représentatif et très bien représentatif du Liban, dont un des membres est à mon côté - je suis fier d'être au sien. Il faut que l'ordre soit rétabli. Je pense que l'immense majorité du peuple libanais est derri??re son armée. L'immense majorité des communautés se trouve derrière son armée pour rétablir cet ordre. J'espère, je souhaite, je veux que cessent les attentats qui n'ont d'autre but que de déstabiliser, de répandre la terreur et l'anxiété parmi toutes les populations libanaises. Mais la communauté internationale n'a jamais été aussi unie pour soutenir le Liban. Je crois qu'il s'agit peut-être d'une réponse imparfaite mais la communauté internationale y compris le monde arabe, la Ligue arabe, tous les pays arabes, sont beaucoup plus unis que par le passé pour soutenir cette intégrité territoriale et le gouvernement du Liban.
Q - Est-ce qu'on comprend que le gouvernement de M. Sarkozy va traiter la crise libanaise et les dossiers de la même façon que le gouvernement de M. Chirac ? Et vous dites que vous soutenez le Liban et le gouvernement, mais comment vous allez réaliser ce support sur le terrain ?
R - Un engagement, des engagements ont été pris à la Conférence de Paris, qu'on appelle la conférence Paris III. Cette conférence a pris des décisions qui seront appliquées, développées. Pour mettre en place les programmes de l'Agence française du développement, il faut un vote du Parlement. Vous savez en ce moment qu'il y a des élections législatives en France. Aussitôt après, le gouvernement montrera sa détermination en déposant un projet de loi à l'Assemblée nationale, et ce projet sera, quels que soient les résultats des élections, voté. D'autre part, nous l'avons affirmé à plusieurs reprises, notre soutien, notre engagement dans la FINUL sera maintenu.
Effectivement, la personnalité du président de la République, Nicolas Sarkozy n'est pas la même que celle du président Chirac. Il ne s'agit pas de la même génération. Mais il y a un lien qui unit ces deux générations, c'est la détermination de la France à être aux côtés des Libanais. Les générations changent, et les problèmes parfois restent, tout comme la cruauté de ces problèmes, les assassinats et les attentats. Eh bien, la France reste dans la même ligne, à des détails importants près, mais dans la même ligne que celle du président Chirac, et d'ailleurs que celle du président François Mitterrand.
Q - A qui vous faites supporter la responsabilité de ce qui se passe au Nord ? La majorité parlementaire libanaise a accusé la Syrie de soutenir le Fatah El-Islam, bien que le porte-parole de votre ministère, M. Jean-Baptiste Mattéi, ait refusé d'accuser la Syrie depuis deux jours ?
R - Vous me posez la question : à qui profite le crime ?
Q - Quelle est votre opinion ?
R - Il y a des éléments dans la région, des éléments un peu partout, et pas seulement dans un pays déterminé, bien qu'il y en ait aussi dans un pays déterminé, qui sont les ennemis de la paix, qui profitent de la stabilité, qui ne vivent comme technique politique que par la terreur et la contrainte. Mais il y a aussi dans ces pays et dans ces populations des gens qui, je l'espère, manifesteront demain, leur soutien à un processus de paix. Il n'y a pas d'autre solution, que la paix. Et la France est disposée à parler avec tous ceux qui soutiendraient, se tiendraient aux côtés du processus de paix. Mais nous en sommes également déterminés, n'étant pas les seuls, avec la communauté internationale, à trouver les responsables d'un certain nombre de ces crimes et en particulier de l'assassinat de l'ancien Premier ministre. Voilà ma réponse.
Q - (Inaudible).
R - Je crois que la Syrie n'est pas indifférente à ce qui se passe au Liban. Elle ne l'a jamais été. Je crois que d'autres éléments qui se situent sur le territoire sont alimentés par les uns et par les autres. Je pense que nous ne trouverons la paix, assurerons l'intégrité territoriale et la souveraineté au Liban qu'en recherchant une paix générale qui comporte évidemment une recherche avec tous les pays de la région, la Syrie, l'Iran, Israël etc... Vous ne pouvez pas imaginer, même dans les périodes les plus optimistes, que tout puisse se régler définitivement au Liban sans qu'il y ait un vrai règlement dans la région.
Q - Est-ce que le gouvernement de la France compte apporter une aide matérielle à l'armée libanaise, aux FSI ? Quel message adresseriez-vous éventuellement à l'opposition qui a fait assumer partiellement du moins, la responsabilité de ce qui se passe au Nord au gouvernement Siniora ?
R - Oui, une aide matérielle, nous en avons apporté souvent, je vous ai dit dans quelle condition nous apporterons tout ce qui a été promis lors de la conférence de Paris. Je vous ai dit dans quelles conditions législatives cela allait se dérouler. Nous coopérons depuis longtemps, en matière de formation et de mise à niveau de l'armée libanaise, et nous continuerons à appuyer nos amis de l'armée libanaise par l'intermédiaire bien entendu du gouvernement.
Vous me dites que l'opposition attribue une part de responsabilité au gouvernement. Oui je comprends très bien, il est facile à l'opposition de dire cela, mais le gouvernement est légal. Je crois qu'il a recueilli une vraie majorité. Où est cette majorité ? Pourquoi cette majorité ne se réunit-elle pas pour continuer à appuyer un gouvernement légal dirigé par un Premier ministre qui a fait l'admiration du monde dans des périodes difficiles précédentes ? Nous reconnaissons tous les droits de l'opposition à critiquer et à proposer d'autres solutions. Mais je crois que, dans la crise que le Liban traverse, il y a presque une unanimité des citoyens libanais, quelle que soit leur appartenance. Maintenant je ne peux pas régler des problèmes qui ne sont pas de mon fait, même si je dois évidemment me prononcer de l'extérieur pour le soutien au gouvernement légal. Qu'est-ce que vous voulez que je fasse d'autre ? Il est évident, que nous apportons un soutien déterminé et je crois massif, à l'intégrité et à la souveraineté libanaise.
Q - Monsieur le Ministre, vous avez dit que la politique de M. Sarkozy serait la même que celle de M. Chirac, à quelques détails importants près, quels sont ces détails ?
R - Ce sont des détails de style, cela n'a rien à voir avec la politique. Vous voyez que ce n'est pas exactement la même pratique et que ce n'est pas non plus - mais je dis cela sans aucun esprit péjoratif - que ce n'est pas du tout la même culture par rapport au Moyen-Orient ou par rapport, en particulier, au Liban, par rapport à l'histoire de notre pays, à l'histoire du Liban, à l'histoire du gaullisme etc... Il y a vraiment une différence qui est certes de style mais qui est également de génération. Mais sur le fond des choses, sur le fond de ce soutien, il n'y a aucune différence. Nous sommes dans le réalisme, dans la sincérité, et dans le soutien à nos amis. Et nous voulons la paix.
Q - Est-ce que la France va accélérer la mise en place du tribunal international ?
R - Mais il ne s'agit pas d'accélérer ni de freiner. Il y a un processus international, auquel s'associe notre pays. Mais nous ne sommes pas seuls à le faire, il y a une communauté internationale, un Conseil de sécurité, une Organisation des Nations unies qui ont pris leurs responsabilités. Il se trouve que nous sommes en face de la dernière étape, de la dernière décision sur le tribunal à caractère international, qui sera prise ou non par un vote démocratique à l'échelle internationale. Ce n'est simple n'est-ce pas. Alors nous verrons bien, mais ne dites pas que c'est seulement la France. Ce n'est pas seulement la France. Il y a là aussi une quasi-unanimité qu'il faut absolument souligner. Vous savez, obtenir ce genre de vote au Conseil de sécurité, c'est très précieux. Il y a les pays africains, les pays asiatiques, les pays d'Amérique du Sud. Il y a un problème de légalité avec deux pays d'Amérique du Sud, mais il va être surmonté, ce n'est pas un problème de fond. Il n'y a pas seulement la France, même si la France a des liens extrêmement étroits, avec le Liban pas seulement parce que c'est un pays francophone, parce que nous avons des liens de culture, par ce que nous avons la même littérature, le même amour d'une certaine démocratie, etc... La France et le Liban sont liés par l'Histoire, les périodes ensoleillées de l'Histoire, les périodes pluvieuses et même les périodes de tempête. Bien sûr il y a une position sentimentale particulière, mais la légalité internationale, c'est autre chose.
Q - M. Sarkozy, dans plusieurs déclarations, a répété que le Hezbollah est un parti terroriste, qu' est-ce que votre gouvernement dit du Hezbollah ?
R - Je vais vous répondre franchement, une fois de plus, à une question très franche. Nous devons parler avec toutes les composantes de la vie libanaise. Je parle de la France. Et nous le faisons, et nous le ferons. Je ne suis pas un partisan, je suis un ennemi déterminé du terrorisme. Je pense que cela ne règle rien, que cela fait des morts, je les ai connus, je les ai souvent pris dans mes bras, tenté de leur apporter une aide. Je suis farouchement contre la guerre, et je n'ai connu que cela dans ce pays. Il y a des circonstances historiques où on doit se défendre, je le comprends. Mais jamais au prix du terrorisme, c'est mon avis. Maintenant, le Hezbollah n'est pas inscrit sur la liste des organisations terroristes, et je vais vous dire quelque chose qu'on a pas l'habitude d'entendre, mais c'est mon expérience de représentant de l'Union européenne pour les Droits de l'Homme au Sri Lanka récemment qui me fait vous affirmer que quand on cherche la paix, cela n'aide pas que d'être inscrit sur une organisation terroriste, c'est un obstacle. Je le dis avec beaucoup de précaution. Mais lorsqu'on est un homme politique, comme Marwan Hamadé - pas comme moi, moi je suis un amateur - on sait qu'il faut rechercher la paix avec tous et en particulier avec ses ennemis. Parce que si on ne doit chercher la paix qu'avec ses amis, cela n'ira pas loin. Voilà. Donc c'est une position très franche. Toutes les composantes de la société libanaise qui recherchent la paix nous trouveront à leurs côtés. Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 mai 2007
A chaque fois, ou très souvent il s'agit d'une visite de solidarité, d'amitié avec le peuple libanais, avec son gouvernement, dans une situation qui est toujours difficile, et qui est particulièrement difficile aujourd'hui, puisque ces événements qui hélas nous rassemblent, ont fait beaucoup de morts, plus qu'il n'y en a jamais eu depuis le début des guerres au Liban.
Au nom du président de la République, Nicolas Sarkozy, du gouvernement de la France et du peuple français, je viens ici saluer le courage, la détermination des Libanais et affirmer que la France est à leur coté pour défendre la souveraineté de ce pays, son unité et bien sûr la paix... perspective éternellement repoussée, jamais complètement atteinte dans ce pays.
Voilà le sens de ma visite au nom du président de la République, qui a téléphoné plusieurs fois à M. Fouad Siniora, le Premier ministre.
J'ai remis d'ailleurs à M. Siniora, un message du président de la République et je peux dire que ses termes, sans rien en révéler - car il ne revient pas au ministre des Affaires étrangères de révéler ces termes - étaient déterminés, très fraternels et très chaleureux.
Je voudrais également - cela va de soi, mais encore faut-il le faire - condamner les attentats qui, maintenant chaque jour, viennent frapper toutes les populations, tous les différents groupes religieux, ils constituent avec difficulté, mais aussi avec la ferveur qu'on leur connaît, le tissu de ce pays et la démocratie vivante qu'on espère la plus activité possible , représentée aujourd'hui au mieux par le Premier ministre, M. Fouad Siniora, et par son gouvernement.
Est-ce que dans ce pays, une fois pour toute, et dans cette région, on va comprendre que la politique n'est pas seulement l'assassinat, que cela n'est pas du tout l'assassinat ? Et ceux qui comprendront un jour cela auront fait un grand pas pour leur quiétude personnelle comme ils l'auront fait pour la démocratie dans toute la zone. Tous les attentats sont condamnables, particulièrement ceux qui atteignent la population civile de façon indiscriminée. Et bien sûr je condamne ce qui s'est passé dans le Nord du pays. Ne l'oublions pas, l'armée libanaise a été durement frappée, avec 33 morts. Et tout cela a commencé par des assassinats déterminés de soldats qui n'étaient pas en fonction. C'est plus qu'une provocation, c'est un crime. Et puis les populations civiles, évidemment, comme d'habitude, sont frappées. Dans ce camp en particulier, on les voit fuir dans des conditions qui sont toujours mauvaises, et qui sont souvent épouvantables.
N'oublions pas qu'à chaque fois que ces attaques sont commises, que ces attentats sont perpétrés, ce sont en premier des populations civiles qui en pâtissent.
J'ai en mémoire, avant de répondre à vos questions, beaucoup de réactions de la communauté internationale, en particulier celle du président du Conseil de sécurité des Nations unies, et la très ferme position de la Ligue arabe. Je dirais surtout - bien que cela ne respecte pas un ordre hiérarchique, c'est un ordre un peu plus sentimental - la condamnation par les Palestiniens eux-mêmes et par leurs organisations de ce qui s'est passé dans le camp. Cela a commencé par des vols, par des simples attaques de mafia qui ont entraîné une réaction bien légitime de l'armée. Je salue l'armée libanaise, dans sa force et dans sa détermination. Ce n'est pas une tâche facile, surtout lorsqu'il s'agit d'opérer au milieu des populations civiles et dans un camp que l'on appelle un camp de réfugiés. Nous comprenons donc la nécessité pour le gouvernement de rétablir l'ordre sur le territoire, tout en évidemment restant attentif, je le répète, au sort des populations civiles. C'est le rôle d'un gouvernement légitimement élu, que de rétablir l'ordre sur son territoire, c'est même la plus importante et la première de ses tâches.
Il paraît que j'ai oublié dans la communauté internationale un certain nombre de gens qui se manifestent. Je ne veux pas les oublier, j'ai parlé du président du Conseil de sécurité des Nations unies, de la Ligue arabe, mais tous les pays, individuellement ont condamné cette attaque contre l'intégrité et l'ordre enfin rétabli au Liban.
La communauté internationale continue à être attentive. Peut être joue-t-on sur sa lassitude ou sur sa crainte pour qu'elle ne s'obstine pas ou qu'elle ne poursuive pas simplement, très tranquillement, le processus au Conseil de sécurité, qui vise à mettre en place un tribunal international pour déterminer les responsabilités dans l'assassinat de Rafic Hariri.
Ne comptez pas sur la communauté internationale, en tout cas pas sur la France pour renoncer à cela. Et je sais parler non pas seulement au nom de mon pays, mais également au nom de cette communauté qui reste extrêmement déterminée. Nous le sommes donc, non seulement s'agissant de ce tribunal, mais également de la pleine application de la résolution 1701, et pour que notre présence, la présence française soit affirmée dans la FINUL. C'est le souhait du président de la République et de notre gouvernement.
Je crois avoir devant vous tracé les grandes lignes qui ont toujours été celles de la France, quels que soient les gouvernements, pour affirmer notre soutien, et notre présence déterminée aux côtés des populations libanaises. La France a des responsabilités particulières, elle les assumera. La communauté internationale a choisi une ligne de conduite, dont elle ne se départira pas.
C'est dans les périodes difficiles qu'on connaît ses amis. Je souhaiterais pour ce pays que je connais si bien, où j'ai travaillé dans tous les camps, de toute part, comme médecin et comme représentant d'une certaine notion politique de l'humanitaire, je souhaiterais bien pouvoir rire et saluer l'arrivée des beaux jours dans des conditions différentes. Mais hélas, c'est ainsi qu'on juge ses amis, aussi dans les périodes les plus conflictuelles et les plus dangereuses. La France est l'amie du Liban.
Q - On a beaucoup entendu dire que la politique de la France après M. Chirac va changer envers le Liban. Et comment vous voyez la solution au Liban ?
R - Et voilà deux questions simples, la première réponse est évidemment simple, elle n'a pas changé. Nous affirmons, le président de la République, M. Nicolas Sarkozy, affirme la même politique de fraternité, de soutien, au peuple libanais. Les conditions mêmes de cette dernière crise ont changé par rapport à la précédente. D'une crise à l'autre, il n'y a pas les mêmes ingrédients, même si globalement hélas, c'est toujours un peu semblable. Comment je vois la sortie de la crise ? Je crois que la communauté internationale ne doit jamais accepter la menace et le terrorisme, jamais. Et nous sommes déterminés avec, je l'espère, la majorité du Conseil de sécurité, pour combattre l'impunité grâce à un tribunal à caractère international chargé de juger les assassins de Rafic Hariri. La sortie de la crise actuelle, elle, appartient au Liban et à ses amis. Ce n'est pas nous qui allons renoncer à notre fraternité, notre soutien renouvelé et déterminé et à long terme.
Il y a un gouvernement représentatif et très bien représentatif du Liban, dont un des membres est à mon côté - je suis fier d'être au sien. Il faut que l'ordre soit rétabli. Je pense que l'immense majorité du peuple libanais est derri??re son armée. L'immense majorité des communautés se trouve derrière son armée pour rétablir cet ordre. J'espère, je souhaite, je veux que cessent les attentats qui n'ont d'autre but que de déstabiliser, de répandre la terreur et l'anxiété parmi toutes les populations libanaises. Mais la communauté internationale n'a jamais été aussi unie pour soutenir le Liban. Je crois qu'il s'agit peut-être d'une réponse imparfaite mais la communauté internationale y compris le monde arabe, la Ligue arabe, tous les pays arabes, sont beaucoup plus unis que par le passé pour soutenir cette intégrité territoriale et le gouvernement du Liban.
Q - Est-ce qu'on comprend que le gouvernement de M. Sarkozy va traiter la crise libanaise et les dossiers de la même façon que le gouvernement de M. Chirac ? Et vous dites que vous soutenez le Liban et le gouvernement, mais comment vous allez réaliser ce support sur le terrain ?
R - Un engagement, des engagements ont été pris à la Conférence de Paris, qu'on appelle la conférence Paris III. Cette conférence a pris des décisions qui seront appliquées, développées. Pour mettre en place les programmes de l'Agence française du développement, il faut un vote du Parlement. Vous savez en ce moment qu'il y a des élections législatives en France. Aussitôt après, le gouvernement montrera sa détermination en déposant un projet de loi à l'Assemblée nationale, et ce projet sera, quels que soient les résultats des élections, voté. D'autre part, nous l'avons affirmé à plusieurs reprises, notre soutien, notre engagement dans la FINUL sera maintenu.
Effectivement, la personnalité du président de la République, Nicolas Sarkozy n'est pas la même que celle du président Chirac. Il ne s'agit pas de la même génération. Mais il y a un lien qui unit ces deux générations, c'est la détermination de la France à être aux côtés des Libanais. Les générations changent, et les problèmes parfois restent, tout comme la cruauté de ces problèmes, les assassinats et les attentats. Eh bien, la France reste dans la même ligne, à des détails importants près, mais dans la même ligne que celle du président Chirac, et d'ailleurs que celle du président François Mitterrand.
Q - A qui vous faites supporter la responsabilité de ce qui se passe au Nord ? La majorité parlementaire libanaise a accusé la Syrie de soutenir le Fatah El-Islam, bien que le porte-parole de votre ministère, M. Jean-Baptiste Mattéi, ait refusé d'accuser la Syrie depuis deux jours ?
R - Vous me posez la question : à qui profite le crime ?
Q - Quelle est votre opinion ?
R - Il y a des éléments dans la région, des éléments un peu partout, et pas seulement dans un pays déterminé, bien qu'il y en ait aussi dans un pays déterminé, qui sont les ennemis de la paix, qui profitent de la stabilité, qui ne vivent comme technique politique que par la terreur et la contrainte. Mais il y a aussi dans ces pays et dans ces populations des gens qui, je l'espère, manifesteront demain, leur soutien à un processus de paix. Il n'y a pas d'autre solution, que la paix. Et la France est disposée à parler avec tous ceux qui soutiendraient, se tiendraient aux côtés du processus de paix. Mais nous en sommes également déterminés, n'étant pas les seuls, avec la communauté internationale, à trouver les responsables d'un certain nombre de ces crimes et en particulier de l'assassinat de l'ancien Premier ministre. Voilà ma réponse.
Q - (Inaudible).
R - Je crois que la Syrie n'est pas indifférente à ce qui se passe au Liban. Elle ne l'a jamais été. Je crois que d'autres éléments qui se situent sur le territoire sont alimentés par les uns et par les autres. Je pense que nous ne trouverons la paix, assurerons l'intégrité territoriale et la souveraineté au Liban qu'en recherchant une paix générale qui comporte évidemment une recherche avec tous les pays de la région, la Syrie, l'Iran, Israël etc... Vous ne pouvez pas imaginer, même dans les périodes les plus optimistes, que tout puisse se régler définitivement au Liban sans qu'il y ait un vrai règlement dans la région.
Q - Est-ce que le gouvernement de la France compte apporter une aide matérielle à l'armée libanaise, aux FSI ? Quel message adresseriez-vous éventuellement à l'opposition qui a fait assumer partiellement du moins, la responsabilité de ce qui se passe au Nord au gouvernement Siniora ?
R - Oui, une aide matérielle, nous en avons apporté souvent, je vous ai dit dans quelle condition nous apporterons tout ce qui a été promis lors de la conférence de Paris. Je vous ai dit dans quelles conditions législatives cela allait se dérouler. Nous coopérons depuis longtemps, en matière de formation et de mise à niveau de l'armée libanaise, et nous continuerons à appuyer nos amis de l'armée libanaise par l'intermédiaire bien entendu du gouvernement.
Vous me dites que l'opposition attribue une part de responsabilité au gouvernement. Oui je comprends très bien, il est facile à l'opposition de dire cela, mais le gouvernement est légal. Je crois qu'il a recueilli une vraie majorité. Où est cette majorité ? Pourquoi cette majorité ne se réunit-elle pas pour continuer à appuyer un gouvernement légal dirigé par un Premier ministre qui a fait l'admiration du monde dans des périodes difficiles précédentes ? Nous reconnaissons tous les droits de l'opposition à critiquer et à proposer d'autres solutions. Mais je crois que, dans la crise que le Liban traverse, il y a presque une unanimité des citoyens libanais, quelle que soit leur appartenance. Maintenant je ne peux pas régler des problèmes qui ne sont pas de mon fait, même si je dois évidemment me prononcer de l'extérieur pour le soutien au gouvernement légal. Qu'est-ce que vous voulez que je fasse d'autre ? Il est évident, que nous apportons un soutien déterminé et je crois massif, à l'intégrité et à la souveraineté libanaise.
Q - Monsieur le Ministre, vous avez dit que la politique de M. Sarkozy serait la même que celle de M. Chirac, à quelques détails importants près, quels sont ces détails ?
R - Ce sont des détails de style, cela n'a rien à voir avec la politique. Vous voyez que ce n'est pas exactement la même pratique et que ce n'est pas non plus - mais je dis cela sans aucun esprit péjoratif - que ce n'est pas du tout la même culture par rapport au Moyen-Orient ou par rapport, en particulier, au Liban, par rapport à l'histoire de notre pays, à l'histoire du Liban, à l'histoire du gaullisme etc... Il y a vraiment une différence qui est certes de style mais qui est également de génération. Mais sur le fond des choses, sur le fond de ce soutien, il n'y a aucune différence. Nous sommes dans le réalisme, dans la sincérité, et dans le soutien à nos amis. Et nous voulons la paix.
Q - Est-ce que la France va accélérer la mise en place du tribunal international ?
R - Mais il ne s'agit pas d'accélérer ni de freiner. Il y a un processus international, auquel s'associe notre pays. Mais nous ne sommes pas seuls à le faire, il y a une communauté internationale, un Conseil de sécurité, une Organisation des Nations unies qui ont pris leurs responsabilités. Il se trouve que nous sommes en face de la dernière étape, de la dernière décision sur le tribunal à caractère international, qui sera prise ou non par un vote démocratique à l'échelle internationale. Ce n'est simple n'est-ce pas. Alors nous verrons bien, mais ne dites pas que c'est seulement la France. Ce n'est pas seulement la France. Il y a là aussi une quasi-unanimité qu'il faut absolument souligner. Vous savez, obtenir ce genre de vote au Conseil de sécurité, c'est très précieux. Il y a les pays africains, les pays asiatiques, les pays d'Amérique du Sud. Il y a un problème de légalité avec deux pays d'Amérique du Sud, mais il va être surmonté, ce n'est pas un problème de fond. Il n'y a pas seulement la France, même si la France a des liens extrêmement étroits, avec le Liban pas seulement parce que c'est un pays francophone, parce que nous avons des liens de culture, par ce que nous avons la même littérature, le même amour d'une certaine démocratie, etc... La France et le Liban sont liés par l'Histoire, les périodes ensoleillées de l'Histoire, les périodes pluvieuses et même les périodes de tempête. Bien sûr il y a une position sentimentale particulière, mais la légalité internationale, c'est autre chose.
Q - M. Sarkozy, dans plusieurs déclarations, a répété que le Hezbollah est un parti terroriste, qu' est-ce que votre gouvernement dit du Hezbollah ?
R - Je vais vous répondre franchement, une fois de plus, à une question très franche. Nous devons parler avec toutes les composantes de la vie libanaise. Je parle de la France. Et nous le faisons, et nous le ferons. Je ne suis pas un partisan, je suis un ennemi déterminé du terrorisme. Je pense que cela ne règle rien, que cela fait des morts, je les ai connus, je les ai souvent pris dans mes bras, tenté de leur apporter une aide. Je suis farouchement contre la guerre, et je n'ai connu que cela dans ce pays. Il y a des circonstances historiques où on doit se défendre, je le comprends. Mais jamais au prix du terrorisme, c'est mon avis. Maintenant, le Hezbollah n'est pas inscrit sur la liste des organisations terroristes, et je vais vous dire quelque chose qu'on a pas l'habitude d'entendre, mais c'est mon expérience de représentant de l'Union européenne pour les Droits de l'Homme au Sri Lanka récemment qui me fait vous affirmer que quand on cherche la paix, cela n'aide pas que d'être inscrit sur une organisation terroriste, c'est un obstacle. Je le dis avec beaucoup de précaution. Mais lorsqu'on est un homme politique, comme Marwan Hamadé - pas comme moi, moi je suis un amateur - on sait qu'il faut rechercher la paix avec tous et en particulier avec ses ennemis. Parce que si on ne doit chercher la paix qu'avec ses amis, cela n'ira pas loin. Voilà. Donc c'est une position très franche. Toutes les composantes de la société libanaise qui recherchent la paix nous trouveront à leurs côtés. Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 mai 2007