Texte intégral
Q - Qu'attendez-vous de votre rendez-vous, aujourd'hui, avec Nicolas Sarkozy ?
R - Il y a dix jours, la première fois où nous l'avons vu après son élection, il nous a promis des précisions sur les conférences sociales qu'il veut organiser en septembre. J'espère qu'il va élargir leur champ. Il y a un grand absent que le président de la République avait pourtant mis au coeur de sa campagne électorale : le pouvoir d'achat. Qu'on ajoute une cinquième table ronde ou qu'on élargisse le thème de celle sur l'égalité salariale homme-femme, peu m'importe, mais il faut qu'en septembre, nous parlions du pouvoir d'achat et pas seulement de celui du salaire mais de l'ensemble du revenu disponible, y compris de la fiscalité. L'assiette de notre système est étroite et le taux nominal élevé. Je mesure la farouche volonté de réforme de Nicolas Sarkozy. Il doit revoir cette architecture plutôt que d'intervenir comme pompier, comme il le fait avec le bouclier fiscal. Il faut la clarifier pour donner une visibilité à nos concitoyens et arrêter de pénaliser les classes moyennes. De même, il faut sortir des slogans de campagne et donner corps aux promesses faites. Je pense en particulier au fameux " travailler plus pour gagner plus ". Je serais agréablement surpris si le président nous donnait des pistes pour en faire bénéficier les nombreux salariés en forfait en jour.
Q - Vous estimez toujours ne pas avoir " le couteau sous la gorge " sur le service minimum, comme le 14 mai, au sortir de votre premier entretien avec Nicolas Sarkozy après son élection ?
R - Pour moi, l'affaire du service minimum est un sujet parmi d'autres. Je comprends la volonté du gouvernement de cadrer le délai imparti aux partenaires sociaux pour avancer, mais je rappelle qu'une loi a été votée qui permet aux partenaires sociaux de se saisir des questions de droit du travail. J'espère que le nouveau gouvernement la respectera. Je redirai à Nicolas Sarkozy aujourd'hui ce que je lui ai déjà dit il y a dix jours : sur un sujet comme le service minimum qui concerne une multitude d'entreprises dont certaines sont publiques et d'autres privées, il faut plutôt s'attaquer aux racines du mal c'est-à-dire aux raisons pour lesquels on en arrive à prendre en otage les Français, dans lesquelles les employeurs ont leur part de responsabilité.
Q - Élaborer des dispositifs pour prévenir les conflits n'est pas la même chose que prévoir un service minimum, l'un n'empêche pas l'autre...
R - J'attends de voir ce que proposera le gouvernement, mais je ne voudrais pas qu'il n'ait qu'une simple valeur symbolique d'adresse aux Français et que concrètement, derrière, le dispositif soit impossible à mettre en oeuvre. Je rappelle que faire circuler des trains trois heures le matin et trois heures le soir pose des problèmes techniques.
Q - Les partenaires sociaux auront jusqu'au 31 décembre pour négocier sur les contrats de travail. Est-ce réaliste ?
R - J'ai bien compris que le gouvernement est focalisé sur le contrat de travail. Cela ne me choque pas car cela relève pour une bonne part de la loi. Il faudra sans doute pousser les feux sur cet aspect. Nous avons déjà commencé à travailler à débroussailler le sujet il y a six mois en faisant un état des lieux. La conférence sur le sujet se tient en septembre. L'échéance de la fin de l'année me paraît donc envisageable, mais je rappelle que le précédent gouvernement avait parlé de laisser trois mois à la négociation renouvelables une fois. En outre, j'ai l'intention de rappeler à Nicolas Sarkozy que nous avons aussi ouvert deux autres dossiers qui ne peuvent être disjoints de la réflexion sur le contrat de travail : la sécurisation des parcours professionnels et l'assurance-chômage. La méthode de travail que nous allons arrêter avec le patronat, après avoir tiré le bilan des groupes de travail le 29 mai, sera donc extrêmement importante.
Propos recueillis par Leïla de Comarmond
source http://www.cfecgc.org, le 29 mai 2007