Texte intégral
Monsieur le Président de l'Etablissement public du musée et du domaine de Versailles, cher Jean-Jacques Aillagon,
Monsieur le Président du conseil d'administration de Vinci, cher Yves-Thibault de Silguy,
Monsieur le Maire de Versailles,
Monsieur le Préfet des Yvelines,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Je suis très heureuse d'inaugurer aujourd'hui à vos côtés la Galerie des Glaces, enfin rendue à elle-même. C'est un très grand moment, pour Versailles, et pour notre patrimoine national.
Cette « royale beauté unique dans le monde », comme l'écrit la marquise de Sévigné, a été le témoin des plus riches heures de notre histoire. Louis XIV en fit l'écrin privilégié des rencontres officielles avec les Grands de ce monde. Il reçut ici-même le Doge de Gênes, l'ambassadeur du Roi de Siam, et, très peu de temps avant sa mort, les ambassadeurs de Perse. C'est ici, également, que fut célébré le mariage du Dauphin et de Marie-Antoinette, lors d'une cérémonie somptueuse qui honora bien plus les relations diplomatiques qu'amoureuses. En 1871, c'est l'Empire allemand qui triompha dans les murs-mêmes où il allait être défait, près de cinquante ans plus tard, avec la signature du Traité de Versailles. Grandeur et décadence : la vanité des Empires n'aurait pu trouver plus beau théâtre qu'une galerie de miroirs. Ce lieu continua par la suite d'accueillir les dîners avec les chefs d'Etat en visite officielle. Mais cela fait vingt-cinq ans, en réalité, qu'un tel dîner n'a pas été organisé.
C'est donc avec beaucoup d'émotion que je vous accueille aujourd'hui dans la Galerie des Glaces, pour célébrer un évènement qui n'est pas placé sous le signe de la diplomatie, mais qui est l'aboutissement d'une belle aventure, celle de la rencontre entre une grande entreprise, un lieu d'exception, et de multiples talents.
Nous célébrons en effet ce soir bien plus qu'un partenariat, aussi exemplaire et innovant soit-il. Bien plus qu'une opération de mécénat, même si elle est exceptionnelle par son ampleur. Nous célébrons une véritable aventure humaine, née autour de l'un des joyaux de Versailles.
Le groupe Vinci ne s'est pas en effet contenté de financer l'entière restauration de la Galerie des Glaces, il a également offert son expertise dans la conduite de projet, et la compétence de ses entreprises spécialisées dans le patrimoine. Il en a assuré la maîtrise d'ouvrage, dans le cadre d'une autorisation d'occupation temporaire. Il a aussi - et je crois que cela restera gravé dans toutes les mémoires - délégué une équipe de passionnés, qui ont vécu ce projet avec les équipes de Versailles, et sont devenus de vrais amis.
C'était la première fois en France qu'une telle mission était confiée à une entreprise privée. C'était également la première fois, en 2003, qu'une entreprise recevait la distinction aujourd'hui très convoitée de « Grand mécène du ministère de la culture et de la communication ». Je tiens à ce sujet à rendre hommage à Jean-Jacques Aillagon, qui a tant oeuvré, en tant que ministre de la culture et de la communication, pour offrir au mécénat un nouvel élan en France.
Le groupe Vinci en a été un pionnier, un visionnaire, et je tiens à saluer chaleureusement le Président de son conseil d'administration, M. Yves-Thibault de Silguy, et tous ses dirigeants. Au-delà de la décision importante qui a été prise par l'ancien Président, ce sont tous les salariés de Vinci qui se sont approprié ce projet, pour en faire un véritable projet d'entreprise. Vinci a véritablement ouvert la voie d'une nouvelle forme de coopération, riche et féconde avec le milieu culturel, dont je vous invite maintenant à contempler le fruit.
Hymne à la toute puissance et à la gloire de Louis XIV, la Galerie des Glaces était aussi une démonstration éclatante de la virtuosité des artistes et des artisans français. Où que nos regards se tournent, nous pouvons lire tout le génie du Grand Siècle. Règne de l'illusion, avec ses atlantes, ses tentures, ses cieux, et ses perspectives en trompe-l'oeil. Vertige des dix-sept arcades ornées des 357 miroirs, qui reflètent la lumière des jardins. Défi insolent que le Roi, et sa toute nouvelle Manufacture des Glaces, lancèrent aux miroitiers vénitiens, qui gardaient jalousement le secret de leur habileté.
La renaissance de la Galerie était un défi à la mesure de celui qui inspira sa création. Rendre, près de trois siècles et demi plus tard, à ce chef-d'oeuvre son éclat et sa splendeur d'origine, retrouver, sous les usures du temps et les restaurations successives, ce chapitre de l'histoire de France, tel que Louis XIV souhaita l'écrire, tel que Jules Hardouin Mansart l'orchestra, et tel que Charles Le Brun l'immortalisa, nécessitait la mobilisation de toutes les compétences, de toutes les énergies et de tous les talents.
Des restaurateurs, des doreurs, des marbriers, des miroitiers, des artisans, des ouvriers ont travaillé ensemble pendant trois ans. Trois ans de passion et de patience, d'ardeur et de méticulosité. Trois ans de méthodes et de choix, validés par un comité de suivi, et un conseil scientifique international composé de spécialistes reconnus de l'architecture et de la peinture du XVIIème siècle.
La redécouverte de la palette de couleurs originelle de Le Brun, et plus particulièrement la première teinte des cieux, révélée par les premiers tests de nettoyage, a été l'un des temps forts de cette grande aventure. Cette nuance si particulière et si précieuse de bleu, obtenue à partir de pierre de lapis-lazuli broyée, illumine aujourd'hui toute la voûte. L'effet produit par l'éclaircissement progressif des toiles, du Nord vers le Sud, a également été restitué. Elément essentiel de la narration de Le Brun, il souligne le cheminement thématique du plafond, de la guerre à la paix.
C'est la lisibilité même de ce véritable manifeste artistique et politique, au rayonnement international, que nous retrouvons aujourd'hui. C'est sa genèse, également, et les hésitations du premier peintre du roi, ces « repentirs » dévoilés par les nettoyages. On dit que le chemin qui mène à la vérité est tout aussi important que la vérité elle-même. Je crois que c'est particulièrement vrai pour la restauration d'art. Je suis donc très heureuse qu'une exposition retrace, en juillet, les différentes étapes et les découvertes de ce chantier.
Cette très belle aventure, suivie et admirée bien au-delà de nos frontières, s'achève aujourd'hui. Je tiens à remercier chaleureusement toutes celles et tous ceux qui y ont participé, les dirigeants de Vinci, les responsables qu'ils ont désigné pour suivre ce projet, et toutes leurs équipes ; les conservateurs et les équipes de Versailles, avec à leur tête Monsieur le Directeur général ; Monsieur l'architecte en chef des Monuments historiques, et tous les scientifiques. Merci surtout à l'équipe fantastique de restaurateurs, conduite par Cinzia Pasquali, avec Véronique Sorano, Alain Roche, Maria-Gabriella De Monte, Lucien et Nicolas Mariotti, et Vincent Guerre. Il nous suffit de lever les yeux pour admirer leur virtuosité, qui avait déjà fait des merveilles à la Galerie d'Apollon du Louvre. Pour admirer, également, un travail que nous avons accompli ensemble, et je veux vous dire, à tous, ce soir, combien nous pouvons en être fiers.
Je vous remercie.Source http://www.culture.gouv.fr, le 29 juin 2007