Texte intégral
Extrait de l'intervention de Madame la Secrétaire d'Etat
au Conseil des Ministres le vendredi 7 septembre 2007
« ....La politique de la ville a besoin de franchise. Entre nous, on ne va pas se la raconter.
Le phénomène de bandes, l'ethnicisation de la violence, le happy slapping, le carjacking, le repli communautaire, le rejet des institutions, l'économie parallèle, le désoeuvrement des jeunes, le désarroi des mères , l'instrumentalisation de la religion et j'en passe, sont la réalité quotidienne de centaines de milliers d'hommes et de femmes de notre pays.
Et pourtant des milliards ont été dépensés depuis vingt ans, alors pourquoi cette situation ?
Je vous le dit cash :
Trop d'acteurs de terrain et d'associations marginalisés, méprisés, vassalisés. Trop de talent négligé. Trop de blocages, Trop de lobbys, Trop de chasses gardées, Trop de forteresses, Trop de tabous. Trop de convenances et d'habitudes qui ont sclérosé et ont empêché d'agir efficacement.
Je vous donne quelques exemples :
. Est-il normal que des bailleurs sociaux ignorent les recommandations gouvernementales en matière de hausse de loyer dans le parc social, alors même que le gouvernement a fait de la préservation du pouvoir d'achat de nos concitoyens les plus modestes une priorité ? Est-il normal que certains bailleurs mènent une politique d'attribution de logement aggravant les phénomènes de ségrégation sociale sans que l'on ne puisse agir ? Est-il normal, malgré les exonérations et les différentes aides, qu'on laisse encore les cages d'escaliers à l'abandon, les boîtes aux lettres saccagées, des carreaux cassés, des espaces publics immondes, toutes ces petites choses qui au bout du compte laissent aux habitants un sentiment d'abandon et d'insécurité.
. Comment parler de l'insertion et de la formation des jeunes quand on n'a même pas le droit d'évoquer une quelconque réforme du financement de la formation professionnelle ? Je vous le demande solennellement, où est la République dans tout ça ? Pourquoi ces situations figées ? Ce sont des sommes colossales que l'on peut redéployer et mieux utiliser. Pour que le chômage et l'assistanat ne représentent plus un horizon indéfini. Est-il normal que les crédits de la politique de la ville servent à compenser les faiblesses du droit commun.
. Comment parler de désenclavement quand l'égoïsme territorial gangrène profondément notre République et nous empêche d'agir ? Quand on ne peut pas rallonger une ligne de bus au prétexte que « la répartition des crédits est déjà faite » ou parce que « ça serait trop compliqué à renégocier » ? Où est la République si l'impuissance et le renoncement la rongent ?
. Comment peut-on parler de réussite scolaire quand il y a autant de dogmes à surmonter ?
. Comment peut-on encore croire à l'illusion de l'égalité républicaine, quand la discrimination, si elle n'est pas affichée, reste insidieuse, rampante comme un virus ? Cela ne sert à rien de dire qu'on est tous libres et égaux quand la société, elle, vous inscrit dans des cases.
Il faut donc changer cette logique, bousculer ces forteresses et briser ces tabous. Cela nous engage tous. Nous tous ici bien sûr mais aussi les entreprises, les syndicats, les associations, les élus, chacun dans le domaine de sa fonction et de sa compétence.
La cité de demain nous engage collectivement.... Il s'agit d'une cause nationale.
Il nous faut une ambition extraordinaire pour la ville à la hauteur des enjeux républicains.
Car notre République n'est fidèle à elle-même que lorsqu'elle est capable de se projeter, de consolider ces valeurs essentielles et de se rassembler autour d'un projet commun sans laisser personne au bord du chemin.
C'est pour cette raison que j'ai voulu engager une véritable concertation avec les habitants. Tout le monde a son mot à dire, tout le monde a le devoir de s'exprimer. Je veux que toutes celles et tous ceux qui veulent être entendus s'expriment. Les architectes, les urbanistes, les sociologues, les politologues, les profs, les élèves, les chauffeurs de bus, les boulangers, les charcutiers, les bloggeurs .....
L'opération « Ce que je veux pour ma ville » que j'ai mis en oeuvre par le biais de blogs le 1er août a suscité un grand intérêt pour notre jeunesse.
Ce n'est pas de deux ou trois mesurettes supplémentaires dont elle a besoin. C'est de rage, d'espoir, et d'ambition, qu'elle nous bombarde tous les jours. elle veut qu'on les engage dans une nouvelle dynamique.
J'ai conscience que changer la ville, et changer la vie en ville constituent une oeuvre de longue haleine. Notre action doit donc favoriser l'émergence non seulement d'une nouvelle approche de la ville, mais aussi et surtout d'une nouvelle approche de la qualité de la vie en ville.
Nos concitoyens veulent en effet une ville mieux équilibrée, plus sûre, moins polluée, moins anonyme, moins uniforme.
Nous travaillons sur trois axes :
1. L'emploi : il faut activer tous les dispositifs, utiliser tous les leviers, et si besoin en créer d'autres. Objectif : tolérance zéro pour la glandouille. Le désoeuvrement d'une partie de notre jeunesse est inacceptable.
2. Le désenclavement : plus de zones à sigles. Plus de quartiers stigmatisés. Il faut tendre vers l'exemplarité, ouvrir les quartiers. La cohésion sociale, je dirais même nationale, implique le désenclavement des quartiers :
- Par le transport en commun. - Par l'intégration des quartiers dans la ville. - Par un maillage urbain. - Par la programmation d'une mixité urbaine. - Par l'adaptation de nos règles d'urbanisme. - Par le désenclavement numérique, pour faire des quartiers difficiles d'aujourd'hui des quartiers pilotes de demain aux avant-postes de la mondialisation.
3. L'éducation : au-delà des dispositifs qu'il convient d'adapter, de revaloriser, de consolider et même d'inventer, il est urgent d'enseigner un certain nombre de valeurs aux enfants de la République.
En ce sens, je souhaite, consacrer une journée à l'éducation au respect, comme nous avons une journée pour la fête de la musique.
. A partir de la mi-septembre jusqu'à la fin-novembre, des réunions publiques se tiendront dans tous les départements de métropole et d'Outre-mer, dans chaque ville, dans chaque quartier pour permettre à tous d'échanger et de donner leur opinion sur ce que doit être la ville de demain.
. Toutes les questions seront abordées lors de ces réunions, sans tabou. Parfois des réponses seront proposées.
Fin novembre, nous aurons les propositions du terrain. Nous les inclurons dans le plan. Et nous proposerons avant la fin de l'année, dans le cadre d'une conférence associative et dans un endroit symbolique le tracé d'un renouveau pour la ville.
Ce qui compte, c'est que jour après jour, nous agissions pour ces quartiers difficiles pour que chacun ait sa chance et pour rendre notre République plus juste, plus humaine.
Renforcer le métissage et la mixité sociale, c'est par définition, par essence, renforcer notre République laïque du respect et de l'égalité des chances.
Ce défi m'oblige, ce défi nous oblige. »
au Conseil des Ministres le vendredi 7 septembre 2007
« ....La politique de la ville a besoin de franchise. Entre nous, on ne va pas se la raconter.
Le phénomène de bandes, l'ethnicisation de la violence, le happy slapping, le carjacking, le repli communautaire, le rejet des institutions, l'économie parallèle, le désoeuvrement des jeunes, le désarroi des mères , l'instrumentalisation de la religion et j'en passe, sont la réalité quotidienne de centaines de milliers d'hommes et de femmes de notre pays.
Et pourtant des milliards ont été dépensés depuis vingt ans, alors pourquoi cette situation ?
Je vous le dit cash :
Trop d'acteurs de terrain et d'associations marginalisés, méprisés, vassalisés. Trop de talent négligé. Trop de blocages, Trop de lobbys, Trop de chasses gardées, Trop de forteresses, Trop de tabous. Trop de convenances et d'habitudes qui ont sclérosé et ont empêché d'agir efficacement.
Je vous donne quelques exemples :
. Est-il normal que des bailleurs sociaux ignorent les recommandations gouvernementales en matière de hausse de loyer dans le parc social, alors même que le gouvernement a fait de la préservation du pouvoir d'achat de nos concitoyens les plus modestes une priorité ? Est-il normal que certains bailleurs mènent une politique d'attribution de logement aggravant les phénomènes de ségrégation sociale sans que l'on ne puisse agir ? Est-il normal, malgré les exonérations et les différentes aides, qu'on laisse encore les cages d'escaliers à l'abandon, les boîtes aux lettres saccagées, des carreaux cassés, des espaces publics immondes, toutes ces petites choses qui au bout du compte laissent aux habitants un sentiment d'abandon et d'insécurité.
. Comment parler de l'insertion et de la formation des jeunes quand on n'a même pas le droit d'évoquer une quelconque réforme du financement de la formation professionnelle ? Je vous le demande solennellement, où est la République dans tout ça ? Pourquoi ces situations figées ? Ce sont des sommes colossales que l'on peut redéployer et mieux utiliser. Pour que le chômage et l'assistanat ne représentent plus un horizon indéfini. Est-il normal que les crédits de la politique de la ville servent à compenser les faiblesses du droit commun.
. Comment parler de désenclavement quand l'égoïsme territorial gangrène profondément notre République et nous empêche d'agir ? Quand on ne peut pas rallonger une ligne de bus au prétexte que « la répartition des crédits est déjà faite » ou parce que « ça serait trop compliqué à renégocier » ? Où est la République si l'impuissance et le renoncement la rongent ?
. Comment peut-on parler de réussite scolaire quand il y a autant de dogmes à surmonter ?
. Comment peut-on encore croire à l'illusion de l'égalité républicaine, quand la discrimination, si elle n'est pas affichée, reste insidieuse, rampante comme un virus ? Cela ne sert à rien de dire qu'on est tous libres et égaux quand la société, elle, vous inscrit dans des cases.
Il faut donc changer cette logique, bousculer ces forteresses et briser ces tabous. Cela nous engage tous. Nous tous ici bien sûr mais aussi les entreprises, les syndicats, les associations, les élus, chacun dans le domaine de sa fonction et de sa compétence.
La cité de demain nous engage collectivement.... Il s'agit d'une cause nationale.
Il nous faut une ambition extraordinaire pour la ville à la hauteur des enjeux républicains.
Car notre République n'est fidèle à elle-même que lorsqu'elle est capable de se projeter, de consolider ces valeurs essentielles et de se rassembler autour d'un projet commun sans laisser personne au bord du chemin.
C'est pour cette raison que j'ai voulu engager une véritable concertation avec les habitants. Tout le monde a son mot à dire, tout le monde a le devoir de s'exprimer. Je veux que toutes celles et tous ceux qui veulent être entendus s'expriment. Les architectes, les urbanistes, les sociologues, les politologues, les profs, les élèves, les chauffeurs de bus, les boulangers, les charcutiers, les bloggeurs .....
L'opération « Ce que je veux pour ma ville » que j'ai mis en oeuvre par le biais de blogs le 1er août a suscité un grand intérêt pour notre jeunesse.
Ce n'est pas de deux ou trois mesurettes supplémentaires dont elle a besoin. C'est de rage, d'espoir, et d'ambition, qu'elle nous bombarde tous les jours. elle veut qu'on les engage dans une nouvelle dynamique.
J'ai conscience que changer la ville, et changer la vie en ville constituent une oeuvre de longue haleine. Notre action doit donc favoriser l'émergence non seulement d'une nouvelle approche de la ville, mais aussi et surtout d'une nouvelle approche de la qualité de la vie en ville.
Nos concitoyens veulent en effet une ville mieux équilibrée, plus sûre, moins polluée, moins anonyme, moins uniforme.
Nous travaillons sur trois axes :
1. L'emploi : il faut activer tous les dispositifs, utiliser tous les leviers, et si besoin en créer d'autres. Objectif : tolérance zéro pour la glandouille. Le désoeuvrement d'une partie de notre jeunesse est inacceptable.
2. Le désenclavement : plus de zones à sigles. Plus de quartiers stigmatisés. Il faut tendre vers l'exemplarité, ouvrir les quartiers. La cohésion sociale, je dirais même nationale, implique le désenclavement des quartiers :
- Par le transport en commun. - Par l'intégration des quartiers dans la ville. - Par un maillage urbain. - Par la programmation d'une mixité urbaine. - Par l'adaptation de nos règles d'urbanisme. - Par le désenclavement numérique, pour faire des quartiers difficiles d'aujourd'hui des quartiers pilotes de demain aux avant-postes de la mondialisation.
3. L'éducation : au-delà des dispositifs qu'il convient d'adapter, de revaloriser, de consolider et même d'inventer, il est urgent d'enseigner un certain nombre de valeurs aux enfants de la République.
En ce sens, je souhaite, consacrer une journée à l'éducation au respect, comme nous avons une journée pour la fête de la musique.
. A partir de la mi-septembre jusqu'à la fin-novembre, des réunions publiques se tiendront dans tous les départements de métropole et d'Outre-mer, dans chaque ville, dans chaque quartier pour permettre à tous d'échanger et de donner leur opinion sur ce que doit être la ville de demain.
. Toutes les questions seront abordées lors de ces réunions, sans tabou. Parfois des réponses seront proposées.
Fin novembre, nous aurons les propositions du terrain. Nous les inclurons dans le plan. Et nous proposerons avant la fin de l'année, dans le cadre d'une conférence associative et dans un endroit symbolique le tracé d'un renouveau pour la ville.
Ce qui compte, c'est que jour après jour, nous agissions pour ces quartiers difficiles pour que chacun ait sa chance et pour rendre notre République plus juste, plus humaine.
Renforcer le métissage et la mixité sociale, c'est par définition, par essence, renforcer notre République laïque du respect et de l'égalité des chances.
Ce défi m'oblige, ce défi nous oblige. »