Texte intégral
Q - Nous allons commencer par l'information de la semaine, la répression qui s'abat sur la Birmanie. On vient d'apprendre que le Conseil de sécurité de l'ONU va se réunir d'ici quelques heures. Rama Yade, que peut-on attendre de cette réunion d'urgence ? Peut-on espérer une résolution sur la Birmanie ?
R - Effectivement, cette réunion du Conseil de sécurité était attendue parce que la pression montait ces derniers temps chez nous et chez nos voisins européens. Gordon Brown l'avait demandé dès hier. Nous-même avions convoqué l'ambassadeur de Birmanie en France pour lui tenir un langage de fermeté en disant qu'on tiendrait la junte pour personnellement responsable de la sécurité des manifestants.
Donc, je pense que cette pression a payé, ce qui explique cette réunion de tout à l'heure du Conseil de sécurité. Cela permettra de savoir si on sort un texte de vigilance, de condamnation, d'appui à une mission. Nous verrons bien, mais en tous cas, nous souhaitons que les manifestants puissent réussir leur opération de contestation pour arriver à la démocratisation et à la réconciliation nationale de la Birmanie. C'est vraiment l'objectif recherché parce que la Birmanie est un pays qui vit depuis 1962 sous le joug d'une junte birmane qui réprime. Et cela va bien au-delà de ce que nous voyons aujourd'hui, puisqu'il y a 1.200 prisonniers politiques, 70.000 enfants soldats, des minorités ethniques harcelées, discriminées qu'on a rassemblées aux frontières du pays. Il était temps que le Conseil de sécurité se réunisse.
Q - En clair, vous voulez que le pouvoir soit renversé en Birmanie ?
R - Ce n'est pas à nous de souhaiter ou de demander le renversement de la junte. Cela relève des manifestants pacifiques, cela relève des Birmans. L'ingérence doit être complétée bien évidemment par l'action souveraine des Birmans. Nous souhaitons pouvoir accompagner les Birmans dans le processus de démocratisation.
Q - Et la France en particulier, que peut-elle faire en dehors de l'action multilatérale décidée à l'ONU ? N'a-t-elle pas un rôle particulier, parce que c'est sa vocation, pays des Droits de l'Homme, qu'est-ce que la France peut faire seule ?
R - La France a déjà, comme je vous le disais, convoqué l'ambassadeur birman.
Q - Cela ne va pas très loin...
R - Cela ne va très loin, mais tenir un langage de fermeté en politique étrangère à un pays qui est souverain, ce n'est pas rien. Nicolas Sarkozy, notre président de la République, recevra tout à l'heure avec moi-même l'opposition birmane en exil, dont le Premier ministre birman en exil qui est le cousin germain d'Aung San Suu Kyi, ce qui est une forme de reconnaissance, parce que l'on a besoin de soutien extérieur lorsque l'on est seul à manifester dans un pays.
Q - Et ce soutien passe obligatoirement par des sanctions ?
R - Nous avons toujours été favorables à ce qu'il y ait une résolution des Nations unies. Nous l'avions déjà été, il y a quelques années, lorsque Desmond Tutu et Vaclav Havel avaient proposé que les pays membres du Conseil de sécurité adoptent une résolution. Evidemment, notre action ne peut s'inscrire que dans un cadre européen, puisque vous savez que sur la Birmanie, nous avons une position commune, à 27.
Q - Par exemple, Gordon Brown, lui, a emboîté le pas de George Bush en demandant que les sanctions européennes soient durcies. Est-ce que la France est favorable à ce que les sanctions européennes soient durcies parce que, par exemple, l'embargo économique qui a été décrété par l'Europe sur la Birmanie porte sur des secteurs mineurs, genre le jus de banane. En revanche, le bois, les minerais, le gaz, là on ne fait rien. Etes-vous favorable à ce durcissement des sanctions ?
R - Je pense que nous en sommes à la question de savoir si le durcissement des sanctions ne va pas conduire à ce que la population paie, finalement. Parce que notre objectif est de nous adresser à la junte, de faire pression sur elle, pas sur la population birmane. Donc, nous sommes tout à fait ouverts pour discuter des sanctions. Maintenant, il faut en analyser les conséquences parce que sanctionner pour sanctionner, si cela conduit à ce que ce soit la population birmane elle-même, déjà exsangue, crie encore plus famine, cela n'a pas de sens. En revanche, si ces sanctions ont pour objectif de pousser la junte à plier, dans ce cas, je pense que notre position pourrait se rapprocher de celle des Etats-Unis.
Q - Quel type de sanction alors ? Qu'est-ce qui peut faire plier la junte ?
R - Pour l'instant l'Union européenne a des sanctions, comme par exemple les sanctions politiques. On ne peut pas se rendre en Birmanie, nous les officiels européens.
Q - Oui, mais cela, c'est une sanction qui existe depuis 1996, donc, elle est inopérante.
R - Il y a des sanctions économiques. Par exemple, on a gelé tous les avoirs des membres de la junte birmane. Et puis, on a interdit aux entreprises d'investir dans des secteurs où les entreprises...
Q - Et Total ? On va laisser Total continuer à opérer comme si c'était un pays normal ?
R - Je ne réponds pas sur cette question là. Je veux juste me préoccuper de ce qui se passe en ce moment au niveau de la population birmane. Chaque chose en son temps.
Q - N'êtes-vous pas choquée que Total ait des activités pétrolières dans un pays où le gouvernement n'est pas démocratique ?
R - Total est une entreprise qui n'est pas aux commandes de l'Etat français.
Q - On est d'accord.
R - Nous avons dit clairement qu'il ne faut pas investir dans des secteurs ou dans des entreprises où...
Q - Parce que l'embargo en Birmanie ne porte pas justement sur le gaz, le pétrole...
R - Nous allons en discuter parce que j'ai déjà l'intention de rencontrer le directeur général de Total pour connaître leur position parce que vous imaginez bien qu'il faut qu'il y ait un dialogue qui s'instaure entre les entreprises comme celle que vous citez et l'Etat français et les Etats européens. Donc, nous allons en discuter. Il est déjà prévu depuis plusieurs semaines que je les voie et je le ferai. Par ailleurs, il faut savoir que l'urgence actuellement, c'est la réunion du Conseil de sécurité. Après, on prendra les choses étape par étape.
Q - Nous allons maintenant enchaîner sur la phrase de la semaine prononcée par Nicolas Sarkozy qui passait son grand oral à l'ONU :
Début de citation - "L'Iran a droit à l'énergie nucléaire à des fins civiles mais en laissant l'Iran se doter de l'arme nucléaire, nous ferions courir un risque inacceptable à la stabilité de la région et à la stabilité du monde." - Fin de citation.
Ce discours de l'ONU - dans sa globalité en dehors de ce petit extrait - est-il vraiment en rupture avec le discours qu'aurait pu tenir son prédécesseur, Jacques Chirac ? Finalement, est-ce que Nicolas Sarkozy ne met pas ses pas dans ceux de son prédécesseur, pour ce qui est finalement la politique étrangère, au moins à l'ONU ?
R - Vous savez, le "sarkozysme", si je puis dire, est aussi une forme d'humanisme. Et l'humanisme n'appartient pas seulement aux anciens présidents de la République. Nicolas Sarkozy a le droit aussi - et je pense qu'en son for intérieur, il est sincère - de développer une forme d'humanisme avec ses spécificités, mais un humanisme quand même. Par exemple, quand il propose un G13 qui intégrerait des pays du Sud, qui ne sont pas membres du Conseil de sécurité, c'est révolutionnaire.
Q - Mais c'est du "Chirac" quand même.
R - Ce n'est pas du tout faire du "Chirac". C'est français que d'être humaniste. C'est français que de vouloir mettre en place un système de solidarité Nord-Sud. Quand il est scandalisé - et il a raison - que des pays comme l'Afrique du Sud, comme le Brésil, ne soient pas membres du Conseil de sécurité, il a raison. Et d'ailleurs, dans les réunions au Conseil de sécurité, des personnalités comme Lula ou Thabo Mbeki l'ont félicité.
Q - Vous avez préféré son discours à l'ONU à celui de Dakar, sans doute pas du même auteur. C'est Jean-Daniel Levitte, qui est diplomate de carrière, et d'un autre côté Guaino, qui est un peu iconoclaste.
R - Ce n'est pas du tout le même exercice. Ce sont deux discours différents par leur portée, par leur intention, par leurs objectifs. Ce n'est donc pas une question de préférence, c'est un autre style.
Q - Dites-nous franchement, vous avez préféré l'ONU à Dakar ?
R - Ecoutez, je ne fais pas partie de ceux qui pensent que le discours de Dakar n'était pas bon parce qu'honnêtement, quand j'ai lu ce discours - parce que tout le monde se focalise sur le même passage du paysan africain bloqué dans le temps - mais lisez le reste du discours, c'est-à-dire 99,9 % du discours, j'ai trouvé qu'il était magnifique.
Je n'ai jamais entendu une personnalité de ce niveau tenir des propos aussi forts. Quand il parle par exemple de la culture africaine, de son originalité, de sa puissance, quand il parle de la faute des colons, dont on a beaucoup parlé à propos de la repentance pendant la campagne, quand il dit que l'Afrique vient d'une grande civilisation et qu'il y a un métissage à créer avec l'Europe, quand il propose l'Eurafrique, ce n'est pas rien. Donc, focaliser sur trois lignes pour condamner tout un discours, je trouve cela dur.
Q - Et un mot sur le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, qui a fait son show mardi à l'ONU et auparavant devant l'université Columbia à New York. Est-ce que cela vous dérange qu'on le laisse divaguer, qu'on lui laisse autant de tribune ?
R - C'est la force des démocraties. Elles craignent moins que les dictatures. Elles craignent moins que les régimes autoritaires. C'est à la fois une force, et un risque que les Américains ont pris, et s'ils lui ont ouvert leur porte, c'est qu'ils sont sûrs de la force de leur démocratie. Le président iranien n'a pas parlé sans qu'il y ait de réaction parce que la salle a fortement réagi. Tout le monde lui a dit ses vérités. C'est donc un homme isolé.
Q - En revanche, Nicolas Sarkozy a paru en retrait par rapport aux précédentes déclarations. C'est visible, l'attitude de la France vis-à-vis de l'Iran ?
R - On ne peut pas juger la position de Nicolas Sarkozy par rapport à l'Iran sur quelques jours.
Q - Sur celle de votre ministre de tutelle, M. Bernard Kouchner, qui a parlé de guerre, le président de la République a quand même remis les choses au point sur ce raisonnement.
R - Et en plus, Bernard Kouchner lui-même s'en est expliqué et je crois que maintenant les choses se sont pacifiées. Non ?Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 octobre 2007
R - Effectivement, cette réunion du Conseil de sécurité était attendue parce que la pression montait ces derniers temps chez nous et chez nos voisins européens. Gordon Brown l'avait demandé dès hier. Nous-même avions convoqué l'ambassadeur de Birmanie en France pour lui tenir un langage de fermeté en disant qu'on tiendrait la junte pour personnellement responsable de la sécurité des manifestants.
Donc, je pense que cette pression a payé, ce qui explique cette réunion de tout à l'heure du Conseil de sécurité. Cela permettra de savoir si on sort un texte de vigilance, de condamnation, d'appui à une mission. Nous verrons bien, mais en tous cas, nous souhaitons que les manifestants puissent réussir leur opération de contestation pour arriver à la démocratisation et à la réconciliation nationale de la Birmanie. C'est vraiment l'objectif recherché parce que la Birmanie est un pays qui vit depuis 1962 sous le joug d'une junte birmane qui réprime. Et cela va bien au-delà de ce que nous voyons aujourd'hui, puisqu'il y a 1.200 prisonniers politiques, 70.000 enfants soldats, des minorités ethniques harcelées, discriminées qu'on a rassemblées aux frontières du pays. Il était temps que le Conseil de sécurité se réunisse.
Q - En clair, vous voulez que le pouvoir soit renversé en Birmanie ?
R - Ce n'est pas à nous de souhaiter ou de demander le renversement de la junte. Cela relève des manifestants pacifiques, cela relève des Birmans. L'ingérence doit être complétée bien évidemment par l'action souveraine des Birmans. Nous souhaitons pouvoir accompagner les Birmans dans le processus de démocratisation.
Q - Et la France en particulier, que peut-elle faire en dehors de l'action multilatérale décidée à l'ONU ? N'a-t-elle pas un rôle particulier, parce que c'est sa vocation, pays des Droits de l'Homme, qu'est-ce que la France peut faire seule ?
R - La France a déjà, comme je vous le disais, convoqué l'ambassadeur birman.
Q - Cela ne va pas très loin...
R - Cela ne va très loin, mais tenir un langage de fermeté en politique étrangère à un pays qui est souverain, ce n'est pas rien. Nicolas Sarkozy, notre président de la République, recevra tout à l'heure avec moi-même l'opposition birmane en exil, dont le Premier ministre birman en exil qui est le cousin germain d'Aung San Suu Kyi, ce qui est une forme de reconnaissance, parce que l'on a besoin de soutien extérieur lorsque l'on est seul à manifester dans un pays.
Q - Et ce soutien passe obligatoirement par des sanctions ?
R - Nous avons toujours été favorables à ce qu'il y ait une résolution des Nations unies. Nous l'avions déjà été, il y a quelques années, lorsque Desmond Tutu et Vaclav Havel avaient proposé que les pays membres du Conseil de sécurité adoptent une résolution. Evidemment, notre action ne peut s'inscrire que dans un cadre européen, puisque vous savez que sur la Birmanie, nous avons une position commune, à 27.
Q - Par exemple, Gordon Brown, lui, a emboîté le pas de George Bush en demandant que les sanctions européennes soient durcies. Est-ce que la France est favorable à ce que les sanctions européennes soient durcies parce que, par exemple, l'embargo économique qui a été décrété par l'Europe sur la Birmanie porte sur des secteurs mineurs, genre le jus de banane. En revanche, le bois, les minerais, le gaz, là on ne fait rien. Etes-vous favorable à ce durcissement des sanctions ?
R - Je pense que nous en sommes à la question de savoir si le durcissement des sanctions ne va pas conduire à ce que la population paie, finalement. Parce que notre objectif est de nous adresser à la junte, de faire pression sur elle, pas sur la population birmane. Donc, nous sommes tout à fait ouverts pour discuter des sanctions. Maintenant, il faut en analyser les conséquences parce que sanctionner pour sanctionner, si cela conduit à ce que ce soit la population birmane elle-même, déjà exsangue, crie encore plus famine, cela n'a pas de sens. En revanche, si ces sanctions ont pour objectif de pousser la junte à plier, dans ce cas, je pense que notre position pourrait se rapprocher de celle des Etats-Unis.
Q - Quel type de sanction alors ? Qu'est-ce qui peut faire plier la junte ?
R - Pour l'instant l'Union européenne a des sanctions, comme par exemple les sanctions politiques. On ne peut pas se rendre en Birmanie, nous les officiels européens.
Q - Oui, mais cela, c'est une sanction qui existe depuis 1996, donc, elle est inopérante.
R - Il y a des sanctions économiques. Par exemple, on a gelé tous les avoirs des membres de la junte birmane. Et puis, on a interdit aux entreprises d'investir dans des secteurs où les entreprises...
Q - Et Total ? On va laisser Total continuer à opérer comme si c'était un pays normal ?
R - Je ne réponds pas sur cette question là. Je veux juste me préoccuper de ce qui se passe en ce moment au niveau de la population birmane. Chaque chose en son temps.
Q - N'êtes-vous pas choquée que Total ait des activités pétrolières dans un pays où le gouvernement n'est pas démocratique ?
R - Total est une entreprise qui n'est pas aux commandes de l'Etat français.
Q - On est d'accord.
R - Nous avons dit clairement qu'il ne faut pas investir dans des secteurs ou dans des entreprises où...
Q - Parce que l'embargo en Birmanie ne porte pas justement sur le gaz, le pétrole...
R - Nous allons en discuter parce que j'ai déjà l'intention de rencontrer le directeur général de Total pour connaître leur position parce que vous imaginez bien qu'il faut qu'il y ait un dialogue qui s'instaure entre les entreprises comme celle que vous citez et l'Etat français et les Etats européens. Donc, nous allons en discuter. Il est déjà prévu depuis plusieurs semaines que je les voie et je le ferai. Par ailleurs, il faut savoir que l'urgence actuellement, c'est la réunion du Conseil de sécurité. Après, on prendra les choses étape par étape.
Q - Nous allons maintenant enchaîner sur la phrase de la semaine prononcée par Nicolas Sarkozy qui passait son grand oral à l'ONU :
Début de citation - "L'Iran a droit à l'énergie nucléaire à des fins civiles mais en laissant l'Iran se doter de l'arme nucléaire, nous ferions courir un risque inacceptable à la stabilité de la région et à la stabilité du monde." - Fin de citation.
Ce discours de l'ONU - dans sa globalité en dehors de ce petit extrait - est-il vraiment en rupture avec le discours qu'aurait pu tenir son prédécesseur, Jacques Chirac ? Finalement, est-ce que Nicolas Sarkozy ne met pas ses pas dans ceux de son prédécesseur, pour ce qui est finalement la politique étrangère, au moins à l'ONU ?
R - Vous savez, le "sarkozysme", si je puis dire, est aussi une forme d'humanisme. Et l'humanisme n'appartient pas seulement aux anciens présidents de la République. Nicolas Sarkozy a le droit aussi - et je pense qu'en son for intérieur, il est sincère - de développer une forme d'humanisme avec ses spécificités, mais un humanisme quand même. Par exemple, quand il propose un G13 qui intégrerait des pays du Sud, qui ne sont pas membres du Conseil de sécurité, c'est révolutionnaire.
Q - Mais c'est du "Chirac" quand même.
R - Ce n'est pas du tout faire du "Chirac". C'est français que d'être humaniste. C'est français que de vouloir mettre en place un système de solidarité Nord-Sud. Quand il est scandalisé - et il a raison - que des pays comme l'Afrique du Sud, comme le Brésil, ne soient pas membres du Conseil de sécurité, il a raison. Et d'ailleurs, dans les réunions au Conseil de sécurité, des personnalités comme Lula ou Thabo Mbeki l'ont félicité.
Q - Vous avez préféré son discours à l'ONU à celui de Dakar, sans doute pas du même auteur. C'est Jean-Daniel Levitte, qui est diplomate de carrière, et d'un autre côté Guaino, qui est un peu iconoclaste.
R - Ce n'est pas du tout le même exercice. Ce sont deux discours différents par leur portée, par leur intention, par leurs objectifs. Ce n'est donc pas une question de préférence, c'est un autre style.
Q - Dites-nous franchement, vous avez préféré l'ONU à Dakar ?
R - Ecoutez, je ne fais pas partie de ceux qui pensent que le discours de Dakar n'était pas bon parce qu'honnêtement, quand j'ai lu ce discours - parce que tout le monde se focalise sur le même passage du paysan africain bloqué dans le temps - mais lisez le reste du discours, c'est-à-dire 99,9 % du discours, j'ai trouvé qu'il était magnifique.
Je n'ai jamais entendu une personnalité de ce niveau tenir des propos aussi forts. Quand il parle par exemple de la culture africaine, de son originalité, de sa puissance, quand il parle de la faute des colons, dont on a beaucoup parlé à propos de la repentance pendant la campagne, quand il dit que l'Afrique vient d'une grande civilisation et qu'il y a un métissage à créer avec l'Europe, quand il propose l'Eurafrique, ce n'est pas rien. Donc, focaliser sur trois lignes pour condamner tout un discours, je trouve cela dur.
Q - Et un mot sur le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, qui a fait son show mardi à l'ONU et auparavant devant l'université Columbia à New York. Est-ce que cela vous dérange qu'on le laisse divaguer, qu'on lui laisse autant de tribune ?
R - C'est la force des démocraties. Elles craignent moins que les dictatures. Elles craignent moins que les régimes autoritaires. C'est à la fois une force, et un risque que les Américains ont pris, et s'ils lui ont ouvert leur porte, c'est qu'ils sont sûrs de la force de leur démocratie. Le président iranien n'a pas parlé sans qu'il y ait de réaction parce que la salle a fortement réagi. Tout le monde lui a dit ses vérités. C'est donc un homme isolé.
Q - En revanche, Nicolas Sarkozy a paru en retrait par rapport aux précédentes déclarations. C'est visible, l'attitude de la France vis-à-vis de l'Iran ?
R - On ne peut pas juger la position de Nicolas Sarkozy par rapport à l'Iran sur quelques jours.
Q - Sur celle de votre ministre de tutelle, M. Bernard Kouchner, qui a parlé de guerre, le président de la République a quand même remis les choses au point sur ce raisonnement.
R - Et en plus, Bernard Kouchner lui-même s'en est expliqué et je crois que maintenant les choses se sont pacifiées. Non ?Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 octobre 2007