Discours de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, sur l'évolution de l'ANPE au cours de ses 40 ans d'existence et la fusion programmée de l'ANPE et de l'UNEDIC, Paris le 23 octobre 2007.

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Circonstance : Cinquièmes Entretiens de l'emploi, organisés par l'ANPE dans le cadre de l'Année européenne de l'égalité des chances à Paris les 23 et 24 octobre 2007

Texte intégral

Monsieur le Président, (Christian Charpy)
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
Nous voici réunis aujourd'hui pour évoquer les thèmes de l'emploi et de la diversité, mais aussi pour fêter le quarantième anniversaire de l'ANPE. L'âge de la maturité, et l'occasion de jeter un regard en arrière pour constater tout le travail accompli et surtout de se projeter vers l'avenir, vers de nouveaux défis. L'année prochaine, vous le savez, une nouvelle structure aura vu le jour, dont le nom et le statut exact sont encore en discussion.
( I ) En de telles circonstances, j'aimerais commencer par rendre un profond et sincère hommage au travail accompli par l'ANPE depuis sa création en 1967 par Jacques Chirac, alors secrétaire d'État aux Affaires sociales.
L'Agence Nationale Pour l'Emploi a vu le jour dans une société de plein-emploi, où le chômage ne concernait que 2 % de la population active. Elle avait essentiellement pour vocation de moderniser les services du travail et de rationaliser la comptabilisation des chômeurs bénéficiant de l'aide publique. C'était surtout une chambre d'enregistrement.
Quarante ans plus tard, l'ANPE s'est profondément transformée. Elle compte désormais 28 000 agents et 1 300 implantations locales. 28 000 serviteurs de l'État dévoués à l'emploi des autres, qui accueillent les demandeurs d'emploi, en leur accordant 17 millions d'entretiens par an, et prospectent les entreprises pour trouver chaque année plus de 3,5 millions de nouvelles offres. Combien de fois, en visitant une entreprise, n'ai-je pas entendu parler de tel ou tel « conseiller ANPE » sans qui l'embauche ne se serait pas faite ? Surtout depuis l'instauration, l'année dernière, du suivi mensuel personnalisé, le conseiller ANPE est devenu pour beaucoup de demandeur d'emploi un interlocuteur plus proche, parce qu'il n'y a pas de conseil sans continuité de l'accompagnement. Ces conseillers ne ménagent pas leurs efforts puisque chacun d'entre eux suit 120 demandeurs d'emploi, en moyenne, donc parfois davantage.
Je sais que cette charge de travail est considérable, et je veux rendre hommage à tous les agents pour le zèle dont ils font preuve au service de leurs concitoyens.
Grâce à eux et aux outils mis à leur disposition, l'ANPE a grandement contribué à l'amélioration de la situation de l'emploi ces dernières années.
Depuis 2005, le nombre de demandeurs d'emploi inscrits auprès de l'Agence en catégorie 1 a en effet baissé de plus de 500 000 pour passer sous la barre des 2 millions, pour la première fois depuis 25 ans. L'année 2007 sera encore une bonne année, grâce à un 1er semestre exceptionnel. Le rythme de créations d'emplois dans le secteur marchand a nettement augmenté au 1er semestre 2007 pour atteindre +162 900, après +89 900 au 2e semestre 2006, soit un quasi-doublement. Le scénario macroéconomique du Projet de loi de finances prévoit la création de 210 000 emplois marchands en 2007 et, pour 2008, nous nous attendons à une accélération et des créations d'emplois marchands de l'ordre de 255 000.
(II) Pour parvenir à l'objectif de plein-emploi que nous nous sommes fixés, soit 5% de chômage à l'horizon 2012 (ce qu'on appelle le chômage « frictionnel »), il faudra encore diminuer le nombre de chômeurs de moitié. Cet objectif est à notre portée, j'en ai la conviction, à condition d'accélérer la transformation du marché du travail et du service public de l'emploi qui s'est engagée depuis deux ans.
L'ANPE a joué un rôle actif dans cette mutation. En quelques années, elle a su commencer à faire évoluer les services destinés aux demandeurs d'emploi, avec le suivi mensuel tout comme les services aux entreprises qui sont plus nombreuses à s'adresser à elle.
L'ANPE s'est modernisée en développant ses partenariats avec les autres acteurs de l'emploi, tels l'Unedic, les autres réseaux de placement, les collectivités territoriales ou les agences d'intérim.
L'ANPE s'est également investie avec succès dans la lutte contre les discriminations sur le marché du travail, qu'elles soient liées à la couleur de peau, au sexe ou à l'apparence physique (je pense au traitement des personnes handicapées et à la collaboration avec l'AGEFIPH et les Cap Emploi). Elle s'applique aujourd'hui à relever un défi plus large, la gestion de la diversité, ainsi qu'en témoigne le thème choisi pour ce colloque.
Fort de ces progrès, le Gouvernement a décidé aujourd'hui de passer à une nouvelle étape et de construire à partir de l'ANPE et des réseaux de l'Unedic une institution nouvelle chargée d'assurer l'ensemble des fonctions d'intermédiation et de placement des demandeurs d'emploi.
Cette réforme a une double vocation : simplifier le paysage institutionnel en offrant à chaque demandeur d'emploi et à chaque entreprise en tout point du territoire un interlocuteur unique capable de l'accueillir, l'orienter et de répondre à ses besoins.
Elle vise surtout à renforcer sur le terrain les moyens d'accompagnement et d'orientation pour les chômeurs car nous savons que c'est la clé de l'accélération du retour rapide et durable à l'emploi.
Elle permettra aussi, en démultipliant la force de frappe dans chaque bassin d'emploi de mieux connaître les besoins des entreprises et d'y faire rapidement face.
Cette réforme constitue bien sûr un profond changement pour les agents des deux réseaux.
Je voudrais aujourd'hui les rassurer et leur dire que cette réforme se fera par eux et avec eux et qu'ils n'ont pas lieu de s'inquiéter pour leur statut qui sera préservé. Je suis convaincue qu'ils ont beaucoup à y gagner : leurs moyens d'action vont se trouver renforcés. Des possibilités de carrière nouvelles vont s'offrir à eux compte tenu de la diversité de métiers dans le nouvel opérateur unique.
J'entends maintenant avancer rapidement sur ce dossier essentiel et ai entamé une concertation avec les partenaires sociaux gestionnaires de l'Unedic. Mon objectif est de présenter un projet de loi d'ici la mi-novembre au comité supérieur de l'emploi pour un débat parlementaire avant la fin de l'année.
Les principes de cette réforme commencent à se dessiner clairement :
- maintien d'un régime paritaire d'assurance chômage sous la responsabilité de l'Unedic ;
- unification des fonctions de service aux demandeurs d'emploi et aux entreprises (indemnisation, accompagnement, placement, collecte...) au sein d'une institution nouvelle, financée par le régime d'assurance-chômage et par l'État, avec une forte implantation territoriale;
- pilotage stratégique assuré par un conseil placé sous ma présidence et regroupant avec les partenaires sociaux les principales parties prenantes des politiques de l'emploi : ce conseil débattra des grandes priorités de ces politiques et des moyens qui leur sont affectées.
Les réseaux spécialisés auront évidemment un rôle de premier plan dans cette nouvelle architecture : je pense à l'APEC (agence pour l'emploi des cadres), aux missions locales ou aux Cap Emploi. Je pense aussi aux maisons de l'emploi qui ont permis de préfigurer sur le terrain le rapprochement ANPE-Assedic. Je veillerai à ce qu'elles trouvent toute leur place, comme interlocuteur de proximité, au sein du nouveau dispositif.
Vous le voyez, 40 ans, c'est l'âge de la maturité, c'est l'âge du renouveau pour l'Agence, qui va prendre un nouveau départ.
Certains ont comparé la fusion de l'ANPE et des Assedic au mariage de la carpe et du lapin. Je ne suis pas experte en zoologie, mais je suis certaine, Mesdames et Messieurs, que chacun y retrouvera ses petits.
Je souhaite que vos travaux à venir, au cours de ces deux jours, contribuent à nourrir les réflexions que je vous ai rapidement présentées, sur le contenu des politiques de l'emploi, sur le rôle des services publics en matière de diversité et d'accompagnement des demandeurs d'emploi.
Je vous remercie.
Source http://www.minefe.gouv.fr, le 24 octobre 2007