Texte intégral
Monsieur le Président,
Messieurs les Députés et Sénateurs,
Monsieur le Président du Groupement français des entreprises
de restauration de monuments historiques,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec plaisir que je réponds à l'invitation de votre Président, Jean de Lambertye, que je salue, à venir partager un moment de votre Assemblée Générale annuelle.
Je salue le dynamisme dont fait preuve votre association depuis plus de 80 ans dans ses actions en faveur du patrimoine privé, de sa protection, de sa mise en valeur, ainsi que de sa transmission. Elle est un partenaire précieux du ministère de la culture et de la communication, en elle-même ainsi qu'au travers du groupe de concertation créé avec les autres associations nationales, et désormais connu, même dans la presse, sous le nom de « G8 ».
Le « G8 » est un espace essentiel de dialogue et de concertation sur les réformes en cours ou à venir, et un lieu où les associations font entendre leurs besoins et leurs attentes. J'y suis très attachée. Michel Clément, qui le réunit régulièrement, m'a fait part de la qualité de vos échanges, qui n'exclut pas, comme chacun peut le comprendre, des divergences de points de vue.
Je regrette de ne pouvoir être présente à la table ronde d'aujourd'hui sur la création d'un cadre favorable aux monuments historiques privés et à l'action des « entrepreneurs du patrimoine » que sont leurs propriétaires. Mais je tenais à vous dire ce matin que vous pouvez compter sur mon engagement et sur le soutien du ministère.
Comme vous, je considère que la propriété d'un monument ne se réduit pas à sa seule charge financière - même si elle est réelle - mais doit aussi être perçue comme une chance. L'Etat s'efforce depuis longtemps déjà d'aider les propriétaires privés dans leurs efforts pour conserver, restaurer, mettre en valeur leurs monuments, plus particulièrement lorsqu'ils sont ouverts au public. J'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt des propositions que vous avez rendues publiques lors des Journées du patrimoine. Permettez-moi d'esquisser quelques éléments de réponse : je laisse à Michel Clément le soin de vous les commenter plus en détails.
1 - Le mécénat :
Je commencerai par un sujet que je sais très important pour vous. Le cadre juridique et fiscal des travaux de restauration des monuments privés, déjà favorable, a encore été amélioré par une extension exceptionnelle du régime fiscal du mécénat. Le décret nécessaire à l'application de cette mesure est en cours de finalisation.
Selon la loi du 1er août 2003, le mécénat porte sur des actions d'intérêt général conduites par des organismes à but non lucratif. L'extension du bénéfice de ces dispositions au financement de travaux sur des monuments privés est assortie de certaines conditions : le caractère non commercial de la gestion du monument et son ouverture effective au public.
Nous sommes en discussion avec le ministère des Finances, depuis plusieurs mois, afin de faire prévaloir auprès de l'administration fiscale une interprétation de ces deux conditions qui permette aux propriétaires privés de MH d'en tirer le parti le plus favorable.
D'abord, nous plaidons pour des conditions d'ouverture au public qui prennent notamment en considération le caractère saisonnier de la fréquentation touristique des MH, et permette de tenir compte de leurs efforts d'ouverture aux publics scolaires, dans l'optique du développement de l'éducation artistique et culturelle.
Ensuite, il faut que vous sachiez que votre demande de supprimer la condition d'exploitation commerciale du monument ne va pas de soi, cette condition étant inscrite dans la loi elle-même. Les premiers échanges avec le ministère des finances ont permis d'envisager un seuil de recettes commerciales annuelles de 60 000 euros pour tous les travaux. Peut-on aller encore plus loin dans le cas des travaux d'accessibilité aux handicapés ? Je le souhaite vivement. Nous avons bon espoir d'être suivis, l'accessibilité aux personnes handicapées étant, comme vous le savez, une des priorités du gouvernement.
2 - La transmission du patrimoine :
Vous avez également soulevé la difficulté, pour les jeunes générations, de reprendre le flambeau du patrimoine familial. Les conditions de succession offrent désormais des souplesses et des avantages spécifiques qui sont de nature à compenser les charges d'un tel héritage. Outre l'exonération des droits de succession en contrepartie de l'engagement d'ouverture au public, la loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités a en effet prévu une évaluation minorée des charges d'entretien et de restauration du bien si l'héritier s'engage sur une clause d'inaliénabilité. Ce qui est généralement le cas lorsqu'on a la chance d'hériter d'un monument propriété familiale depuis plusieurs générations ou acquis par des parents amoureux du patrimoine. Cette avancée importante et récente mériterait d'être évaluée dans ses effets avant d'envisager d'autres pistes.
3 - La mobilisation des crédits en faveur du patrimoine privé :
Vous avez également souhaité, avec le groupement des entreprises de monuments historiques, que les crédits budgétaires affectés aux monuments historiques privés soient maintenus à un niveau suffisant. J'ai donné instruction aux DRAC de veiller à l'équilibre des subventions attribuées aux monuments n'appartenant pas à l'Etat, ainsi qu'à la mobilisation de 10% des crédits en faveur des monuments privés, comme vous le demandiez.
Quant au montant total des crédits, je rappelle que les crédits 2007 avaient été abondés par l'affectation rétroactive de 25% des droits de mutation à titre onéreux pour l'année 2006. Nous sommes en 2008 revenus au niveau moyen antérieur, c'est-à-dire à un peu plus de 300 millions d'euros. Je connais les besoins, je sais que ce montant peut paraître insuffisant. Mais nous ne pouvons ignorer le contexte de tension budgétaire dans lequel nous nous trouvons actuellement. Nous devons donc utiliser au mieux nos ressources et nous mobiliser pour rechercher d'autres sources de financements. Je pense au mécénat, dont je rappelle qu'il est également une forme d'aide de l'Etat. Je pense aussi aux recettes publicitaires sur les échafaudages, dans le cadre des nouvelles dispositions dérogatoires au code de l'environnement. Elles permettront, dans certains cas, d'apporter des compléments de financements pour des travaux extérieurs.
4 - La responsabilisation des propriétaires maîtres d'ouvrage :
La réforme de la maîtrise d'ouvrage et de la maîtrise d'oeuvre, entreprise depuis deux ans est en voie d'achèvement. Elle va responsabiliser les propriétaires maîtres d'ouvrage, qui vont instaurer une relation nouvelle avec leur maître d'oeuvre. En effet, vous allez pouvoir choisir librement votre architecte en chef, parmi les architectes en chef français ou d'autres architectes européens présentant des qualifications professionnelles et une expérience équivalente dans la restauration de monuments.
L'Etat ne se « désengage » pas, contrairement à ce qui a pu être dit ça et là. Il continuera, sur des bases juridiques clarifiées, d'apporter ses conseils et son expertise pour l'élaboration des projets de travaux et leur bonne exécution. L'objectif est en effet de créer une relation de confiance entre le maître d'ouvrage que vous allez être et les services de l'Etat chargés d'autoriser les travaux, et ce, le plus en amont possible de leur exécution. Cette démarche concertée doit intégrer l'étape indispensable de la connaissance de l'état sanitaire du monument et de ses contraintes.
Ce dialogue construit entre les services de l'Etat et les propriétaires de monuments est nécessaire pour établir des demandes de crédits budgétaires fondées sur la réalité des projets de restauration. Cela permettra un démarrage plus rapide des travaux et une mobilisation des financements plus facile.
Enfin, en cas de travaux très complexes ou si le propriétaire ne dispose pas de moyens suffisants pour assumer seul la maîtrise d'ouvrage, l'Etat mettra en oeuvre une assistance à maîtrise d'ouvrage. Le G8 a été consulté depuis juillet dernier sur les versions successives du projet de décret correspondant, qui part maintenant en concertation interministérielle.
Afin d'aider les propriétaires, notamment privés, dans ces nouvelles responsabilités, la DAPA et le Président de la CAPA veilleront à ce que l'Ecole de Chaillot leur propose une formation spécifique dès 2008, renouvelée en tant que de besoin les années suivantes. La médiathèque du Patrimoine, dont le transfert à Charenton est en cours de préparation, organisera aussi un accueil spécifique des propriétaires et des architectes à la recherche de documentation de référence pouvant les aider dans leurs projets de restauration.
5 - La réforme des services de l'Etat :
Comme vous le voyez, la réforme dessinée par le plan national du patrimoine adopté en conseil des ministres en septembre 2003 est en voie d'aboutir. Je m'en réjouis. Ce travail de longue haleine a été entièrement conçu et conduit en concertation avec les parlementaires. Beaucoup de mesures sont ainsi nées de ce dialogue entre les élus, les associations du G8 et le ministère.
Cette réforme intègre une réorganisation des services déconcentrés du ministère, destinée à renforcer le pôle de compétences culturelles autour d'un axe vertical constitué par le rapprochement des DRAC et des SDAP. Le patrimoine et l'architecture sont en effet les seuls domaines du ministère à disposer des deux niveaux de services déconcentrés, qu'il me semblait indispensable d'articuler de manière claire. C'est une chance pour le patrimoine qui bénéficie ainsi de la complémentarité des compétences des agents des deux niveaux territoriaux, placés dorénavant sous l'autorité du directeur régional : conservateurs au niveau régional, architectes des bâtiments de France au niveau des SDAP. Sans oublier bien sûr les architectes en chef investis d'une mission de surveillance territoriale des monuments et les inspecteurs généraux de l'architecture et du patrimoine.
A l'issue de cette réforme, le cadre législatif et réglementaire du patrimoine se sera considérablement modernisé, donnant toute leur place aux propriétaires de monuments - collectivités territoriales ou personnes privées. Il articulera mieux que par le passé les servitudes du patrimoine avec le droit de l'urbanisme, sans que les principes fondateurs de la loi du 31 décembre 1913 ne soient remis en cause. Cette modernisation était nécessaire, près de cent ans après le vote de la loi fondatrice. Vous pouvez compter sur l'effort continu des services de la direction de l'architecture et du patrimoine, des DRAC et des SDAP, pour que sa mise en oeuvre se fasse dans l'intérêt collectif de la conservation des monuments et de la préservation de l'attractivité de nos territoires.
6 - Le Grenelle de l'environnement :
J'aimerais, pour finir, évoquer avec vous les travaux du Grenelle de l'Environnement. Je sais que certains d'entre vous ont siégé dans différents groupes de travail, et qu'au niveau régional, les groupes de concertation conduits par les Préfets ont également permis à tous les acteurs d'intervenir. Cette réflexion collective témoigne d'une prise de conscience sans précédent de l'enjeu environnemental et de l'intérêt de la démarche de développement durable. La restauration et la préservation de notre patrimoine y participent pleinement.
Il y a potentiellement un risque que le zèle en matière de développement durable, surtout s'il débouche sur des mesures radicales, normatives et systématiques, ne soit en définitive contraire aux intérêts du patrimoine et à la qualité architecturale et paysagère. Je prendrai deux exemples.
Les éoliennes, tout d'abord. Je signerai prochainement une circulaire, pour laquelle vous serez consultés, pour alerter les Préfets sur la nécessité de mesurer l'impact de la création de zones de développement éolien sur le paysage. Nous encourageons les SDAP à défendre la notion de cône de visibilité.
Ensuite, dans le domaine des économies d'énergie et de bilan de performance énergétique, nous mettons en ce moment en garde les pilotes de ces réflexions contre le risque d'application systématique de préconisations adaptées au bâti des années 60, mais dégradantes pour le bâti ancien. En effet, les constructions anciennes sont bien souvent des modèles d'intégration dans leur environnement et d'adaptation à la gestion des variations climatiques. Leurs matériaux et leurs techniques de construction doivent être étudiées et mieux connues. Nous relayons en cela vos propres interventions, ainsi que celles de l'Association des Maisons paysannes de France, que je salue ici pour sa clairvoyance et sa ténacité dans ce domaine. Nous commençons à être entendus, ce qui montre bien l'intérêt et l'efficacité d'un dialogue suivi entre les associations patrimoniales et le ministère. Je ne peux donc, pour conclure, que me réjouir des bons rapports que nous entretenons. Je suis certaine que cette relation de confiance et d'estime réciproques se poursuivra, dans l'intérêt des monuments historiques dont nous assumons, ensemble, la responsabilité.Source http://www.demeure-historique.org, le 7 novembre 2007
Messieurs les Députés et Sénateurs,
Monsieur le Président du Groupement français des entreprises
de restauration de monuments historiques,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec plaisir que je réponds à l'invitation de votre Président, Jean de Lambertye, que je salue, à venir partager un moment de votre Assemblée Générale annuelle.
Je salue le dynamisme dont fait preuve votre association depuis plus de 80 ans dans ses actions en faveur du patrimoine privé, de sa protection, de sa mise en valeur, ainsi que de sa transmission. Elle est un partenaire précieux du ministère de la culture et de la communication, en elle-même ainsi qu'au travers du groupe de concertation créé avec les autres associations nationales, et désormais connu, même dans la presse, sous le nom de « G8 ».
Le « G8 » est un espace essentiel de dialogue et de concertation sur les réformes en cours ou à venir, et un lieu où les associations font entendre leurs besoins et leurs attentes. J'y suis très attachée. Michel Clément, qui le réunit régulièrement, m'a fait part de la qualité de vos échanges, qui n'exclut pas, comme chacun peut le comprendre, des divergences de points de vue.
Je regrette de ne pouvoir être présente à la table ronde d'aujourd'hui sur la création d'un cadre favorable aux monuments historiques privés et à l'action des « entrepreneurs du patrimoine » que sont leurs propriétaires. Mais je tenais à vous dire ce matin que vous pouvez compter sur mon engagement et sur le soutien du ministère.
Comme vous, je considère que la propriété d'un monument ne se réduit pas à sa seule charge financière - même si elle est réelle - mais doit aussi être perçue comme une chance. L'Etat s'efforce depuis longtemps déjà d'aider les propriétaires privés dans leurs efforts pour conserver, restaurer, mettre en valeur leurs monuments, plus particulièrement lorsqu'ils sont ouverts au public. J'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt des propositions que vous avez rendues publiques lors des Journées du patrimoine. Permettez-moi d'esquisser quelques éléments de réponse : je laisse à Michel Clément le soin de vous les commenter plus en détails.
1 - Le mécénat :
Je commencerai par un sujet que je sais très important pour vous. Le cadre juridique et fiscal des travaux de restauration des monuments privés, déjà favorable, a encore été amélioré par une extension exceptionnelle du régime fiscal du mécénat. Le décret nécessaire à l'application de cette mesure est en cours de finalisation.
Selon la loi du 1er août 2003, le mécénat porte sur des actions d'intérêt général conduites par des organismes à but non lucratif. L'extension du bénéfice de ces dispositions au financement de travaux sur des monuments privés est assortie de certaines conditions : le caractère non commercial de la gestion du monument et son ouverture effective au public.
Nous sommes en discussion avec le ministère des Finances, depuis plusieurs mois, afin de faire prévaloir auprès de l'administration fiscale une interprétation de ces deux conditions qui permette aux propriétaires privés de MH d'en tirer le parti le plus favorable.
D'abord, nous plaidons pour des conditions d'ouverture au public qui prennent notamment en considération le caractère saisonnier de la fréquentation touristique des MH, et permette de tenir compte de leurs efforts d'ouverture aux publics scolaires, dans l'optique du développement de l'éducation artistique et culturelle.
Ensuite, il faut que vous sachiez que votre demande de supprimer la condition d'exploitation commerciale du monument ne va pas de soi, cette condition étant inscrite dans la loi elle-même. Les premiers échanges avec le ministère des finances ont permis d'envisager un seuil de recettes commerciales annuelles de 60 000 euros pour tous les travaux. Peut-on aller encore plus loin dans le cas des travaux d'accessibilité aux handicapés ? Je le souhaite vivement. Nous avons bon espoir d'être suivis, l'accessibilité aux personnes handicapées étant, comme vous le savez, une des priorités du gouvernement.
2 - La transmission du patrimoine :
Vous avez également soulevé la difficulté, pour les jeunes générations, de reprendre le flambeau du patrimoine familial. Les conditions de succession offrent désormais des souplesses et des avantages spécifiques qui sont de nature à compenser les charges d'un tel héritage. Outre l'exonération des droits de succession en contrepartie de l'engagement d'ouverture au public, la loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités a en effet prévu une évaluation minorée des charges d'entretien et de restauration du bien si l'héritier s'engage sur une clause d'inaliénabilité. Ce qui est généralement le cas lorsqu'on a la chance d'hériter d'un monument propriété familiale depuis plusieurs générations ou acquis par des parents amoureux du patrimoine. Cette avancée importante et récente mériterait d'être évaluée dans ses effets avant d'envisager d'autres pistes.
3 - La mobilisation des crédits en faveur du patrimoine privé :
Vous avez également souhaité, avec le groupement des entreprises de monuments historiques, que les crédits budgétaires affectés aux monuments historiques privés soient maintenus à un niveau suffisant. J'ai donné instruction aux DRAC de veiller à l'équilibre des subventions attribuées aux monuments n'appartenant pas à l'Etat, ainsi qu'à la mobilisation de 10% des crédits en faveur des monuments privés, comme vous le demandiez.
Quant au montant total des crédits, je rappelle que les crédits 2007 avaient été abondés par l'affectation rétroactive de 25% des droits de mutation à titre onéreux pour l'année 2006. Nous sommes en 2008 revenus au niveau moyen antérieur, c'est-à-dire à un peu plus de 300 millions d'euros. Je connais les besoins, je sais que ce montant peut paraître insuffisant. Mais nous ne pouvons ignorer le contexte de tension budgétaire dans lequel nous nous trouvons actuellement. Nous devons donc utiliser au mieux nos ressources et nous mobiliser pour rechercher d'autres sources de financements. Je pense au mécénat, dont je rappelle qu'il est également une forme d'aide de l'Etat. Je pense aussi aux recettes publicitaires sur les échafaudages, dans le cadre des nouvelles dispositions dérogatoires au code de l'environnement. Elles permettront, dans certains cas, d'apporter des compléments de financements pour des travaux extérieurs.
4 - La responsabilisation des propriétaires maîtres d'ouvrage :
La réforme de la maîtrise d'ouvrage et de la maîtrise d'oeuvre, entreprise depuis deux ans est en voie d'achèvement. Elle va responsabiliser les propriétaires maîtres d'ouvrage, qui vont instaurer une relation nouvelle avec leur maître d'oeuvre. En effet, vous allez pouvoir choisir librement votre architecte en chef, parmi les architectes en chef français ou d'autres architectes européens présentant des qualifications professionnelles et une expérience équivalente dans la restauration de monuments.
L'Etat ne se « désengage » pas, contrairement à ce qui a pu être dit ça et là. Il continuera, sur des bases juridiques clarifiées, d'apporter ses conseils et son expertise pour l'élaboration des projets de travaux et leur bonne exécution. L'objectif est en effet de créer une relation de confiance entre le maître d'ouvrage que vous allez être et les services de l'Etat chargés d'autoriser les travaux, et ce, le plus en amont possible de leur exécution. Cette démarche concertée doit intégrer l'étape indispensable de la connaissance de l'état sanitaire du monument et de ses contraintes.
Ce dialogue construit entre les services de l'Etat et les propriétaires de monuments est nécessaire pour établir des demandes de crédits budgétaires fondées sur la réalité des projets de restauration. Cela permettra un démarrage plus rapide des travaux et une mobilisation des financements plus facile.
Enfin, en cas de travaux très complexes ou si le propriétaire ne dispose pas de moyens suffisants pour assumer seul la maîtrise d'ouvrage, l'Etat mettra en oeuvre une assistance à maîtrise d'ouvrage. Le G8 a été consulté depuis juillet dernier sur les versions successives du projet de décret correspondant, qui part maintenant en concertation interministérielle.
Afin d'aider les propriétaires, notamment privés, dans ces nouvelles responsabilités, la DAPA et le Président de la CAPA veilleront à ce que l'Ecole de Chaillot leur propose une formation spécifique dès 2008, renouvelée en tant que de besoin les années suivantes. La médiathèque du Patrimoine, dont le transfert à Charenton est en cours de préparation, organisera aussi un accueil spécifique des propriétaires et des architectes à la recherche de documentation de référence pouvant les aider dans leurs projets de restauration.
5 - La réforme des services de l'Etat :
Comme vous le voyez, la réforme dessinée par le plan national du patrimoine adopté en conseil des ministres en septembre 2003 est en voie d'aboutir. Je m'en réjouis. Ce travail de longue haleine a été entièrement conçu et conduit en concertation avec les parlementaires. Beaucoup de mesures sont ainsi nées de ce dialogue entre les élus, les associations du G8 et le ministère.
Cette réforme intègre une réorganisation des services déconcentrés du ministère, destinée à renforcer le pôle de compétences culturelles autour d'un axe vertical constitué par le rapprochement des DRAC et des SDAP. Le patrimoine et l'architecture sont en effet les seuls domaines du ministère à disposer des deux niveaux de services déconcentrés, qu'il me semblait indispensable d'articuler de manière claire. C'est une chance pour le patrimoine qui bénéficie ainsi de la complémentarité des compétences des agents des deux niveaux territoriaux, placés dorénavant sous l'autorité du directeur régional : conservateurs au niveau régional, architectes des bâtiments de France au niveau des SDAP. Sans oublier bien sûr les architectes en chef investis d'une mission de surveillance territoriale des monuments et les inspecteurs généraux de l'architecture et du patrimoine.
A l'issue de cette réforme, le cadre législatif et réglementaire du patrimoine se sera considérablement modernisé, donnant toute leur place aux propriétaires de monuments - collectivités territoriales ou personnes privées. Il articulera mieux que par le passé les servitudes du patrimoine avec le droit de l'urbanisme, sans que les principes fondateurs de la loi du 31 décembre 1913 ne soient remis en cause. Cette modernisation était nécessaire, près de cent ans après le vote de la loi fondatrice. Vous pouvez compter sur l'effort continu des services de la direction de l'architecture et du patrimoine, des DRAC et des SDAP, pour que sa mise en oeuvre se fasse dans l'intérêt collectif de la conservation des monuments et de la préservation de l'attractivité de nos territoires.
6 - Le Grenelle de l'environnement :
J'aimerais, pour finir, évoquer avec vous les travaux du Grenelle de l'Environnement. Je sais que certains d'entre vous ont siégé dans différents groupes de travail, et qu'au niveau régional, les groupes de concertation conduits par les Préfets ont également permis à tous les acteurs d'intervenir. Cette réflexion collective témoigne d'une prise de conscience sans précédent de l'enjeu environnemental et de l'intérêt de la démarche de développement durable. La restauration et la préservation de notre patrimoine y participent pleinement.
Il y a potentiellement un risque que le zèle en matière de développement durable, surtout s'il débouche sur des mesures radicales, normatives et systématiques, ne soit en définitive contraire aux intérêts du patrimoine et à la qualité architecturale et paysagère. Je prendrai deux exemples.
Les éoliennes, tout d'abord. Je signerai prochainement une circulaire, pour laquelle vous serez consultés, pour alerter les Préfets sur la nécessité de mesurer l'impact de la création de zones de développement éolien sur le paysage. Nous encourageons les SDAP à défendre la notion de cône de visibilité.
Ensuite, dans le domaine des économies d'énergie et de bilan de performance énergétique, nous mettons en ce moment en garde les pilotes de ces réflexions contre le risque d'application systématique de préconisations adaptées au bâti des années 60, mais dégradantes pour le bâti ancien. En effet, les constructions anciennes sont bien souvent des modèles d'intégration dans leur environnement et d'adaptation à la gestion des variations climatiques. Leurs matériaux et leurs techniques de construction doivent être étudiées et mieux connues. Nous relayons en cela vos propres interventions, ainsi que celles de l'Association des Maisons paysannes de France, que je salue ici pour sa clairvoyance et sa ténacité dans ce domaine. Nous commençons à être entendus, ce qui montre bien l'intérêt et l'efficacité d'un dialogue suivi entre les associations patrimoniales et le ministère. Je ne peux donc, pour conclure, que me réjouir des bons rapports que nous entretenons. Je suis certaine que cette relation de confiance et d'estime réciproques se poursuivra, dans l'intérêt des monuments historiques dont nous assumons, ensemble, la responsabilité.Source http://www.demeure-historique.org, le 7 novembre 2007