Texte intégral
Monsieur le Président,
Cher Jean Parrot,
Mesdames et Messieurs, chers confrères et consoeurs,
Le seul énoncé des différentes sections de l'ordre illustre bien la diversité d'un métier dont les bonnes pratiques déterminent, pour une grande part, la qualité de notre système de soins. Cette pluralité des fonctions exercées n'implique pas, pour autant, l'éclatement de vos missions ni même la séparation de vos intérêts. Pour en avoir moi-même pratiqué l'exercice, je sais bien que, dans l'univers pharmaceutique, tout se tient, d'un bout à l'autre de la chaîne, depuis la recherche jusqu'à l'officine.
Cependant, c'est moins le médicament lui-même qui constitue le dénominateur commun de vos activités que la qualité de votre travail, fondé sur des compétences croisées et sur une culture rationnelle également partagée par tous. Vous travaillez, nous oeuvrons tous, dans l'intérêt du patient, de manière à lui donner des soins de qualité. Ainsi, votre unité est, pourrait-on dire, consubstantiellement déontologique. L'ordre en est le garant institutionnel.
J'ai clairement conscience que la pharmacie française doit beaucoup aux initiatives de l'ordre. Aussi, je me dois ici de rendre hommage à la manière dont vous accomplissez votre difficile mission, monsieur le président, cher Jean Parrot, ainsi que vous, Présidents et membres des différentes sections : titulaires, grossistes, industriels, adjoints, pharmaciens des DOM, biologistes et hospitaliers. Cette mission est aujourd'hui d'autant plus fondamentale qu'il convient désormais d'opérer un certain nombre d'adaptations sans jamais en rabattre sur des exigences qui constituent le fond de votre raison d'être.
Je tenais à vous féliciter notamment pour le travail de grande qualité réalisé par l'équipe du comité d'éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française (le Cespharm) et son président, le Pr Claude Dreux ainsi que sa secrétaire générale, Mme Fabienne Blanchet.
Ainsi, les actions que vous engagez auprès des pharmaciens contribuent avec efficacité à l'accomplissement de leur mission de santé publique. Elles les confirment dans leur rôle d'éducateur de santé, proche du patient, indispensable soutien de nos politiques de prévention et de dépistage.
Je sais aussi que la forte implication de la section des biologistes (la section G) dans la réflexion portant sur les réformes à venir constitue un très précieux atout.
Je tenais aussi à saluer les actions que vous menez en Europe, en particulier pour défendre la qualité de la biologie et de la pharmacie telles que nous les pratiquons en France.
Plus spécifiquement, l'ordre, par ses initiatives, permet aux pharmaciens d'améliorer et de faciliter l'exercice même de leur profession. C'est ainsi qu'à pu être élaboré un outil professionnel d'aide à la formulation de « l'opinion pharmaceutique », permettant de tracer l'analyse pharmaceutique.
Surtout, sous l'impulsion du président Parrot et de madame Isabelle Adenot, que je salue, le dossier pharmaceutique a pu être mis en place. Vous vous êtes lancés dans cette aventure, conscients de la complexité des procédures, tant juridiques, administratives, humaines, que techniques et éthiques en matière de systèmes d'information en santé. Sans doute pouviez-vous compter sur le professionnalisme des pharmaciens et sur leur maîtrise de l'outil informatique, qui fait partie intégrante, depuis longtemps, de l'exercice officinal. Ainsi, ce projet est aujourd'hui une réalité, et son déploiement semble se dérouler dans de bonnes conditions.
Certes, le DP et le DMP sont intimement liés, puisque le premier a vocation à alimenter la partie médicament du second. Afin de ne pas freiner son rythme de progression, j'ai soutenu à l'Assemblée Nationale l'amendement au PLFSS inspiré par l'Ordre, visant à déconnecter les deux dossiers dans l'attente de la mise en oeuvre effective du DMP. Avec l'ouverture de plus de 1 000 dossiers par jour, le DP semble recueillir l'adhésion des patients qui, je l'espère, en seront les plus grands bénéficiaires. Ce nouvel outil rendra non seulement lisible la traçabilité des dispensations, mais il permettra aussi de favoriser la détection d'éventuelles interactions entre les médicaments, qu'ils aient été prescrits ou non, et d'éviter les erreurs médicamenteuses.
La collaboration entre l'ordre et le ministère, comme chacun sait, est essentielle. Elle s'exerce, je crois, dans un esprit de convivialité, et même si nous ne sommes pas toujours spontanément d'accord, dans une atmosphère de concorde et de compréhension mutuelle. Notre confraternité y est sans doute pour beaucoup et je m'en réjouis.
Cette collaboration est particulièrement constructive et fructueuse en ces temps où les pharmaciens, en particulier les biologistes et les officinaux, sont inquiets pour leur avenir. Je voudrais leur dire sans ambiguïté que je soutiendrai, avec conviction, le maintien de la détention du capital des officines et des laboratoires de biologie médicale par ceux qui les exploitent et en assument la responsabilité pharmaceutique. Je l'affirme ici sans ambages : je défendrai aussi le principe du monopole pharmaceutique.
L'ouverture du capital à des holding financières, vers laquelle la Commission souhaite amener notre pays, pourrait produire un déplacement des priorités de la PME/officine vers des objectifs quantifiés de rentabilité, voire remettre en cause l'existence même d'un service pharmaceutique de qualité et de proximité. A ce propos, il convient de rappeler que le maintien d'une chaîne du médicament sous strict contrôle pharmaceutique constitue un rempart efficace contre la pénétration de médicaments contrefaits dans notre pays. Je tiens ainsi à saluer la récente initiative prise par l'Ordre pour constituer un groupe de travail commun avec l'AFSSAPS et la Direction générale de la santé sur la vente de médicaments par internet.
Le monopole pharmaceutique constitue un maillon indispensable de la politique intégrée du médicament que je souhaite mettre en oeuvre. Le médicament doit rester identifié comme étant un produit spécifique, dont le potentiel de soulagement ou de guérison est toujours, quel qu'il soit, assorti de risques. L'accompagnement et les conseils d'un professionnel de santé spécialisé, indépendant et dont la responsabilité personnelle est pleinement engagée est clairement de nature à protéger la santé des patients. Seul un pharmacien est vraiment à même de le bon médicament au bon patient, lorsqu'un traitement est nécessaire, de dispenser une éducation thérapeutique adaptée et d'orienter le cas échéant vers une consultation médicale. Cet impératif justifie que les patients/consommateurs ne puissent trouver de médicaments au milieu d'une suite de rayons de bonbons ou de lessive, mais uniquement dans un commerce dédié et professionnalisé.
Cependant, il importe que les officines adoptent résolument une logique d'efficience pour démontrer leur valeur ajoutée. Elles devront ainsi, sans doute, se restructurer pour répondre de façon optimale aux besoins de la population. Elles pourront, si le besoin s'en fait sentir, se regrouper, notamment dans les zones à forte densité. Une fois encore, l'objectif est ici qualitatif : il s'agit pour les officines d'atteindre une masse critique suffisante de manière à assurer un service qui réponde aux critères actuels de qualité.
Pour que la qualité du circuit pharmaceutique soit reconnue, pour lever toute ambiguïté sur une éventuelle collusion entre l'impératif du monopole et une logique du profit qui imposerait ces diktats au détriment du patient, il conviendra de mieux intégrer les exigences de transparence et de concurrence dans le service pharmaceutique. Dans ce contexte, il convient de réaffirmer, encore et toujours, le caractère spécifique, protecteur et responsable du métier de pharmacien dont la fonction propre est de veiller au bon usage du médicament.
J'ai proposé à l'Ordre et aux organisations professionnelles un plan d'actions global, dont les principales orientations seront affinées et avec la profession et les institutions partenaires :
Mieux adapter le maillage officinal aux besoins de la population et aux exigences actuelles de qualité : c'est l'objet de l'article 39 du PLFSS pour 2008, qui a été élaboré avec vous, Ordre et syndicats professionnels qui êtes présents aujourd'hui et que je salue. Cette mesure, peaufinée ensemble jusqu'à la dernière minute dans ses moindres détails, prévoit ainsi d'augmenter la population desservie par chaque officine. Elle permet d'éviter l'ouverture de nouvelles officines là où elles sont en surnombre et de favoriser le redéploiement des pharmacies existantes, par voie de transferts ou de regroupements rendus possibles sur tout le territoire. Les créations resteront, bien entendu, possibles là où aucun transfert ou regroupement ne permet de couvrir les besoins. Cette mesure doit permettre à chaque officine de disposer d'un volant d'activité suffisant pour offrir un service pharmaceutique répondant aux exigences modernes de qualité.
Elle doit contribuer à améliorer la situation des micro-entreprises dont le titulaire est aujourd'hui esclave et qui n'arrivent pas à répondre aux besoins.
Enfin, elle pourrait favoriser la diminution des coûts de la distribution pharmaceutique assumés par l'assurance maladie, décriés à de nombreuses reprises, et très récemment par le Haut Conseil pour l'Avenir de l'Assurance Maladie.
Si je souhaite autoriser la mise à disposition de médicaments de prescription facultative devant le comptoir, c'est précisément pour valoriser le conseil pharmaceutique associé et éviter la mise en vente des médicaments dans les supermarchés. Le rôle du pharmacien apparaît, en effet, encore plus fondamental et indissociable du bon usage du produit, lorsque celui-ci est utilisé sans consultation préalable d'un médecin. Cette fonction sera d'autant mieux reconnue qu'il sera le seul à même de déconseiller au patient une prise médicamenteuse lorsqu'elle ne sera pas adaptée.
Sans doute, les conditions et les modalités de mise en oeuvre restent-elles à définir précisément. Un certain nombre de chantiers ont été ouverts lors d'une première réunion. J'invite tous les pharmaciens et préparateurs à participer sans tabou au débat.
Ceci me conduit à vous présenter le troisième élément de ce plan d'actions : il s'agit de donner un statut réglementaire de type centrale d'achat ou coopérative aux groupements de pharmaciens pour l'achat groupé des médicaments non remboursables et de parapharmacie. Ce statut comportera une contrepartie d'engagements de service public tels que formation, actions d'information ou de prévention, éducation thérapeutique, observance, traçabilité et lutte contre la contrefaçon, et surtout maîtrise des prix publics des médicaments non remboursables. Il permettra donc à tous les pharmaciens adhérant à ces groupements de bénéficier des remises leur permettant d'offrir les meilleurs prix à leurs clients.
Vous l'aurez compris : je serai à vos côtés, parce qu'il en va de l'intérêt du patient, pour vous aider à exercer, comme il se doit, la fonction qui est la vôtre au sein de notre système de santé. Je m'engage à vous défendre et à faire tout mon possible pour que la distribution des médicaments en France puisse être assurée dans des conditions exemplaires, au meilleur coût, au plus grand bénéfice de tous.
Parce que je reconnais à sa juste valeur et que je veux confirmer le rôle de santé publique du pharmacien, je souhaite travailler avec vous à la construction de la pharmacie de demain.
Je connais bien les exigences de votre profession et les obligations qui vous incombent.
Vous connaissez mes convictions. Vous pouvez être certains que je défendrai avec la plus grande vigilance un des fleurons essentiels de notre système de soins. Je vous remercie.Source http://www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr, le 8 novembre 2007