Texte intégral
Madame la Présidente (Angélique DELAHAYE),
Monsieur le Secrétaire Général (Jacques ROUCHAUSSE),
Monsieur le Président de l'interprofession des fruits et légumes
INTERFEL (Gilles VIGNAUD),
Monsieur le Maire de Reims,
Mesdames, messieurs,
[ Introduction ]
Je vous remercie de m'accueillir à votre 51ème congrès et me donner ainsi l'occasion de venir à la rencontre de tous les producteurs de légumes de France.
Permettez-moi tout d'abord de vous féliciter, Madame la Présidente, pour les services rendus à la profession par votre organisation. Votre filière est reconnue comme exigeante et dynamique, constituée de professionnels réalistes et responsables.
J'ai mesuré lors de mes différentes rencontres avec des producteurs de légumes (je pense notamment à ma visite dans les exploitations maraîchères de la région de Nantes, en juillet dernier) que les gens que je rencontrais étaient des femmes et des hommes qui sont de vrais patrons de PME, très soucieux des contraintes à gérer et des charges à assumer, conscients aussi des véritables potentialités du secteur, et animés d'une véritable volonté de progresser, de trouver des solutions.
Vos filières fournissent nos sociétés en produits alimentaires à haute valeur ajoutée du point de vue nutritionnel et, plus généralement, de la santé. Cette haute valeur ajoutée nutritionnelle doit être reconnue et mise en avant. De ce point de vue, votre « village des légumes dans la ville », que j'irai visiter tout à l'heure, est une initiative particulièrement heureuse.
Par leurs qualités, vos productions se trouvent au coeur de ma vision de l'agriculture : ce n'est pas une agriculture aseptisée, mais une agriculture qui produit de la qualité alimentaire, avec des produits qui ont du goût, une typicité, une identité forte, une agriculture qui répond au défi alimentaire tant du point de vue quantitatif que du point de vue qualitatif.
Je salue donc, Madame la présidente, le sujet que vous avez choisi pour votre congrès : « valoriser l'origine France ». Il montre bien que les légumes ne sont pas des produits agricoles « neutres », standards, mais qu'ils ont au contraire une identité, qu'il faut certainement mieux valoriser.
[ Annonce du plan ]
Je partage votre approche, Madame la Présidente : incontestablement, la bonne valorisation de vos productions doit constituer un objectif majeur pour votre filière. Je commencerai donc par ce sujet.
J'aborderai ensuite la question du cadre communautaire, récemment réformé en ce qui concerne vos productions.
Je vous parlerai ensuite de l'organisation de vos filières, élément-clé de la réussite du secteur.
Enfin, j'aborderai différents sujets qui sont autant de facteurs de compétitivité pour vos entreprises.
[ 1- Mieux valoriser les productions françaises ]
Tous les consommateurs français et européens doivent être informés et assurés qu'en achetant des légumes français, ils seront sûrs d'acheter des légumes sains, riches en goût, qui correspondent à leurs attentes.
La performance économique de votre filière passe par la poursuite d'un travail de segmentation stratégique de l'offre, pour s'adapter à une demande toujours plus variée dans ses attentes, et aussi toujours plus exigeante.
J'ai été très intéressé par l'initiative portée par votre secrétaire général, Jacques ROUCHAUSSE, qui a su, avec les maraîchers de la Marne, implanter une démarche innovante de « tradition maraîchère », basée sur la proximité, la saisonnalité et la fraîcheur de vos légumes. D'autres démarches du même type sont possibles, au travers de tous les circuits de commercialisation, comme par exemple les filières de qualité « mûr à points ».
Vous avez présenté tout à l'heure, chère Marion GUILLOU, le Groupement d'Intérêt Scientifique « PIC Lég » : cette initiative témoigne d'une volonté forte, que je soutiens totalement. Mais là aussi, l'objectif ultime doit bien être d'aboutir à une valorisation commerciale de la « production légumière intégrée », qui doit trouver sa place aux côtés de la production biologique et de la production raisonnée.
Enfin, j'encourage la filière fruits et légumes à davantage tirer partie des signes de qualité : ces outils répondent pleinement au besoin d'une segmentation du marché claire et lisible pour le consommateur, en particulier sur l'offre de haut de gamme, et permettent de bien valoriser des produits et des territoires.
Mais au-delà - ou plutôt en-deçà - de la segmentation se pose la question de l'accès-même des consommateurs aux légumes. C'est la fameuse notion « d'accessibilité » : il faut agir pour lever tout ce qui constitue des freins à la consommation.
C'est un sujet qui me tient à coeur, sur lequel je souhaite m'investir.
J'ai ouvert, avant-hier mardi, la journée organisée par l'INRA pour présenter son expertise scientifique collective sur « les déterminants de la consommation des fruits et légumes ». Au-delà de l'insuffisance du niveau moyen de la consommation en France, il existe des disparités de consommation de fruits et légumes en fonction de l'âge et de la catégorie socio-économique des ménages, ce qui constitue à mes yeux une véritable « injustice alimentaire ».
Aussi, je souhaite, en tant que ministre chargé de l'agriculture et de l'alimentation, travailler sur le sujet en étroite collaboration avec l'ensemble de la filière. Je sais que c'est un aspect des choses sur lequel vous avez déjà beaucoup travaillé, sous la houlette de M. Jean SALES, votre Président d'honneur, dans le cadre d'un comité « accessibilité » au sein d'INTERFEL.
Dès la semaine prochaine, je rencontrerai ces responsables qui travaillent déjà sur la question, afin de débattre librement des propositions que je souhaite faire à la filière :
- la mise en place d'une politique systématique de promotion, axée sur la saisonnalité et la proximité ;
- le développement des distributeurs de fruits et légumes frais et conditionnés dans tous les lieux de vie (écoles, entreprises, lieux de passage...)
- la mise en place de programme de distribution gratuite dans les écoles, au moment de la pause matinale ou du goûter. Mon collègue allemand m'a montré une telle expérience lundi dernier, à Berlin. Il y a là un enjeu important : il s'agit de redonner le goût des fruits et légumes aux enfants.
Bien évidemment, il s'agit là de propositions qui peuvent être complétées.
Il y a un aspect de l'accessibilité qui est particulièrement épineux : c'est la question du prix des produits. D'un côté, il y a les producteurs, dont je vois parfaitement qu'ils ont besoin de prix plus équitables, plus rémunérateurs, et, de l'autre côté, il y a le consommateur, qui a le sentiment que les légumes et les fruits frais sont trop chers. Je compte sur vous pour qu'ensemble, au sein du groupe de travail, nous cherchions à y voir plus clair sur cette question. Nous devons expliquer la formation du prix, et, avec des éléments objectifs, éclairer la perception des consommateurs pour qu'elle soit juste.
Je souhaite aussi, peut-être dans un autre cadre, étendre la réflexion sur l'accessibilité au domaine des fruits et légumes transformés. Les produits frais, les produits conditionnés et les produits transformés ne sont pas concurrents, mais au contraire complémentaires, dans le cadre d'une stratégie globale en faveur de la politique nutritionnelle.
Je voudrais maintenant aborder avec un certain nombre d'autres sujets particulièrement important.
[ 2- Réforme de l'OCM ]
A partir du 1er janvier prochain, une nouvelle organisation commune de marché, profondément rénovée, entre en vigueur. Eléments essentiels, les programmes opérationnels, qui doivent être de véritables projets d'entreprise, sont maintenus au coeur du nouveau dispositif.
La nouvelle OCM prévoit pour la prévention et la gestion des crises des moyens financiers supplémentaires ainsi que de nouveaux moyens juridiques, notamment au regard du droit de la concurrence. C'était une demande forte de la France, portée depuis longtemps. Nous avons maintenant une forte obligation de résultats dans le domaine de la mise en oeuvre de ces nouveaux dispositifs.
Au-delà, c'est un pas en avant important vers une nouvelle philosophie de la politique agricole commune. A cet égard, le débat qui va s'ouvrir sur le « bilan de santé de la PAC » devra s'inspirer, c'est mon ambition, de cette nouvelle approche dans la gestion des risques, face à la forte volatilité des prix.
C'est dans le cadre des Assises que ce débat va être ouvert dès la fin du mois. Votre secteur y sera associé. Il sera conclu, je vous le rappelle, sous présidence française de l'Union européenne, au second semestre 2008.
Dans l'immédiat, concernant les modalités d'intégration des fruits et légumes dans le régime de paiement unique : après une concertation approfondie avec les différentes familles professionnelles, j'ai décidé de limiter en 2008 l'admissibilité aux droits à paiement unique (DPU) aux productions entrant en rotation avec des grandes cultures déjà dotées. Il s'agissait pour ces cas-là de ne pas compliquer les contraintes agronomiques par une « couche » de contraintes administratives. Pour ce qui est de la dotation en DPU, le choix a été fait de ne pas anticiper un prélèvement supplémentaire sur tous les agriculteurs : ce débat devra être traité dans le cadre plus global du « bilan de santé » de la PAC, en 2008.
[ 3- Gouvernance filière - Interprofession ]
Le cadre communautaire rénové nous conduit à nous adapter sur l'organisation de vos filières, pour profiter des nouvelles possibilités offertes aux associations d'organisations de producteurs.
Deux choses me paraissent claires : nous devons continuer à travailler d'une part à un renforcement de l'organisation économique et d'autre part à un développement de la concertation interprofessionnelle.
Par ailleurs, je pense que nous devons faire évoluer notre schéma d'organisation afin de le mettre en phase avec le cadre communautaire et afin de renforcer la cohérence dans la gestion par produit ou par groupes de produits à l'échelle nationale. Les sections nationales se sont mises en place pour répondre à ce besoin de gestion plus efficace : il faut certainement confirmer ce schéma, dans le domaine de la politique commerciale comme de la gestion des risques. Une mission d'expertise confiée au Conseil Général de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Espaces Ruraux doit me rendre ses conclusions dans quelques jours. Je compte très rapidement y travailler avec le Président de l'interprofession (INTERFEL - Gilles VIGNAUD) et l'ensemble de ses membres.
[ 4- Renforcer la compétitivité des entreprises légumières ]
Madame la Présidente, vous avez insisté sur tous les facteurs qui conditionnent la compétitivité de vos entreprises. Sans entrer dans le détail, je souhaite toutefois vous apporter ici quelques éléments.
Traitement phytosanitaire
Vous le savez, la mise en oeuvre de pratiques agricoles respectueuses de l'environnement est l'une des priorités retenues par le Grenelle de l'environnement. Cela passe, notamment, par la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires. Les débats du Grenelle ont montré l'adhésion de votre profession pour répondre à ces enjeux de société, mais ils en ont également pointé les difficultés de mise en oeuvre. Je suis conscient de ces difficultés.
Ce matin même, j'ai présidé la première réunion du groupe de travail issu du Grenelle consacré à la réduction de l'emploi des traitements phytosanitaires.
Cette réduction ne se fera pas en remettant en cause la viabilité des exploitations.
Je sais que votre secteur est particulièrement concerné par la disparition de molécules de traitement. Soyez assurés que la plus grande attention sera portée à votre secteur pour l'élaboration de la liste et du calendrier des substances actives les plus dangereuses à retirer du marché en priorité.
L'Etat continuera d'apporter son soutien à l'expérimentation pour la mise au point rapide, dans le cas de retraits incontournables, d'alternatives techniquement efficaces et économiquement viables.
Ces travaux doivent se conduire avec votre pleine adhésion : votre Fédération doit être force de proposition pour atteindre l'objectif du Grenelle, notamment dans le domaine de la modification des systèmes de production. Le GIS PIC-Lég me montre que vous êtes bien dans cet état d'esprit.
Mesures agro-environnementales
A l'occasion de la nouvelle programmation de développement rural 2007-2013, les mesures agro-environnementales portant sur les légumes ont été très significativement élargies et renforcées.
Je souhaite que ces mesures puissent être rapidement expérimentées dans trois régions françaises : le Nord, la Normandie et la Loire-Atlantique.
Main d'oeuvre
Vous avez beaucoup évoqué la question des charges salariales. Nous devons réunir des éléments d'expertise précis sur cette question : l'observatoire des distorsions de concurrence créé par la loi d'orientation agricole est notamment chargé de cette mission. J'ai également demandé à l'INRA de réaliser une étude sur les stratégies de gestion de main d'oeuvre dans le secteur des fruits et légumes.
Diverses dispositions ont déjà été prises : allongement de la période d'allègement de charges sociales pour l'emploi de travailleurs occasionnels, allègement accru des charges sociales pour toute transformation d'emplois occasionnels longs en emplois permanents sous contrat à durée indéterminée, encouragements à la constitution et au développement des groupements d'employeurs, et, bien sûr, depuis le 1er octobre dernier, réduction des cotisations sociales pour les heures supplémentaires et complémentaires effectuées par les salariés.
Je sais que votre fédération est très soucieuse de promouvoir une gestion des emplois et des ressources humaines qui assoie la compétitivité des entreprises sur la compétence des salariés ; je suis également très attentif à ce que vous faites en matière d'insertion par l'activité économique.
Energie
La hausse du coût de l'énergie pénalise très fortement les exploitations légumières.
Comme l'a annoncé le Président de la République à l'issue du Grenelle de l'environnement, j'ai engagé un grand plan sur la performance énergétique des exploitations agricoles. Le comité de pilotage, qui laisse une large place à la profession, et le calendrier de travail sont en cours de constitution. Bien évidement, vous serez largement associés à ses travaux. Il s'agit de réfléchir ensemble aux conséquences de la nouvelle donne énergétique. Le défi est de taille, mais je sais, madame la Présidente, que vous en mesurez particulièrement l'importance.
Dans le court terme, je suis tout à fait ouvert à ce que les paramètres du plan « serres-énergie », qui associe un dispositif national géré par VINIFLHOR et un dispositif cofinancé dans le cadre du PDRH (plan de développement rural hexagonal), soient revues, afin d'atteindre une meilleure efficacité.
Et dans le très court terme, je suis prêt à soutenir des opérations-pilotes, dans quelques régions ciblées, afin de tester la possibilité pour des entreprises de réaliser une véritable « conversion énergétique ».
Face à la flambée des prix du gazole, j'ai demandé, et le Gouvernement a validé, le principe de la reconduction en 2007 des mesures de défiscalisation des carburants fossiles appliquées en 2005 et 2006. Cela sera adopté dans le cadre de la Loi de Finances Rectificative 2007.
Enfin, je sais que votre filière est très attachée à l'amélioration d'un dispositif fiscal particulier : la « dotation pour aléas », qui permet de mettre de côté une part du revenu quand la situation est bonne, en perspective des périodes plus difficiles. Je considère que vous êtes en quelque sorte pionniers dans ce vaste chantier des dispositifs assurantiels, que nous devons, je le pense, profondément revoir. Nous devons évoluer vers un ensemble d'outils, à la fois nationaux et communautaires, à la fois individuels et collectifs, beaucoup plus efficaces que ce dont nous disposons à l'heure actuelle. Je soutiens vos demandes d'évolution de la dotation pour aléas (DPA), et j'ai engagé les discussions avec mes collègues ministres de l'Economie et du Budget, dans le cadre d'une réflexion globale sur la gestion des risques et les dispositifs assurantiels dont j'ai été chargé par le Président de la République.
4- Conclusion
Je vous l'ai déjà dit : la politique de l'alimentation doit être au coeur des politiques conduites par mon ministère. Vos produits ont un rôle essentiel à jouer dans cette politique, par leur importance nutritionnelle, par le plaisir gustatif et gastronomique qu'ils apportent.
Je l'ai dit en commençant mon propos : je vois en vous des femmes et des hommes d'entreprise, énergiques, prêts à relever les défis. Je suis sûr que vous saurez aborder les tournants qui s'annoncent.
Je serai à vos côtés.
Source http://fnpleg.fnsea.fr, le 26 novembre 2007
Monsieur le Secrétaire Général (Jacques ROUCHAUSSE),
Monsieur le Président de l'interprofession des fruits et légumes
INTERFEL (Gilles VIGNAUD),
Monsieur le Maire de Reims,
Mesdames, messieurs,
[ Introduction ]
Je vous remercie de m'accueillir à votre 51ème congrès et me donner ainsi l'occasion de venir à la rencontre de tous les producteurs de légumes de France.
Permettez-moi tout d'abord de vous féliciter, Madame la Présidente, pour les services rendus à la profession par votre organisation. Votre filière est reconnue comme exigeante et dynamique, constituée de professionnels réalistes et responsables.
J'ai mesuré lors de mes différentes rencontres avec des producteurs de légumes (je pense notamment à ma visite dans les exploitations maraîchères de la région de Nantes, en juillet dernier) que les gens que je rencontrais étaient des femmes et des hommes qui sont de vrais patrons de PME, très soucieux des contraintes à gérer et des charges à assumer, conscients aussi des véritables potentialités du secteur, et animés d'une véritable volonté de progresser, de trouver des solutions.
Vos filières fournissent nos sociétés en produits alimentaires à haute valeur ajoutée du point de vue nutritionnel et, plus généralement, de la santé. Cette haute valeur ajoutée nutritionnelle doit être reconnue et mise en avant. De ce point de vue, votre « village des légumes dans la ville », que j'irai visiter tout à l'heure, est une initiative particulièrement heureuse.
Par leurs qualités, vos productions se trouvent au coeur de ma vision de l'agriculture : ce n'est pas une agriculture aseptisée, mais une agriculture qui produit de la qualité alimentaire, avec des produits qui ont du goût, une typicité, une identité forte, une agriculture qui répond au défi alimentaire tant du point de vue quantitatif que du point de vue qualitatif.
Je salue donc, Madame la présidente, le sujet que vous avez choisi pour votre congrès : « valoriser l'origine France ». Il montre bien que les légumes ne sont pas des produits agricoles « neutres », standards, mais qu'ils ont au contraire une identité, qu'il faut certainement mieux valoriser.
[ Annonce du plan ]
Je partage votre approche, Madame la Présidente : incontestablement, la bonne valorisation de vos productions doit constituer un objectif majeur pour votre filière. Je commencerai donc par ce sujet.
J'aborderai ensuite la question du cadre communautaire, récemment réformé en ce qui concerne vos productions.
Je vous parlerai ensuite de l'organisation de vos filières, élément-clé de la réussite du secteur.
Enfin, j'aborderai différents sujets qui sont autant de facteurs de compétitivité pour vos entreprises.
[ 1- Mieux valoriser les productions françaises ]
Tous les consommateurs français et européens doivent être informés et assurés qu'en achetant des légumes français, ils seront sûrs d'acheter des légumes sains, riches en goût, qui correspondent à leurs attentes.
La performance économique de votre filière passe par la poursuite d'un travail de segmentation stratégique de l'offre, pour s'adapter à une demande toujours plus variée dans ses attentes, et aussi toujours plus exigeante.
J'ai été très intéressé par l'initiative portée par votre secrétaire général, Jacques ROUCHAUSSE, qui a su, avec les maraîchers de la Marne, implanter une démarche innovante de « tradition maraîchère », basée sur la proximité, la saisonnalité et la fraîcheur de vos légumes. D'autres démarches du même type sont possibles, au travers de tous les circuits de commercialisation, comme par exemple les filières de qualité « mûr à points ».
Vous avez présenté tout à l'heure, chère Marion GUILLOU, le Groupement d'Intérêt Scientifique « PIC Lég » : cette initiative témoigne d'une volonté forte, que je soutiens totalement. Mais là aussi, l'objectif ultime doit bien être d'aboutir à une valorisation commerciale de la « production légumière intégrée », qui doit trouver sa place aux côtés de la production biologique et de la production raisonnée.
Enfin, j'encourage la filière fruits et légumes à davantage tirer partie des signes de qualité : ces outils répondent pleinement au besoin d'une segmentation du marché claire et lisible pour le consommateur, en particulier sur l'offre de haut de gamme, et permettent de bien valoriser des produits et des territoires.
Mais au-delà - ou plutôt en-deçà - de la segmentation se pose la question de l'accès-même des consommateurs aux légumes. C'est la fameuse notion « d'accessibilité » : il faut agir pour lever tout ce qui constitue des freins à la consommation.
C'est un sujet qui me tient à coeur, sur lequel je souhaite m'investir.
J'ai ouvert, avant-hier mardi, la journée organisée par l'INRA pour présenter son expertise scientifique collective sur « les déterminants de la consommation des fruits et légumes ». Au-delà de l'insuffisance du niveau moyen de la consommation en France, il existe des disparités de consommation de fruits et légumes en fonction de l'âge et de la catégorie socio-économique des ménages, ce qui constitue à mes yeux une véritable « injustice alimentaire ».
Aussi, je souhaite, en tant que ministre chargé de l'agriculture et de l'alimentation, travailler sur le sujet en étroite collaboration avec l'ensemble de la filière. Je sais que c'est un aspect des choses sur lequel vous avez déjà beaucoup travaillé, sous la houlette de M. Jean SALES, votre Président d'honneur, dans le cadre d'un comité « accessibilité » au sein d'INTERFEL.
Dès la semaine prochaine, je rencontrerai ces responsables qui travaillent déjà sur la question, afin de débattre librement des propositions que je souhaite faire à la filière :
- la mise en place d'une politique systématique de promotion, axée sur la saisonnalité et la proximité ;
- le développement des distributeurs de fruits et légumes frais et conditionnés dans tous les lieux de vie (écoles, entreprises, lieux de passage...)
- la mise en place de programme de distribution gratuite dans les écoles, au moment de la pause matinale ou du goûter. Mon collègue allemand m'a montré une telle expérience lundi dernier, à Berlin. Il y a là un enjeu important : il s'agit de redonner le goût des fruits et légumes aux enfants.
Bien évidemment, il s'agit là de propositions qui peuvent être complétées.
Il y a un aspect de l'accessibilité qui est particulièrement épineux : c'est la question du prix des produits. D'un côté, il y a les producteurs, dont je vois parfaitement qu'ils ont besoin de prix plus équitables, plus rémunérateurs, et, de l'autre côté, il y a le consommateur, qui a le sentiment que les légumes et les fruits frais sont trop chers. Je compte sur vous pour qu'ensemble, au sein du groupe de travail, nous cherchions à y voir plus clair sur cette question. Nous devons expliquer la formation du prix, et, avec des éléments objectifs, éclairer la perception des consommateurs pour qu'elle soit juste.
Je souhaite aussi, peut-être dans un autre cadre, étendre la réflexion sur l'accessibilité au domaine des fruits et légumes transformés. Les produits frais, les produits conditionnés et les produits transformés ne sont pas concurrents, mais au contraire complémentaires, dans le cadre d'une stratégie globale en faveur de la politique nutritionnelle.
Je voudrais maintenant aborder avec un certain nombre d'autres sujets particulièrement important.
[ 2- Réforme de l'OCM ]
A partir du 1er janvier prochain, une nouvelle organisation commune de marché, profondément rénovée, entre en vigueur. Eléments essentiels, les programmes opérationnels, qui doivent être de véritables projets d'entreprise, sont maintenus au coeur du nouveau dispositif.
La nouvelle OCM prévoit pour la prévention et la gestion des crises des moyens financiers supplémentaires ainsi que de nouveaux moyens juridiques, notamment au regard du droit de la concurrence. C'était une demande forte de la France, portée depuis longtemps. Nous avons maintenant une forte obligation de résultats dans le domaine de la mise en oeuvre de ces nouveaux dispositifs.
Au-delà, c'est un pas en avant important vers une nouvelle philosophie de la politique agricole commune. A cet égard, le débat qui va s'ouvrir sur le « bilan de santé de la PAC » devra s'inspirer, c'est mon ambition, de cette nouvelle approche dans la gestion des risques, face à la forte volatilité des prix.
C'est dans le cadre des Assises que ce débat va être ouvert dès la fin du mois. Votre secteur y sera associé. Il sera conclu, je vous le rappelle, sous présidence française de l'Union européenne, au second semestre 2008.
Dans l'immédiat, concernant les modalités d'intégration des fruits et légumes dans le régime de paiement unique : après une concertation approfondie avec les différentes familles professionnelles, j'ai décidé de limiter en 2008 l'admissibilité aux droits à paiement unique (DPU) aux productions entrant en rotation avec des grandes cultures déjà dotées. Il s'agissait pour ces cas-là de ne pas compliquer les contraintes agronomiques par une « couche » de contraintes administratives. Pour ce qui est de la dotation en DPU, le choix a été fait de ne pas anticiper un prélèvement supplémentaire sur tous les agriculteurs : ce débat devra être traité dans le cadre plus global du « bilan de santé » de la PAC, en 2008.
[ 3- Gouvernance filière - Interprofession ]
Le cadre communautaire rénové nous conduit à nous adapter sur l'organisation de vos filières, pour profiter des nouvelles possibilités offertes aux associations d'organisations de producteurs.
Deux choses me paraissent claires : nous devons continuer à travailler d'une part à un renforcement de l'organisation économique et d'autre part à un développement de la concertation interprofessionnelle.
Par ailleurs, je pense que nous devons faire évoluer notre schéma d'organisation afin de le mettre en phase avec le cadre communautaire et afin de renforcer la cohérence dans la gestion par produit ou par groupes de produits à l'échelle nationale. Les sections nationales se sont mises en place pour répondre à ce besoin de gestion plus efficace : il faut certainement confirmer ce schéma, dans le domaine de la politique commerciale comme de la gestion des risques. Une mission d'expertise confiée au Conseil Général de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Espaces Ruraux doit me rendre ses conclusions dans quelques jours. Je compte très rapidement y travailler avec le Président de l'interprofession (INTERFEL - Gilles VIGNAUD) et l'ensemble de ses membres.
[ 4- Renforcer la compétitivité des entreprises légumières ]
Madame la Présidente, vous avez insisté sur tous les facteurs qui conditionnent la compétitivité de vos entreprises. Sans entrer dans le détail, je souhaite toutefois vous apporter ici quelques éléments.
Traitement phytosanitaire
Vous le savez, la mise en oeuvre de pratiques agricoles respectueuses de l'environnement est l'une des priorités retenues par le Grenelle de l'environnement. Cela passe, notamment, par la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires. Les débats du Grenelle ont montré l'adhésion de votre profession pour répondre à ces enjeux de société, mais ils en ont également pointé les difficultés de mise en oeuvre. Je suis conscient de ces difficultés.
Ce matin même, j'ai présidé la première réunion du groupe de travail issu du Grenelle consacré à la réduction de l'emploi des traitements phytosanitaires.
Cette réduction ne se fera pas en remettant en cause la viabilité des exploitations.
Je sais que votre secteur est particulièrement concerné par la disparition de molécules de traitement. Soyez assurés que la plus grande attention sera portée à votre secteur pour l'élaboration de la liste et du calendrier des substances actives les plus dangereuses à retirer du marché en priorité.
L'Etat continuera d'apporter son soutien à l'expérimentation pour la mise au point rapide, dans le cas de retraits incontournables, d'alternatives techniquement efficaces et économiquement viables.
Ces travaux doivent se conduire avec votre pleine adhésion : votre Fédération doit être force de proposition pour atteindre l'objectif du Grenelle, notamment dans le domaine de la modification des systèmes de production. Le GIS PIC-Lég me montre que vous êtes bien dans cet état d'esprit.
Mesures agro-environnementales
A l'occasion de la nouvelle programmation de développement rural 2007-2013, les mesures agro-environnementales portant sur les légumes ont été très significativement élargies et renforcées.
Je souhaite que ces mesures puissent être rapidement expérimentées dans trois régions françaises : le Nord, la Normandie et la Loire-Atlantique.
Main d'oeuvre
Vous avez beaucoup évoqué la question des charges salariales. Nous devons réunir des éléments d'expertise précis sur cette question : l'observatoire des distorsions de concurrence créé par la loi d'orientation agricole est notamment chargé de cette mission. J'ai également demandé à l'INRA de réaliser une étude sur les stratégies de gestion de main d'oeuvre dans le secteur des fruits et légumes.
Diverses dispositions ont déjà été prises : allongement de la période d'allègement de charges sociales pour l'emploi de travailleurs occasionnels, allègement accru des charges sociales pour toute transformation d'emplois occasionnels longs en emplois permanents sous contrat à durée indéterminée, encouragements à la constitution et au développement des groupements d'employeurs, et, bien sûr, depuis le 1er octobre dernier, réduction des cotisations sociales pour les heures supplémentaires et complémentaires effectuées par les salariés.
Je sais que votre fédération est très soucieuse de promouvoir une gestion des emplois et des ressources humaines qui assoie la compétitivité des entreprises sur la compétence des salariés ; je suis également très attentif à ce que vous faites en matière d'insertion par l'activité économique.
Energie
La hausse du coût de l'énergie pénalise très fortement les exploitations légumières.
Comme l'a annoncé le Président de la République à l'issue du Grenelle de l'environnement, j'ai engagé un grand plan sur la performance énergétique des exploitations agricoles. Le comité de pilotage, qui laisse une large place à la profession, et le calendrier de travail sont en cours de constitution. Bien évidement, vous serez largement associés à ses travaux. Il s'agit de réfléchir ensemble aux conséquences de la nouvelle donne énergétique. Le défi est de taille, mais je sais, madame la Présidente, que vous en mesurez particulièrement l'importance.
Dans le court terme, je suis tout à fait ouvert à ce que les paramètres du plan « serres-énergie », qui associe un dispositif national géré par VINIFLHOR et un dispositif cofinancé dans le cadre du PDRH (plan de développement rural hexagonal), soient revues, afin d'atteindre une meilleure efficacité.
Et dans le très court terme, je suis prêt à soutenir des opérations-pilotes, dans quelques régions ciblées, afin de tester la possibilité pour des entreprises de réaliser une véritable « conversion énergétique ».
Face à la flambée des prix du gazole, j'ai demandé, et le Gouvernement a validé, le principe de la reconduction en 2007 des mesures de défiscalisation des carburants fossiles appliquées en 2005 et 2006. Cela sera adopté dans le cadre de la Loi de Finances Rectificative 2007.
Enfin, je sais que votre filière est très attachée à l'amélioration d'un dispositif fiscal particulier : la « dotation pour aléas », qui permet de mettre de côté une part du revenu quand la situation est bonne, en perspective des périodes plus difficiles. Je considère que vous êtes en quelque sorte pionniers dans ce vaste chantier des dispositifs assurantiels, que nous devons, je le pense, profondément revoir. Nous devons évoluer vers un ensemble d'outils, à la fois nationaux et communautaires, à la fois individuels et collectifs, beaucoup plus efficaces que ce dont nous disposons à l'heure actuelle. Je soutiens vos demandes d'évolution de la dotation pour aléas (DPA), et j'ai engagé les discussions avec mes collègues ministres de l'Economie et du Budget, dans le cadre d'une réflexion globale sur la gestion des risques et les dispositifs assurantiels dont j'ai été chargé par le Président de la République.
4- Conclusion
Je vous l'ai déjà dit : la politique de l'alimentation doit être au coeur des politiques conduites par mon ministère. Vos produits ont un rôle essentiel à jouer dans cette politique, par leur importance nutritionnelle, par le plaisir gustatif et gastronomique qu'ils apportent.
Je l'ai dit en commençant mon propos : je vois en vous des femmes et des hommes d'entreprise, énergiques, prêts à relever les défis. Je suis sûr que vous saurez aborder les tournants qui s'annoncent.
Je serai à vos côtés.
Source http://fnpleg.fnsea.fr, le 26 novembre 2007