Déclaration de M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat aux sports, sur les orientations du sport de haut niveau, à Paris le 29 novembre 2007.

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Circonstance : Ouverture de la séance de la Commission nationale du sport de haut niveau

Texte intégral

Monsieur le secrétaire général (CNOSF),
Madame la directrice (des sport),
Mesdames, Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs les membres de la CNSHN,
Je suis très heureux de vous accueillir aujourd'hui pour cette Commission Nationale du Sport Haut Niveau. Je suis d'autant plus heureux que l'ensemble des acteurs qui interviennent dans la mise en oeuvre de la politique nationale du sport de haut niveau sont réunis autour de cette table : mouvement sportif, parlementaires, élus des collectivités territoriales, sportifs de haut niveau et, bien sûr, les services de l'Etat. Je vais donc profiter de cette occasion qui m'est donnée pour vous exposer en quelques minutes mon projet et les pistes de réflexion que je souhaite ouvrir en matière de sport de haut niveau.
Le sport de haut niveau focalise en effet toutes les attentions en cette année olympique : tout le monde se mobilise et s'agite pour essayer d'atteindre les objectifs fixés par mon prédécesseur. Les uns disent qu'il faut établir des priorités : sans doute. Les autres qu'il faut donner plus de moyens : peut-être. Les choses ne se jouent plus cette année !
Ma position de Secrétaire d'Etat chargé des Sports m'impose de voir plus loin que l'extraordinaire perspective des JO de Pékin du mois août prochain. Ma mission m'impose d'être beaucoup plus ambitieux. Ma mission m'impose d'anticiper. Le plus grand de nos stratèges, Napoléon, disait : « Se faire battre est excusable, se faire surprendre est impardonnable ! ». Je pense qu'il est nécessaire de préparer dès à présent les Jeux de Vancouver de 2010, de Londres en 2012, de Sotchi en 2014 et les suivants. Je veux que la France se donne les moyens de revenir, à terme, parmi les cinq premières Nations sportives sur la scène internationale.
Et la Commission Nationale du Sport Haut Niveau doit être l'un des premiers lieux où se discutent les orientations futures du sport de haut niveau français. Il ne faut pas hésiter à reconnaître que, si notre système est bon, il peut encore être très largement amélioré ! Une réflexion globale de restructuration du sport de haut niveau français doit être entamée dès aujourd'hui.
Pour cela, la première question que je vous poserai est la suivante : qu'est-ce que le sport de haut niveau en France ? A bien y réfléchir, la réponse n'est pas si évidente que ça...
Une politique ambitieuse du sport de haut niveau, c'est une véritable stratégie globale définissant des axes, des priorités. Or, aujourd'hui, les critères pour qu'une discipline soit reconnue de « haut niveau » sont avant tout administratifs. Je souhaite pour ma part que nous apportions une réponse stratégique, une réponse politique à cette interrogation. Nous devons nous poser les bonnes questions sans tabous. Par exemple, à l'image des Nations concurrentes, doit-on favoriser certaines disciplines par rapport à d'autres ? Si oui, quels critères doivent être retenus ? Si non, comment améliorer le financement de toutes les fédérations disposant d'une filière haut niveau pour qu'elles aient les moyens de leurs ambitions ?
La question de la définition du sport de haut niveau pose aussi irrémédiablement celle du rapport au professionnalisme. Est-ce que tous les sportifs de l'Elite doivent être professionnels comme certains essaient de le démontrer ? Quel est la place des fédérations dans le sport d'excellence ? Pour ma part, je n'ai rien contre le sport professionnel. Au contraire, je souhaite travailler à la création des meilleures conditions possibles pour un développement du sport professionnel respectueux des sportifs. En France, selon moi, le sport professionnel ne souffre pas d'être trop professionnel, il souffre de ne l'être pas assez : je souhaite agir pour que le sport professionnel de notre pays gagne en compétitivité, en compétences, en respectabilité. Plus particulièrement, je souhaite que l'on s'attaque à l'amélioration de la qualité de la formation (structures, suivi scolaire, sportif et médical) et à la normalisation des relations entre équipes nationales et clubs employant les internationaux, en trouvant un point d'équilibre raisonnable entre les intérêts de l'équipe nationale, du sportif et du club. Je sais à quel point, compte tenu de votre rôle sur ces sujets, cela vous tient aussi à coeur.
Mais, ceci étant dit, soyez certain que je serai un fervent défenseur du milieu fédéral. N'oublions pas que c'est aux fédérations que l'Etat octroie sa délégation et il n'y a pas de raison pour que cela change ! Je veux des fédérations puissantes et responsables.
Après ces considérations d'ordre général, revenons aux dossiers qui préoccupent directement la Commission Nationale du Sport de Haut Niveau.
J'insisterai, dans un premier temps, sur la réécriture des filières d'accès au sport de haut niveau. Et plus que « réécriture », je parlerai plutôt de « redéfinition », voire de « refondation ». Ce dispositif est le symbole de la formation des sportifs de l'élite française. Ces filières étant renouvelées à chaque Olympiade, nous allons devoir travailler à l'élaboration de la nouvelle filière 2009-2012 qui devra nous apporter les meilleurs sportifs français pour les JO de Londres et les suivants. Un premier bilan de ces filières va être fait dans une quinzaine de jours lors d'une réunion à l'INSEP autour des représentants du CNOSF, des DTN, de la POP, des directeurs régionaux et des directeurs d'établissement. Une longue phase de concertation s'en suivra entre le ministère, ses services déconcentrés et le mouvement sportif.
Mais d'ores et déjà, nous savons que le haut niveau français doit faire en sorte de construire l'avenir, en ayant, dans la mesure du possible, un temps d'avance sur ses adversaires. Nous allons devoir moderniser ce dispositif en rediscutant la condition de faisabilité concrète du double-projet, en replaçant le « haut niveau » au coeur de la filière, en réexaminant la place des clubs sportifs dans le dispositif, en réfléchissant à l'âge d'entrée des sportifs au sein de cette filière, etc...
Bref, l'enjeu est grand pour les générations de champions à venir et nous devons nous montrer à la hauteur de nos grandes ambitions.
Le deuxième sujet, quasiment indissociable du premier, est celui du rôle des établissements nationaux, avec au premier rang desquels l'INSEP. Nous devons valoriser ces établissements. Chacun dans son registre, ils doivent se positionner en tant que tête de réseau, en tant que site pilote de la politique menée par le ministère. J'attacherai une attention toute particulière à l'examen de l'évolution des projets politiques de ces établissements. Ils doivent avoir un rôle décisif dans la mise en oeuvre de la politique de formation, de la stratégie du haut niveau, dans l'organisation de la recherche en sciences du sport en France et j'en passe. En clair, les établissements nationaux ne doivent pas être de simples complexes hôteliers pour les sportifs de haut niveau, mais doivent se situer au coeur de la politique du sport de haut niveau français.
Le troisième gros dossier que nous aurons à traiter sera celui du statut du sportif de haut niveau. La grande majorité de nos sportifs de l'élite ne sont pas des sportifs professionnels. Cela veut dire qu'ils ne disposent pas de contrat de travail en rapport avec leur pratique sportive. Or le sport de haut niveau est de plus en plus exigeant en termes de temps d'investissement (un, voire deux entraînements par jour ; de nombreuses compétitions à l'extérieur, voire à l'étranger, etc...).
Pour aider le sport de haut niveau à se développer, il faut avant tout aider les sportifs de haut niveau à remplir leur mission première : rapporter des médailles à la France. Nous devons donc travailler à définir un véritable statut du sportif de haut niveau. Cela veut dire quoi ? Nous devons définir des règles claires et communes en termes de prestations sociales - assurance maladie, assurance vieillesse, voire mutuelle santé -, de formation - le fameux double projet - et de reconversion - où nous devons aller plus loin que les simples Conventions d'Insertion Professionnelle qui existent actuellement. Pour figurer parmi les Nations majeures du sport mondial, nous devons offrir à nos sportifs de l'élite les meilleures conditions d'exercice de leurs talents.
Enfin, je tiens à terminer mon intervention en disant quelques mots sur le sport de haut niveau pour les personnes handicapées. Que ce soit le handisport ou le sport adapté. Tout d'abord, en réaffirmant que nous avons tenu, Roselyne BACHELOT et moi-même, à ce que les primes de médaille pour les sportifs participant aux Jeux Paralympiques de Pékin 2008 soit à la même hauteur que celles des « valides » des Jeux Olympiques. Je tiens aussi à souligner le rôle exemplaire du mouvement sportif en ce qui concerne ses relations avec le sport des personnes handicapées. La multiplication des partenariats entre les fédérations sportives handisport, sport adapté et valides constitue l'une des voies au développement de l'excellence du handisport et du sport adapté.
Nous devons continuer nos efforts dans ce domaine car la pratique du sport par les personnes handicapées reste encore très inférieure à celle des personnes valides. Et cela se répercute forcément sur le haut niveau. Ainsi, notre volonté d'améliorer l'accessibilité aux équipements sportifs, financée dans le cadre du CNDS, doit aussi prendre en compte la recherche de la performance sportive.
Il est temps pour moi, maintenant, d'ouvrir cette séance de la Commission Nationale du Sport de Haut Niveau. Je souhaite que nos échanges soient riches et constructifs, guidés par une cause commune qui nous rassemble tous ici : celle du sport, des sportives et des sportifs de haut niveau français...
Je vous remercie.
Source http://www.jeunesse-sports.gouv.fr, le 5 décembre 2007