Interview de M. Claude Goasguen, porte-parole de Démocratie libérale, à RMC le 1er février 2001, sur le résultat des élections aux chambres d'agriculture, la violence et l'insécurité et la campagne pour l'élection municipale à Paris.

Prononcé le 1er février 2001

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

P. Lapousterle - Juste un mot des résultats de cette nuit, puisqu'il s'agissait quand même du monde agricole qui a voté par trois millions d'électeurs. La Confédération paysanne de José Bové, qui pourtant elle attendait un score très important, a pris 5 points certes, mais la FNSEA de Luc Guyau et la FDSEA ont finalement largement gagné les élections. Surprise.
- "Forte participation, mauvaise surprise pour M. Glavany, qui avait mis le paquet quand même pour mettre en difficulté la FNSEA, qui avait fait les choses en grand, qui avait convoqué tout le monde hier soir pour annoncer la défaite historique de la FNSEA.
M. Glavany est resté tristement dans ses dorures. Ce matin c'est une défaite du Gouvernement, en même temps qu'une défaite de M. Bové. Je m'en félicite car la FNSEA représente la sagesse, l'évolution, l'évolution du monde agricole."
Je me souviens quand même d'un Salon de l'agriculture dans lequel le Président de la République s'était déplacé pour saluer M. Bové.
- "Oui, mais on peut saluer M. Bové et ne pas être d'accord avec ses idées. Vous savez la démocratie n'empêche pas qu'on se sert la main en pensant des choses différentes, c'est même souhaitable."
La sécurité, c'est un domaine que vous suivez de manière particulière. Les chiffres vont être publiés aujourd'hui, on sait que les tendances sont mauvaises, notamment pour les vols à main armée, vols avec violence et délinquance financière. Le Gouvernement a présenté un plan appelé " plan de sécurité quotidienne ". Est-ce qu'il vous paraît à la hauteur des enjeux ?
- "Les chiffres ne sont pas mauvais, ils seront très mauvais. Ils seront d'autant plus mauvais qu'ils sont en grande partie manipulés puisque désormais, on ne considère plus comme admissibles dans les chiffres les incivilités, c'est-à-dire la voiture qui brûle, les non-plaintes - d'ailleurs les gens ne se déplacent même plus dans les commissariats pour porter plainte tant les affaires sont classées. Donc, même avec ces manipulations les chiffres vont être très mauvais. En vérité, le Gouvernement socialiste a annoncé il y a 48 heures un plan, en prévention et dans un but médiatique. Ce plan ne prend absolument pas la dimension réelle du problème de la violence. Je crois que les socialistes ne comprennent pas qu'il s'agit véritablement désormais d'un fléau social d'une nature tout à fait différente, que c'est une progression quantitative et qualitative. En réalité, qu'est-ce qu'on nous propose ? Des mesures qui sont intéressantes, on crée"
Des postes.
- "On crée des postes, mais on crée des postes qui suffisent à peine à rattraper les départs à la retraite. M. Jospin a oublié de raconter comment s'est passé le vote budgétaire du ministre de l'Intérieur où on avait sanctionné M. Chevènement qui était indocile. En réalité, le ministère de l'Intérieur a été saqué dans la discussion budgétaire et aujourd'hui, on essaye de rattraper, mais on rattrape quoi ? On rattrape en réalité le nombre de 95, à peine. Est-ce que vous croyez que cela correspond à la montée de la violence ?"
C'est un peu comme la Corse, c'est-à-dire que c'est un problème sur lequel tous les Gouvernements se sont cassés les dents. Personne n'a de réussite à son actif dans ce domaine.
- "Non, c'est faux."
Est-ce que quelqu'un peut
- "Oui, la droite et je le dirais sans fausse modestie car c'est probablement le seul endroit où la droite dispose d'une crédibilité supérieure à la gauche. En réalité, la gauche ne comprend pas ni structurellement ni culturellement l'éruption de la violence sociale. Structurellement, parce qu'elle ne sait pas modifier les services publics dont elle est dépendante en réalité. Les syndicats de police, ceux de l'Education Nationale, d'autres, maintiennent un certain conservatisme dans l'approche des problèmes publics. Et puis culturellement, parce qu'ils ne saisissent pas la notion de sanction associée à la notion de prévention. La sanction est civique. Je voudrais dire très fortement qu'il faut prendre le discours du Président de la République qui parle de la prévention et de la sanction dans son aspect sanction. Quand on sanctionne, on ne va pas à l'encontre des intérêts de la société. La sanction est civique, voilà ce que les socialistes ne comprennent pas."
Qu'est-ce que vous pensez du refus répété du Premier ministre d'accepter le principe des polices municipales ? C'est un vrai problème.
- " Comment peut-on imaginer au début du XXIème siècle que les maires et les élus locaux ne soient pas associés aux menaces permanentes qui pèsent sur l'ordre public ? Je ne parle même pas de Paris"
La police municipale ?
- "Elle existe la police municipale. Aujourd'hui, le problème n'est pas seulement la police municipale. Le problème c'est de mettre le maire dans le dispositif de police. Je vous rappelle que la tradition française - ce que M. Jospin visiblement ne sait pas -,c'est la police municipale. C'est le gouvernement de Vichy qui a créé la police nationale. Par conséquent, la France a toujours eu cette tradition de proximité sur les problèmes de délinquance et de violence ! On veut rester sur un schéma jacobin de la police. Je n'ai rien contre l'idéologie jacobine, mais on voit bien qu'elle est obsolète. Le maire de Chanteloup-les-Vignes prévient le commissariat de police, tout cela remonte au ministère de l'Intérieur, trois jours plus tard il y a des agressions à 30 kilomètres de Chanteloup-les-Vignes et les CRS protègent M. Vaillant à 200 mètres."
Vous pensez que c'est un échec de M. Vaillant ?
- "Je crois que c'est un échec de M. Vaillant et un échec du Gouvernement socialiste en général. Il n'y qu'à se promener dans le 18ème arrondissement à partir de 10H00 du soir, je sais bien que depuis une semaine M. VAILLANT qui est en campagne électorale"
Il paraît qu'il y a des policiers comme jamais.
- "Il y en a comme jamais depuis une semaine, mais en réalité vous savez, les habitants du 18ème arrondissement ne s'y trompent pas. Allez vous y promener, prenez vos précautions, parce qu'il y a certaines rues du 18ème arrondissement qui sont difficiles à fréquenter le soir."
Vous parliez de la justice, de la sanction. Le Gouvernement ne peut pas intervenir sur les juges
- "C'est le problème de la justice. La chaîne sécurité/ justice va mal en France, car en réalité, nous nous refusons à réformer. Regardez les difficultés d'application de la loi sur la présomption d'innocence. On voit bien que ce secteur-là, qui est névralgique, qui est la première préoccupation des Français, a besoin d'une grande réforme courageuse et les socialistes ne font pas cette réforme."
Sur le calendrier, l'inversion du calendrier : la bataille du Sénat a été gagnante. Finalement, l'Assemblée revotera mais en avril lorsque l'Assemblée se retrouvera
- "Je félicite les sénateurs du travail qu'ils ont fait à propos de l'inversion, ils ont posé les problèmes. Simplement, je voudrais dire à nos amis centristes qui ont voté avec les socialistes, que bien entendu"
En première lecture.
- "La sanction des municipales risque peut-être de leur faire comprendre qu'il ne faut pas donner de cartouches à l'adversaire. Par conséquent, je souhaite vraiment qu'ils se dispensent de voter comme ils l'ont fait en première lecture, que la sagesse revienne, et qu'on évite cette manipulation personnelle de M. Jospin contre M. Chirac."
Vous êtes élu de Paris et candidat à Paris, vous êtes sur une des listes dites liste Séguin.
M. Christian Poncelet, le président du Sénat a demandé hier que M. Séguin et Tiberi s'entendent pour "sauver Paris", que Paris reste à droite.
- "Ce que je retiens surtout dans sa phrase c'est : "sauver Paris". Est-ce que parler de deuxième tour et de troisième tour avant le premier tour est une solution qui me paraît adéquate ? Non. Cela fait trois mois qu'on discute sur le deuxième et le troisième tour. A force de discuter sur le deuxième et le troisième tour, M. Delanoë s'envole sur le premier. Je crois qu'aujourd'hui, il faut commencer à faire campagne. Il faut commencer à faire campagne dans les arrondissements"
Cela n'a pas commencé ?
- "Non, je considère que la campagne n'est pas commencée. En réalité, nous avons perdu notre temps dans des querelles stériles qui n'amènent à rien sauf à dissuader l'électorat de droite de voter. Car notre problème c'est l'abstentionnisme."
C'est de la faute de M. Séguin ?
- "Non, c'est la faute d'un système parisien qui a connu les soubresauts que vous connaissez. Je crois qu'il faut prendre maintenant le bâton de pèlerin et aller expliquer à nos électeurs de droite les risques"
Mais vous lui demandez de changer de campagne !
- "Non"
Modifier.
- "Non. Regardez le discours dans le 17ème arrondissement ! Le discours de P. Séguin est tout à fait dans cette optique. Je souhaite d'ailleurs que toutes les listes de droite les plus diverses prennent le même bâton de pèlerin, et expliquent aux Parisiens ce qu'ils risquent dans un vote socialiste à Paris, c'est-à-dire la sécurité, la fiscalité. Comment pourrait-on donner un satisfecit à M. Vaillant et à M. Delanoë, alors que la France entière condamne le Gouvernement socialiste sur la sécurité ? Est-ce que les Parisiens se rendent compte que sur le problème de la sécurité, nous allons déraper gravement à Paris."
J-38 h ! Est-ce que vous pouvez endiguer la vague rose ? Vous croyez que c'est encore possible ?
- "Je fais tout mon possible avec mes amis pour le faire. Je crois que tous les leaders nationaux - je ne pense pas forcement à M. Poncelet -, au lieu d'appeler à des fusions, des affaires de deuxième et troisième tour, devraient mettre leur talent à expliquer aux Parisiens les risques qu'il y a d'un changement politique à Paris, non pas pour des raisons partisanes, mais parce que c'est une mutation profonde de Paris."
Les Parisiens ont envie de changer, c'est clair.
"Les Parisiens ont envie de changer, mais je crois qu'ils ne réalisent pas la manière dont
M. Delanoë va les faire changer."
(source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 2 février 2001)