Déclaration de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, sur la vie associative, le bénévolat et le volontariat, le mécénat et le rôle des Commissariats aux comptes, Paris le 13 décembre 2007.

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Circonstance : Ouverture du Conseil national de la vie associative (CNVA) à Paris le 13 décembre 2007

Texte intégral

La vitalité de la vie associative est, avec l'implication civique, un des signes qui manifeste la bonne santé d'une société démocratique. Elle constitue même le meilleur indice de la prévalence, sur les penchants individualistes, de l'exigence de solidarité. Nos démocraties, en effet, ne se réduisent pas à des sociétés de marché, marquées par le primat absolu des rapports économiques.
S'il est possible d'admettre que l'Etat ne peut pas tout et ne saurait constituer, en aucun cas, la seule instance régulatrice du corps social, il faut, en même temps, reconnaître que l'échange marchand ne suffit pas à harmoniser les rapports individuels.
L'engagement associatif atteste clairement du fait que la vie sociale n'est pas entièrement gouvernée par la loi de l'intérêt réciproque.
Nos concitoyens qui ne croient pas à l'omnipotence de la puissance publique, mais qui aspirent à vivre dans une société de confiance régie par d'autres valeurs que celles de l'argent, sont ainsi de plus en plus nombreux à vouloir consacrer leur temps à des activités associatives.
Cet engagement, sans conteste, procède d'un choix éthique. Il traduit la volonté d'échapper à la frénésie consumériste. Il manifeste surtout leur attachement aux principes consubstantiellement liés de solidarité et de responsabilité individuelle. Ainsi, le temps consacré à la vie associative est à proprement parlé du temps retrouvé pour soi et pour les autres, non pas du temps dépensé dans le culte narcissique de soi qui n'exprime qu'un désir de reconnaissance sociale, mais plutôt le temps de l'échange affranchi de la contrainte marchande.
J'ai été, en ce sens, très émue, lors d'une visite récente à la Croix-Rouge Française par les paroles d'un récipiendaire à qui je devais remettre un trophée, qui a parfaitement résumé à cette occasion le sens de son engagement : « tout ce qui n'est pas donné est perdu ».
Voilà, en peu de mots, clairement désigné le fondement même de tout projet associatif : le but non lucratif.
A cet égard, notre pays qui compte près de 15 millions de bénévoles, engagés dans plus d'un million d'associations, fait preuve de son attachement à cette culture du don enracinée dans la tradition des sociétés hospitalières.
Cette extraordinaire vitalité du bénévolat renvoie l'image d'une France solidaire et généreuse, d'une France au service des autres.
Chaque année, plus de 70 000 associations nouvelles enrichissent notre tissu associatif. Chaque jour, 190 associations se créent. Par ailleurs, dans notre pays, l'emploi associatif augmente deux fois plus vite que celui du secteur marchand.
C'est ainsi que l'esprit de fraternité s'incarne au quotidien, par des actions concrètes. Porté par le seul souci de faire oeuvre utile, tous ceux qui participent au grand mouvement associatif, en vertu de leur désintéressement, n'éprouvent pas le besoin d'en proclamer la gratuité. Aussi, il nous revient, à nous, pouvoirs publics, de soutenir cet élan, discret mais profitable à tous.
Les hommes et les femmes, rassemblés au sein des associations de notre pays incarnent cette solidarité active. Le Conseil national de la vie associative que j'ai l'honneur d'installer aujourd'hui, au nom du Premier Ministre, en est la vivante expression.
Depuis sa création en 1983, le Conseil national de la vie associative a, en effet, joué un rôle déterminant. Il est le lieu permanent de la concertation entre les associations et l'Etat. Son travail de réflexion sur le champ associatif, son rôle d'analyse et d'expertise font de votre conseil une force de propositions qui a permis bien des avancées. A titre d'exemples, ses avis sur la fiscalité, sur les agréments associatifs ou encore sur le projet de loi relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif ont largement influencé les pouvoirs publics.
Je voudrais ici profiter de la circonstance pour rendre hommage à l'action particulièrement efficace de Madame Edith ARNOULT-BRILL à la tête du CNVA depuis 2000.
L'importance grandissante de la vie associative dans notre pays a conduit les pouvoirs publics à prendre ces dernières années de nombreuses mesures pour accompagner son essor.
Ainsi depuis 2002, le Gouvernement a mis en oeuvre un certain nombre de dispositifs visant à favoriser le développement de la vie associative et à faciliter la vie quotidienne des associations dans leur fonctionnement courant.
L'accompagnement et la reconnaissance du bénévolat ont été également renforcés.
Le gouvernement s'est également attaché à stimuler l'engagement des volontaires en créant, par la loi du 23 mai 2006, le volontariat associatif.
Les efforts engagés vont dans le bon sens. Cependant, j'entends me tourner résolument vers l'avenir et aller plus loin, notamment pour promouvoir encore davantage le bénévolat et faciliter l'activité des associations.
Je vous épargnerai, me trouvant ici parmi les meilleurs experts en la matière, et m'adressant à des praticiens, le détail des dispositifs déjà mis en oeuvre.
Je veux rendre effectifs les engagements très forts que le Président de la République a pris à l'égard des bénévoles et qu'il a rappelés devant le Conseil économique et social le 17 octobre dernier, lors de la journée mondiale du refus de la misère. Je rappellerai d'ailleurs ses propos : « Je veux encourager... l'engagement civique et l'engagement humanitaire à tous les âges, notamment chez les jeunes. Je veux également favoriser la générosité privée. Et je m'engage à faire en sorte que la fiscalité, le droit du travail, l'organisation des études prennent mieux en compte cette solidarité spontanée. (...).
Je veux que les années de bénévolat dans des associations valident des années de cotisations de retraite. Je veux que les étudiants qui consacrent du temps à une association, soient valorisés dans les examens qu'ils passent, avec des bonifications de points... Le bénévolat doit être encouragé, récompensé, valorisé, pas forcément rémunéré ».
Pour concrétiser ces engagements, le Président de la République a demandé la création d'un livret d'épargne civique qui accompagnera le bénévole pendant toute la durée de son engagement et lui permettra l'ouverture de droits.
Ainsi, il lui sera possible de bénéficier notamment :
- de stages de formation gratuits pour un an de bénévolat dans une association.
- de l'octroi de points supplémentaires aux examens.
- de mesures fiscales pour favoriser les dons et legs.
- d'une véritable reconnaissance de l'expérience associative.
Des travaux interministériels sont en cours sur tous ces sujets. Vous serez bien évidemment consultés sur l'élaboration de ces dispositions. Votre collaboration est indispensable. J'en suivrai l'évolution avec la plus grande attention.
Quelques pistes méritent, par ailleurs, d'être explorées : Je souhaite d'abord que la vie des associations, au quotidien, soit simplifiée.
Par exemple, en faisant mieux connaître le chèque emploi associatif qui facilite les démarches de l'association employeur.
Il faut promouvoir le mécénat et le bénévolat de compétence dans notre pays parce que les associations ressentent aujourd'hui un besoin croissant d'expertise.
Certaines entreprises mettent, d'ores et déjà, leurs employés à la disposition des associations tout en continuant à les rémunérer. De même, elles favorisent l'engagement bénévole de leurs collaborateurs sur leur temps libre. Il conviendrait d'amplifier cette pratique.
J'aimerais, par ailleurs, promouvoir le label associatif, gage de transparence et de bonne gouvernance afin de donner les meilleures garanties aux donateurs et de conforter leur confiance.
Les relations financières entre les associations et les pouvoirs publics doivent être également confortées.
A cet égard, il serait souhaitable de développer l'évaluation, en lien avec l'Association française des trésoriers d'associations et la Compagnie des commissaires aux comptes.
Il est enfin nécessaire d'aider à une meilleure reconnaissance du rôle des associations
Je souhaite voir accrue la place des associations au sein du Conseil économique et social.
Dans le même esprit, la place des associations employeurs aux côtés des autres employeurs doit être mieux reconnue.
Je souhaite, enfin, pouvoir favoriser l'émergence d'une citoyenneté européenne par l'adoption d'un statut d'association européenne durant la présidence française de l'Union européenne.
Comme vous le voyez, les pistes de réflexions et les chantiers à ouvrir sont nombreux.
Le poids socio-économique grandissant du secteur associatif l'inscrit aujourd'hui très directement parmi les enjeux de la révision générale des politiques publiques. Investies dans des secteurs très divers, touchant au plus près nos concitoyens, les associations, avec un budget cumulé de près de soixante milliards d'euros représentent près de deux millions d'emplois salariés et mobilisent le travail de quatorze millions de bénévoles.
Les associations ont tissé avec l'Etat des liens nombreux et complexes. Aussi, j'ai demandé à un haut fonctionnaire d'analyser les relations qu'entretient la puissance publique avec le monde associatif.
J'étudierai avec la plus grande attention les conclusions de ce rapport qui ne saurait prendre forme sans bénéficier de votre précieuse contribution.
Je n'ai d'autres soucis, vous l'aurez compris, que de donner au monde associatif les moyens de son développement pour que l'élan spontanément engagé puisse connaître un plus grand essor.
Je vous remercie
source http://www.jeunesse-sports.gouv.fr, le 18 décembre 2007