Texte intégral
Monsieur le Président,
Cher ami,
Mesdames,
Messieurs les journalistes, notamment de la presse argentine,
Il ne faut en aucun cas considérer ce bref passage dans cette magnifique capitale comme une visite officielle en Argentine. Le jour où l'invitation m'ayant déjà été adressée par le président De la Rúa, je viendrai pour véritablement connaître mieux ce pays et y poursuivre un dialogue engagé depuis longtemps avec ses responsables, j'y passerai le temps qu'il faut ! Mais parce que j'avais envie de voir Fernando De la Rúa en dehors de Paris ou de Berlin où nous nous sommes vus au Sommet des Modernisateurs et aussi peut être dans les circonstances actuelles, je pensais qu'avant de regagner ma propre capitale, il était bon de faire, sinon une visite officielle, en tout cas une visite d'amitié à un homme d'Etat que nous respectons, à un ami, dans un moment où effectivement l'Argentine connaît des difficultés économiques conjoncturelles comme tous les pays en rencontrent et comme nous en avons eues en France, à d'autres époques.
Nous nous sentons très proches de l'Argentine, par nos liens historiques, culturels, je devrais même dire linguistiques, puisque la ministre m'indiquait tout à l'heure que la langue française progressait dans ce pays, que des étudiants venaient plus nombreux à l'Alliance française.
Je voudrais terminer en disant que dans le premier entretien que j'ai eu avec le président De la Rúa puis dans la réunion de travail qui a été élargie aux ministres des deux gouvernements nous avons, c'est vrai, évoqué la situation économique argentine aujourd'hui, ses difficultés conjoncturelles dont je parlais, et le ministre Cavallo nous a dit en particulier comment le plan qu'il a proposé au président De la Rúa va se mettre en place. Mais nous avons évoqué également, et nous le ferons encore dans le repas, à la fois de travail et amical que nous aurons, les problèmes de l'ALCA, les problèmes du Mercosur dans la mesure où des réunions importantes avaient lieu à Buenos Aires hier et aujourd'hui.
Nous parlerons aussi je pense des relations entre le Mercosur et l'Europe, mais il faudra peut-être qu'on mange et qu'on boive un peu avant pour être dans le climat qui convient. Le ministre des Affaires étrangères, M. Giavarini, nous dira un peu plus précisément ce qui a été fait aujourd'hui. Le ministre des Infrastructures et du Logement, M. Bastos nous a parlé d'un certain nombre de dossiers bilatéraux économiques. Donc nous avons eu déjà une série de discussions très importantes. Je voudrais terminer en disant que les entreprises françaises ont choisi d'investir fortement en Argentine et ont bien l'intention de continuer à le faire. Quant aux autorités publiques françaises, je parle bien sûr seulement au nom du gouvernement, mais je sais que c'est le sentiment du président de la République, veuillez croire que dans ce moment de difficultés que vous surmonterez, la France est à vos côtés.
Q - La France va-t-elle revoir sa position concernant les subventions agricoles et est-ce que la France et l'Union européenne considèrent que la construction de l'ALCA va nuire aux relations commerciales entre l'Union européenne et le Mercosur ?
R - L'Argentine et la France sont deux pays développés avec une industrie forte et avec un secteur agricole puissant. Il est donc légitime que les deux pays défendent leurs intérêts. Vous défendez vos agriculteurs, nous veillons aux intérêts des nôtres. Les Etats-Unis sont la première puissance industrielle du monde, ils sont aussi la première puissance agricole du monde et ils veillent à défendre leurs intérêts agricoles dans chaque négociation internationale. La France est le deuxième exportateur mondial de produits agricoles et agro-alimentaires et donc elle veille légitimement à la défense de ses intérêts. Pour autant, il est vrai que la façon dont les différents pays produisent doit être autant que possible compatible avec des règles saines de commerce international. En même temps on constate que beaucoup de pays défendent leur agriculture, les Etats-Unis défendent la leur et d'ailleurs le marché américain est moins ouvert aux produits agricoles de l'Amérique latine que ne l'est le marché européen. En outre depuis 1992, il y a eu une réforme de la politique agricole commune qui fait que les sommes consacrées par l'Union Européenne au soutien direct aux prix d'une part et au financement de subventions à l'exportation ont été réduits dans les deux cas pratiquement de moitié.
Ce que nous proposons c'est que, dans le cadre des négociations engagées entre le Mercosur et l'Union européenne, l'on discute de tous les problèmes, des problèmes agricoles mais aussi des problèmes industriels, des problèmes industriels mais aussi des problèmes de services, des questions non tarifaires mais aussi des questions tarifaires. Je pense d'ailleurs que, progressivement, une économie comme l'économie argentine, compte tenu de ses capacités, peut avoir intérêt à développer d'avantage encore son industrie et ses services pour être peut-être moins dépendants des productions agricoles, même si elles sont importantes. Donc ce que nous proposons, pour finir, c'est la recherche de compromis dans les négociations entre l'Union européenne et le Mercosur et la France sera tout à fait favorable à des compromis raisonnables.
Quant à l'ALCA c'est un projet américain. Quand je dis américain, je fais allusion à tout le continent américain, bien sûr. L'Argentine au sein du Mercosur et comme pays décide souverainement de ses choix. Nous souhaitons tout à fait que cette zone de libre échange ne soit pas contradictoire avec vos efforts d'intégration régionale dans le Mercosur d'une part, et avec les liens économiques très importants que vous voulez garder avec l'Europe, d'autre part. Voilà le seul commentaire que je puisse faire sur ce deuxième sujet.
Q - De quelle façon la France va-t-elle soutenir le projet de M. Domingo Cavallo d'introduire comme référence pour la monnaie argentine un panier de monnaies incluant l'euro ? Quels sont vos commentaires à ce propos ?
R - D'abord je voudrais dire que l'Argentine détermine souverainement sa politique monétaire. Elle y introduit les éléments de souplesse, de convertibilité plus grande qu'elle décide. Le ministre Cavallo a indiqué qu'il rencontrerait bientôt à Paris son homologue Laurent Fabius, le ministre de l'Economie et des Finances. Il a dit aussi qu'il rencontrerait certainement le gouverneur de la Banque de France, M. Trichet, même si la politique de l'euro, comme le ministre le sait et nous l'a rappelé, est gérée par la Banque centrale. Mais néanmoins, étant à Paris, je pense qu'avoir l'opinion de M. Trichet sera tout à fait utile. Nous sommes au début de propositions. On nous a exposé tout à l'heure le plan de compétitivité. Nous allons évidemment écouter cela et y répondre avec beaucoup d'attention d'abord parce que nous tenons à développer le rôle de l'euro comme monnaie internationale. Elle sera bientôt la monnaie de tous les Européens, en janvier et février de l'année prochaine. Et quant à l'aide que nous pouvons apporter, nous l'avons fait en décembre dans le cadre multilatéral, dans un contact d'ailleurs direct que nous avions noué, le président De la Rúa et moi-même, lorsque la communauté financière internationale et le FMI sont venus aux côtés de l'Argentine. Nous sommes prêts à continuer à jouer ce rôle par une discussion directe avec les autorités argentines et notamment avec le président, et bien sûr dans le cadre international si cela est nécessaire.
Q - Sur l'épidémie de fièvre aphteuse ?
R - Peut-être pourrais-je dire un mot. Nous avons parlé de ce sujet. C'est même un des premiers sujets que nous avons abordés. J'ai dit au président De la Rúa qu'il y avait une grande sensibilité à la fièvre aphteuse en Europe aujourd'hui à cause de la situation dramatique dans laquelle sont nos amis britanniques et aussi du fait qu'il y a eu quelques foyers de fièvre aphteuse dans des pays européens, notamment en France, où heureusement jusqu'ici nous n'en avons eu que deux. Je lui ai dit la vigueur du plan que nous avions mis en uvre et j'ai dit aussi au président que la Commission européenne a elle-même mis l'embargo sur des pays membres de l'Union à partir du moment où ils avaient des cas de fièvre aphteuse. Donc il n'y a pas une attitude différente à l'égard de pays extérieurs et notamment de l'Argentine. Et si peut-être l'attitude n'est pas exactement celle qui avait pu exister dans le passé, c'est qu'il y a une épizootie qui est en Europe aujourd'hui et cela nous rend naturellement particulièrement prudents, on peut le comprendre. Mais, comme le président De la Rúa, je pense qu'il faut discuter à la fois techniquement et dans un bon esprit de coopération./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 avril 2001)
Cher ami,
Mesdames,
Messieurs les journalistes, notamment de la presse argentine,
Il ne faut en aucun cas considérer ce bref passage dans cette magnifique capitale comme une visite officielle en Argentine. Le jour où l'invitation m'ayant déjà été adressée par le président De la Rúa, je viendrai pour véritablement connaître mieux ce pays et y poursuivre un dialogue engagé depuis longtemps avec ses responsables, j'y passerai le temps qu'il faut ! Mais parce que j'avais envie de voir Fernando De la Rúa en dehors de Paris ou de Berlin où nous nous sommes vus au Sommet des Modernisateurs et aussi peut être dans les circonstances actuelles, je pensais qu'avant de regagner ma propre capitale, il était bon de faire, sinon une visite officielle, en tout cas une visite d'amitié à un homme d'Etat que nous respectons, à un ami, dans un moment où effectivement l'Argentine connaît des difficultés économiques conjoncturelles comme tous les pays en rencontrent et comme nous en avons eues en France, à d'autres époques.
Nous nous sentons très proches de l'Argentine, par nos liens historiques, culturels, je devrais même dire linguistiques, puisque la ministre m'indiquait tout à l'heure que la langue française progressait dans ce pays, que des étudiants venaient plus nombreux à l'Alliance française.
Je voudrais terminer en disant que dans le premier entretien que j'ai eu avec le président De la Rúa puis dans la réunion de travail qui a été élargie aux ministres des deux gouvernements nous avons, c'est vrai, évoqué la situation économique argentine aujourd'hui, ses difficultés conjoncturelles dont je parlais, et le ministre Cavallo nous a dit en particulier comment le plan qu'il a proposé au président De la Rúa va se mettre en place. Mais nous avons évoqué également, et nous le ferons encore dans le repas, à la fois de travail et amical que nous aurons, les problèmes de l'ALCA, les problèmes du Mercosur dans la mesure où des réunions importantes avaient lieu à Buenos Aires hier et aujourd'hui.
Nous parlerons aussi je pense des relations entre le Mercosur et l'Europe, mais il faudra peut-être qu'on mange et qu'on boive un peu avant pour être dans le climat qui convient. Le ministre des Affaires étrangères, M. Giavarini, nous dira un peu plus précisément ce qui a été fait aujourd'hui. Le ministre des Infrastructures et du Logement, M. Bastos nous a parlé d'un certain nombre de dossiers bilatéraux économiques. Donc nous avons eu déjà une série de discussions très importantes. Je voudrais terminer en disant que les entreprises françaises ont choisi d'investir fortement en Argentine et ont bien l'intention de continuer à le faire. Quant aux autorités publiques françaises, je parle bien sûr seulement au nom du gouvernement, mais je sais que c'est le sentiment du président de la République, veuillez croire que dans ce moment de difficultés que vous surmonterez, la France est à vos côtés.
Q - La France va-t-elle revoir sa position concernant les subventions agricoles et est-ce que la France et l'Union européenne considèrent que la construction de l'ALCA va nuire aux relations commerciales entre l'Union européenne et le Mercosur ?
R - L'Argentine et la France sont deux pays développés avec une industrie forte et avec un secteur agricole puissant. Il est donc légitime que les deux pays défendent leurs intérêts. Vous défendez vos agriculteurs, nous veillons aux intérêts des nôtres. Les Etats-Unis sont la première puissance industrielle du monde, ils sont aussi la première puissance agricole du monde et ils veillent à défendre leurs intérêts agricoles dans chaque négociation internationale. La France est le deuxième exportateur mondial de produits agricoles et agro-alimentaires et donc elle veille légitimement à la défense de ses intérêts. Pour autant, il est vrai que la façon dont les différents pays produisent doit être autant que possible compatible avec des règles saines de commerce international. En même temps on constate que beaucoup de pays défendent leur agriculture, les Etats-Unis défendent la leur et d'ailleurs le marché américain est moins ouvert aux produits agricoles de l'Amérique latine que ne l'est le marché européen. En outre depuis 1992, il y a eu une réforme de la politique agricole commune qui fait que les sommes consacrées par l'Union Européenne au soutien direct aux prix d'une part et au financement de subventions à l'exportation ont été réduits dans les deux cas pratiquement de moitié.
Ce que nous proposons c'est que, dans le cadre des négociations engagées entre le Mercosur et l'Union européenne, l'on discute de tous les problèmes, des problèmes agricoles mais aussi des problèmes industriels, des problèmes industriels mais aussi des problèmes de services, des questions non tarifaires mais aussi des questions tarifaires. Je pense d'ailleurs que, progressivement, une économie comme l'économie argentine, compte tenu de ses capacités, peut avoir intérêt à développer d'avantage encore son industrie et ses services pour être peut-être moins dépendants des productions agricoles, même si elles sont importantes. Donc ce que nous proposons, pour finir, c'est la recherche de compromis dans les négociations entre l'Union européenne et le Mercosur et la France sera tout à fait favorable à des compromis raisonnables.
Quant à l'ALCA c'est un projet américain. Quand je dis américain, je fais allusion à tout le continent américain, bien sûr. L'Argentine au sein du Mercosur et comme pays décide souverainement de ses choix. Nous souhaitons tout à fait que cette zone de libre échange ne soit pas contradictoire avec vos efforts d'intégration régionale dans le Mercosur d'une part, et avec les liens économiques très importants que vous voulez garder avec l'Europe, d'autre part. Voilà le seul commentaire que je puisse faire sur ce deuxième sujet.
Q - De quelle façon la France va-t-elle soutenir le projet de M. Domingo Cavallo d'introduire comme référence pour la monnaie argentine un panier de monnaies incluant l'euro ? Quels sont vos commentaires à ce propos ?
R - D'abord je voudrais dire que l'Argentine détermine souverainement sa politique monétaire. Elle y introduit les éléments de souplesse, de convertibilité plus grande qu'elle décide. Le ministre Cavallo a indiqué qu'il rencontrerait bientôt à Paris son homologue Laurent Fabius, le ministre de l'Economie et des Finances. Il a dit aussi qu'il rencontrerait certainement le gouverneur de la Banque de France, M. Trichet, même si la politique de l'euro, comme le ministre le sait et nous l'a rappelé, est gérée par la Banque centrale. Mais néanmoins, étant à Paris, je pense qu'avoir l'opinion de M. Trichet sera tout à fait utile. Nous sommes au début de propositions. On nous a exposé tout à l'heure le plan de compétitivité. Nous allons évidemment écouter cela et y répondre avec beaucoup d'attention d'abord parce que nous tenons à développer le rôle de l'euro comme monnaie internationale. Elle sera bientôt la monnaie de tous les Européens, en janvier et février de l'année prochaine. Et quant à l'aide que nous pouvons apporter, nous l'avons fait en décembre dans le cadre multilatéral, dans un contact d'ailleurs direct que nous avions noué, le président De la Rúa et moi-même, lorsque la communauté financière internationale et le FMI sont venus aux côtés de l'Argentine. Nous sommes prêts à continuer à jouer ce rôle par une discussion directe avec les autorités argentines et notamment avec le président, et bien sûr dans le cadre international si cela est nécessaire.
Q - Sur l'épidémie de fièvre aphteuse ?
R - Peut-être pourrais-je dire un mot. Nous avons parlé de ce sujet. C'est même un des premiers sujets que nous avons abordés. J'ai dit au président De la Rúa qu'il y avait une grande sensibilité à la fièvre aphteuse en Europe aujourd'hui à cause de la situation dramatique dans laquelle sont nos amis britanniques et aussi du fait qu'il y a eu quelques foyers de fièvre aphteuse dans des pays européens, notamment en France, où heureusement jusqu'ici nous n'en avons eu que deux. Je lui ai dit la vigueur du plan que nous avions mis en uvre et j'ai dit aussi au président que la Commission européenne a elle-même mis l'embargo sur des pays membres de l'Union à partir du moment où ils avaient des cas de fièvre aphteuse. Donc il n'y a pas une attitude différente à l'égard de pays extérieurs et notamment de l'Argentine. Et si peut-être l'attitude n'est pas exactement celle qui avait pu exister dans le passé, c'est qu'il y a une épizootie qui est en Europe aujourd'hui et cela nous rend naturellement particulièrement prudents, on peut le comprendre. Mais, comme le président De la Rúa, je pense qu'il faut discuter à la fois techniquement et dans un bon esprit de coopération./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 avril 2001)