Interview de M. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat chargé du commerce, de l'artisanat, des PME, du tourisme et des services, à "France 2" le 6 mai 2008, sur la réorganisation du secteur du commerce et sur le chantier de rénovation de la nomenclature de l'hôtellerie.

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Média : France 2

Texte intégral

F. Laborde.- Commerce, Artisanat, Tourisme, PME... ah, ça fait déjà beaucoup de choses !
 
R.- Et Services.
 
Q.- Et Services !
 
R.- Oui.
 
Q.- Bonjour H. Novelli.
 
R.- Bonjour.
 
Q.- Merci d'être avec nous ce matin. Alors, on va commencer justement par le commerce, puisque vous étiez hier à côté de Marseille à « Plan-de-Campagne ». « Plan de campagne », c'est ce fameux grand espace commercial, c'est plus qu'un centre commercial, c'est une succession de magasins...
 
R.- C'est une zone où il y a des milliers d'emplois qui sont créés pour proposer des produits aux consommateurs.
 
Q.- Mais alors, les commerçants veulent ouvrir le dimanche et puis manifestement ils n'y arrivent pas.
 
R.- Manifestement, il y a un problème. Il y a d'un côté des milliers de salariés, qui veulent travailler, il y a des entreprises qui veulent vendre leurs produits et il y a des consommateurs qui veulent les acheter. Et la loi ne le permet pas. Et j'ai été frappé... J'étais donc hier à Marseille, c'est vrai, j'ai vu une manifestation de salariés qui souhaitent travailler, et on est quand même dans un pays un peu spécifique, où la loi empêche ceux qui le souhaitent, de pouvoir travailler.
 
Q.- Est-ce que ça veut dire qu'à terme, vous allez remettre à plat tout le système de fermeture des magasins le dimanche ?
 
R.- Manifestement, c'est une loi qui ne résiste pas à la réalité économique. Il y a aujourd'hui des centaines de dérogations qui introduisent des contentieux à une incertitude juridique et donc il faut vraiment discuter de cela et je soutiens la proposition de loi d'un parlementaire des Bouches du Rhône, qui l'a déposée et qui devrait être adoptée, je l'espère, dans les semaines qui viennent, pour mettre fin à cette situation paradoxale.
 
Q.- Concrètement, ça veut dire quoi ? Que dans certaines villes, on pourrait permettre l'ouverture de petits commerces et pas dans d'autres ? Il faut regarder au cas par cas ou il y aura une loi pour tout le monde ?
 
R.- Non, il faut bien sûr une loi qui encadre. Mais, l'intérêt de la proposition de loi de Richard Mallié, elle est de créer un nouveau concept qui est la « zone de chalandise exceptionnelle », et c'est vrai que quand vous habitez Marseille et que vous allez à « Plan-de- Campagne », il y a des dizaines de milliers de personnes qui y vont, et donc c'est une zone exceptionnelle. Et il y a là...
 
Q.- Comme sur les Champs-Élysées où il y a un côté de l'avenue où on peut ouvrir, parce que c'est considéré comme zone touristique, et puis en face, ce n'est pas zone touristique, et c'est fermé.
 
R.- Exactement. Il y a des restrictions, il y a des aberrations. Ceux qui veulent travailler doivent pouvoir le faire à titre volontaire et en étant payés plus. Les entreprises doivent pouvoir ouvrir, surtout lorsqu'elles sont dans des zones touristiques, il ne s'agit pas de remettre en cause les fondements du repos dominical ; dans ma petite commune, par exemple, eh bien ce repos dominical et des quelques...
 
Q.- C'est Richelieu, je crois.
 
R.-...A Richelieu, c'est évident que le problème ne se pose pas comme il se pose dans un certain nombre de lieux comme à « Plan-de-Campagne » ou Paris.
 
Q.- Vous avez dit aussi, parce que vous n'avez décidément peur de rien, mais peut-être que c'est votre secteur qui vous condamne à ça, si je puis dire, que vous, vous n'étiez pas contre la suppression des 35 heures. Est-ce que c'est parce que justement, dans le commerce et dans l'artisanat, la question se pose moins ou c'est parce que vous êtes, j'allais dire, dans la tradition libérale ?
 
R.- Non...
 
Q.- Il faut rappeler que vous représentez le courant libéral de la majorité et que les 35 heures c'est...
 
R.- C'est vrai mais ça n'est pas pour cela, c'est parce que dans tous les pays, on constate que la restriction du travail... bien sûr il ne faut pas travailler au-delà des dangers que l'on peut courir en matière de santé, ou de sécurité, mais c'est la norme européenne, les 48 heures, au-delà c'est interdit. Et bien, il faut éviter de restreindre l'offre de travail. En France, globalement, on travaille moins, et l'un des grands mérites de N. Sarkozy est d'avoir mis au coeur de la campagne présidentielle et de notre action, cette idée simple que l'on ne peut pas travailler durablement et globalement moins que nos principaux concurrents, je parle évidemment des pays qui ont les mêmes normes sociales ou légales que les nôtres.
 
Q.- Autre secteur qui parfois pourrait faire grincer des dents, on a vu certaines grandes enseignes de distribution dire : « Après tout, nous, on veut vendre, dans nos grandes surfaces, les produits pharmaceutiques, qui ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale et donc libres d'accès en quelque sorte, qui sont vendus sans ordonnance ». Est-ce que vous, vous considérez qu'en effet il n'y a pas de raison que l'on ne trouve pas à la supérette du coin, je ne sais pas, des comprimés contre les maux de gorge, de tête, le cors aux pieds, que sais-je ?
 
R.- Je ne suis pas en charge de la santé publique ni des ventes de médicaments, mais ce que je considère pour ma part, à titre personnel, c'est que les médicaments qui ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale, les médicaments dits de confort - je pense à quelques marques que vous avez en tête et qui permettent d'éviter justement le mal de tête - eh bien tout cela me semblerait pouvoir être vendu, dans certaines conditions, par les grandes surfaces. Je suis, de manière générale...
 
Q.- Un homme ouvert.
 
R.- Oui, et contre les restrictions qui n'ont plus de sens aujourd'hui, au XXIème siècle.
 
Q.- Alors, autre secteur et qui n'est pas le moindre : le tourisme. La France a des atouts et des handicaps, vous allez présider les assises nationales du tourisme bientôt et parmi les grands chantiers que vous voulez mettre à plat, c'est la nomenclature des hôtels. Alors, là encore, vaste thème, parce que l'on est resté en France sur une nomenclature qui date des années...
 
R.- 60.
 
Q.- 60, oui.
 
R.- Eh bien il faut rénover.
 
Q.- Avec des normes de confort qui sont parfois dans un, deux, trois, quatre étoiles.
 
R.- Il faut changer cela et adapter notre offre touristique à une demande qui évolue et ce sera l'objet de ces Assises nationales du tourisme que je tiendrai avec tous les professionnels, pour évaluer la demande touristique. Les choses bougent, le monde bouge. Il y a des populations qui, parce qu'elles ont un pouvoir d'achat supplémentaire, viennent. Ce sont des touristes nouveaux...
 
Q.- C'est par exemple les Chinois...
 
R.- Par exemple, ne serait-ce que les Chinois, les Brésiliens, les Mexicains...
 
Q.- Les Russes.
 
R.- Les Russes. Ils vont venir, des dizaines de millions de touristes, il s'agit...
 
Q.- Avec des exigences en matière de quoi ? De services, de confort, plus grandes ?
 
R.- Bien sûr, ils ont des exigences en matière de services, en matière d'accueil, en matière de sûreté et de sécurité, du choix qu'ils opèrent lorsqu'ils vont dans un hôtel et c'est la raison...
 
Q.- Il n'y a pas de 5 étoiles, en France, pour l'instant.
 
R.- Il n'y a pas de 5 étoiles...
 
Q.- Vous allez en créer une catégorie ?
 
R.- Nous allons le créer. J'aurai l'occasion de l'annoncer lors de ces assises du tourisme. Il faut absolument rénover notre offre hôtelière. Nous avons une offre hôtelière qui est grande, qui est nombreuse, beaucoup d'hôtels, mais il faut absolument que la nomenclature qui date des années 60 soit revue et donc on va s'y atteler. Mais, pour restaurer les hôtels, nous créerons un fonds de rénovation hôtelier...
 
Q.- Oui, parce que c'est ça, souvent, c'est que, quand ce n'est pas une grande chaîne d'hôtels, les hôtels « familiaux », ça leur coûte cher de tout refaire.
 
R.- Voilà, et lorsque l'on sera volontaire pour obtenir deux, trois, quatre ou cinq étoiles, on sera éligible à ce fonds d'investissement pour la rénovation hôtelière.
 
Q.- Ça veut dire que, un trois étoiles en France n'a pas les mêmes normes de confort qu'un trois étoiles, je ne sais pas, en Italie, en Angleterre ou en Allemagne ?
 
R.-  D'abord, parce que la réglementation est désuète, mais aussi parce qu'un trois étoiles... aujourd'hui, un trois étoiles français c'est souvent une entreprise familiale, avec une rentabilité qui n'est pas toujours à la hauteur. Eh bien il faut soutenir cette restauration hôtelière, aider à l'investissement et le faire sur une base volontaire, parce qu'il n'y a pas de contrôle, les normes sont désuètes mais ne sont pas renouvelées.
 
Q.- H. Novelli, vous êtes aussi le chef de file du courant libéral, que présidait...
 
R.- Et réformateur.
 
Q.- Et réformateur, que présidait A. Madelin jusqu'à présent, enfin, jusqu'à il y a un certain temps. Comment vous faites pour faire vivre cette pensée, si je puis dire, libérale, au sein de l'UMP ? Ou bien vous considérez tout simplement qu'il n'y a pas une particularité et que, voilà, vous êtes fondu dans la masse ?
 
R.- Non. Il y a, chez un certain nombre de collègues parlementaires, j'ai aujourd'hui une centaine de parlementaires qui, comme moi, partagent l'idée forte que nous devons adapter notre pays et que les réformes qui mettent en avant les idées de liberté et de responsabilité sont les mieux à même d'adapter notre pays à la mondialisation. C'est cela l'idée. On s'était réunis avant l'élection de N. Sarkozy pour protester contre un certain immobilisme. Aujourd'hui, nous soutenons l'effort réformateur du président de la République, nous serons à ses côtés, il a été élu pour 5 ans, il a un contrat avec les Français, ne suis persuadé qu'il le mettra en oeuvre en matière de réforme.
 
Q.- Merci H. Novelli, d'être venu nous voir aujourd'hui. Très bonne journée à vous.
 
R.- Merci à vous.
 
Q.- Bonne fête ce soir avec le président de la République, je crois que vous ferez partie du lot...
 
R.- C'est vrai, j'interviens.
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 6 mai 2008