Entretien de M. Bernard Kouchner, avec la radio norvégienne "NRK" le 4 juin 2008, sur le financement du renforcement des forces militaires en Afghanistan et la future conférence internationale de soutien à ce pays.

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Q - Sur la question de l'Afghanistan, pourquoi la France a-t-elle décidé de renforcer la pression au sein de l'OTAN ?
R - Mais il n'y a pas de renforcement de la pression au sein de l'OTAN. Nous travaillons actuellement à la conférence sur l'Afghanistan qui se déroulera à Paris le 12 juin prochain. Il y a eu une première rencontre avec une réunion de la société civile, des ONG le 24 mai à Paris . Nous ne renforçons aucune pression. Nous voulons avoir de meilleures conditions de sécurité, c'est-à-dire que nous avons envoyé 700 soldats supplémentaires pour que le périmètre de sécurité soit plus grand, pour que les Afghans prennent en charge eux-mêmes leurs problèmes et tous les projets de développement. C'est ce que l'on appelle "l'afghanisation". Mais ce n'est pas une pression, c'est au contraire une ouverture vers les Afghans qui a déjà commencé mais que l'on doit renforcer.
Q - Il y a une polémique en Norvège aujourd'hui pour savoir si on a suffisamment d'argent pour envoyer tous les soldats promis à l'International Security Assistance Force (ISAF) ? Quel est votre conseil ?
R - Il faut à la fois assurer la sécurité, d'où la présence de soldats dans un premier temps, mais nous espérons rester le moins longtemps possible. Et, parallèlement, il faut des projets pour la société civile, pour les Afghans. S'il y a une insécurité majeure comme dans le Sud du pays, il est très difficile d'aider les Afghans à se prendre en charge eux-mêmes. Il ne s'agit pas d'aider en permanence les Afghans, mais de faire en sorte qu'ils arrivent à s'aider eux-mêmes. C'est un problème politique, économique. Il y a 2 à 3 % de l'aide qui est consacrée à l'agriculture dans un pays qui est entièrement agricole. Il faut faire tous ces efforts en même temps. Cela serait très bien que nos amis norvégiens soit à nos côtés le plus vite possible aussi bien en terme militaire qu'en terme de développement.
Q - Une semaine avant cette conférence très opportune à Paris, il y a cette polémique en Norvège pour savoir si on peut financer cette opération...
R - Il est tout à fait normal que l'on discute de ces choses. Nous avons eu cette polémique en France quand on a décidé d'envoyer des soldats. Il a été difficile d'expliquer que l'on ne fait pas une guerre contre les Afghans, mais c'est une guerre que l'on fait à leurs côtés. Il y a un gouvernement élu, un parlement élu, un président élu en 2004 avec pour la première fois des femmes qui ont voté. Il faut continuer dans ce sens.
Q - Quel est le but, quelle est la chose la plus importante que vous recherchez pour la conférence de la semaine prochaine ?
R - Le but est que les Afghans se prennent en charge eux-mêmes et que l'on puisse leur permettre de le faire. Ce n'est pas une opération militaire qui réglera le problème afghan. Ce sont les Afghans eux-mêmes. Tel est le but.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 juin 2008