Texte intégral
ERIC REVEL - Les 35 heures vidées donc de leur substance, Xavier BERTRAND, le ministre du Travail à la manoeuvre. La CFDT et la CGT qui font front commun, qui s'agitent, on s'attendait Bernard VAN CRAEYNEST, à une réaction forte des syndicats. On la connaît. Est-ce que vous allez vous associer à cette mobilisation de la CFDT et de la CGT ? A cette protestation ou pas ?
BERNARD VAN CRAEYNEST - Déjà, il faut savoir de quoi nous parlons. Ce soir, il y avait effectivement une réunion intersyndicale qui était programmée, pour parler de la suite du mouvement du 22 mai sur les retraites. Nous avons un problème pour l'instant, pas de nouvelle du gouvernement sur les suites qu'il compte donner. Oh si ! On connaît une petite partie, il nous renvoie au projet de loi de financement de Sécurité sociale 2009, dans lequel, il y aurait un certain nombre disposition traduite pour la suite concernant les retraites. Donc ce soir, nos collègues se réunissent pour parler de cela, je conçois que nous ayons deux autres organisations qui soient un peu gênées de la tournure prise par le dossier...
ERIC REVEL - Sur cette affaire des 35 heures, Bernard VAN CRAEYNEST, vous diriez que la CFDT et la CGT passez-moi l'expression sont un peu les cocus, les dindons de la farce ?
BERNARD VAN CRAEYNEST - Le résultat, c'est que incontestablement, ils se sont trouvés face à une situation qu'apparemment, ils n'avaient pas envisagé, à savoir un gouvernement qui profite d'une réforme des règles de la représentativité pour s'engouffrer et sans doute régler d'ailleurs quelques problèmes internes à la majorité, que ce soit entre le gouvernement, le groupe UMP au Parlement et la formation politique, on lance ce sujet dans le camp des parlementaires, pour qu'ils « se régalent » entre guillemets, afin de régler un certain nombre de problèmes.
ERIC REVEL - Mais sur le fond, est-ce que c'est un scandale absolu, que de vider les 35 heures de leur substance, alors qu'on a dit quand même pendant des années, qu'elles avaient bloqué l'augmentation du salaire, qu'elles avaient appris à certaines entreprises à vivre avec des subventions. Sur le fond les 35 heures, on n'est pas parvenu à faire démonstration que c'était une bonne chose quoi ! ?
BERNARD VAN CRAEYNEST - Je l'ai dit d'ailleurs au nom de la CFE-CGC, que cela avait crée beaucoup de situation hétérogène, avec les salariés qui en ont pleinement profité et beaucoup qui n'en ont pas profité du tout ou qui se les sont payées très chères. Le problème n'est pas de savoir si il faut ad vitam æternam revenir sur les 35 heures. Je vous rappelle que nous devons en être à la 4 ou 5ème révision depuis 2002-2003 sur ce sujet. Alors il faudra quand même que le gouvernement nous dise une bonne fois pour toute, ce qu'il veut faire, qu'il soit cohérent. Ce que je constate, c'est que dans l'avant projet de loi sur le problème de la réforme de la représentativité syndicale, il en profite pour glisser une potentielle remise en cause totale, du Code du Travail, de la réglementation, du temps de travail en général et de l'aménagement du temps de travail...
ERIC REVEL - Donc vous, vous associez à la protestation de la CFDT et de la CGT ?
BERNARD VAN CRAEYNEST - Je pense, je pense surtout qu'il y a une cohérence dans tout ce que nous sommes en train de vivre actuellement. L'offre raisonnable d'emploi, la culpabilisation des salariés, des chômeurs, qui ne sont pas assez mobiles, la remise en cause de l'ensemble de la protection sociale et tout ceci montre bien qu'on veut petit à petit mettre les salariés en situation de faiblesse, tirer tout vers le bas, diminuer les salaires, diminuer les coûts. Je pense que ce n'est pas comme cela que progresse un pays moderne. Je pense que nous devons faire en sorte d'avoir un dialogue social de qualité, et ce que je reproche à la position commune et c'est pour ça que la CFE-CGC ne l'a pas signé, c'est qu'on renvoie tout...
ERIC REVEL - Signé par la CFDT et la CGT.
BERNARD VAN CRAEYNEST - Absolument, on renvoie tout à la négociation dans l'entreprise. Or vous savez qu'il y a des centaines de milliers d'entreprises, des millions de salariés aujourd'hui...
ERIC REVEL - Qui n'ont pas de représentation à l'intérieur...
BERNARD VAN CRAEYNEST - Qui n'ont pas de représentation, donc on est en train de s'engager dans une formule qui consiste à remplacer le Code du Travail, par le Code du Commerce et la négociation de gré à gré.
ERIC REVEL - Alors une bonne nouvelle quand même, Bernard VAN CRAEYNEST, qui va vous faire sortir un peu de votre colère, là, on vous sent un peu énervé, ce soir. Le chômage de nouveau est réduit en France, de 8400 nous dit Bercy et l'INSEE, c'est une bonne nouvelle quand même, le taux de chômage qui se réduit en France ? La politique gouvernementale a des fruits qui portent ?
BERNARD VAN CRAEYNEST - C'est une excellente nouvelle, pour les 8400 personnes qui ont retrouvé un emploi. Je souhaiterai que les 2 millions d'autres qui sont inscrits, plus les millions qui voudraient travailler davantage quand ils sont à temps partiel, puissent voir leur situation s'améliorer. Ce que j'observe malheureusement, c'est que c'est peut-être le chant du cygne de la décrue du chômage. Parce que quand on regarde les statistiques publiées par le ministère, on s'aperçoit qu'il y a d'autres indicateurs préoccupants. Sur le dernier trimestre nous voyons une augmentation sensible de l'inscription de demandeurs d'emplois pour des fins de mission d'intérim, pour des fins de CDD, voire une légère reprise...
ERIC REVEL - Donc pour vous, c'est la fin de la décrue ? C'est ce que vous annoncez ? C'est la fin de la décrue du chômage ?
BERNARD VAN CRAEYNEST - Je le crains, je ne le souhaite pas du tout, je préférerais bien évidemment, et ça serait très utile pour l'ensemble de nos finances et pour l'ensemble des salariés de ce pays que tous aient un emploi, si possible un emploi bien payé, avec une bonne protection sociale.
ERIC REVEL - Merci Bernard VAN CRAEYNEST, président de la CFE-CGC de toutes ces explications.Source http://www.cfecgc.org, le 12 juin 2008