Texte intégral
Monsieur le Président, cher Jacques Louvet
Mesdames, Messieurs,
C'est un grand plaisir pour moi de venir m'exprimer devant vous à l'occasion de l'assemblée générale de la Fédération Nationale de la Presse d'information Spécialisée. Je tenais par ma présence à vous dire tout l'attachement que le gouvernement porte à cette presse qui joue un rôle si essentiel dans le paysage médiatique français.
Cette fédération rassemble les entreprises de presse qui ont choisi d'apporter aux professionnels de tous bords une information vérifiée, hiérarchisée, dans un contexte dont vous avez parfaitement décrit, Monsieur le Président, la complexité. Ce travail d'expertise et d'analyse, les 1500 titres de la presse d'information spécialisée s'en sont saisis et apportent en ce sens une plus-value incontestable. Je suis donc particulièrement attentive aux problématiques spécifiques à votre secteur.
Monsieur le Président, vous avez parlé tout à l'heure de « temps d'incertitudes » pour la presse écrite, du fait notamment de l'avènement de l'instantanéité et de la gratuité. Au-delà de la crise dont tout le monde parle, je crois que la presse traverse surtout une période de mutation profonde. Dans cette révolution, le gouvernement souhaite vous accompagner pour que vos entreprises et vos publications puissent relever les défis liés à leur adaptation.
L'Etat a poursuivi, cette année encore, des efforts nourris en direction de la presse. Avec un budget total de 285 Meuros, la loi de finances initiale pour 2008 affiche une progression de 5% des crédits consacrés à la presse et cela dans un contexte budgétaire restreint. L'ambition du Gouvernement s'affiche clairement dans ce budget : accompagner les efforts de modernisation de la presse sur la base d'une plus grande contractualisation et maintenir son soutien à la diffusion et au pluralisme.
Je n'en oublie pas pour autant, Mesdames et Messieurs, les problématiques plus concrètes qui vous sont posées, à vous représentants de la presse ne s'adressant pas tous au grand public. Vous m'avez d'ailleurs interpellée tout à l'heure, Monsieur le Président, sur plusieurs points. Je veux y répondre brièvement.
Vous avez soulevé quatre grandes interrogations : la question de la distribution postale à travers les négociations en cours des nouveaux accords Presse-Poste ; la présence de la presse spécialisée dans le régime préférentiel de la presse ; la problématique lourde de sens des droits d'auteurs et enfin le cas de la circulaire de 2006, sur laquelle je souhaiterais apporter quelques précisions.
Quelques mots d'abord, concernant la distribution postale qui concerne, je le sais, plus de 80% des modes de diffusion de la presse spécialisée. La contribution de l'Etat au service obligatoire du transport postal de la presse constitue un des soutiens importants que les pouvoirs publics apportent à ce secteur.
La mission confiée à Marc Schwartz en janvier dernier a précisément pour but de rechercher des garanties d'avenir pour le transport postal de la presse. Les orientations proposées doivent couvrir la problématique de la distribution postale sur plusieurs années, en pleine concertation avec les professionnels. L'Etat veillera à ce que le nouveau cadre relationnel continue à assurer le pluralisme de l'information et l'accès aux titres sur tout le territoire.
L'un des enjeux essentiels réside dans le déficit que ce transport engendre pour La Poste et que nous devons tous tâcher de réduire. Il en va de la survie du système de distribution postale auquel l'Etat consacre chaque année une aide directe de plus de 240 Meuros.
J'ai reçu Marc Schwartz il y a quelques semaines au ministère pour qu'il me remette son rapport d'étape, rendu public la semaine dernière. Je sais qu'il est le fruit d'un travail partagé, en collaboration étroite avec l'ensemble des éditeurs dans une atmosphère que chacun a jugé constructive. Ce rapport dresse un bilan contradictoire de l'accord de 2004 et donne le cap pour le rapport final qui doit m'être présenté dans les prochaines semaines. Nous disposerons alors de propositions pour mettre en oeuvre ce nouvel accord postal. L'échéance de 2011, date de l'ouverture complète à la concurrence du marché postal, nous oblige à reconfigurer pleinement les modalités de l'aide publique.
La presse spécialisée, à travers vos représentants, a été étroitement associée aux travaux de cette commission. Je tiens également à souligner que la mise en place, dans le cadre des accords de 2004, d'un troisième tarif postal pour la presse économique, a fortement bénéficié à bon nombre de titres de la presse d'information spécialisée. Je sais également tout l'attachement que le Syndicat de la presse agricole et rurale (membre de la FNPS) notamment porte à l'un des deux fonds alimentant l'aide postale et se concentrant spécifiquement dans la distribution en zones peu denses. Il importe en effet que le nouveau cadre relationnel continue d'assurer à tous les lecteurs l'accès aux titres sur tout le territoire.
Un mot maintenant sur les craintes que vous avez exprimées quant à la sortie possible de la presse spécialisée du régime préférentiel accordé à la presse. Je suis consciente de l'enjeu que représente pour vous la durée des futurs accords, de même que le périmètre des publications qui seront concernées. Je souhaite en tout cas que la négociation ouverte par Marc Schwartz ait abouti dans les prochaines semaines, avant l'été, pour que l'engagement financier qui sera pris par l'Etat puisse être inscrit dans le PLF 2009.
Au-delà de la problématique de distribution de la presse, le Président de la République a appelé à la tenue d'Etats Généraux de la presse. L'utilisation de ce terme illustre parfaitement la prise de conscience par le gouvernement de l'urgence de la situation. La période qui s'ouvre, nous la vivrons ensemble. Elle doit permettre à tous les professionnels de la presse, à commencer par vous, de réfléchir et de débattre sur l'avenir de la presse française. Ce débat se fera dans la plus grande transparence et avec un souci de responsabilité de la part de chacun : responsabilité de l'Etat quant à son soutien vis-à-vis des professionnels ; responsabilité des professionnels vis-à-vis des contraintes budgétaires qui limitent fortement nos efforts mais pas notre volonté de vous soutenir.
J'en viens maintenant à la question des droits d'auteurs, rendue particulièrement cruciale avec l'émergence du numérique et d'internet. Depuis plusieurs années, des discussions sont menées pour la sécurisation juridique des exploitations par les éditeurs des contributions des journalistes. Avec la DDM, nous avons suivi attentivement l'évolution des réflexions engagées, notamment sur la création d'un statut de l'oeuvre multimédia, convaincus de la nécessité de régler cette question au plus vite. Là encore, les concertations en cours avec l'ensemble des représentants des professionnels permettront de dégager une conclusion équilibrée et satisfaisante pour tous les acteurs. Je suis prête à légiférer d'ici la fin de l'année pour donner une sécurité juridique aux éditeurs et aux journalistes. Nos discussions dans le cadre des Etats Généraux ne manqueront pas d'aborder ce thème si essentiel.
Je souhaiterais enfin apporter quelques précisions sur la circulaire dont vous faisiez mention, Monsieur le Président, dans votre propos, car je ne partage pas pleinement votre analyse. Je veux dire que cette circulaire intervient dans un contexte de forte évolution législative concernant la formation professionnelle, dans laquelle la presse spécialisée a bien évidemment tout son rôle à jouer. La circulaire de 2006 ne supprime pas l'imputabilité des abonnements sur la contribution légale à la formation professionnelle mais elle la conditionne. Ces abonnements sont ainsi soumis à des critères précis liés à une action de formation particulière, au fonctionnement de groupes d'action mis en oeuvre régulièrement par l'entreprise ou d'un centre de formation de l'entreprise. Cependant, j'ai entendu vos préoccupations sur cette question qui relève du ministère du Travail et je compte donc en discuter avec Xavier Bertrand prochainement.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
A l'heure où s'engage pour la presse, pour celles et ceux qui la font, journalistes, distributeurs et bien sûr éditeurs, un débat sans précédent destiné à repenser l'avenir de l'écrit et du papier en France, je veux vous inviter à y apporter votre contribution, à faire entendre la voix de vos publications dans les différents débats.
Je compte donc sur le FNPS, sur les 7 syndicats qui en sont membres ainsi que sur les 700 éditeurs que vous représentez pour y prendre une part active. Ce travail de dialogue, de réflexion et, si vous me permettez, d'imagination, ne se fera pas sans vous.
Je vous remercie.
Source http://www.culture.gouv.fr, le 25 juin 2008