Déclaration de Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat à la solidarité, sur les comptes de la sécurité sociale et de l'assurance maladie, notamment la branche vieillesse, la branche famille et les politiques médico-sociales, Paris le 18 juin 2008.

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Circonstance : Présentation des comptes de la sécurité sociale à Paris le 18 juin 2008

Texte intégral

 


Je tiens d'abord à saluer le remarquable travail accompli par notre Secrétaire général, M. MONIER, ainsi que par la Direction de la Sécurité sociale et les équipes de M. LIBAULT, pour préparer cette Commission des Comptes avec efficacité et rapidité.
Je vous prie d'excuser Xavier BERTRAND et Nadine MORANO qui regrettent de ne pouvoir être là aujourd'hui.
Après les présentations que vous ont faites Eric WOERTH et Roselyne BACHELOT, je vous présenterai l'état des comptes dans le champ de la Sécurité sociale dont Xavier BERTRAND, Nadine MORANO et moi-même avons la charge.
I- Je souhaiterais premièrement vous présenter la situation de la branche vieillesse.
En ce domaine, la dégradation se poursuit : le déficit serait de 5,6 milliards d'euros cette année, soit 1 milliard d'euros de plus qu'en 2007. Cette tendance est même plus accentuée dans les prévisions que la CCSS évoque pour 2008 que dans celles de la LFSS. Il nous faut analyser ces chiffres pour mieux comprendre ce qui est en jeu. Cet écart de 400 millions d'euros s'explique par deux facteurs : d'abord, le dynamisme persistant des départs anticipés dans le cadre du dispositif "carrières longues" ; ensuite, la revalorisation supplémentaire de 0,8% des pensions au 1er septembre pour faire face à une inflation plus forte que prévue, revalorisation annoncée par le Président de la République dans les perspectives de la conférence de revalorisation des pensions que Xavier BERTRAND a présidée le 20 décembre dernier.
Afin d'éviter que de tels écarts de prévisions ne se reproduisent à l'avenir, nous voulons proposer au Parlement de modifier la loi pour que la revalorisation intervienne désormais au 1er avril, comme dans les régimes complémentaires.
Vous me permettrez d'ajouter quelques mots concernant le rendez-vous 2008 sur les retraites.
Après concertation avec les partenaires sociaux, le Gouvernement a précisé ses intentions le 28 avril dernier en indiquant que les mesures correspondantes seraient prises dans le cadre du PLFSS ou du PLF de l'automne, ou par voie réglementaire.
L'application de la loi du 21 août 2003 a été confirmée, qu'il s'agisse de la durée de cotisation, de la reconduction du dispositif "carrières longues" ou encore d'un objectif de minimum de pension pour une carrière complète.
S'il est nécessaire de travailler un peu plus longtemps pour tenir compte de l'augmentation de l'espérance de vie, nous devons aussi avoir tous conscience qu'il faudra consacrer davantage de ressources au financement des retraites en organisant progressivement un redéploiement au sein de la protection sociale, comme cela avait été prévu en 2003.
Le Gouvernement envisage également la mise en oeuvre de mesures attendues pour les retraités : je pense à la revalorisation du minimum vieillesse ainsi qu'à l'augmentation de 54% à 60% du taux de réversion, je pense enfin aux retraites agricoles. Tous nos engagements seront tenus.
Pour finir sur ce sujet, je tiens à rappeler que, comme les partenaires sociaux, nous pensons que la priorité est d'améliorer l'emploi des seniors. Un groupe de travail spécifique a été mis en place le 15 mai et des concertations bilatérales ont été menées depuis un mois pour discuter et compléter les propositions du Gouvernement. Xavier BERTRAND et Laurent WAUQUIEZ indiqueront le 26 juin prochain les mesures qui seront retenues.
II- Je voudrais maintenant aborder nos politiques médico-sociales, dont une large part du financement est assurée par l'assurance maladie
L'ONDAM médico-social qui finance une part importante des établissements et services pour personnes âgées et handicapées connaît une progression soutenue (+8% en 2008) pour faire face à la montée en charge des personnes dépendantes, et cela devra se poursuivre au cours des prochaines années. En contrepartie, nous faisons un effort sans précédent pour que le secteur médico-social s'engage sur le chemin de la régulation et de l'efficacité de la dépense.
A ce titre, deux mesures adoptées récemment méritent d'être citées.
D'une part, dans le cadre du PLFSS 2008, le Gouvernement n'a pas souhaité accepter un nouveau report de la date limite pour conclure une convention tripartite entre une maison de retraite, l'Etat et le département. Aujourd'hui nous recueillons les fruits de cette décision : au 30 mars 2008 le taux de conventionnement s'élève à 96%.
Mais je ne veux pas m'arrêter à ce bilan : il reste environ 24 000 places à conventionner. Mon objectif d'est d'atteindre 100% à la fin de cette année et tout doit être mis en oeuvre pour y parvenir.
D'autre part, le Gouvernement a également pris en 2008 une autre décision forte, en décidant de réintroduire les dispositifs médicaux dans le budget des EHPAD. L'arrêté fixant la liste des dispositifs médicaux vient d'être publié. Cela permettra non seulement de mieux réguler la dépense, mais également de supprimer le ticket modérateur pour les résidents des EHPAD qui supportent déjà un reste à charge élevé au titre de leur hébergement.
Cette opération me semble exemplaire des mesures que nous devrons prendre à l'avenir pour, dans un même mouvement, mieux répondre aux besoins en soins des personnes âgées et mieux réguler la dépense. C'est pourquoi que je souhaite une réflexion approfondie sur l'éventualité d'un passage au tarif global pour l'ensemble des maisons de retraite.
Ces mesures nous permettent également de mieux intégrer la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer dans les EHPAD. Cette amélioration fait partie, aux côtés d'un plus grand soutien aux aidants et de l'amélioration de la prise en charge à domicile, des priorités du Plan présidentiel de lutte contre la maladie d'Alzheimer 2008-2012.
J'aimerais enfin vous présenter la réflexion que nous menons actuellement avec Xavier BERTRAND, dans le cadre fixé par le Président de la République, pour mettre en place le cinquième risque de protection sociale. Notre système de protection sociale n'apporte pas aujourd'hui de réponse satisfaisante au défi de la perte d'autonomie. Au-delà de la maîtrise des dépenses et de l'efficacité dans leur utilisation, c'est bien notre modèle social qui est en jeu : nous voulons construire un édifice qui soit à la fois solidaire et pérenne. Cela implique de tenir nos engagements pour les capacités d'accueil des personnes âgées et handicapées, cela implique aussi de sécuriser les financements pour que chacun ait le choix. Sur ce sujet, la concertation se poursuit. Après la présentation des premières orientations du Gouvernement le 28 mai dernier, notre objectif reste l'élaboration d'un projet de loi pour la fin de l'année 2008.
III- Je voudrais ensuite aborder le thème des conditions de travail, notamment dans ses volets santé et sécurité, thème qui a fait l'objet d'une attention particulière cette année, en lien avec la branche Accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP).
La branche des AT-MP devrait redevenir excédentaire cette année et la tendance devrait se confirmer en 2009.
Nous avons deux préoccupations principales pour le PLFSS 2009 :
- la transposition de l'accord interprofessionnel concernant la prévention, la tarification et la réparation de la branche AT-MP qui a été signé le 12 mars 2007, et pour lequel l'ensemble des partenaires sociaux ont été reçus par le directeur de la Sécurité sociale.
- la réforme du FCAATA, suite au rapport élaboré par M. LE GARREC et remis à Xavier BERTRAND le 24 avril dernier.
IV- Je conclurai en vous présentant les perspectives de la branche Famille.
Notre politique familiale est une réussite incontestable, comme en témoigne notre fort taux de natalité, qui place la France en tête des pays européens avec l'Irlande. En dépit de ce dynamisme, les comptes de la branche confirment leur amélioration : dès l'année 2007, la CNAF a de nouveau atteint l'équilibre. Elle devrait progressivement dégager des excédents. Cette tendance devrait se poursuivre au cours des années à venir.
Forts de cet équilibre, nous orientons notre politique de la famille selon trois priorités :
La première est l'adaptation à la vie des allocataires, comme nous l'avons fait avec la majoration unique des allocations familiales à 14 ans.
La deuxième est la simplification, dont témoigne la suppression de la déclaration de ressources spécifiques pour bénéficier des allocations familiales.
La troisième est l'accompagnement des familles, pour les aider à trouver plus simplement et plus rapidement un mode de garde adapté à leurs besoins. A cette fin, l'instauration d'un identifiant unique permettra d'apporter aux familles une solution individualisée et de donner lieu à un partage du système d'informations entre CAF et communes ou intercommunalité. Plus largement, nous voulons intensifier et diversifier l'offre de garde des enfants. Il serait notamment envisageable d'encourager le rôle des seniors, en leur donnant la possibilité de s'insérer dans les nouveaux dispositifs de gardes d'enfants, alliant réinsertion dans le monde du travail et solidarité intergénérationnelle.
En conclusion, je voudrais insister sur l'idée que le fonctionnement de notre modèle social doit être envisagé selon une approche décloisonnée : face aux nouveaux besoins qui apparaissent, il faut avoir le courage de s'interroger sur la meilleure affectation des moyens. Nous avons donc aujourd'hui une responsabilité historique : parfaire l'édifice de solidarité nationale mis en place à la Libération, le rénover et l'adapter à la France du XXIe siècle, dans la fidélité aux idéaux qui ont présidé à la naissance du modèle social français.
Source http://www.travail.gouv.fr, le 19 juin 2008