Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs,
La présidence française du Conseil de l'Union européenne commencera dans dix jours.
Il y a dix jours, l'Irlande votait "non" à la ratification du traité de Lisbonne.
C'est à ce moment charnière, dans un contexte porteur de grands espoirs mais aussi de vraies interrogations, que vous avez souhaité m'entendre sur les priorités et les actions de mon ministère, lors de la présidence française.
Votre invitation tombait à point nommé. Je tiens à vous remercier, monsieur le président, pour cette occasion que vous nous donnez d'évoquer ensemble les défis de la santé en Europe, et la voix que la France souhaite faire entendre.
Le Président de la République, Nicolas SARKOZY veut promouvoir une Europe du concret, une Europe qui sache se faire entendre, se faire connaître et reconnaître par ses concitoyens. Les priorités du Président portent donc dans des domaines où la plus-value d'une action européenne s'impose comme une évidence, un surcroît de force et d'efficacité au service de causes qui nous concernent tous.
Ces priorités, vous les connaissez, sans doute. Je me contenterai de les rappeler à grands traits. La France a ainsi pour but de :
Jeter les bases d'une véritable Europe de la défense
Lancer le Pacte européen sur l'immigration pour faire face, de manière concertée, à la gestion des flux migratoires ;
Négocier un paquet Energie-climat pour répondre à la crise pétrolière et de dérèglements climatiques ;
Enfin, préparer l'avenir de la Politique Agricole Commune, au moment où le cours des denrées s'envole, et où les pays en voie de développement sont confrontés à des émeutes de la faim.
Tous les ministères travaillent depuis un an à la préparation de cette présidence. La réflexion, les initiatives et les projets du gouvernement de français déploieront dans trois temporalités.
La première est législative. Nous serons les héritiers de travaux engagés par d'autres avant nous, que ce soit la Commission européenne ou les présidences antérieures. Le système communautaire est ainsi fait que certains des projets législatifs que nous allons porter ont été conçus par d'autres. Les Etats qui succéderont à la France auront la responsabilité, après nous, de mettre en place les résolutions issues de nos priorités. Cette fluidité est la marque de notre oeuvre commune.
La deuxième temporalité est institutionnelle.
La France a élaboré un programme pour 18 mois, en accord avec les deux pays qui lui succéderont : la République Tchèque et la Suède.
Nous ne serons donc pas seuls à la manoeuvre. Cet exercice garantit en revanche une véritable continuité des travaux. Cette partition jouée à trois voix préfigure ainsi la présidence permanente et stable du Conseil de l'Union que nous verrons naître un jour.
La troisième et dernière temporalité, enfin, est politique. Nos priorités doivent tenir compte des attentes de nombreux acteurs : parlementaires européens, membres de la Commission européenne, partenaires sociaux, monde de l'entreprise, et bien évidemment, société civile. Tous doivent pouvoir être associés au débat.
Les Irlandais viennent de voter "non" au Traité de Lisbonne. C'est un choix que, personnellement, je regrette, mais que nous devons respecter.
Les chefs d'Etats et de gouvernements étaient rassemblés hier à Bruxelles pour entendre le premier ministre irlandais, et trouver une issue à cette crise, qui, par tant d'aspects, nous renvoie au coup d'arrêt momentané porté par les "non" français et néerlandais de 2005.
Aujourd'hui, nous ne devons pas feindre d'ignorer cette crise, ni ignorer la défiance qui, à plusieurs reprises, s'est exprimée face au projet européen.
Nous ne convaincrons pas les peuples en nous contentant de monter le volume, au moment d'entonner nos professions de foi européennes.
Il ne s'agit pas de parler plus fort.
Il s'agit de parler autrement d'Europe.
Il nous faut désormais prouver, par des actes et dans les faits, que seule l'Europe peut apporter des solutions efficaces et concrètes aux préoccupations des Européens.
Les priorités politiques de la France visent ainsi à relancer l'adhésion de nos concitoyens au projet européen.
Le traité de Lisbonne comporte des innovations institutionnelles importantes pour la santé.
Je pense notamment à la nouvelle rédaction de l'article 152, qui permet de mieux coordonner la gestion européenne de la sécurité sanitaire. Celle-ci dépend pour l'instant d'un cadre juridique lâche, qui ne concerne que la santé animale.
L'Union européenne, aujourd'hui, est bien armée face aux épizooties. Elle doit pouvoir réagir demain avec la même efficacité face à une crise pour la santé humaine.
La santé est, par excellence, le domaine où les Etats demeurent libres de définir et de financer leur offre de soins et de planifier leur gestion des risques, il apparaît nécessaire de mieux coordonner nos systèmes de santé, parfois bousculés par le fonctionnement d'un grand marché intérieur, qui ne tient pas assez compte de certains impératifs de santé publique.
Le traité de Lisbonne prévoit ainsi de mettre en place la "méthode ouverte de coordination(MOC)" en santé, bâtie sur le modèle éprouvé de la MOC dans le secteur "Emploi". Cette méthode a permis d'accomplir un travail de pédagogie remarquable, ces dernières années : nous lui devons par exemple la diffusion du modèle scandinave de "flexsécurité".
Si aujourd'hui, l'avenir du traité de Lisbonne reste incertain, nous devons cependant continuer à avancer.
La santé en Europe a en effet tout à attendre des innovations qu'il comporte.
Les objectifs de la présidence française en matière de santé sont ambitieux.
Le futur trio présidentiel -France, République Tchèque et Suède- a arrêté cinq axes de travail pour les 18 mois à venir.
Améliorer la sécurité sanitaire.
Vieillir en bonne santé
Concrétiser l'Europe de la santé au service des patients et de leurs familles
Agir sur les déterminants de santé
Faire progresser les dossiers relatifs aux médicaments
* Améliorer la sécurité sanitaire.
Notre objectif est d'évaluer le degré de préparation des Etats face à une crise de grande ampleur, et de mesurer ainsi notre fragilité collective potentielle.
"The readiness is all" disait Shakespeare.
La France est convaincue qu'à terme, il faudra mettre au point les outils nécessaires à une meilleure coordination de la gestion des risques sanitaires au sein de l'Union européenne.
Les efforts accomplis dans le domaine de la préparation à une pandémie grippale fourniront le point de départ de cette réflexion que je veux particulièrement fructueuse.
Le second volet de cette priorité sera l'engagement des réformes du Comité de sécurité Sanitaire et du Centre de contrôle des maladies (ECDC), réformes prévues en 2009.
Les 8 et 9 septembre prochains, je tiendrai une réunion informelle des ministres à Angers, sur le thème de "la gestion de risques sanitaires de grande ampleur", réunion qui sera précédée d'un séminaire d'experts sur la Grippe.
* Vieillir en bonne santé
Les défis politiques, économiques et sociaux que représentent le vieillissement, et la gestion de la dépendance en Europe sont immenses.
La France les abordera en particulier sous l'angle de la lutte contre la maladie d'Alzheimer. Priorité nationale du Président de la République, ce choix s'est imposé comme une évidence, tant la réflexion française est avancée sur ce point, depuis la publication du rapport MENARD, l'année dernière, et la mission visant à mettre en oeuvre ses conclusions.
Une grande conférence ministérielle sera organisée autour de la maladie d'Alzheimer les 30 et 31 octobre 2008 à Paris.
Ce rendez-vous, qui réunira politiques et experts, nous permettra d'établir toutes les modalités d'une action européenne, en termes de financement de la recherche, d'établissement de lignes directrices dans le domaine des soins et de l'accompagnement social. Nous réfléchirons également à la soutenabilité financière des systèmes nationaux, ainsi qu'à l'évolution des métiers et compétences des aidants.
* Concrétiser l'Europe de la santé au service des patients et de leurs familles
Ce thème large, qui répond à des attentes concrètes des citoyens européens, regroupe plusieurs projets législatifs et non législatifs. Je pense en particulier à un important projet de directive sur les soins de santé transfrontaliers que la Commissaire européenne Androulla VASSILIOU pourrait présenter dans le cadre de l'agenda social rénové, le 2 juillet prochain. Dans cette perspective, la France organisera une conférence ministérielle sur le thème de "l'Europe de la santé au service des patients" les 13 et 14 octobre prochains à l'institut Pasteur de Paris.
La présidence française devrait également traiter d'une communication sur les maladies rares, sur laquelle notre pays est en pointe, depuis le lancement du plan national maladies rares qui doit s'achever cette année. Les dons d'organes feront également l'objet de nombreux échanges avec nos partenaires européens, qui se concrétiseront par un projet de directive.
De grandes avancées sont également en préparation dans les domaines de la sécurité des patients, de la lutte contre les maladies nosocomiales ou de la résistance aux antibiotiques. Cette question essentielle fera l'objet de plusieurs réunions d'experts, dont une organisée par l'Institut National de Veille Sanitaire.
* Agir sur les déterminants de santé.
Alcool et Tabac viennent au premier rang des déterminants "comportementaux". La lutte contre la consommation d'alcool, notamment chez les jeunes, sera une priorité de la Suède.
La France, qui a récemment imposé l'interdiction de fumer dans tous les lieux publics, coordonnera les positions des pays de l'UE dans le cadre des travaux liés à la "Convention internationale de lutte contre le tabagisme" qui se dérouleront à Durban, en Afrique du Sud. Le tabac sera également le sujet principal de discussion de la réunion des directeurs de la santé, le 2 octobre prochain.
* Faire progresser les dossiers relatifs aux médicaments
La France est particulièrement sensible à la question du médicament. Notre pays est un grand pays d'industrie pharmaceutique et entend le rester. Comme j'ai pu vous le dire mercredi soir, nous soutiendrons les initiatives du Commissaire VERHEUGEN, dans le sens du renforcement de l'innovation et de l'implantation de cette industrie sur le sol européen. L'engagement de la France dans la plateforme européenne Initiative Médicaments Innovants témoigne de l'esprit dans lequel nous allons travailler.
La Commission européenne prépare des initiatives dans les domaines de la pharmacovigilance et de l'information des patients. Elle s'attellera également à la révision de la législation relative aux modifications d'autorisations de mise sur le marché (AMM) afin d'étendre aux AMM nationales le modèle existant pour les procédures communautaires, et de simplifier la gestion administrative des dossiers.
La Commission prépare également une Communication sur l'avenir des produits pharmaceutiques et une initiative dans le domaine de la lutte contre la contrefaçon. La plupart de ces initiatives seront à terme rassemblées dans un paquet global, que la France préparera activement en amont.
Reste enfin la question de la contrefaçon des médicaments, question qui me tient particulièrement à coeur.
La France est fière d'être l'un des rares pays préservé de la pénétration de contrefaçons médicamenteuses, en-dehors des voies illégales.
Bien des pays dans le monde, et en Europe même, ont connu ou connaissent les drames auxquels peut conduire la moindre brèche dans le système de sécurisation du circuit du médicament.
Dans les meilleurs des cas, les patients ne sont pas soignés par les produits neutres contenus dans les comprimés contrefaits.
D'autres médicaments en revanche, peuvent se révéler toxiques.
La morbidité et la mortalité liées à la contrefaçon sont d'autant plus significatives que ces faux produits peuvent être largement diffusés, en dépit des contrôles éventuels.
Sans vouloir poser notre pays en modèle, je veux que nous puissions réfléchir aux enjeux de la sécurisation du circuit du médicament, ainsi qu'aux conséquences de failles éventuelles dans son organisation. Notre vigilance ne saurait être prise en défaut. Les services de mon ministère travaillent ainsi actuellement à garantir l'inviolabilité des boîtes de médicaments présentées à l'avant des comptoirs, dans les pharmacies.
Je tiens à redire, ici, que les médicaments ne sauraient être considérés comme des biens de consommation ordinaire, qu'on pourrait se procurer entre deux boîtes de conserve.
Une chaîne de distribution non spécifique peut devenir un point d'entrée potentiel pour les médicaments contrefaits.
La récupération de médicaments non utilisés pour les pays en voie de développement peut également présenter des risques de progression de la contrefaçon.
A ma demande, le Forum pharmaceutique du 2 octobre prochain à Bruxelles se réunira donc sur le thème de la lutte contre la contrefaçon.
Avant cette date, la présidence française soutiendra et labellisera l'initiative du LEEM et de l'IMS, qui organiseront un grand colloque le 10 septembre prochain à la Sorbonne autour des "défis de l'Europe de la santé".
L'Europe de la santé est depuis longtemps une réalité pratique.
Les patients, les médicaments, les professionnels de santé circulent librement.
Les capitaux aussi, qui s'investissent de plus en plus souvent au-delà de leurs frontières d'origine.
Si l'Europe de la santé a un contenu, il nous reste toutefois à lui donner des contours juridiques, une armature souple et solide, qui lui permette d'assurer à tous les ressortissants de l'Union européenne les mêmes garanties de santé publique.
Dans ce grand effort de réflexion et d'action collective, rien n'est écrit d'avance.
L'actualité politique récente vient de le démontrer.
Si la crise que traverse l'Europe aujourd'hui nous incite à remettre en question certaines de nos certitudes, elle nous invite à nous investir plus fortement, plus énergiquement dans la construction d'une santé commune pour tous les Européens.
Cette mobilisation ne doit pas seulement concerner les responsables politiques. Elle appelle un engagement des partenaires sociaux, des entrepreneurs et de la société civile dans son entier.
Il en va de votre intérêt comme de l'intérêt général.
En cette période de doutes sur l'avenir politique de notre Union, les entrepreneurs du secteur de la santé peuvent et doivent revendiquer un rôle déterminant dans cette dynamique.
Je ne doute pas de votre participation active à ce débat.
Comptez sur moi pour vous entendre, et pour faire entendre toutes vos initiatives.
Je vous remercie.Source http://www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr, le 25 juin 2008
Mesdames et messieurs,
La présidence française du Conseil de l'Union européenne commencera dans dix jours.
Il y a dix jours, l'Irlande votait "non" à la ratification du traité de Lisbonne.
C'est à ce moment charnière, dans un contexte porteur de grands espoirs mais aussi de vraies interrogations, que vous avez souhaité m'entendre sur les priorités et les actions de mon ministère, lors de la présidence française.
Votre invitation tombait à point nommé. Je tiens à vous remercier, monsieur le président, pour cette occasion que vous nous donnez d'évoquer ensemble les défis de la santé en Europe, et la voix que la France souhaite faire entendre.
Le Président de la République, Nicolas SARKOZY veut promouvoir une Europe du concret, une Europe qui sache se faire entendre, se faire connaître et reconnaître par ses concitoyens. Les priorités du Président portent donc dans des domaines où la plus-value d'une action européenne s'impose comme une évidence, un surcroît de force et d'efficacité au service de causes qui nous concernent tous.
Ces priorités, vous les connaissez, sans doute. Je me contenterai de les rappeler à grands traits. La France a ainsi pour but de :
Jeter les bases d'une véritable Europe de la défense
Lancer le Pacte européen sur l'immigration pour faire face, de manière concertée, à la gestion des flux migratoires ;
Négocier un paquet Energie-climat pour répondre à la crise pétrolière et de dérèglements climatiques ;
Enfin, préparer l'avenir de la Politique Agricole Commune, au moment où le cours des denrées s'envole, et où les pays en voie de développement sont confrontés à des émeutes de la faim.
Tous les ministères travaillent depuis un an à la préparation de cette présidence. La réflexion, les initiatives et les projets du gouvernement de français déploieront dans trois temporalités.
La première est législative. Nous serons les héritiers de travaux engagés par d'autres avant nous, que ce soit la Commission européenne ou les présidences antérieures. Le système communautaire est ainsi fait que certains des projets législatifs que nous allons porter ont été conçus par d'autres. Les Etats qui succéderont à la France auront la responsabilité, après nous, de mettre en place les résolutions issues de nos priorités. Cette fluidité est la marque de notre oeuvre commune.
La deuxième temporalité est institutionnelle.
La France a élaboré un programme pour 18 mois, en accord avec les deux pays qui lui succéderont : la République Tchèque et la Suède.
Nous ne serons donc pas seuls à la manoeuvre. Cet exercice garantit en revanche une véritable continuité des travaux. Cette partition jouée à trois voix préfigure ainsi la présidence permanente et stable du Conseil de l'Union que nous verrons naître un jour.
La troisième et dernière temporalité, enfin, est politique. Nos priorités doivent tenir compte des attentes de nombreux acteurs : parlementaires européens, membres de la Commission européenne, partenaires sociaux, monde de l'entreprise, et bien évidemment, société civile. Tous doivent pouvoir être associés au débat.
Les Irlandais viennent de voter "non" au Traité de Lisbonne. C'est un choix que, personnellement, je regrette, mais que nous devons respecter.
Les chefs d'Etats et de gouvernements étaient rassemblés hier à Bruxelles pour entendre le premier ministre irlandais, et trouver une issue à cette crise, qui, par tant d'aspects, nous renvoie au coup d'arrêt momentané porté par les "non" français et néerlandais de 2005.
Aujourd'hui, nous ne devons pas feindre d'ignorer cette crise, ni ignorer la défiance qui, à plusieurs reprises, s'est exprimée face au projet européen.
Nous ne convaincrons pas les peuples en nous contentant de monter le volume, au moment d'entonner nos professions de foi européennes.
Il ne s'agit pas de parler plus fort.
Il s'agit de parler autrement d'Europe.
Il nous faut désormais prouver, par des actes et dans les faits, que seule l'Europe peut apporter des solutions efficaces et concrètes aux préoccupations des Européens.
Les priorités politiques de la France visent ainsi à relancer l'adhésion de nos concitoyens au projet européen.
Le traité de Lisbonne comporte des innovations institutionnelles importantes pour la santé.
Je pense notamment à la nouvelle rédaction de l'article 152, qui permet de mieux coordonner la gestion européenne de la sécurité sanitaire. Celle-ci dépend pour l'instant d'un cadre juridique lâche, qui ne concerne que la santé animale.
L'Union européenne, aujourd'hui, est bien armée face aux épizooties. Elle doit pouvoir réagir demain avec la même efficacité face à une crise pour la santé humaine.
La santé est, par excellence, le domaine où les Etats demeurent libres de définir et de financer leur offre de soins et de planifier leur gestion des risques, il apparaît nécessaire de mieux coordonner nos systèmes de santé, parfois bousculés par le fonctionnement d'un grand marché intérieur, qui ne tient pas assez compte de certains impératifs de santé publique.
Le traité de Lisbonne prévoit ainsi de mettre en place la "méthode ouverte de coordination(MOC)" en santé, bâtie sur le modèle éprouvé de la MOC dans le secteur "Emploi". Cette méthode a permis d'accomplir un travail de pédagogie remarquable, ces dernières années : nous lui devons par exemple la diffusion du modèle scandinave de "flexsécurité".
Si aujourd'hui, l'avenir du traité de Lisbonne reste incertain, nous devons cependant continuer à avancer.
La santé en Europe a en effet tout à attendre des innovations qu'il comporte.
Les objectifs de la présidence française en matière de santé sont ambitieux.
Le futur trio présidentiel -France, République Tchèque et Suède- a arrêté cinq axes de travail pour les 18 mois à venir.
Améliorer la sécurité sanitaire.
Vieillir en bonne santé
Concrétiser l'Europe de la santé au service des patients et de leurs familles
Agir sur les déterminants de santé
Faire progresser les dossiers relatifs aux médicaments
* Améliorer la sécurité sanitaire.
Notre objectif est d'évaluer le degré de préparation des Etats face à une crise de grande ampleur, et de mesurer ainsi notre fragilité collective potentielle.
"The readiness is all" disait Shakespeare.
La France est convaincue qu'à terme, il faudra mettre au point les outils nécessaires à une meilleure coordination de la gestion des risques sanitaires au sein de l'Union européenne.
Les efforts accomplis dans le domaine de la préparation à une pandémie grippale fourniront le point de départ de cette réflexion que je veux particulièrement fructueuse.
Le second volet de cette priorité sera l'engagement des réformes du Comité de sécurité Sanitaire et du Centre de contrôle des maladies (ECDC), réformes prévues en 2009.
Les 8 et 9 septembre prochains, je tiendrai une réunion informelle des ministres à Angers, sur le thème de "la gestion de risques sanitaires de grande ampleur", réunion qui sera précédée d'un séminaire d'experts sur la Grippe.
* Vieillir en bonne santé
Les défis politiques, économiques et sociaux que représentent le vieillissement, et la gestion de la dépendance en Europe sont immenses.
La France les abordera en particulier sous l'angle de la lutte contre la maladie d'Alzheimer. Priorité nationale du Président de la République, ce choix s'est imposé comme une évidence, tant la réflexion française est avancée sur ce point, depuis la publication du rapport MENARD, l'année dernière, et la mission visant à mettre en oeuvre ses conclusions.
Une grande conférence ministérielle sera organisée autour de la maladie d'Alzheimer les 30 et 31 octobre 2008 à Paris.
Ce rendez-vous, qui réunira politiques et experts, nous permettra d'établir toutes les modalités d'une action européenne, en termes de financement de la recherche, d'établissement de lignes directrices dans le domaine des soins et de l'accompagnement social. Nous réfléchirons également à la soutenabilité financière des systèmes nationaux, ainsi qu'à l'évolution des métiers et compétences des aidants.
* Concrétiser l'Europe de la santé au service des patients et de leurs familles
Ce thème large, qui répond à des attentes concrètes des citoyens européens, regroupe plusieurs projets législatifs et non législatifs. Je pense en particulier à un important projet de directive sur les soins de santé transfrontaliers que la Commissaire européenne Androulla VASSILIOU pourrait présenter dans le cadre de l'agenda social rénové, le 2 juillet prochain. Dans cette perspective, la France organisera une conférence ministérielle sur le thème de "l'Europe de la santé au service des patients" les 13 et 14 octobre prochains à l'institut Pasteur de Paris.
La présidence française devrait également traiter d'une communication sur les maladies rares, sur laquelle notre pays est en pointe, depuis le lancement du plan national maladies rares qui doit s'achever cette année. Les dons d'organes feront également l'objet de nombreux échanges avec nos partenaires européens, qui se concrétiseront par un projet de directive.
De grandes avancées sont également en préparation dans les domaines de la sécurité des patients, de la lutte contre les maladies nosocomiales ou de la résistance aux antibiotiques. Cette question essentielle fera l'objet de plusieurs réunions d'experts, dont une organisée par l'Institut National de Veille Sanitaire.
* Agir sur les déterminants de santé.
Alcool et Tabac viennent au premier rang des déterminants "comportementaux". La lutte contre la consommation d'alcool, notamment chez les jeunes, sera une priorité de la Suède.
La France, qui a récemment imposé l'interdiction de fumer dans tous les lieux publics, coordonnera les positions des pays de l'UE dans le cadre des travaux liés à la "Convention internationale de lutte contre le tabagisme" qui se dérouleront à Durban, en Afrique du Sud. Le tabac sera également le sujet principal de discussion de la réunion des directeurs de la santé, le 2 octobre prochain.
* Faire progresser les dossiers relatifs aux médicaments
La France est particulièrement sensible à la question du médicament. Notre pays est un grand pays d'industrie pharmaceutique et entend le rester. Comme j'ai pu vous le dire mercredi soir, nous soutiendrons les initiatives du Commissaire VERHEUGEN, dans le sens du renforcement de l'innovation et de l'implantation de cette industrie sur le sol européen. L'engagement de la France dans la plateforme européenne Initiative Médicaments Innovants témoigne de l'esprit dans lequel nous allons travailler.
La Commission européenne prépare des initiatives dans les domaines de la pharmacovigilance et de l'information des patients. Elle s'attellera également à la révision de la législation relative aux modifications d'autorisations de mise sur le marché (AMM) afin d'étendre aux AMM nationales le modèle existant pour les procédures communautaires, et de simplifier la gestion administrative des dossiers.
La Commission prépare également une Communication sur l'avenir des produits pharmaceutiques et une initiative dans le domaine de la lutte contre la contrefaçon. La plupart de ces initiatives seront à terme rassemblées dans un paquet global, que la France préparera activement en amont.
Reste enfin la question de la contrefaçon des médicaments, question qui me tient particulièrement à coeur.
La France est fière d'être l'un des rares pays préservé de la pénétration de contrefaçons médicamenteuses, en-dehors des voies illégales.
Bien des pays dans le monde, et en Europe même, ont connu ou connaissent les drames auxquels peut conduire la moindre brèche dans le système de sécurisation du circuit du médicament.
Dans les meilleurs des cas, les patients ne sont pas soignés par les produits neutres contenus dans les comprimés contrefaits.
D'autres médicaments en revanche, peuvent se révéler toxiques.
La morbidité et la mortalité liées à la contrefaçon sont d'autant plus significatives que ces faux produits peuvent être largement diffusés, en dépit des contrôles éventuels.
Sans vouloir poser notre pays en modèle, je veux que nous puissions réfléchir aux enjeux de la sécurisation du circuit du médicament, ainsi qu'aux conséquences de failles éventuelles dans son organisation. Notre vigilance ne saurait être prise en défaut. Les services de mon ministère travaillent ainsi actuellement à garantir l'inviolabilité des boîtes de médicaments présentées à l'avant des comptoirs, dans les pharmacies.
Je tiens à redire, ici, que les médicaments ne sauraient être considérés comme des biens de consommation ordinaire, qu'on pourrait se procurer entre deux boîtes de conserve.
Une chaîne de distribution non spécifique peut devenir un point d'entrée potentiel pour les médicaments contrefaits.
La récupération de médicaments non utilisés pour les pays en voie de développement peut également présenter des risques de progression de la contrefaçon.
A ma demande, le Forum pharmaceutique du 2 octobre prochain à Bruxelles se réunira donc sur le thème de la lutte contre la contrefaçon.
Avant cette date, la présidence française soutiendra et labellisera l'initiative du LEEM et de l'IMS, qui organiseront un grand colloque le 10 septembre prochain à la Sorbonne autour des "défis de l'Europe de la santé".
L'Europe de la santé est depuis longtemps une réalité pratique.
Les patients, les médicaments, les professionnels de santé circulent librement.
Les capitaux aussi, qui s'investissent de plus en plus souvent au-delà de leurs frontières d'origine.
Si l'Europe de la santé a un contenu, il nous reste toutefois à lui donner des contours juridiques, une armature souple et solide, qui lui permette d'assurer à tous les ressortissants de l'Union européenne les mêmes garanties de santé publique.
Dans ce grand effort de réflexion et d'action collective, rien n'est écrit d'avance.
L'actualité politique récente vient de le démontrer.
Si la crise que traverse l'Europe aujourd'hui nous incite à remettre en question certaines de nos certitudes, elle nous invite à nous investir plus fortement, plus énergiquement dans la construction d'une santé commune pour tous les Européens.
Cette mobilisation ne doit pas seulement concerner les responsables politiques. Elle appelle un engagement des partenaires sociaux, des entrepreneurs et de la société civile dans son entier.
Il en va de votre intérêt comme de l'intérêt général.
En cette période de doutes sur l'avenir politique de notre Union, les entrepreneurs du secteur de la santé peuvent et doivent revendiquer un rôle déterminant dans cette dynamique.
Je ne doute pas de votre participation active à ce débat.
Comptez sur moi pour vous entendre, et pour faire entendre toutes vos initiatives.
Je vous remercie.Source http://www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr, le 25 juin 2008