Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Commissaire,
Cher Louis Michel,
Mesdames et Messieurs les Députés,
L'élection présidentielle qui s'est récemment tenue au Zimbabwe a reconduit Robert Mugabe à la présidence de son pays pour cinq années supplémentaires. Le second tour du scrutin a eu lieu après le retrait du seul autre candidat, M. Morgan Tsvangirai, ce qui a placé M. Mugabe en position d'obtenir 85 % des suffrages exprimés. L'élection a été qualifiée de simulacre de démocratie par un grand nombre de chefs d'Etat, y compris africains, et par le Secrétaire des Nations unies, l'estimant, pour sa part, non légitime.
Immédiatement après sa prestation de serment, M. Mugabe s'est rendu à Charm el-Cheikh où s'est déroulé le Sommet de l'Union africaine, les 30 juin et 1er juillet derniers. Lors du Sommet, le Nigeria a lancé une discussion animée sur les élections. Une résolution a été adoptée, exprimant la vive préoccupation qu'inspirait la situation au Zimbabwe. Les rapports critiques établis par les observateurs électoraux, que ce soit la SADC, l'Union africaine et le parlement panafricain ainsi que les violences et les pertes en vies humaines ont été soulignés.
La résolution encourage en outre M. Mugabe et M. Tsvangirai à nouer un dialogue dans l'intérêt du peuple du Zimbabwe, à mettre en place un gouvernement d'union nationale et à soutenir la mission de médiation entreprise par la SADC.
Face à ces développements, la communauté internationale se mobilise. Les Etats-Unis ont présenté une résolution au Conseil de sécurité de l'ONU. Celle-ci prévoit l'application de sanctions contre l'autorité du Zimbabwe : embargo sur les armes, gel d'avoirs et interdiction de voyager, et comporte en annexe une liste de 14 individus à sanctionner, dont M. Mugabe et d'autres responsables politiques, dont la plupart sont déjà inscrits sur la liste européenne des sanctions, adoptée en 2002.
Le Canada également a renforcé les mesures qu'il avait prises et le Conseil européen du 20 juin s'est déclaré prêt à prendre de nouvelles mesures qui seront d'ailleurs examinées avec M. le commissaire Louis Michel le 22 juillet. La Présidence de l'Union européenne a fermement condamné le déni de démocratie qu'a représenté le second tour de scrutin dès le lendemain de celui-ci, c'est-à-dire le 29 juin, et la Présidence a souligné, dans une nouvelle déclaration faite au nom de l'Union le 4 juillet, qu'elle n'accepterait pas le fait accompli issu du scrutin faussé du 27 juin et qu'il ne pouvait y avoir d'autre solution qu'une formule de transition reposant sur les résultats du premier tour du scrutin.
Il est, d'autre part, important que l'Afrique ait marqué sa préoccupation face à une crise de dimension régionale et il convient de soutenir les efforts qui sont faits par l'Union africaine, notamment, et la SADC, et de faire en sorte que les principes qui sont inscrits notamment dans la Charte de l'Union africaine soient respectés. Il serait bon que l'Union africaine et l'ONU soient associées à cette démarche, afin de compléter la perspective régionale de la SADC par une perspective africaine et internationale.
Dans sa résolution, l'Union africaine a également engagé les Etats et les parties à s'abstenir de prendre des mesures susceptibles de nuire au climat du dialogue. Il s'agit d'un signal envoyé notamment à l'Union européenne. L'Union ne s'abstiendra pas pour autant de préparer un élargissement de la liste des personnes responsables de violences faisant l'objet de sanctions ciblées par l'interdiction de visa ou par le gel des avoirs et l'Union, également, devra veiller à obtenir une restriction des exceptions prévues aux interdictions de visa et l'instauration de nouvelles sanctions, notamment économiques et, bien sûr, toute cette panoplie de mesures de rétorsion dépendra des progrès réalisés dans les négociations.
Les négociations entre les deux parties devraient démarrer dès que possible. Je pense que le Commissaire le confirmera, même si leur issue n'est pas fixée. Elles doivent de toute façon reposer à nos yeux sur les résultats du premier tour du 29 mars, qui constitue l'expression la plus fidèle de la volonté du peuple du Zimbabwe, alors que le second tour a été un déni de démocratie. Toute forme de coalition peut constituer une mesure transitoire en vue de nouvelles élections libres, démocratiques et transparentes, comme cela a été indiqué par le candidat face à M. Mugabe.
Enfin, je souhaite mentionner que, lors de leur dernière réunion qui vient de s'achever, les membres du G8 ont envisagé des mesures financières complémentaires visant les personnes responsables de violences à l'occasion des dernières élections. Voilà ! Il nous faut donc maintenir inlassablement cette pression pour que cette atteinte inacceptable au droit cesse.
Réponse aux orateurs :
Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, cher Louis Michel, Mesdames et Messieurs les Députés, le débat a été parfaitement clair, les conclusions à en tirer le sont également, les interventions ont été fortes et c'est bien normal, car l'Union européenne ne doit accepter qu'une formule, celle qui respecte la volonté du peuple du Zimbabwe telle qu'elle s'est exprimée lors du premier tour des élections, et c'est ce résultat qui doit servir de base à tout règlement.
Nous examinerons avec la Commission la situation du Zimbabwe à l'occasion du prochain Conseil du 22 juillet. Nous prendrons en compte les observations qui ont été formulées ainsi que les suggestions qui ont été faites, non pas à la France, Monsieur Van Orden, mais à la Présidence du Conseil de l'Union européenne. La France en elle-même n'a pas de pouvoir en tant que tel, elle a simplement le mandat qui lui est confié par l'Union européenne dans ce cadre-là, y compris ce que vous avez proposé en ce qui concerne la convocation d'une session extraordinaire sur les Droits de l'Homme à Genève si le Conseil en a, bien évidemment, la possibilité.
Nous suivrons les recommandations toujours sages et tout à fait expérimentées faites par Louis Michel en ce qui concerne le suivi des efforts de médiation. Je crois que, de ce point de vue, on ne peut pas être allé au-delà, en termes de revendications, de ce que M. Tsvangirai lui-même a recommandé au commissaire lors de l'entretien qu'il a eu avec lui, et je crois que c'est la position que nous devons suivre.
L'Union européenne, le Conseil et la Commission doivent rester en contact avec les acteurs engagés, la SADC, l'Union africaine ainsi que l'Afrique du Sud dont je salue, une nouvelle fois, la délégation qui est présente parmi nous, et nous devrons naturellement prendre en compte la résolution qui sera votée par votre Parlement demain dans le cadre des travaux que nous aurons au Conseil.
Je n'ai rien d'autre à ajouter, je m'en remets bien évidemment, sur ce point, à l'expérience et à l'éloquence de Louis Michel, sans vouloir abuser de son temps.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 juillet 2008