Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Vice-présidents,
Mesdames et Messieurs les Députés européens,
Un mot d'abord pour vous dire que je suis très heureux d'être ici parmi vous, pour faire un point, quelques jours après le début de la Présidence française, sur ce qui va être notre feuille de route à tous, en Europe, au cours du prochain semestre, sur la lutte contre le changement climatique, compte tenu des échéances qui nous attendent :
- Accra fin août, avec la 3ème réunion du groupe de travail mis en place à Bali
- Dialogue de Minuit à El Calafate en Argentine du 15 au 18 septembre
- Varsovie les 13 et 14 octobre, réunion ministérielle restreinte pour préparer Poznan
- Et enfin Poznan du 1er au 13 décembre, rendez-vous intermédiaire avant la COP de Copenhague en décembre 2009.
1/ Au fond, on pourrait résumer ainsi les six mois qui nous attendent : le monde nous regarde pour savoir si nous allons vraiment faire ce que nous disons et c'est un peu l'heure de vérité, la 24ème heure pour le monde.
Avec le Paquet « Energie/climat », nous entrons enfin dans l'action, dans le faire. C'est le « Paquet du comment ». C'est la première fois qu'une zone géographique toute entière, de dimension planétaire, propose un mode opératoire complet pour accomplir une mutation écologique intégrale :
* -30% de réductions de GES d'ici 2020 par rapport à 1990 s'il y a un accord international et -20% en tout état de cause, ces réductions étant organisées et différenciées entre le secteur industriel et énergétique (ETS) et les autres secteurs (transport, bâtiments, agriculture- non ETS)
* 20% d'énergies renouvelables en 2020.
Nous sommes les premiers à le faire et nous avons donc une responsabilité particulière vis-à-vis des autres pays qui ont placé leurs espoirs en nous.
2/ Et de ce point de vue, l'équation est assez simple : si nous parvenons à organiser la solidarité au sein de l'Europe, alors nous prouverons que c'est possible à l'échelle de la planète.
Et l'expérience montre que le passage à l'acte n'est pas aussi douloureux que nous l'imaginons.
- Le plan de réduction des SO2 aux USA (pluies acides) n'a coûté que 6% de ce qui avait été estimé au départ.
- La mise en oeuvre du protocole de Montréal sur la réduction des CFC responsables de la destruction de la couche d'ozone n'a coûté que 13% des prévisions initiales.
Passer à l'acte, c'est reconnaître que le coût de l'inaction dépassera de loin le coût de l'action (STERN, 1% du PIB chaque année de manière préventive ou 20% du PIB si on intervient au dernier moment).
Et puis, avec ETS, nous avons un outil fantastique qui :
- Incite les industries à réduire leurs émissions de CO2 en faisant un peu plus de vérité sur le prix réel du carbone, renforce et étend le marché du carbone ;
- Et qui constitue une ressource financière considérable (470 milliards d'euros sur la période 2013-2020, soit 50% du budget de l'UE pour 2007-2013 et 0,3% du PIB des 27).
Et cette manne, doit nous servir à faire deux choses :
- Organiser la solidarité à l'intérieur de l'Europe, entre Etats membres et vis-à-vis de ceux qui seront les plus touchés.
- Organiser la solidarité à l'extérieur de l'Europe.
3/ Organiser la solidarité à l'intérieur de l'Europe, ça veut dire deux choses :
? la solidarité entre les Etats membres.
Nous ne partons pas tous du même point. Certaines économies sont très charbonnées, d'autres ont investi très tôt dans les énergies basses en carbone, d'autres non raccordées au reste de l'Europe n'ont pas le choix. Certains ont des forêts, des lacs et des rivières, d'autres le soleil, d'autres encore du charbon ou du gaz. Certains pays sont isolés énergétiquement du reste de l'Europe et l'adoption du paquet énergie/climat pèse sur leur sécurité énergétique.
Il faut nous assurer que la transition sera possible pour tous.
Le revenu des enchères va nous permettre d'investir massivement dans les économies d'énergie, l'efficacité et le développement des énergies renouvelables. Nous devrons canaliser ces moyens d'investissements pour financer la transition énergétique: celle des transports, celle de l'industrie, celle du bâtiment et celle du secteur énergétique.
? la solidarité avec les acteurs les plus touchés :
On n'obtiendra pas d'accord si on ne répond pas à deux préoccupations majeures :
- La perte de pouvoir d'achat liée à la hausse insupportable du prix des énergies fossiles : en clair, les revenus des enchères doivent permettre d'amortir la hausse pour les foyers les plus démunis (bouclier énergétique).
- La perte de compétitivité des entreprises à la fois très intensives en énergie et très fortement exposées à la concurrence internationale. Ce deuxième niveau de protection peut prendre plusieurs formes : quotas gratuits ou mécanisme d'inclusion carbone des autres opérateurs, voire un mix des deux.
4/ Organiser la solidarité à l'extérieur de l'Europe :
Au titre de la feuille de route de Bali, les pays émergents ont accepté de mettre en oeuvre des actions mesurables, vérifiables et communicables. Cette évolution est conditionnée au fait que nous les soutenions, à la fois financièrement et par des transferts de technologie.
Il n'y aura donc pas d'accord à Copenhague si nous ne sommes pas capables d'organiser la solidarité à l'échelle mondiale. Nous devons y consacrer des moyens, et donner un vrai signal sur l'utilisation d'une partie du recours des enchères. Je souhaite remercier ici Avril Doyle pour ses propositions très intéressantes en la matière. Nous devrons trouver un compromis, dans le respect du droit budgétaire des Etats membres, qui permette de crédibiliser la solidarité internationale et de construire de vraies alliances avec d'autres zones géographiques.
La feuille de route de Bali définit les bases d'une solidarité renforcée entre pays en développement et pays développés pour gérer l'adaptation au changement climatique : nous savons que les pays les moins avancés et les petits états insulaires sont ceux qui vont payer le plus lourd tribut aux désordres climatiques et nous devrons apporter des réponses à la hauteur de ce défi.
Enfin, la feuille de route de Bali a inscrit le sujet de la lutte contre la déforestation parmi les éléments indispensables à un régime de l'après-Kyoto. Or il n'y aura pas d'arrêt de la déforestation, si nous ne sommes pas capables de fixer un prix et de payer pour les services rendus à l'humanité par les forêts tropicales. A cet égard, nous attendons avec impatience la Communication de la Commission sur la déforestation qui doit nous aider à avancer sur ce sujet en vue de Poznan. Au-delà, nous devons définir des critères de durabilité des biocarburants, en Europe et à l'extérieur de l'Europe. Notre rencontre à Saint Cloud a été l'occasion de confirmer que l'objectif c'est bien 10% d'énergies renouvelables dans les transports et pas 10% de biocarburants comme on a pu le lire ou l'entendre. Afin de bien clarifier les choses et d'éviter les risques de confusion, le rapporteur Mr Turmes a proposé de développer des initiatives en matière de véhicules électriques. Mr Wijkmann a proposé un sous objectif sur les véhicules électriques/hydrogène et les agrocarburants de 2ème génération.
Fixer des critères de durabilité applicables à la production européenne et à nos importations de biocarburants est une question fondamentale et de cohérence : on ne peut pas d'un côté lutter contre la déforestation au sein des négociations sur le climat et de l'autre côté, aggraver le phénomène en l'encourageant dans les autres pays.
Avant de conclure, juste deux ou trois précisions sur la feuille de route que je vous propose pour les mois à venir. Au sein du Conseil tout d'abord :
- D'ici octobre, il faudra avancer au niveau du COREPER sur : les accords de coopération, sur le passage de 20% à 30% (calendrier, procédures et critères d'évaluation), les principes d'affectation des recettes des enchères, la définition de critères relatifs aux secteurs intensifs en énergie, le financement de projets pilotes CSC.
- L'idée c'est qu'au conseil d'octobre, on puisse se concentrer sur le degré de solidarité nécessaire dans le paquet et les fuites carbone.
Parallèlement, les rapports du Parlement européen seront examinés en groupes et nous organiserons autant de rencontres que nécessaires pour commencer à rapprocher nos positions, comme nous avons commencé à le faire à St-Cloud.
- Enfin, il nous faudra ensuite organiser la dernière convergence entre les positions du Conseil et celle du Parlement et parvenir ensemble à un accord en 1ère lecture.
La catastrophe, ce serait d'arriver à Poznan sans avoir un accord traduisant cette volonté de mutation énergétique. SI nous ne sommes pas capables, dans nos zones au climat tempéré, dans nos économies classiquement industrialisées, et au-delà de nos histoires industrielles, de nous mettre d'accord à 27, comment pourrons demander au reste du monde de le faire ?
Je compte sur vous. Je vous remercie.
Source http://www.ue2008.fr, le 31 juillet 2008
Mesdames et Messieurs les Vice-présidents,
Mesdames et Messieurs les Députés européens,
Un mot d'abord pour vous dire que je suis très heureux d'être ici parmi vous, pour faire un point, quelques jours après le début de la Présidence française, sur ce qui va être notre feuille de route à tous, en Europe, au cours du prochain semestre, sur la lutte contre le changement climatique, compte tenu des échéances qui nous attendent :
- Accra fin août, avec la 3ème réunion du groupe de travail mis en place à Bali
- Dialogue de Minuit à El Calafate en Argentine du 15 au 18 septembre
- Varsovie les 13 et 14 octobre, réunion ministérielle restreinte pour préparer Poznan
- Et enfin Poznan du 1er au 13 décembre, rendez-vous intermédiaire avant la COP de Copenhague en décembre 2009.
1/ Au fond, on pourrait résumer ainsi les six mois qui nous attendent : le monde nous regarde pour savoir si nous allons vraiment faire ce que nous disons et c'est un peu l'heure de vérité, la 24ème heure pour le monde.
Avec le Paquet « Energie/climat », nous entrons enfin dans l'action, dans le faire. C'est le « Paquet du comment ». C'est la première fois qu'une zone géographique toute entière, de dimension planétaire, propose un mode opératoire complet pour accomplir une mutation écologique intégrale :
* -30% de réductions de GES d'ici 2020 par rapport à 1990 s'il y a un accord international et -20% en tout état de cause, ces réductions étant organisées et différenciées entre le secteur industriel et énergétique (ETS) et les autres secteurs (transport, bâtiments, agriculture- non ETS)
* 20% d'énergies renouvelables en 2020.
Nous sommes les premiers à le faire et nous avons donc une responsabilité particulière vis-à-vis des autres pays qui ont placé leurs espoirs en nous.
2/ Et de ce point de vue, l'équation est assez simple : si nous parvenons à organiser la solidarité au sein de l'Europe, alors nous prouverons que c'est possible à l'échelle de la planète.
Et l'expérience montre que le passage à l'acte n'est pas aussi douloureux que nous l'imaginons.
- Le plan de réduction des SO2 aux USA (pluies acides) n'a coûté que 6% de ce qui avait été estimé au départ.
- La mise en oeuvre du protocole de Montréal sur la réduction des CFC responsables de la destruction de la couche d'ozone n'a coûté que 13% des prévisions initiales.
Passer à l'acte, c'est reconnaître que le coût de l'inaction dépassera de loin le coût de l'action (STERN, 1% du PIB chaque année de manière préventive ou 20% du PIB si on intervient au dernier moment).
Et puis, avec ETS, nous avons un outil fantastique qui :
- Incite les industries à réduire leurs émissions de CO2 en faisant un peu plus de vérité sur le prix réel du carbone, renforce et étend le marché du carbone ;
- Et qui constitue une ressource financière considérable (470 milliards d'euros sur la période 2013-2020, soit 50% du budget de l'UE pour 2007-2013 et 0,3% du PIB des 27).
Et cette manne, doit nous servir à faire deux choses :
- Organiser la solidarité à l'intérieur de l'Europe, entre Etats membres et vis-à-vis de ceux qui seront les plus touchés.
- Organiser la solidarité à l'extérieur de l'Europe.
3/ Organiser la solidarité à l'intérieur de l'Europe, ça veut dire deux choses :
? la solidarité entre les Etats membres.
Nous ne partons pas tous du même point. Certaines économies sont très charbonnées, d'autres ont investi très tôt dans les énergies basses en carbone, d'autres non raccordées au reste de l'Europe n'ont pas le choix. Certains ont des forêts, des lacs et des rivières, d'autres le soleil, d'autres encore du charbon ou du gaz. Certains pays sont isolés énergétiquement du reste de l'Europe et l'adoption du paquet énergie/climat pèse sur leur sécurité énergétique.
Il faut nous assurer que la transition sera possible pour tous.
Le revenu des enchères va nous permettre d'investir massivement dans les économies d'énergie, l'efficacité et le développement des énergies renouvelables. Nous devrons canaliser ces moyens d'investissements pour financer la transition énergétique: celle des transports, celle de l'industrie, celle du bâtiment et celle du secteur énergétique.
? la solidarité avec les acteurs les plus touchés :
On n'obtiendra pas d'accord si on ne répond pas à deux préoccupations majeures :
- La perte de pouvoir d'achat liée à la hausse insupportable du prix des énergies fossiles : en clair, les revenus des enchères doivent permettre d'amortir la hausse pour les foyers les plus démunis (bouclier énergétique).
- La perte de compétitivité des entreprises à la fois très intensives en énergie et très fortement exposées à la concurrence internationale. Ce deuxième niveau de protection peut prendre plusieurs formes : quotas gratuits ou mécanisme d'inclusion carbone des autres opérateurs, voire un mix des deux.
4/ Organiser la solidarité à l'extérieur de l'Europe :
Au titre de la feuille de route de Bali, les pays émergents ont accepté de mettre en oeuvre des actions mesurables, vérifiables et communicables. Cette évolution est conditionnée au fait que nous les soutenions, à la fois financièrement et par des transferts de technologie.
Il n'y aura donc pas d'accord à Copenhague si nous ne sommes pas capables d'organiser la solidarité à l'échelle mondiale. Nous devons y consacrer des moyens, et donner un vrai signal sur l'utilisation d'une partie du recours des enchères. Je souhaite remercier ici Avril Doyle pour ses propositions très intéressantes en la matière. Nous devrons trouver un compromis, dans le respect du droit budgétaire des Etats membres, qui permette de crédibiliser la solidarité internationale et de construire de vraies alliances avec d'autres zones géographiques.
La feuille de route de Bali définit les bases d'une solidarité renforcée entre pays en développement et pays développés pour gérer l'adaptation au changement climatique : nous savons que les pays les moins avancés et les petits états insulaires sont ceux qui vont payer le plus lourd tribut aux désordres climatiques et nous devrons apporter des réponses à la hauteur de ce défi.
Enfin, la feuille de route de Bali a inscrit le sujet de la lutte contre la déforestation parmi les éléments indispensables à un régime de l'après-Kyoto. Or il n'y aura pas d'arrêt de la déforestation, si nous ne sommes pas capables de fixer un prix et de payer pour les services rendus à l'humanité par les forêts tropicales. A cet égard, nous attendons avec impatience la Communication de la Commission sur la déforestation qui doit nous aider à avancer sur ce sujet en vue de Poznan. Au-delà, nous devons définir des critères de durabilité des biocarburants, en Europe et à l'extérieur de l'Europe. Notre rencontre à Saint Cloud a été l'occasion de confirmer que l'objectif c'est bien 10% d'énergies renouvelables dans les transports et pas 10% de biocarburants comme on a pu le lire ou l'entendre. Afin de bien clarifier les choses et d'éviter les risques de confusion, le rapporteur Mr Turmes a proposé de développer des initiatives en matière de véhicules électriques. Mr Wijkmann a proposé un sous objectif sur les véhicules électriques/hydrogène et les agrocarburants de 2ème génération.
Fixer des critères de durabilité applicables à la production européenne et à nos importations de biocarburants est une question fondamentale et de cohérence : on ne peut pas d'un côté lutter contre la déforestation au sein des négociations sur le climat et de l'autre côté, aggraver le phénomène en l'encourageant dans les autres pays.
Avant de conclure, juste deux ou trois précisions sur la feuille de route que je vous propose pour les mois à venir. Au sein du Conseil tout d'abord :
- D'ici octobre, il faudra avancer au niveau du COREPER sur : les accords de coopération, sur le passage de 20% à 30% (calendrier, procédures et critères d'évaluation), les principes d'affectation des recettes des enchères, la définition de critères relatifs aux secteurs intensifs en énergie, le financement de projets pilotes CSC.
- L'idée c'est qu'au conseil d'octobre, on puisse se concentrer sur le degré de solidarité nécessaire dans le paquet et les fuites carbone.
Parallèlement, les rapports du Parlement européen seront examinés en groupes et nous organiserons autant de rencontres que nécessaires pour commencer à rapprocher nos positions, comme nous avons commencé à le faire à St-Cloud.
- Enfin, il nous faudra ensuite organiser la dernière convergence entre les positions du Conseil et celle du Parlement et parvenir ensemble à un accord en 1ère lecture.
La catastrophe, ce serait d'arriver à Poznan sans avoir un accord traduisant cette volonté de mutation énergétique. SI nous ne sommes pas capables, dans nos zones au climat tempéré, dans nos économies classiquement industrialisées, et au-delà de nos histoires industrielles, de nous mettre d'accord à 27, comment pourrons demander au reste du monde de le faire ?
Je compte sur vous. Je vous remercie.
Source http://www.ue2008.fr, le 31 juillet 2008