Texte intégral
J.-J. Bourdin.- La solidarité, on va en parler, ça fait partie des droits de l'homme, la solidarité ?
Oui, les droits de l'homme sont indivisibles, donc ça en fait partie, sauf que c'est sur la France.
Alors ce RSA, financé par les revenus du capital, tout le monde est d'accord pour souligner qu'il faut de la solidarité, que le RSA c'est une excellente mesure, mais quand il s'agit de mettre la main à la poche, alors plus personne n'est là... Enfin, pas plus personne, mais 80 %. Je vois le sondage qu'on fait ce matin, il y a entre 70 et 80 % d'auditeurs de RMC qui disent : mais non, non, non ! On aurait pu trouver d'autres solutions.
Je trouve que c'est une bonne mesure le RSA, c'était en engagement du président de la République qu'il essaye de mettre en oeuvre aujourd'hui, en faisant preuve d'imagination, dans un contexte qui est contraint comme vous le savez. Donc, il faut bien trouver des solutions. Maintenant, il est normal que, lorsqu'on lance une mesure, qu'on propose des solutions de financement, il y ait toujours certains qui disent, surtout en matière de solidarité, que, effectivement, on est dans optique de partage, entre les uns et les autres.
Mais alors, ça veut dire que le Français n'est pas partageur ?
Non, ce n'est pas ça, mais simplement, chacun analyse les choses en fonction peut-être de sa situation. Et là, on est dans un domaine de solidarité. Je rappelle quand même que ce Revenu de solidarité a pour objet de favoriser le retour à l'activité de ceux qui sont inactifs et qui sont rémunérés tout en étant inactifs, et leur permettre de continuer à l'être mais en travaillant. Cela fait partie quand même d'une des pierres angulaires de la philosophie du travail président de la République. Et pas seulement.
Vous allez payer, vous, vous avez des biens, vous avez...1,1 %, non ?
Je n'ai pas de biens en particulier, mais je mettrai la main à la poche si c'est nécessaire pour la solidarité.
Quelques actions...quelque je ne sais pas... ?
Je respecterai la loi, et je n'ai pas une seule action.
À propos de la loi, j'ai vu le nombre de décrets d'application qui ne sont pas sortis sur plusieurs lois, c'est incroyable !
C'est incroyable, c'est vrai, je regrette beaucoup. Quand j'étais administrateur au Sénat, on avait l'habitude avec les parlementaires de faire des rapports faisant le point sur l'état d'application des lois que nous, que les parlementaires, votaient. Et c'est vrai que c'était...on avait toujours...on faisait toujours le même constat : insuffisant, et ça c'est terrible. Le Conseil d'Etat a déjà fait également de nombreux rapports sur le sujet, mais je crois que cela passe par un assainissement du processus législatif, peut-être faire moins de lois, comme d'ailleurs le demandent les parlementaires, essayer en même temps, à chaque fois, que les administrations se mobilisent pour mettre en place les décrets, et le faire dans le délai prévu sinon les lois ne servent plus à rien.
Avant de parler de l'adoption, parce que vous portez une réforme de l'adoption en France qui est très très intéressante, je voudrais qu'on parle de politique étrangère quand même, c'est votre domaine, et notamment de ce qui se passe en Géorgie et en Russie, parce que beaucoup de Français s'inquiètent. Alors, est-ce que, quand même, franchement, B. Kouchner ne met pas de l'huile sur le feu lorsqu'il parle de "génocide", sans aucune preuve, d'une part ? A-t-il des preuves, tiens, lorsqu'il emploie le mot "génocide" ?
Je n'ai pas souvenir qu'il ait parlé de "génocide"...
Si, si, je vous le dis...
Il a parlé de "nettoyage ethnique" peut-être...
Ou "nettoyage ethnique", oui...
Il a parlé de "nettoyage ethnique". Non, je ne crois pas qu'il mette de l'huile sur le feu...
Il a des preuves ou pas de nettoyage ethnique ?
C'est toujours...Quand on vit un évènement international, à chaud, je me faisait cette réflexion hier, il y a toujours quelque part un doute sur la question de savoir si on mesure, si on surestime ou on sous-estime l'événement par rapport à ce qu'en diront demain les historiens. Et donc, je crois qu'il faut prendre la mesure des choses. On a une situation...
Avez-vous peur d'une guerre, puisqu'on prend la mesure des choses ? Avez-vous peur d'une guerre, oui ou non ?
Il y a eu une offensive militaire ...
Je vous pose la question, avez-vous peur d'une guerre, vous ?
Ce n'est pas rassurant...
Vous êtes aux affaires, quand même, vous êtes responsable, avez-vous peur d'une guerre ?
Par prévention, je préfère toujours m'inquiéter plus que d'être dans un confort en me disant : il faut se rassurer, tout ce qui se passe n'est pas si grave. Donc, ce que je vois, c'est une intervention militaire géorgienne, le 7 août, qui a été contrée, tout de suite, par les Russes, qui ont, de manière disproportionnée, mené une offensive éclair qui a conduit à une victoire écrasante. Mais quelles conséquences terribles ! On a aujourd'hui deux entités géographiques qui faisaient partie de la Géorgie, l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie, deux entités...230.000 habitants et 30.000 habitants...
Oui, mais qui demandent soit leur indépendance, soit leur rattachement à la Fédération de Russie.
Indépendance reconnue par les Russes, et je ne crois pas que ça ira plus loin, parce que, pour reconnaître l'indépendance d'un pays, que se passe-t-il ? Pour être un pays, comme le Monténégro a été le 192eme pays à accéder à l'Onu, il faut rentrer effectivement à l'Onu, il faut une recommandation. Mais pour cette sécurité...
Ce qui veut dire que le Kosovo n'est pas un pays...
Non, mais...
Le Kosovo n'est pas rentré aux Nations unies, ça veut dire que le Kosovo n'est pas un pays ? On a reconnu...
Non, mais le processus... Le processus ne se fait pas en six mois, cela peut prendre plusieurs années.
R. Yade, pardon, je trouve quand même que nous sommes un peu donneurs de leçons, Français, moins que les autres.
Par rapport à la Russie ? Je n'ai pas terminé ce que je disais tout à l'heure, mais...
Alors, finissez, je vais vous dire après pourquoi je nous trouve un peu donneurs de leçons, allez-y !
Par rapport au nettoyage ethnique, et donc, ces deux entités, dont l'indépendance a été reconnue par la Russie, il y a des Géorgiens qui y vivent, et donc, il y des actions où les Russes, des miliciens, les habitants d'Ossétie du Sud, aussi bien les militaires que d'autres, mais aussi d'Abkhazie, essayent d'évacuer les Géorgiens qui habitent dans ces deux entités. Ça s'appelle comment ? Ça s'appelle de l'épuration. Ça passe par des déplacements de populations. Je rappelle quand même qu'aujourd'hui, selon le HCR, on est à 160.000 personnes déplacées, cela s'accompagne de pillages, de demandes de rançons, de kidnappings, et l'ambassadeur de Géorgie parle de mesures...
Mais dites-moi, au Tibet ou ailleurs, on ne déplace pas des populations ?
Au Tibet, c'est plutôt l'inverse, c'est-à-dire que les autorités chinoises font venir des Chinois Han au Tibet, on appelle cela la sinisation.
Pour tuer les cultures.
C'est plus subtil. Cela passe par la culture, par le tourisme, par l'investissement économique à tel point que l'identité spirituelle et religieuse des Tibétains ne peut être exercée pleinement.
J'ai deux questions à vous poser. Franchement, est-ce que nous ne sommes pas un peu donneurs de leçons ? Au Kosovo, nous avons accordé unilatéralement l'indépendance au Kosovo, alors qu'il y avait des Serbes au Kosovo, et nous ne comprenons pas qu'un Ossète puisse demander son indépendance. J'ai un autre exemple, R. Yade, que je trouve encore plus frappant. Parfois, nous voulons imposer notre modèle démocratique, c'est un peu insupportable. Je me mets à la place des Kurdes. Quand l'armée turque va bombarder le nord de l'Irak, va bombarder les Kurdes à qui on n'accorde pas de droit à l'indépendance, à former une nation, on ne dit rien, la communauté internationale. L'armée turque peut aller bombarder les Kurdes, personne ne dit rien.
Mais si, il y a déjà eu des réactions. Mais concernant le Kosovo...
En tout cas, des réactions je ne les ai pas beaucoup entendues.
... moi je ne comprends pas cet argument qui consiste à dire : les Russes ne font en Géorgie que ce que nous avons fait au Kosovo. Ce n'est absolument pas la même chose.
Je peux renvoyer l'argument aux Russes de la même façon, pour renverser l'argument.
A ce rythme-là, pourquoi la Tchétchénie ne serait pas indépendante aussi ?
Oui. Mais bien sûr.
Le Kosovo, ce n'est pas pareil que la Géorgie. Au Kosovo, l'OTAN mettait fin à une épuration ethnique. Pour la Géorgie, la Russie couvre son nettoyage ethnique. Parce que qu'est-ce qui se passe ? A l'époque, on a dû en plus préserver la minorité serbe. Là, elle n'est pas préservée, non pas la minorité, mais la majorité géorgienne, puisqu'ils sont majoritaires.
Ah non, pas en Ossétie du Sud ni en Abkhazie. Egalité en Abkhazie, à peut près.
En Abkhazie, il a 130.000 habitants je crois.
Pas plus de 200 000 en Abkhazie.
Et puis en Ossétie, 60.000. Donc le reste, la Géorgie est majoritaire. Donc ce n'est pas du tout la même chose. Mais je suis d'accord avec vous qu'il y a une chose importante : il faut respecter le droit international. L'OTAN, au Kosovo, avait respecté le droit international. L'OTAN n'était en plus intervenu au Kosovo qu'après avoir épuisé tous les recours diplomatiques. Les Russes, eux, sont intervenus, tout de suite militairement, de manière exagérée. Le droit international n'est pas respecté puisque les règles définies par l'OSCE, par le traité d'Helsinki de 1975, par les résolutions du Conseil de sécurité...
Alors la Turquie ne respecte pas le droit international quand elle bombarde les Kurdes.
Mais quand le droit international n'est pas respecté, on est là pour le dire. On le dit même pour Israël par rapport aux Territoires palestiniens.
Israël ne respecte pas le droit international ?
Il n'y a pas de raison, quand ce n'est pas le cas, qu'on ne le dise pas. Donc, à chaque fois, on le dit, systématiquement.
Bon, très bien, R. Yade. On va parler d'adoption. J'ai deux ou trois questions à vous poser : il paraît que vous ne servez rien. Il paraît que vous ne servez à rien du tout. Moi je ne sais pas. Vous avez entendu cette rumeur. Alors, vous allez nous dire ce que vous en pensez. Attendez, je recherche mes fiches...
On l'a toujours dit depuis le début...
Il paraît que... Alors l'Express dit : « le secrétariat d'Etat aux Droits de l'Homme pourrait ne plus exister dans un futur Gouvernement. N. Sarkozy a répété à plusieurs reprises en privé qu'il considérait que la constitution de ce ministère était une erreur, il a déjà indiqué à l'actuelle titulaire du poste, R. Yade, qu'elle changerait de fonction lors du prochain remaniement ». C'est vrai ou pas ? Est-ce qu'il vous a dit que vous alliez changer de fonction ?
Il me l'a dit depuis longtemps, ça.
Oui, donc vous confirmez ?
En fait, moi je lui ai expliqué que sur le Droits de l'Homme, ce qu'il fait, ça impacte sur moi.
C'est-à-dire ?
C'est parce qu'on est interdépendants.
Ah oui, j'imagine.
Donc, je lui ai expliqué que quand il prend des positions sur tel ou tel sujet...
...Vous êtes d'accord avec lui, il est d'accord avec vous. Donc, il faut être d'accord avec lui.
Et que ( ?) ça colle forcément... Donc, voilà, je lui expliquais ça. Et au début, quand...
Vous vous êtes fait rappeler à l'ordre ? Franchement ?
Ah oui, oui, oui. Sur ces trucs-là oui. Parce que c'est mon job. Je lui ai dit que j'étais obligée. Au début, il n'avait pas vu le truc. Donc, du coup, il a compris ça.
Il n'avait pas vu le truc ?
Il n'avait pas vu que les Droits de l'homme...
...Que vous pouviez avoir un peu de personnalité, que vous pouviez dire : « Attendez, il y a les Droits de l'Homme, il faut défendre les Droits de l'Homme. »
Ce n'est pas ça. C'est un peu délicat : c'est soit on ne dit rien et c'est terrible, soit on dit et c'est terrible aussi. J'ai essayé pendant plusieurs mois de lui expliquer ça.
Donc vous allez changer de fonction.
Ça je n'en sais rien...
Vous avez envie de changer de fonction ? Mais s'il vous l'a dit, donc...
Moi je suis sur un poste assez moral. Donc, c'est vrai que...
Eh bien vous allez trouver une autre fonction morale, on peut quand même ?
Oui, on peut.
«Avant de défoncer une porte, il faut toujours vérifier qu'elle n'est pas déjà ouverte. »
C'est moi qui l'ai dit.
Ce n'est pas lui qui vous a dit ça ? C'est vous ?
Oui, c'est moi.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 28 août 2008
Oui, les droits de l'homme sont indivisibles, donc ça en fait partie, sauf que c'est sur la France.
Alors ce RSA, financé par les revenus du capital, tout le monde est d'accord pour souligner qu'il faut de la solidarité, que le RSA c'est une excellente mesure, mais quand il s'agit de mettre la main à la poche, alors plus personne n'est là... Enfin, pas plus personne, mais 80 %. Je vois le sondage qu'on fait ce matin, il y a entre 70 et 80 % d'auditeurs de RMC qui disent : mais non, non, non ! On aurait pu trouver d'autres solutions.
Je trouve que c'est une bonne mesure le RSA, c'était en engagement du président de la République qu'il essaye de mettre en oeuvre aujourd'hui, en faisant preuve d'imagination, dans un contexte qui est contraint comme vous le savez. Donc, il faut bien trouver des solutions. Maintenant, il est normal que, lorsqu'on lance une mesure, qu'on propose des solutions de financement, il y ait toujours certains qui disent, surtout en matière de solidarité, que, effectivement, on est dans optique de partage, entre les uns et les autres.
Mais alors, ça veut dire que le Français n'est pas partageur ?
Non, ce n'est pas ça, mais simplement, chacun analyse les choses en fonction peut-être de sa situation. Et là, on est dans un domaine de solidarité. Je rappelle quand même que ce Revenu de solidarité a pour objet de favoriser le retour à l'activité de ceux qui sont inactifs et qui sont rémunérés tout en étant inactifs, et leur permettre de continuer à l'être mais en travaillant. Cela fait partie quand même d'une des pierres angulaires de la philosophie du travail président de la République. Et pas seulement.
Vous allez payer, vous, vous avez des biens, vous avez...1,1 %, non ?
Je n'ai pas de biens en particulier, mais je mettrai la main à la poche si c'est nécessaire pour la solidarité.
Quelques actions...quelque je ne sais pas... ?
Je respecterai la loi, et je n'ai pas une seule action.
À propos de la loi, j'ai vu le nombre de décrets d'application qui ne sont pas sortis sur plusieurs lois, c'est incroyable !
C'est incroyable, c'est vrai, je regrette beaucoup. Quand j'étais administrateur au Sénat, on avait l'habitude avec les parlementaires de faire des rapports faisant le point sur l'état d'application des lois que nous, que les parlementaires, votaient. Et c'est vrai que c'était...on avait toujours...on faisait toujours le même constat : insuffisant, et ça c'est terrible. Le Conseil d'Etat a déjà fait également de nombreux rapports sur le sujet, mais je crois que cela passe par un assainissement du processus législatif, peut-être faire moins de lois, comme d'ailleurs le demandent les parlementaires, essayer en même temps, à chaque fois, que les administrations se mobilisent pour mettre en place les décrets, et le faire dans le délai prévu sinon les lois ne servent plus à rien.
Avant de parler de l'adoption, parce que vous portez une réforme de l'adoption en France qui est très très intéressante, je voudrais qu'on parle de politique étrangère quand même, c'est votre domaine, et notamment de ce qui se passe en Géorgie et en Russie, parce que beaucoup de Français s'inquiètent. Alors, est-ce que, quand même, franchement, B. Kouchner ne met pas de l'huile sur le feu lorsqu'il parle de "génocide", sans aucune preuve, d'une part ? A-t-il des preuves, tiens, lorsqu'il emploie le mot "génocide" ?
Je n'ai pas souvenir qu'il ait parlé de "génocide"...
Si, si, je vous le dis...
Il a parlé de "nettoyage ethnique" peut-être...
Ou "nettoyage ethnique", oui...
Il a parlé de "nettoyage ethnique". Non, je ne crois pas qu'il mette de l'huile sur le feu...
Il a des preuves ou pas de nettoyage ethnique ?
C'est toujours...Quand on vit un évènement international, à chaud, je me faisait cette réflexion hier, il y a toujours quelque part un doute sur la question de savoir si on mesure, si on surestime ou on sous-estime l'événement par rapport à ce qu'en diront demain les historiens. Et donc, je crois qu'il faut prendre la mesure des choses. On a une situation...
Avez-vous peur d'une guerre, puisqu'on prend la mesure des choses ? Avez-vous peur d'une guerre, oui ou non ?
Il y a eu une offensive militaire ...
Je vous pose la question, avez-vous peur d'une guerre, vous ?
Ce n'est pas rassurant...
Vous êtes aux affaires, quand même, vous êtes responsable, avez-vous peur d'une guerre ?
Par prévention, je préfère toujours m'inquiéter plus que d'être dans un confort en me disant : il faut se rassurer, tout ce qui se passe n'est pas si grave. Donc, ce que je vois, c'est une intervention militaire géorgienne, le 7 août, qui a été contrée, tout de suite, par les Russes, qui ont, de manière disproportionnée, mené une offensive éclair qui a conduit à une victoire écrasante. Mais quelles conséquences terribles ! On a aujourd'hui deux entités géographiques qui faisaient partie de la Géorgie, l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie, deux entités...230.000 habitants et 30.000 habitants...
Oui, mais qui demandent soit leur indépendance, soit leur rattachement à la Fédération de Russie.
Indépendance reconnue par les Russes, et je ne crois pas que ça ira plus loin, parce que, pour reconnaître l'indépendance d'un pays, que se passe-t-il ? Pour être un pays, comme le Monténégro a été le 192eme pays à accéder à l'Onu, il faut rentrer effectivement à l'Onu, il faut une recommandation. Mais pour cette sécurité...
Ce qui veut dire que le Kosovo n'est pas un pays...
Non, mais...
Le Kosovo n'est pas rentré aux Nations unies, ça veut dire que le Kosovo n'est pas un pays ? On a reconnu...
Non, mais le processus... Le processus ne se fait pas en six mois, cela peut prendre plusieurs années.
R. Yade, pardon, je trouve quand même que nous sommes un peu donneurs de leçons, Français, moins que les autres.
Par rapport à la Russie ? Je n'ai pas terminé ce que je disais tout à l'heure, mais...
Alors, finissez, je vais vous dire après pourquoi je nous trouve un peu donneurs de leçons, allez-y !
Par rapport au nettoyage ethnique, et donc, ces deux entités, dont l'indépendance a été reconnue par la Russie, il y a des Géorgiens qui y vivent, et donc, il y des actions où les Russes, des miliciens, les habitants d'Ossétie du Sud, aussi bien les militaires que d'autres, mais aussi d'Abkhazie, essayent d'évacuer les Géorgiens qui habitent dans ces deux entités. Ça s'appelle comment ? Ça s'appelle de l'épuration. Ça passe par des déplacements de populations. Je rappelle quand même qu'aujourd'hui, selon le HCR, on est à 160.000 personnes déplacées, cela s'accompagne de pillages, de demandes de rançons, de kidnappings, et l'ambassadeur de Géorgie parle de mesures...
Mais dites-moi, au Tibet ou ailleurs, on ne déplace pas des populations ?
Au Tibet, c'est plutôt l'inverse, c'est-à-dire que les autorités chinoises font venir des Chinois Han au Tibet, on appelle cela la sinisation.
Pour tuer les cultures.
C'est plus subtil. Cela passe par la culture, par le tourisme, par l'investissement économique à tel point que l'identité spirituelle et religieuse des Tibétains ne peut être exercée pleinement.
J'ai deux questions à vous poser. Franchement, est-ce que nous ne sommes pas un peu donneurs de leçons ? Au Kosovo, nous avons accordé unilatéralement l'indépendance au Kosovo, alors qu'il y avait des Serbes au Kosovo, et nous ne comprenons pas qu'un Ossète puisse demander son indépendance. J'ai un autre exemple, R. Yade, que je trouve encore plus frappant. Parfois, nous voulons imposer notre modèle démocratique, c'est un peu insupportable. Je me mets à la place des Kurdes. Quand l'armée turque va bombarder le nord de l'Irak, va bombarder les Kurdes à qui on n'accorde pas de droit à l'indépendance, à former une nation, on ne dit rien, la communauté internationale. L'armée turque peut aller bombarder les Kurdes, personne ne dit rien.
Mais si, il y a déjà eu des réactions. Mais concernant le Kosovo...
En tout cas, des réactions je ne les ai pas beaucoup entendues.
... moi je ne comprends pas cet argument qui consiste à dire : les Russes ne font en Géorgie que ce que nous avons fait au Kosovo. Ce n'est absolument pas la même chose.
Je peux renvoyer l'argument aux Russes de la même façon, pour renverser l'argument.
A ce rythme-là, pourquoi la Tchétchénie ne serait pas indépendante aussi ?
Oui. Mais bien sûr.
Le Kosovo, ce n'est pas pareil que la Géorgie. Au Kosovo, l'OTAN mettait fin à une épuration ethnique. Pour la Géorgie, la Russie couvre son nettoyage ethnique. Parce que qu'est-ce qui se passe ? A l'époque, on a dû en plus préserver la minorité serbe. Là, elle n'est pas préservée, non pas la minorité, mais la majorité géorgienne, puisqu'ils sont majoritaires.
Ah non, pas en Ossétie du Sud ni en Abkhazie. Egalité en Abkhazie, à peut près.
En Abkhazie, il a 130.000 habitants je crois.
Pas plus de 200 000 en Abkhazie.
Et puis en Ossétie, 60.000. Donc le reste, la Géorgie est majoritaire. Donc ce n'est pas du tout la même chose. Mais je suis d'accord avec vous qu'il y a une chose importante : il faut respecter le droit international. L'OTAN, au Kosovo, avait respecté le droit international. L'OTAN n'était en plus intervenu au Kosovo qu'après avoir épuisé tous les recours diplomatiques. Les Russes, eux, sont intervenus, tout de suite militairement, de manière exagérée. Le droit international n'est pas respecté puisque les règles définies par l'OSCE, par le traité d'Helsinki de 1975, par les résolutions du Conseil de sécurité...
Alors la Turquie ne respecte pas le droit international quand elle bombarde les Kurdes.
Mais quand le droit international n'est pas respecté, on est là pour le dire. On le dit même pour Israël par rapport aux Territoires palestiniens.
Israël ne respecte pas le droit international ?
Il n'y a pas de raison, quand ce n'est pas le cas, qu'on ne le dise pas. Donc, à chaque fois, on le dit, systématiquement.
Bon, très bien, R. Yade. On va parler d'adoption. J'ai deux ou trois questions à vous poser : il paraît que vous ne servez rien. Il paraît que vous ne servez à rien du tout. Moi je ne sais pas. Vous avez entendu cette rumeur. Alors, vous allez nous dire ce que vous en pensez. Attendez, je recherche mes fiches...
On l'a toujours dit depuis le début...
Il paraît que... Alors l'Express dit : « le secrétariat d'Etat aux Droits de l'Homme pourrait ne plus exister dans un futur Gouvernement. N. Sarkozy a répété à plusieurs reprises en privé qu'il considérait que la constitution de ce ministère était une erreur, il a déjà indiqué à l'actuelle titulaire du poste, R. Yade, qu'elle changerait de fonction lors du prochain remaniement ». C'est vrai ou pas ? Est-ce qu'il vous a dit que vous alliez changer de fonction ?
Il me l'a dit depuis longtemps, ça.
Oui, donc vous confirmez ?
En fait, moi je lui ai expliqué que sur le Droits de l'Homme, ce qu'il fait, ça impacte sur moi.
C'est-à-dire ?
C'est parce qu'on est interdépendants.
Ah oui, j'imagine.
Donc, je lui ai expliqué que quand il prend des positions sur tel ou tel sujet...
...Vous êtes d'accord avec lui, il est d'accord avec vous. Donc, il faut être d'accord avec lui.
Et que ( ?) ça colle forcément... Donc, voilà, je lui expliquais ça. Et au début, quand...
Vous vous êtes fait rappeler à l'ordre ? Franchement ?
Ah oui, oui, oui. Sur ces trucs-là oui. Parce que c'est mon job. Je lui ai dit que j'étais obligée. Au début, il n'avait pas vu le truc. Donc, du coup, il a compris ça.
Il n'avait pas vu le truc ?
Il n'avait pas vu que les Droits de l'homme...
...Que vous pouviez avoir un peu de personnalité, que vous pouviez dire : « Attendez, il y a les Droits de l'Homme, il faut défendre les Droits de l'Homme. »
Ce n'est pas ça. C'est un peu délicat : c'est soit on ne dit rien et c'est terrible, soit on dit et c'est terrible aussi. J'ai essayé pendant plusieurs mois de lui expliquer ça.
Donc vous allez changer de fonction.
Ça je n'en sais rien...
Vous avez envie de changer de fonction ? Mais s'il vous l'a dit, donc...
Moi je suis sur un poste assez moral. Donc, c'est vrai que...
Eh bien vous allez trouver une autre fonction morale, on peut quand même ?
Oui, on peut.
«Avant de défoncer une porte, il faut toujours vérifier qu'elle n'est pas déjà ouverte. »
C'est moi qui l'ai dit.
Ce n'est pas lui qui vous a dit ça ? C'est vous ?
Oui, c'est moi.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 28 août 2008