Texte intégral
M. Biraben et C. Roux M. Biraben : L. Chatel, le secrétaire d'Etat chargé de l'Industrie et la Consommation, porte-parole du Gouvernement, est l'invité de « La Matinale. »
C. Roux : Oui, porte-parole du Gouvernement : il se charge chaque semaine du compte-rendu du Conseil des ministres, numéro d'équilibriste et de langue de bois. Il est aussi secrétaire d'Etat chargé de l'Industrie et de la Consommation, celui qui gère, avec la ministre de l'Economie, le dossier de La Poste ; en ce moment, il discute avec les syndicats, pas franchement enthousiastes sur l'ouverture du capital de La Poste.
Bonjour.
C. Roux : Dans ces dossiers sensibles, Airbus, et le cas Renault en grève aujourd'hui... Bonjour. M. Biraben : L. Chatel.
Bonjour.
M. Biraben : 4.000 suppressions de postes aujourd'hui chez Renault, 2.000 en prévision. Est-ce que c'est l'échec de C. Ghosn ?
Non, c'est une situation économique mondiale, un ralentissement économique, un ralentissement de l'activité automobile, qui a impacté les Etats-Unis - les constructeurs américains ont été durement frappés - qui a impacté le Japon, et qui impacte l'ensemble des constructeurs européens. On a des cycles dans l'économie, on a des cycles dans l'automobile, et actuellement, il y a un tassement, il y a un ralentissement.
C. Roux : Il n'y a pas eu des choix stratégiques un peu douteux, comme le disent les syndicats aujourd'hui, par exemple, lancer un 4X4 au moment où tout le monde arrête de produire et de sortir des 4X4 ; il n'y a pas eu quelques erreurs stratégiques ?
Alors, on pourra discuter, je dirais, de la fin de vie de ce véhicule, si ça a été un bon véhicule ou un mauvais véhicule, je crois que c'est un petit peu tôt pour dire si c'est un échec commercial ou pas. C'est vrai qu'on peut s'interroger sur le fait que les constructeurs français, quinze ans après les autres, aient lancé leur 4X4 au moment où ce n'était plus vraiment à la mode. Mais ça, ce n'est peut-être pas forcément le débat, et ce n'est pas forcément le 4X4 qui allait relancer Renault ou qui allait relancer PSA, puisque PSA est dans la même situation.
C. Roux : Alors aujourd'hui, les syndicats sont en grève, qu'est-ce qu'ils peuvent attendre de Bercy, du Gouvernement, rien peut-être ?
Ils peuvent attendre d'abord d'avoir un gouvernement qui mise sur l'industrie ; nous, on considère que l'industrie ce n'est pas foutu, ce n'est pas fini, un grand pays industriel c'est un pays, comme l'a dit N. Sarkozy à Saint-Nazaire, qui construit des bateaux, qui fabrique des avions, qui fabrique des voitures...
C. Roux : Mais vraiment, qu'est-ce qu'ils peuvent attendre, concrètement, sur ce dossier précis ?
Eh bien, concrètement, voilà, concrètement, d'abord, le Gouvernement a déjà agi ; tout à l'heure, je vais me rendre à Sochaux, sur l'usine qui fabrique la 308, là, c'est un bon exemple de site, sur lequel aujourd'hui, le groupe PSA va pouvoir innover davantage, investir pour l'avenir, parce qu'on a mis en place le crédit impôt recherche, on a le système le plus protecteur des pays développés en matière de crédit impôt recherche, pour attirer et laisser les investissements en matière d'innovation en France, parce que les innovations d'aujourd'hui dans l'automobile, c'est les emplois de demain. Et si on veut rester compétitif dans un marché qui est mondial aujourd'hui dans l'automobile, si on veut garder nos emplois en France, il faut que les constructeurs français soient incités à investir en France. Donc c'est ce qu'on a fait avec le crédit impôt recherche. Autre mesure que nous avons prise pendant l'été, qui concerne l'ensemble de la filière automobile, c'est par exemple d'avoir raccourci les délais de paiement à 60 jours. Dans l'automobile, il y avait traditionnellement des délais de paiement très longs, et ça, ça pesait sur tous les sous-traitants de l'automobile, parce qu'il y a les constructeurs d'un côté, mais il y a toute la filière de sous-traitants, c'est plus de 700.000 emplois en France.
C. Roux : Sur ces 4.000 départs volontaires, vous n'avez rien à dire en fait ?
Alors, non, sur... enfin, sur ces 4.000 départs, d'abord, ce sont des départs volontaires, ensuite, le Gouvernement sera évidemment très vigilant au traitement au cas par cas, puis, dernier élément...
C. Roux : Ça veut dire quoi « vigilant sur le traitement au cas par cas » ?
Oui, vigilant au cas par cas, parce que nous voulons regarder ce que Renault propose, dans quels cas, dans quelles circonstances. Ensuite, vous savez qu'il y a des obligations de ré-industrialisation pour les entreprises qui sont amenées à mettre en place des plans de restructuration. Donc avec Renault, avec les autres, si c'est nécessaire, nous regarderons quels sont les plans de ré-industrialisation pour les bassins qui sont concernés par ces restructurations. C'est ça que le Gouvernement peut faire. On investit sur le long terme, d'un côté, pour rendre notre pays plus compétitif dans l'industrie, et puis de l'autre, au cas par cas...
C. Roux : On gère les suppressions de postes, de l'autre côté...
Oui, mais, si vous voulez, un constructeur automobile, il faut qu'il reste performant et il faut qu'il reste compétitif par rapport à ses concurrents. Donc évidemment... alors, sachant que, en France, il se trouve que les immatriculations vont plutôt mieux que dans les autres pays - mais ça, c'est l'effet du bonus/malus que nous avons mis en place...
C. Roux : Alors, dans votre dossier industriel, il y a une mauvaise nouvelle ce matin - c'est à la Une du Figaro - le contrat du siècle de l'armée américaine échappe à Airbus en raison des élections aux Etats-Unis. Quelle est votre réaction ?
Eh bien, évidemment, ce n'est pas une bonne nouvelle, en l'occurrence, il n'échappe pas à Airbus, il échappe à tout le monde, puisque l'armée américaine a décidé de reporter cet appel d'offres, donc il ne faut pas dire que c'est un échec d'Airbus, c'est simplement l'armée américaine qui considère que ce n'est pas le moment, qu'il y a un Président qui va être renouvelé prochainement. Et elle laisse le dossier à la prochaine administration. Vous savez que c'est un très gros contrat...
M. Biraben : La différence, c'est qu'il était signé avec nous, et puis, bon, il a été revu...
Oui, mais il y a eu un recours. Enfin, vous savez, nous sommes dans des Etats de droit, en l'occurrence, les Etats-Unis...
M. Biraben : On perd plus que les autres, c'est ça que je veux dire...
Eh bien, c'est-à-dire qu'on avait un bon espoir d'être retenu sur ce contrat. En première délibération, le contrat avait été retenu, Airbus avait été retenu. Ensuite, il y a eu un recours de la part de son concurrent Boeing, et puis, finalement, l'armée américaine décide de surseoir et de reporter l'appel d'offres. Eh bien, il faut se dire, il faut dire aux gens d'Airbus - et ils en sont conscients - qu'ils soient encore meilleurs la prochaine fois, et plus percutants. On avait gagné la première fois, donc c'est un beau challenge de se dire que lorsqu'il y aura de nouveaux contrats, eh bien, on sera meilleur que les autres.
C. Roux : Pareil, toujours sur le dossier Airbus, sur les délocalisations, donc Airbus délocalise en Tunisie, en zone dollar, pour faire des économies. Que dit le ministre de l'Industrie ?
Le ministre de l'Industrie dit qu'il faut bien faire attention aux mots. Quand vous dites : « délocalisation », ça veut dire, en gros, « je ferme Toulouse et j'ouvre Tunis », ce n'est pas du tout le cas...
C. Roux : Non, ça veut dire : j'ouvre à Tunis, bon, voilà...
Non, mais c'est très important, parce que nos téléspectateurs, vos téléspectateurs, ceux qui regardent Canal, quand on leur dit « délocalisation », disent : ça y est, on va fermer mon usine et on va aller la construire à Tunis. Ce n'est pas vrai. Aujourd'hui, le marché de l'aéronautique est mondial, c'est un marché hyper porteur. Ayez en tête qu'il va se vendre, dans les prochaines années, 20.000 avions dans les dix prochaines années, donc c'est considérable. Eh bien, les demandes, elles viennent de l'ensemble des pays, et en particulier hors zone euro. Aujourd'hui, Airbus, il fabrique l'essentiel de ses avions dans la zone euro, et il vend en zone dollar. Donc pour les pays émergents, ce nouveau marché, ce n'est pas anormal qu'Airbus aille fabriquer proche de ces pays émergents ; ce sont des marchés sur lesquels on a tendance à fabriquer près des endroits où on vend, mais on ne va pas aller fabriquer en Tunisie les avions qu'on va vendre à Air France à Toulouse, voilà.
C. Roux : Ce qu'on entend, c'est qu'on va peut-être créer des emplois en Tunisie plutôt qu'en France, non ? Ce n'est pas ça non plus ?
Non. Il faut être honnête dans la façon de voir les choses...
C. Roux : C'est le plan Power 8 ; je veux dire, on n'invente rien, on sait très bien comment ça va se passer : il y a moins d'emplois à Toulouse...
Mais l'objectif, c'est quoi ? L'objectif, c'est que, d'abord, Airbus reste leader mondial de l'aéronautique et continue à investir en recherche et développement en France, et que les sites français continuent à produire. Eh bien, pour faire ça, on a besoin de rendre le groupe plus compétitif, on a besoin de répondre à des clients qui sont aujourd'hui mondiaux.
M. Biraben : L'ouverture du capital de La Poste maintenant. Vous avez commencé, avec la ministre de l'Economie, des consultations avec les syndicats, qui craignent que ce soit le premier pas vers la privatisation.
Alors, effectivement, avec C. Lagarde, nous recevons depuis le début de la semaine les syndicats. Quel est le problème, qu'est-ce qui se passe, en fait...
M. Biraben : La privatisation...
Non, ce n'est pas ça le problème, le sujet. Le sujet c'est qu'en 2011, vous avez une ouverture au marché, ouverture à la concurrence du courrier, c'est-à-dire que vous, moi, on pourra avoir un autre prestataire que La Poste qui viendra nous livrer notre courrier, un autre facteur, voilà, c'est ça le sujet. Donc l'enjeu pour le Gouvernement, c'est de dire : eh bien, finalement, quelle est la meilleure solution pour La Poste, pour préparer cette ouverture au marché, pour attendre, quand on va avoir donc La Poste peut-être allemande, La Poste néerlandaise, qui va venir en France, eh bien, qu'est-ce qu'on fait pour donner les meilleurs moyens à La Poste d'anticiper cela, et d'être la meilleure en Europe, et de préserver notre service public ? Donc c'est ça le sujet. Alors, J.-P. Bailly, le président de La Poste, a fait son travail, c'est-à-dire qu'il a travaillé avec son équipe, et il nous a proposé un projet, il est sur la table. Maintenant, nous, avec C. Lagarde, nous écoutons l'ensemble des acteurs, les représentants des personnels...
C. Roux : Ils pourraient vous faire changer d'avis, les acteurs, les partenaires sociaux ?
Non, mais d'abord, on n'a pas donné notre avis, donc il ne s'agit pas de changer d'avis, puisque ça, ce qui est sur la table, c'est le projet de La Poste...
M. Biraben : Oui, ou influer votre avis ?
Non, mais encore une fois, c'est le projet de La Poste. Nous, on a reçu les syndicats avec C. Lagarde, nous allons recevoir les représentants des élus, nous allons recevoir les représentants des clients, les consommateurs et les entreprises, pour leur demander comment ils voient l'évolution à l'ouverture du marché et qu'est-ce qu'ils proposent d'autres pour La Poste, voilà. Et puis, c'est ensuite que le Gouvernement se déterminera. Seulement, ce que nous avons dit, c'est que nous sommes très attachés... La Poste ce n'est pas une entreprise comme les autres, La Poste c'est une vraie proximité, le facteur fait presque partie de la famille, donc il y a une fibre affective. Donc ce que nous avons dit c'est que, 1°) : nous étions très attachés, et nous maintiendrions les garanties de service public, le fait de recevoir son courrier six jours sur sept, le fait d'être à moins de dix kilomètres d'un bureau de Poste dans les départements ruraux - moi, je suis l'élu d'un département rural, je sais ce que c'est que La Poste, c'est souvent la dernière administration en Haute-Marne qui est présente, proche de chez vous.
M. Biraben : B. Hortefeux était notre invité hier, et nous lui avons demandé de poser une question au suivant. Le suivant, c'est vous. Voici la question de B. Hortefeux.
Ah, je crains le pire.
C. Roux : Je ne l'ai pas relue avant, au secours : « tu es responsable de la consommation, je suis élu d'Auvergne, terre d'eau minérale. Sa consommation baisse. Ne devrais-tu pas boire davantage pour aider la profession, boire davantage d'eau minérale... ».
Mais je bois, je bois beaucoup d'eau, et d'ailleurs, je recommande à Brice, à chaque fois qu'on boit un verre de vin, de boire un verre d'eau minérale, ce qui est très bon pour la santé, et qui permettrait d'aider l'eau de Volvic. Non, plus sérieusement, c'est vrai que la consommation d'eau minérale, elle baisse, elle baisse parce qu'en gros, l'eau du robinet c'est cent fois moins cher que l'eau minérale, voilà, donc. Maintenant, peut-être faudrait-il mettre sur les bouteilles d'eau de Volvic que c'est la région de B. Hortefeux, et ça se vendrait sûrement beaucoup mieux...
M. Biraben : Eh bien voilà une amabilité qui aura passé. « J'aime ou j'aime pas. » J'aime ou j'aime pas le Pape à Paris ?
J'aime, j'aime, oui, parce que c'est un grand événement. D'abord, il se trouve que - accessoirement, ça ne regarde pas grand monde - mais moi, je suis catholique. Ensuite, j'aime parce que ça va être un grand rassemblement populaire de la jeunesse de France, et donc c'est un grand événement. C'est un chef d'Etat aussi, le Pape, il a un message à diffuser...
M. Biraben : C'est politique aussi...
Oui, bien sûr, il y aura d'ailleurs un rendez-vous avec le président de la République. Donc oui, j'aime.
C. Roux : J'aime pas, j'aime pas le baril de brut qui baisse ?
Ah, ben, j'aime, j'aime parce que c'est un peu le bol d'oxygène de l'été, alors ensuite, la question que vous allez me poser après, c'est, j'imagine : quand est-ce qu'on voit les résultats ?
C. Roux : Ben oui !
Ben, on les voit déjà, c'est-à-dire que... vous savez que l'hiver dernier, tout le monde a un peu ricané, parce qu'à Bercy, avec C. Lagarde, nous avions reçu les pétroliers et les distributeurs de pétrole, on leur avait demandé de lisser les hausses et de répercuter intégralement les baisses quand il y en avait, alors qu'ils faisaient, jusqu'à présent, l'inverse, ils avaient tendance à anticiper...
C. Roux : Quand est-ce qu'on le voit vraiment à la pompe... ?
Eh bien, on le voit aujourd'hui, allez faire votre plein... oui, eh bien, regardez les prix...
C. Roux : Juste, le baril de brut a baissé de 22%, et le prix à la pompe de 4...
Non, c'est inexact, les Français qui sont revenus de vacances ont payé leur prix de gasoil, leur litre, 13 centimes d'euro moins cher que lorsqu'ils sont partis en vacances. Et les chiffres que nous avons, c'est que dans les cinq mois où ça a le plus augmenté, les quatre mois, entre mars et juillet, les pétroliers ont répercuté 83% de la hausse, alors que quand ça a baissé, depuis le 11 juillet, ils ont répercuté 95% de la baisse.
M. Biraben : On va mieux regarder à la pompe. Merci beaucoup L. Chatel. Vous poserez votre question, s'il vous plaît, au cardinal Barbarin, archevêque de Lyon, qui sera notre invité demain.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 11 septembre 2008
C. Roux : Oui, porte-parole du Gouvernement : il se charge chaque semaine du compte-rendu du Conseil des ministres, numéro d'équilibriste et de langue de bois. Il est aussi secrétaire d'Etat chargé de l'Industrie et de la Consommation, celui qui gère, avec la ministre de l'Economie, le dossier de La Poste ; en ce moment, il discute avec les syndicats, pas franchement enthousiastes sur l'ouverture du capital de La Poste.
Bonjour.
C. Roux : Dans ces dossiers sensibles, Airbus, et le cas Renault en grève aujourd'hui... Bonjour. M. Biraben : L. Chatel.
Bonjour.
M. Biraben : 4.000 suppressions de postes aujourd'hui chez Renault, 2.000 en prévision. Est-ce que c'est l'échec de C. Ghosn ?
Non, c'est une situation économique mondiale, un ralentissement économique, un ralentissement de l'activité automobile, qui a impacté les Etats-Unis - les constructeurs américains ont été durement frappés - qui a impacté le Japon, et qui impacte l'ensemble des constructeurs européens. On a des cycles dans l'économie, on a des cycles dans l'automobile, et actuellement, il y a un tassement, il y a un ralentissement.
C. Roux : Il n'y a pas eu des choix stratégiques un peu douteux, comme le disent les syndicats aujourd'hui, par exemple, lancer un 4X4 au moment où tout le monde arrête de produire et de sortir des 4X4 ; il n'y a pas eu quelques erreurs stratégiques ?
Alors, on pourra discuter, je dirais, de la fin de vie de ce véhicule, si ça a été un bon véhicule ou un mauvais véhicule, je crois que c'est un petit peu tôt pour dire si c'est un échec commercial ou pas. C'est vrai qu'on peut s'interroger sur le fait que les constructeurs français, quinze ans après les autres, aient lancé leur 4X4 au moment où ce n'était plus vraiment à la mode. Mais ça, ce n'est peut-être pas forcément le débat, et ce n'est pas forcément le 4X4 qui allait relancer Renault ou qui allait relancer PSA, puisque PSA est dans la même situation.
C. Roux : Alors aujourd'hui, les syndicats sont en grève, qu'est-ce qu'ils peuvent attendre de Bercy, du Gouvernement, rien peut-être ?
Ils peuvent attendre d'abord d'avoir un gouvernement qui mise sur l'industrie ; nous, on considère que l'industrie ce n'est pas foutu, ce n'est pas fini, un grand pays industriel c'est un pays, comme l'a dit N. Sarkozy à Saint-Nazaire, qui construit des bateaux, qui fabrique des avions, qui fabrique des voitures...
C. Roux : Mais vraiment, qu'est-ce qu'ils peuvent attendre, concrètement, sur ce dossier précis ?
Eh bien, concrètement, voilà, concrètement, d'abord, le Gouvernement a déjà agi ; tout à l'heure, je vais me rendre à Sochaux, sur l'usine qui fabrique la 308, là, c'est un bon exemple de site, sur lequel aujourd'hui, le groupe PSA va pouvoir innover davantage, investir pour l'avenir, parce qu'on a mis en place le crédit impôt recherche, on a le système le plus protecteur des pays développés en matière de crédit impôt recherche, pour attirer et laisser les investissements en matière d'innovation en France, parce que les innovations d'aujourd'hui dans l'automobile, c'est les emplois de demain. Et si on veut rester compétitif dans un marché qui est mondial aujourd'hui dans l'automobile, si on veut garder nos emplois en France, il faut que les constructeurs français soient incités à investir en France. Donc c'est ce qu'on a fait avec le crédit impôt recherche. Autre mesure que nous avons prise pendant l'été, qui concerne l'ensemble de la filière automobile, c'est par exemple d'avoir raccourci les délais de paiement à 60 jours. Dans l'automobile, il y avait traditionnellement des délais de paiement très longs, et ça, ça pesait sur tous les sous-traitants de l'automobile, parce qu'il y a les constructeurs d'un côté, mais il y a toute la filière de sous-traitants, c'est plus de 700.000 emplois en France.
C. Roux : Sur ces 4.000 départs volontaires, vous n'avez rien à dire en fait ?
Alors, non, sur... enfin, sur ces 4.000 départs, d'abord, ce sont des départs volontaires, ensuite, le Gouvernement sera évidemment très vigilant au traitement au cas par cas, puis, dernier élément...
C. Roux : Ça veut dire quoi « vigilant sur le traitement au cas par cas » ?
Oui, vigilant au cas par cas, parce que nous voulons regarder ce que Renault propose, dans quels cas, dans quelles circonstances. Ensuite, vous savez qu'il y a des obligations de ré-industrialisation pour les entreprises qui sont amenées à mettre en place des plans de restructuration. Donc avec Renault, avec les autres, si c'est nécessaire, nous regarderons quels sont les plans de ré-industrialisation pour les bassins qui sont concernés par ces restructurations. C'est ça que le Gouvernement peut faire. On investit sur le long terme, d'un côté, pour rendre notre pays plus compétitif dans l'industrie, et puis de l'autre, au cas par cas...
C. Roux : On gère les suppressions de postes, de l'autre côté...
Oui, mais, si vous voulez, un constructeur automobile, il faut qu'il reste performant et il faut qu'il reste compétitif par rapport à ses concurrents. Donc évidemment... alors, sachant que, en France, il se trouve que les immatriculations vont plutôt mieux que dans les autres pays - mais ça, c'est l'effet du bonus/malus que nous avons mis en place...
C. Roux : Alors, dans votre dossier industriel, il y a une mauvaise nouvelle ce matin - c'est à la Une du Figaro - le contrat du siècle de l'armée américaine échappe à Airbus en raison des élections aux Etats-Unis. Quelle est votre réaction ?
Eh bien, évidemment, ce n'est pas une bonne nouvelle, en l'occurrence, il n'échappe pas à Airbus, il échappe à tout le monde, puisque l'armée américaine a décidé de reporter cet appel d'offres, donc il ne faut pas dire que c'est un échec d'Airbus, c'est simplement l'armée américaine qui considère que ce n'est pas le moment, qu'il y a un Président qui va être renouvelé prochainement. Et elle laisse le dossier à la prochaine administration. Vous savez que c'est un très gros contrat...
M. Biraben : La différence, c'est qu'il était signé avec nous, et puis, bon, il a été revu...
Oui, mais il y a eu un recours. Enfin, vous savez, nous sommes dans des Etats de droit, en l'occurrence, les Etats-Unis...
M. Biraben : On perd plus que les autres, c'est ça que je veux dire...
Eh bien, c'est-à-dire qu'on avait un bon espoir d'être retenu sur ce contrat. En première délibération, le contrat avait été retenu, Airbus avait été retenu. Ensuite, il y a eu un recours de la part de son concurrent Boeing, et puis, finalement, l'armée américaine décide de surseoir et de reporter l'appel d'offres. Eh bien, il faut se dire, il faut dire aux gens d'Airbus - et ils en sont conscients - qu'ils soient encore meilleurs la prochaine fois, et plus percutants. On avait gagné la première fois, donc c'est un beau challenge de se dire que lorsqu'il y aura de nouveaux contrats, eh bien, on sera meilleur que les autres.
C. Roux : Pareil, toujours sur le dossier Airbus, sur les délocalisations, donc Airbus délocalise en Tunisie, en zone dollar, pour faire des économies. Que dit le ministre de l'Industrie ?
Le ministre de l'Industrie dit qu'il faut bien faire attention aux mots. Quand vous dites : « délocalisation », ça veut dire, en gros, « je ferme Toulouse et j'ouvre Tunis », ce n'est pas du tout le cas...
C. Roux : Non, ça veut dire : j'ouvre à Tunis, bon, voilà...
Non, mais c'est très important, parce que nos téléspectateurs, vos téléspectateurs, ceux qui regardent Canal, quand on leur dit « délocalisation », disent : ça y est, on va fermer mon usine et on va aller la construire à Tunis. Ce n'est pas vrai. Aujourd'hui, le marché de l'aéronautique est mondial, c'est un marché hyper porteur. Ayez en tête qu'il va se vendre, dans les prochaines années, 20.000 avions dans les dix prochaines années, donc c'est considérable. Eh bien, les demandes, elles viennent de l'ensemble des pays, et en particulier hors zone euro. Aujourd'hui, Airbus, il fabrique l'essentiel de ses avions dans la zone euro, et il vend en zone dollar. Donc pour les pays émergents, ce nouveau marché, ce n'est pas anormal qu'Airbus aille fabriquer proche de ces pays émergents ; ce sont des marchés sur lesquels on a tendance à fabriquer près des endroits où on vend, mais on ne va pas aller fabriquer en Tunisie les avions qu'on va vendre à Air France à Toulouse, voilà.
C. Roux : Ce qu'on entend, c'est qu'on va peut-être créer des emplois en Tunisie plutôt qu'en France, non ? Ce n'est pas ça non plus ?
Non. Il faut être honnête dans la façon de voir les choses...
C. Roux : C'est le plan Power 8 ; je veux dire, on n'invente rien, on sait très bien comment ça va se passer : il y a moins d'emplois à Toulouse...
Mais l'objectif, c'est quoi ? L'objectif, c'est que, d'abord, Airbus reste leader mondial de l'aéronautique et continue à investir en recherche et développement en France, et que les sites français continuent à produire. Eh bien, pour faire ça, on a besoin de rendre le groupe plus compétitif, on a besoin de répondre à des clients qui sont aujourd'hui mondiaux.
M. Biraben : L'ouverture du capital de La Poste maintenant. Vous avez commencé, avec la ministre de l'Economie, des consultations avec les syndicats, qui craignent que ce soit le premier pas vers la privatisation.
Alors, effectivement, avec C. Lagarde, nous recevons depuis le début de la semaine les syndicats. Quel est le problème, qu'est-ce qui se passe, en fait...
M. Biraben : La privatisation...
Non, ce n'est pas ça le problème, le sujet. Le sujet c'est qu'en 2011, vous avez une ouverture au marché, ouverture à la concurrence du courrier, c'est-à-dire que vous, moi, on pourra avoir un autre prestataire que La Poste qui viendra nous livrer notre courrier, un autre facteur, voilà, c'est ça le sujet. Donc l'enjeu pour le Gouvernement, c'est de dire : eh bien, finalement, quelle est la meilleure solution pour La Poste, pour préparer cette ouverture au marché, pour attendre, quand on va avoir donc La Poste peut-être allemande, La Poste néerlandaise, qui va venir en France, eh bien, qu'est-ce qu'on fait pour donner les meilleurs moyens à La Poste d'anticiper cela, et d'être la meilleure en Europe, et de préserver notre service public ? Donc c'est ça le sujet. Alors, J.-P. Bailly, le président de La Poste, a fait son travail, c'est-à-dire qu'il a travaillé avec son équipe, et il nous a proposé un projet, il est sur la table. Maintenant, nous, avec C. Lagarde, nous écoutons l'ensemble des acteurs, les représentants des personnels...
C. Roux : Ils pourraient vous faire changer d'avis, les acteurs, les partenaires sociaux ?
Non, mais d'abord, on n'a pas donné notre avis, donc il ne s'agit pas de changer d'avis, puisque ça, ce qui est sur la table, c'est le projet de La Poste...
M. Biraben : Oui, ou influer votre avis ?
Non, mais encore une fois, c'est le projet de La Poste. Nous, on a reçu les syndicats avec C. Lagarde, nous allons recevoir les représentants des élus, nous allons recevoir les représentants des clients, les consommateurs et les entreprises, pour leur demander comment ils voient l'évolution à l'ouverture du marché et qu'est-ce qu'ils proposent d'autres pour La Poste, voilà. Et puis, c'est ensuite que le Gouvernement se déterminera. Seulement, ce que nous avons dit, c'est que nous sommes très attachés... La Poste ce n'est pas une entreprise comme les autres, La Poste c'est une vraie proximité, le facteur fait presque partie de la famille, donc il y a une fibre affective. Donc ce que nous avons dit c'est que, 1°) : nous étions très attachés, et nous maintiendrions les garanties de service public, le fait de recevoir son courrier six jours sur sept, le fait d'être à moins de dix kilomètres d'un bureau de Poste dans les départements ruraux - moi, je suis l'élu d'un département rural, je sais ce que c'est que La Poste, c'est souvent la dernière administration en Haute-Marne qui est présente, proche de chez vous.
M. Biraben : B. Hortefeux était notre invité hier, et nous lui avons demandé de poser une question au suivant. Le suivant, c'est vous. Voici la question de B. Hortefeux.
Ah, je crains le pire.
C. Roux : Je ne l'ai pas relue avant, au secours : « tu es responsable de la consommation, je suis élu d'Auvergne, terre d'eau minérale. Sa consommation baisse. Ne devrais-tu pas boire davantage pour aider la profession, boire davantage d'eau minérale... ».
Mais je bois, je bois beaucoup d'eau, et d'ailleurs, je recommande à Brice, à chaque fois qu'on boit un verre de vin, de boire un verre d'eau minérale, ce qui est très bon pour la santé, et qui permettrait d'aider l'eau de Volvic. Non, plus sérieusement, c'est vrai que la consommation d'eau minérale, elle baisse, elle baisse parce qu'en gros, l'eau du robinet c'est cent fois moins cher que l'eau minérale, voilà, donc. Maintenant, peut-être faudrait-il mettre sur les bouteilles d'eau de Volvic que c'est la région de B. Hortefeux, et ça se vendrait sûrement beaucoup mieux...
M. Biraben : Eh bien voilà une amabilité qui aura passé. « J'aime ou j'aime pas. » J'aime ou j'aime pas le Pape à Paris ?
J'aime, j'aime, oui, parce que c'est un grand événement. D'abord, il se trouve que - accessoirement, ça ne regarde pas grand monde - mais moi, je suis catholique. Ensuite, j'aime parce que ça va être un grand rassemblement populaire de la jeunesse de France, et donc c'est un grand événement. C'est un chef d'Etat aussi, le Pape, il a un message à diffuser...
M. Biraben : C'est politique aussi...
Oui, bien sûr, il y aura d'ailleurs un rendez-vous avec le président de la République. Donc oui, j'aime.
C. Roux : J'aime pas, j'aime pas le baril de brut qui baisse ?
Ah, ben, j'aime, j'aime parce que c'est un peu le bol d'oxygène de l'été, alors ensuite, la question que vous allez me poser après, c'est, j'imagine : quand est-ce qu'on voit les résultats ?
C. Roux : Ben oui !
Ben, on les voit déjà, c'est-à-dire que... vous savez que l'hiver dernier, tout le monde a un peu ricané, parce qu'à Bercy, avec C. Lagarde, nous avions reçu les pétroliers et les distributeurs de pétrole, on leur avait demandé de lisser les hausses et de répercuter intégralement les baisses quand il y en avait, alors qu'ils faisaient, jusqu'à présent, l'inverse, ils avaient tendance à anticiper...
C. Roux : Quand est-ce qu'on le voit vraiment à la pompe... ?
Eh bien, on le voit aujourd'hui, allez faire votre plein... oui, eh bien, regardez les prix...
C. Roux : Juste, le baril de brut a baissé de 22%, et le prix à la pompe de 4...
Non, c'est inexact, les Français qui sont revenus de vacances ont payé leur prix de gasoil, leur litre, 13 centimes d'euro moins cher que lorsqu'ils sont partis en vacances. Et les chiffres que nous avons, c'est que dans les cinq mois où ça a le plus augmenté, les quatre mois, entre mars et juillet, les pétroliers ont répercuté 83% de la hausse, alors que quand ça a baissé, depuis le 11 juillet, ils ont répercuté 95% de la baisse.
M. Biraben : On va mieux regarder à la pompe. Merci beaucoup L. Chatel. Vous poserez votre question, s'il vous plaît, au cardinal Barbarin, archevêque de Lyon, qui sera notre invité demain.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 11 septembre 2008