Interview de Mme Nadine Morano, secrétaire d'Etat à la famille, à France 2 le 17 septembre 2008, sur la garde et l'accueil des enfants, la natalité et le contrôle parental sur internet.

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Média : France 2

Texte intégral


 
 
 
F. Laborde.- Ce matin, avec N. Morano, nous allons parler, ô surprise, de la famille. Bonjour !
 
Bonjour !
 
Merci de nous rendre visite ! Alors vous recevez aujourd'hui l'ensemble de vos confrères et consoeurs de l'Union européenne - c'est à votre initiative. Ils viennent tous à Paris pour justement évoquer les problèmes que pose la gestion des affaires familiales au niveau européen.
 
Oui. Avec X. Bertrand, nous avons pris l'initiative de réunir à Paris, dans le cadre de la présidence de l'Union européenne, nos collègues et partenaires européens pour traiter des politiques familiales, en sachant que c'est de la compétence des Etats et que nous avons plutôt à trouver des défis en commun. Il faut savoir qu'aujourd'hui nous sommes 495 millions d'habitants en Europe, que d'ici à 2035, nous serons 521 millions et que nous avons un taux de vieillissement de la population important. Donc, nous avons à réfléchir comment assurer le renouvellement des générations dans le cadre de l'Union européenne, parce qu'à l'aube de 2035, nous aurons près de 26 % de la population qui auront plus de 65 ans. Dès 2015...
 
Donc vous réfléchissez à la fois, j'allais dire, à la retraite, à la façon de gérer, d'un pays à l'autre c'est très différent évidemment parce qu'il y a des traditions aussi qui sont différentes, les personnes âgées restent dans les familles ou au contraire vont dans une institution ; c'est tout ça que vous allez passer en revue ?
 
Dès 2015, le taux de mortalité sera supérieur au taux de natalité en Europe. Et donc par rapport à cela, si nous voulons élever le taux de natalité, et il faut savoir que la France est le premier en Europe avec un taux de natalité...
 
Oui, on se reproduit beaucoup en France ! Bon signe.
 
Pas encore assez pour assurer le renouvellement des générations, deux enfants par femme. Nous voulons regarder, parce qu'il y a des pays qui ont un faible taux de natalité, comment mieux assurer la conciliation vie familiale/vie professionnelle avec des modes de garde. Et on le voit, dès que nous avons des modes de garde adaptés, dès que les femmes travaillent plus et sont plus actives dans la vie professionnelle, nous avons un taux de natalité beaucoup plus élevé.
 
Mais, en France les femmes sont plutôt au-dessus de la moyenne en ce qui concerne leur implication dans la vie active et professionnelle. La difficulté ça reste comment on fait pour garder les enfants.
 
Oui, alors c'est un engagement fort du président de la République de développer 350 000 offres de garde supplémentaires et nous avons regardé avec X. Bertrand comment être plus pragmatique pour répondre aux besoins des familles. Par exemple, ce qui nous a marqué et sur lequel nous voulons agir, c'est que, par exemple, à Paris - Paris et banlieue parisienne - il faut savoir que vous avez des crèches hospitalières...
 
D'ailleurs à côté d'ici, à l'hôpital Georges Pompidou, il y a une très belle crèche, je confirme.
 
A l'Assistance Publique - Hôpitaux De Paris, il y a 410 000 places de crèche avec un taux d'occupation de seulement 65 à 70 %. Ce qui veut dire que nous avons un potentiel de 1 000 places de crèche libres aujourd'hui, disponibles... Tout de suite ? Disponibles et pour lesquelles, on voit bien, une place de crèche, le taux annuel d'une place de crèche c'est 13 000 euros à l'année. Ce qu'il faut savoir, c'est qu'avec 1 000 places de crèche vacantes, inoccupées comme ça, eh bien c'est une perte de 13 millions d'euros. Et donc nous avons décidé avec X. Bertrand de réunir - et ça a été fait au cours d'une séance de travail, le directeur général, monsieur Leclerc, de l'Assistance Publique - Hôpitaux De Paris, et également le directeur de la CAF, pour trouver une convention, mettre en place une convention avec les collectivités, pour élargir l'ouverture de ces crèches aux quartiers qui les bordent...
 
Et ce sera en place quand, N. Morano ? C'est une première, ça !
 
Dans les meilleurs délais. Ah ! Oui, c'est une première. Dans les meilleurs délais. Je pense que nous devrions arriver à signer une convention d'ici quinze jours. Et par rapport à cela, il faut savoir aussi que l'avantage des crèches hospitalières, c'est qu'elles ont des ouvertures larges, parce qu'elles correspondent aux horaires atypiques et donc elles sont ouvertes de 06h30 le matin à 22h00. Donc c'est un potentiel que nous souhaitons utiliser à disposition des familles.
 
Vous commencez avec Paris et après dans toute la France vous allez regarder si le modèle justement peut être transposable ?
 
Oui, c'est ce que nous avons commencé à regarder dans d'autres secteurs de France, d'ailleurs en partenariat avec ma collègue R. Bachelot, parce que je m'étais entretenue avec elle de ce sujet. Nous allons aussi développer des modes de garde concernant... on parlait des horaires atypiques, mais aussi il faut penser à tous ceux qui travaillent dans les commerces. Par exemple, il n'y a pas de crèches ouvertes le samedi ou le dimanche et donc c'est une vraie difficulté. Donc nous voulons vraiment répondre aux besoins des familles pour que ce ne soit plus un casse-tête chinois que de faire garder son enfant en France.
 
Voilà en exclusivité pour France 2 : dans quinze jours, vous pouvez aller à l'hôpital le plus proche de chez vous savoir s'il y a une place dans une crèche et vérifier si en effet les conventions ont été signées ! Autre thème que vous allez aborder, me suis-je laissée dire, ce sont les dangers d'Internet pour les enfants parce que ça se développe de plus en plus, ils vont tous surfer. Ici même, nous avons des enfants qui surfent sur Internet, je pense à mademoiselle Laura, je plaisante, mais parfois on fait de mauvaises rencontres sur Internet.
 
C'est une préoccupation des familles, c'est une préoccupation de l'ensemble des autorités de l'Union européenne, puisque lorsque je me suis déplacée dans plusieurs de ces pays, notamment en Norvège, en Suède, en Allemagne, j'ai pu m'apercevoir à quel point il y avait parmi mes partenaires européens cette préoccupation de réglementer l'utilisation d'Internet. Internet est un outil fabuleux et Internet est un outil absolument désastreux. Donc nous avons édité avec X. Darcos une plaquette à destination des familles, qui a été distribuée dans les écoles primaires, à destination des parents avec...
 
Les conseils.
 
 ...Le nouveau programme, pour donner huit conseils aux parents. Cette plaquette a été éditée à 4,5 millions d'exemplaires parce qu'il est important d'informer les parents des dangers d'Internet et puis de vanter aussi les qualités de cet outil. Mais ne laissez jamais un enfant seul dans sa chambre relié à l'Internet s'il n'y a pas de système de contrôle parental activé.
 
De toute façon il faut accompagner son enfant, j'allais dire, sur Internet pour ses premiers pas et lui montrer en effet quels sont les dangers, les pièges, les mots à éviter. Si on est confronté à une image choquante, tout de suite prévenir.
 
Franchement, il faut d'abord un système de contrôle parental, c'est absolument indispensable !
 
Et tous les parents ne le mettent pas ça ?
 
Tous les parents ne l'activent pas, parce que quelquefois, vous avez des fratries, donc des enfants qui sont plus âgés, qui n'ont pas besoin d'avoir un système de contrôle parental, il faut activer le système de contrôle parental, il faut parler avec les enfants de leur activité sur Internet, 62 % des parents ne savent pas, par exemple, que leurs enfants ont un blog sur Internet, alors que 96 % des adolescents surfent tous les jours sur Internet. Donc on voit bien qu'on a inventé la voiture, eh bien avec ça on a inventé un code de la route, aujourd'hui on navigue, on surfe sur la toile, il nous faut inventer aussi un code de sécurité pour nos enfants sur Internet.
 
Et rendre les parents conscients en effet de ces risques qu'ils ignorent trop souvent.
 
Oui, et comme le Web par définition n'a pas de frontière, vous comprenez bien à quel point tous ces nouveaux comportements qu'on voit sur Internet préoccupent nos partenaires européens et nous voulons arriver à définir des axes communs de lutte contre certaines pratiques, mais également des engagements de sécurité pour nos enfants.
 
Puisqu'on parle, on évoque comme ça l'international, je sais bien que ce n'est pas directement votre activité, je pense à la crise financière qui agite en ce moment les marchés financiers et boursiers ; vous pensez, vous, que la France va être aussi moins touchée que les autres pays ou l'Europe ?
 
Je pense qu'une crise financière, par définition, où qu'elle se passe dans le monde, nécessite notre vigilance. Je recevais C. Lagarde en Lorraine il y a deux jours, dès le départ de la crise qui vient de toucher les Etats- Unis, je peux vous dire qu'elle est d'une extrême vigilance, minute après minute, avec les autorités de surveillance françaises pour bien évidemment stabiliser les marchés. Donc il y a une crise évidemment qui peut inquiéter, mais il y a d'abord aussi à mettre en face les outils de vigilance, qui nous permettent, eh bien, de tenir le choc simplement.
 
Merci d'être venue nous voir ce matin, N. Morano, très bonne journée à vous !
 
 Merci à vous !
 
Vous saluerez pour nous tous vos confrères européens. Vous serez combien en tout ?
 
Vingt-sept ; vingt-sept représentants de l'Union européenne.
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 18 septembre 2008