Déclaration de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, sur les soins médicaux, le système de soins hospitaliers et la prévention des infections et maladies, Lille le 26 septembre 2008.

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Circonstance : Présentation du dispositif portant sur les centres de référence de prise en charge des infections ostéarticulaires complexes à Lille le 26 septembre 2008

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Nous voici, si j'en crois le récent classement d'un hebdomadaire, dans le meilleur hôpital de France.
Certes, ces classements ont leurs limites, mais c'est tout de même un beau signe de reconnaissance pour l'ensemble des personnels du CHU de Lille dont je suis heureuse de pouvoir aujourd'hui partager la fierté.
Nos concitoyens apprécient à sa juste valeur votre travail, votre engagement au service de la santé. Ils connaissent vos contraintes mais aussi les exigences qui se trouvent au fondement de la vocation hospitalière.
Ils souhaitent, pour l'avenir, que soit préservée la qualité de notre service public de santé, l'un des meilleurs au monde, comme l'indiquent encore d'autres classements.
Mon déplacement dans le Nord, qui se poursuivra dans l'après-midi par une étape au centre hospitalier de Valenciennes, et s'achèvera à Douai par l'inauguration du nouvel hôpital, est résolument placé sous le signe de l'amélioration continue de la qualité de notre système hospitalier.
Le Président de la République l'a rappelé à Bletterans le 18 septembre : les établissements doivent faire preuve d'une plus grande transparence à l'égard du public, notamment sur leur taux d'infections nosocomiales.
En ce sens, le travail mené dans domaine des infections ostéo-articulaires complexes est tout à fait remarquable. En effet, ces infections nosocomiales, qui recouvrent essentiellement les infections sur prothèse et les infections post-traumatiques, se contractent le plus souvent après un passage au bloc opératoire.
Si ces infections, rapportées au nombre de cas, sont peu nombreuses - 2.000 à 2.500, sur plus de 100.000 interventions pratiquées, elles peuvent néanmoins mettre en jeu le pronostic vital et provoquent le plus souvent de graves séquelles fonctionnelles.
Le contrôle des infections nosocomiales est prioritaire.
Non seulement, en effet, ces infections peuvent avoir des conséquences dramatiques sur la santé des patients, mais elles fragilisent, de surcroît, le lien de confiance qui doit unir soignants et soignés.
Objectivement graves, elles sont aussi subjectivement vécues comme une altération préjudiciable à tous de la relation qui doit nécessairement lier patients et thérapeutes.
La confiance, comme on le sait, constitue non seulement un déterminant essentiel de la guérison, mais aussi, pour les professionnels de santé, la condition sine qua non de l'exercice serein de leur fonction.
Chacun l'a bien compris : le présupposé essentiel de la confiance qu'il convient de préserver, c'est la sécurité.
Dans cet esprit, j'ai donc souhaité accélérer le programme de prévention des infections ostéo-articulaires initié en 2005.
C'est ainsi que j'ai annoncé, le 30 janvier dernier, ma volonté de labelliser, d'ici à 2009, 10 "Centres de référence interrégionaux pour la prise en charge des infections ostéoarticulaires complexes".
Ces centres de référence ont une mission de coordination, d'expertise, de formation et de recherche ainsi que de prise en charge des infections ostéo-articulaires les plus complexes.
Huit centres ont ainsi été proposés pour 2008, sur une trentaine potentiellement éligible.
J'ai souhaité que le choix soit avant tout déterminé par la qualité du projet médical proposé. Pour chaque centre candidat, nous avons ainsi analysé les modalités d'organisation interne et de prise en charge des patients, le regroupement des compétences, la qualité du partenariat avec les établissements de santé environnants.
Les centres que j'ai retenus sont :
- le CHU de LILLE pour l'inter-région Nord-Ouest, regroupant les régions Basse-Normandie, Haute-Normandie, Picardie, Nord-Pas-de-Calais,
- CHU de REIMS pour l'inter-région Est, regroupant les régions Alsace, Bourgogne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Lorraine,
- le CHU de TOURS pour l'inter-région Ouest, regroupant les régions Bretagne, Centre, Pays-de-Loire, Poitou-Charentes,
- les HOSPICES CIVILS DE LYON pour l'inter-région Sud-Est, regroupant les régions Auvergne, Rhône-Alpes,
- l'ASSITANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE MARSEILLE pour l'inter-région Sud méditerranée, regroupant les régions Corse, Languedoc-Roussillon, PACA,
- le CHU de TOULOUSE pour l'inter-région Sud-Ouest, regroupant les régions, Aquitaine, Limousin, Midi-Pyrénées,
- et enfin, le GROUPE HOSPITALIER DIACONESSES-CROIX ST-SIMON et le CHU RAYMOND POINCARE (Garches), dépendant de l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris pour la région Ile-de-France.
Ces choix sont fondés sur la proposition de l'ensemble des ARH, sur la base d'un cahier des charges national rédigé par six sociétés savantes sur l'avis du Comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins (CTINILS).
J'ai souhaité déléguer totalement la prise de décision à l'échelon régional. Cette approche décentralisée correspond en tout point à mon projet politique, qui consiste à territorialiser nos politiques de santé.
La qualité du traitement que nous devons aux malades commande de ne pas saupoudrer la compétence.
Nous devons être capables d'organiser nos filières de recours par inter région et non mécaniquement au sein de chaque CHU.
La qualité des équipes, leur capacité à se mobiliser sur une thématique n'est pas uniforme sur l'ensemble du territoire.
Ces prises en charge d'exception, qui ne concerneront fort heureusement que quelques dizaines de cas par an pour chaque centre, permettent d'apprécier la pertinence d'une meilleure organisation de la gradation des soins.
Je note d'ailleurs que les CHU ne sont pas les seuls à atteindre l'excellence : la Croix Saint-Simon, établissement PSHP est aussi reconnu, avec l'AP-HP, pour la région de Paris.
En cela, ce dispositif préfigure les mesures que je m'apprête à présenter dans le projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires » dans les prochaines semaines.
Ainsi, pour reprendre le choix du CHU de Lille, la procédure a été traitée au sein du « G4 » qui regroupe les 4 CHU de l'inter région.
Je tiens à saluer l'approche coopérative du dossier porté par Lille.
Ce dossier, en effet, intègre à la fois l'expertise de proximité, avec l'association du pôle d'infectiologie du centre hospitalier de Tourcoing et la dimension hospitalo universitaire, puisque les CHU de Caen, Rouen et Amiens seront centres associés.
Très concrètement, la reconnaissance de ces centres permettra de proposer aux patients une prise en charge multidisciplinaire garante de la meilleure stratégie thérapeutique pour le patient.
A ce titre, le centre de Lille assurera l'harmonisation des protocoles, la création d'un registre interrégional des infections, l'évaluation médico-économique, la formation et l'évaluation des pratiques professionnelles, l'harmonisation et le fonctionnement des réunions de concertations multidisciplinaires, sur le modèle de ce qui se pratique en cancérologie, et enfin, le développement d'une stratégie de Recherche Clinique, pour améliorer la prise en charge.
L'intérêt du patient est la seule pierre de touche de toutes ces actions.
Le centre assurera la diffusion de protocoles à l'ensemble des professionnels de santé de l'inter région, cherchant à améliorer l'information des patients et de leur famille en collaboration avec l'association « Le LIEN », dont je salue les représentants, présents aujourd'hui.
La création des 8 centres est une étape indispensable vers l'organisation d'une filière de recours, qui passe également par une adaptation des financements actuels.
Il a été réservé dans l'ONDAM 2008 un montant de 900.000euros destiné à l'activité des centres, qui sera réparti entre les huit centres reconnus.
Parallèlement, des travaux ont été engagés de manière à permettre un financement de l'activité de prise en charge des infections ostéo-articulaires à un juste niveau. En effet, les malades qui subissent ces complications doivent bénéficier d'une prise en charge chirurgicale adaptée. Il faut disposer pour cela d'un plateau de microbiologie performant et de compétences médicales diversifiées, comme j'ai été amené à le voir en visitant le plateau technique de Lille.
Aussi ai-je souhaité que la mission « Tarification à l'activité » puisse rapidement cheminer vers un dispositif tarifaire adapté à la gravité des cas et à la complexité de la prise en charge, en modulant le dispositif T2A.
Cela se traduira par :
- la création d'un groupement homogène de malades (GHM) chirurgical de prise en charge des infections ostéo-articulaires au sein de la Version 11 (V11) de la classification des GHM avec ses niveaux de sévérité qui entrera en vigueur en mars 2009. Deux tarifs seront associés à ce GHM selon que la prise en charge soit effectuée dans des centres de référence (ou les centres associés dans un projet inter-régional) ou non. Seuls les centres reconnus pourront facturer le tarif le plus élevé,
- le redécoupage en deux GHM médicaux spécifiques dans la V11 avec ses niveaux de sévérité,
- l'intégration des infections ostéo-articulaires dans les listes de complications dans les niveaux de sévérité les plus élevés.
Nous avons l'ambition, à l'aide de ce dispositif tarifaire, de mieux organiser la filière en établissant un lien entre proximité et recours, qui aboutira à une prise en charge améliorée.
En effet, les centres ne disposant pas du tarif le plus élevé auront un intérêt à transférer rapidement les malades souffrant d'infection ostéo-articulaire complexe vers les centres de référence, qui disposeront de l'infrastructure adaptée et du temps nécessaire pour traiter au mieux les malades.
Je suis convaincue que ce dispositif innovant, mobilisant avec intelligence tous les outils de pilotage du système - T2A, reconnaissance décentralisée, coopération entre les CHU sur des activités hyper spécialisées... - est capable d'offrir un meilleur service aux patients. Ne nous y trompons pas : notre système, un des meilleurs au monde, donne des signes de fragilité.
Nos structures sont si complexes que nous passons parfois plus de temps à tenter de coordonner nos efforts qu'à traiter les problèmes réels.
On demande trop à la bonne volonté des hommes.
Ce sont les structures qu'il faut réformer, pour soutenir les professionnels de santé, soucieux de la qualité du service rendu, en leur donnant de nouveaux outils leur permettant de mieux accomplir leurs missions.
Je vous remercie.
Source http://www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr, le 30 septembre 2008