Déclaration de M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat chargé de l'aménagement du territoire, sur la politique des pôles de compétitivité, axée sur le rapprochement des acteurs de la recherche et de l'innovation, la mise en place d'un modèle de réseaux d'entreprises et sur le développement durable, Paris le 1er octobre 2008.

Prononcé le 1er octobre 2008

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Circonstance : 4ème journée nationale des pôles de compétitivité à Paris le 1er octobre 2008

Texte intégral

Mesdames et messieurs,
C'est pour moi un honneur et un plaisir d'être devant l'assemblée des présidents et directeurs des pôles de compétitivité français, et de saluer les représentants des collectivités territoriales et de l'Etat qui accompagnent les pôles dans leur stratégie de croissance. La politique des pôles de compétitivité, c'est un enjeu national et un défi collectif.
Il est évident que le développement de la compétitivité de notre économie, et de notre tissu industriel, implique la participation de chacun : industriels, universités et Ecoles, chercheurs, et pouvoirs publics. C'est la force des pôles de compétitivité que d'associer toute cette chaîne d'acteurs dans nos territoires. Car la synergie territoriale est au coeur et à l'origine des pôles. Elle a conduit à un succès d'une ampleur inattendue qui exprime la richesse et le dynamisme de tous nos territoires. Je ne reprendrai pas les conclusions de l'évaluation qui vous ont déjà été présentées.
Je soulignerai seulement que nous avons franchi une rupture culturelle en termes de capacité de travail coopératif. Ce n'était pas facile dans notre pays. La politique des pôles a permis ce développement, entre des acteurs jusqu'ici encore trop cloisonnés, d'une dynamique de coopération d'une nouvelle ampleur qui produit des résultats remarquable et, comme je le disais, remarqués. C'est en premier lieu cette dynamique que nous devons maintenant consolider et faire fructifier.
Je souhaite revenir sur trois chantiers de cette phase 2.0 des pôles que nous devons mettre en oeuvre :
1/ Tout d'abord, nous devons amplifier les synergies territoriales.
Pour cette deuxième phase de la politique des pôles, nous devons tenir compte systématiquement des pôles de compétitivité dans l'ensemble des politiques publiques que nous menons. En particulier, nous devons mieux les intégrer et les rapprocher des acteurs de la recherche et de l'innovation, à l'échelon local et national.
Au niveau national, les ministères membres du groupe de travail interministériel prendront en compte les pôles de compétitivité dans leurs stratégies nationales ainsi que dans leurs décisions d'investissement et d'allocation de ressources. C'est très important. J'ai notamment en tête l'exemple de ce que nous allons faire, dans mon ministère, autour de Marne-La-Vallée où nous allons constituer un centre d'excellence scientifique et technique de niveau mondial dans le domaine de la ville durable. Et, bien sûr, cela se fait avec le pôle Advancity sur la Ville et la mobilité durable. Le pôle profitera de cette masse de compétences qui rejoindront le campus de Marne la Vallée. Et, réciproquement, les organismes publics concernés profiteront de ces liens étroits avec le secteur privé.
Au niveau des territoires, le gouvernement demande aux établissements publics d'enseignement et de recherche impliqués dans les pôles d'assurer l'implication des structures de coopération et de coordination auxquelles ils participent (comme les Pôles de Recherche et d'Enseignement Supérieur (PRES), les Réseaux Thématiques de Recherche Avancée (RTRA), les Instituts Carnot, les structures mutualisées de valorisation, ou les incubateurs,...).
D'autre part, nous poursuivons notre volonté de coordination avec les collectivités territoriales, notamment dans le cadre des comités de coordination et des contrats de performance. Les contrats de projets Etat-Régions et les programmes opérationnels européens seront orientés pour apporter un soutien prioritaire aux projets structurants liés aux pôles de compétitivité.
Par ailleurs, le dialogue avec les financeurs privés doit être renforcé, par exemple en impliquant davantage les "business angels" et les fonds de capital risque privés dans le travail des pôles.
Enfin, face à ce développement massif des coopérations et des liens entre diverses structures, nous ne devons pas oublier de bien organiser la fonction d'intelligence économique.
Vous le voyez, réussir cette phase 2 des pôles de compétitivité est au coeur de nos priorités et de notre action.
2/ Deuxième chantier en lien avec les pôles de compétitivité : nous devons poursuivre notre réflexion et compléter notre politique de clusters.
En effet, il y a des réseaux d'entreprises qui coopèrent et qui innovent, mais qui ne sont pas forcément des pôles de compétitivité. Ils n'en ont peut-être pas la taille critique, mais ils apportent un plus et participent à la compétitivité de nos territoires. J'y suis attaché et j'ai donc proposé au Premier Ministre de réfléchir à ce nouveau défi : mettre en place un modèle de réseaux d'entreprises en lien et en complémentarité avec les pôles de compétitivité, ouvert à diverses maturités de réseaux et qui favorisera leur évolution et les coopérations. Il s'agit de compléter et d'adapter le dispositif public. Nous le ferons à l'occasion de la rénovation prochaine de la politique des « systèmes productifs locaux » (SPL). J'ai confié cette réflexion à la DIACT qui doit me rendre ses propositions d'ici la fin de l'année.
3/ Cela m'amène au dernier point sur lequel je veux insister : le développement durable.
Mon rattachement au Ministre d'Etat, Ministre de l'Ecologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, a une signification forte : elle traduit la nécessité de penser l'aménagement du territoire dans le cadre renouvelé par le Grenelle de l'environnement. Et la politique des pôles de compétitivité constitue un levier majeur de cette ambition. Parce que notre société ne peut réussir cette évolution que par une action collective, associant les entreprises, les scientifiques, les formateurs, les citoyens et les pouvoirs publics nationaux et territoriaux.
Car le contexte mondial actuel valide les hypothèses sur lesquelles nous avons engagé le Grenelle de l'environnement.
Notre modèle de croissance fondé sur l'idée que les ressources naturelles sont illimitées n'est pas viable sur le long terme. Nous ne pouvons plus attendre : les experts (de l'Agence Internationale de l'Energie) nous ont annoncé un ralentissement de l'offre de pétrole à partir de 2010, c'est-à-dire demain ! Le consommateur citoyen ne veut plus des produits trop gourmands en énergies fossiles ou en emballages. L'opinion publique, française, mais aussi mondiale, a définitivement basculé : le développement durable n'est ni une mode passagère, ni le combat de quelques pionniers, mais un mouvement irrésistible qui touche tous les domaines de la consommation. Aujourd'hui, tout le monde souhaite réduire sa facture énergétique ; chacun veut savoir ce qu'il y a dans son assiette ; chacun exige de boire une eau de qualité. La demande est là. Les marchés sont en train d'émerger : dans le bâtiment, dans les énergies renouvelables, dans l'automobile propre, dans l'agriculture bio,...
C'est pourquoi je pense que les entreprises qui ne prendront pas le virage du développement durable seront des entreprises fragilisées à court terme et probablement condamnées à moyen terme. Il y aura demain un avantage compétitif majeur au bénéfice des entreprises qui auront accompli cette révolution.
Dans ce contexte, nous devons impérativement développer l'offre d'écotechs pour diminuer l'empreinte environnementale des activités économiques. Il faut créer les nouvelles filières sources d'emplois et de compétitivité pour notre pays. A cet égard, je me félicite que le Premier ministre nous ait donné, la semaine dernière (lors de son déplacement à Grenoble le 24 septembre), une orientation claire : « nous ne procéderons à aucune nouvelle labellisation de pôles dans les trois ans, à une exception près, dans le domaine des écotechnologies, puisqu'il s'agit d'un domaine dans lequel il n'y a pas encore de pôle de compétitivité. Je pense que la France gagnerait à organiser une logique de "cluster" dans ce domaine-là, parallèlement aux labels qui ont déjà été accordés dans le domaine de l'énergie. »
De nombreux pôles développent des projets de développement durable. Cela étant, à ce jour, les projets liés au développement durable représentent 19 % des projets retenus et 16 % des aides accordées par le fonds unique interministériel. Comparativement aux secteurs leaders (TIC, biotechnologies, aéronautique), les projets dans les domaines du développement durable sont relativement moins nombreux, pour des demandes de subventions moins importantes.
Une prise en compte plus substantielle de cette thématique me semble nécessaire. Je souhaite fixer une ambition collective : que 30 % des projets et des aides soient accordées par le fonds unique interministériel à des projets de développement durable, à échéance de cette nouvelle phase de 3 ans. Cet objectif me semble nécessaire et réaliste.
Car ce taux est déjà atteint dans les projets de pôles soutenus par l'Agence Nationale de la Recherche : en 2006 et 2007, la part des projets relevant du développement durable est de 31 % en nombre de projets et de 38 % des financements. Cela nous montre que nous avons des compétences en matière de recherche amont. L'objectif doit être de concrétiser ces efforts amonts en projets
plus proches du marché.
A l'heure où les marchés révèlent les désastres d'une financiarisation à outrance de l'économie mondiale, la politique des pôles de compétitivité peut montrer un autre visage de l'économie : un visage sain, résolument confiant dans l'avenir, ancré dans nos territoires et dans le réel.
Je souhaite, fort de cette conviction, que vos travaux soient fructueux et vos projets plus nombreux encore.
Source http://www.diact.gouv.fr, le 6 octobre 2008