Entretien de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, avec France 3-Pays de Loire le 10 octobre 2008, sur l'implication des jeunes dans le projet européen.

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Média : France 3

Texte intégral

Q - Cinq cents jeunes de vingt-sept Etats membres de l'Union européenne plus quelques Etats frontaliers dont la Russie, la Géorgie, la Turquie et les pays des Balkans se sont réunis cette fin de semaine à Nantes. Ils ont pour mission de rédiger douze projets qu'ils souhaitent voir mis en oeuvre d'ici 2020. Pour les accompagner dans cette démarche, plusieurs personnalités politiques dont Felipe Gonzalez l'ancien Premier ministre espagnol et puis Jean-Pierre Jouyet secrétaire d'Etat chargé des Affaires européennes que nous recevons ce soir. Bonsoir Monsieur le Ministre.
R - Bonsoir.
Q - Première question, pourquoi une telle opération ?
R - C'est une opération destinée à rendre la Présidence française plus "citoyenne". Nous voulons mieux expliquer nos priorités dans ces périodes difficiles et connaître le regard que portent les jeunes de l'Union européenne et, vous l'avez dit, de pays qui ne sont pas membres de l'Union européenne sur le projet européen à horizon de dix à quinze ans.
Q - Mais est-ce que ce n'est pas aussi l'envie derrière ces discours de motiver les jeunes pour qu'ils aillent voter aux élections européennes, parce que l'on sait que la participation n'est pas très bonne, elle n'arrête pas de baisser depuis 1979 d'ailleurs ?
R - On verra ce qu'il en sera en 2009. Pour ma part, je pense que la participation sera assez importante et plus importante que les autres années. Dans des situations difficiles comme l'Irlande ou l'Autriche ces derniers temps en ont connues, on s'aperçoit que l'Europe est au coeur d'un certain nombre de préoccupations et qu'il y a une volonté de s'exprimer sur les enjeux européens. Qui plus est, dans certains pays dont le nôtre, ce sera la seule consultation électorale en 2009.
Q - De quoi vont-ils parler ces jeunes ? Quels sont les thèmes ? Est-ce que tout est ouvert ou il y a des thèmes précis qui vont être abordés ?
R - Les thèmes sont ouverts. Ce que l'on remarque chez les jeunes, c'est leur volonté de parler de leurs préoccupations : la culture, la mobilité mais aussi la manière dont l'Europe répond aux défis globaux, je pense notamment à l'environnement, à l'énergie et aussi, plus surprenant, à l'intérêt qu'ils portent aux questions extérieures. Je suis frappé que les jeunes, plus que leur aînés, soient intéressés par exemple par la défense de l'Europe, par les relations extérieures de l'Europe, par la conviction que l'Europe peut s'affirmer davantage en tant que puissance et acteur global dans le monde. C'est cela qui me paraît le plus frappant. La crise que nous avons connue entre la Russie et la Géorgie contribue sans doute à ce regain d'intérêt des jeunes pour cette "Europe puissance".
Q - Je pense que les jeunes s'intéressent aussi à leur emploi et la crise actuelle tombe à point nommé par rapport à ce rassemblement. Qu'est-ce que vous avez à répondre à ces jeunes, est-ce que l'Europe peut faire quelque chose contre la crise actuelle ?
R - Nous devons faire face à une crise qui est d'origine américaine mais qui est devenue une crise internationale. A l'évidence, l'Europe doit apporter ses valeurs, faire valoir la nécessité d'avoir un monde financier plus régulé, une finance beaucoup moins spéculative et au service du financement de l'économie. Nous sommes dans une situation extrêmement difficile qui appelle beaucoup de coordination de la part des Etats européens. Le président du conseil espagnol, M. Zapatero a fait des propositions pour que dès ce week-end il y ait des réunions de coordination au niveau des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Eurogroupe. Je trouve que ce sont de bonnes propositions. Je crois que plus que jamais nous avons besoin de coordination et de trouver une réponse européenne et internationale.
Q - Mais c'est là où les jeunes vont vous attendre justement, parce qu'il faudra prouver que l'Europe peut faire quelque chose.
R - Ils ont raison. L'Europe peut surtout faire entendre sa voix unie sur le plan international. L'Europe doit porter ses propres valeurs à un moment où l'on voit bien que le modèle libéral tel qu'il a été importé des Etats-Unis, connaît une crise majeure. Il faut réinventer le modèle, et il faut redonner confiance à court terme. Il faut retrouver les fondamentaux de l'économie, il faut sans doute aussi bousculer certains dogmes. L'Europe y est prête, il y aura des réunions importantes dès la semaine prochaine, peut-être ce week-end. Les ministres de l'Economie et des Finances et les gouverneurs de banques centrales sont réunis à Washington. Nous devons trouver une approche concertée. Ce n'est plus seulement une crise financière, nous avons à faire face aujourd'hui à une crise économique internationale sans précédent.
Q - Comment peut-on motiver les jeunes pour l'Europe quand même pour les politiques c'est un petit peu une voie de garage quand on se présente sur une liste pour les européennes quand on a perdu ailleurs ?
R - Il y a pas mal de jeunes qui souhaiteraient être sur les listes européennes, et il serait bon effectivement que l'ensemble des partis contribuent à rajeunir les listes européennes. Je crois qu'il y a une vocation et une envie des jeunes à être sur les listes européennes. Il faut, vous avez raison de le souligner, que ces listes soient constituées d'européens engagés, de responsables politiques nationaux. Et pour voir fonctionner le Parlement européen, je peux vous dire que c'est une assemblée extrêmement importante qui va avoir des pouvoirs encore renforcés si, comme nous l'espérons, le Traité de Lisbonne est appliqué dans les meilleurs délais.
Q - On peut encore participer à ce rassemblement demain en allant à la Cité des Congrès de Nantes dès neuf heures, il n'y a pas de sélection ?
R - J'invite effectivement tous ceux qui peuvent à venir. C'est un débat ouvert, très interactif et surtout, ce qui est nouveau, c'est qu'il y a un aspect multinational et j'allais dire multiculturel. C'est cela la valeur ajoutée de ce rassemblement.
Q - Merci Monsieur le Ministre d'avoir été avec nous ce soir, on en reparle dans le journal régional.
R - Merci.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 octobre 2008