Interview de M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat aux sports, à France 2 le 6 mars 2009, sur les paris sportifs et les jeux de hasard, les dossiers du secrétariat d'Etat aux sports et la candidature de la France aux Jeux olypiques de 2018.

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Média : France 2

Texte intégral

J. Wittenberg.- Alors, en sport, on aime bien les statistiques, les chiffres, et ça fait aujourd'hui 500 jours tout rond que vous êtes entré au Gouvernement, alors quel bilan vous en tirez ?
 
Eh bien d'abord j'ai fait un fascicule, effectivement, qui retrace un petit peu tout ce que nous avons fait, tout ce que j'ai fait durant 500 jours. Je me permets de vous l'offrir.
 
Donc, "500 jours qui ont fait bouger le sport". C'est quoi ? Qu'est-ce que vous retiendriez comme mesure principale, comme avancée principale avec vous ?
 
C'est un bilan qui retrace toutes les actions que nous avons menées depuis 500 jours. Je dirais que, pour synthétiser, il y a deux missions prioritaires dans mon ministère. La première c'est rendre le sport accessible à tous les Français. Tous les Français, cela veut dire, dans les zones rurales, dans les zones dans les quartiers sensibles, dans les zones urbaines, faire en sorte qu'il y ait un maximum de femmes qui pratiquent le sport, aider le handisport à se développer. Tout ça c'est rendre le sport accessible à tous les Français. Et la deuxième mission, qui est aussi importante, c'est le haut niveau, c'est le sport professionnel, c'est aider les clubs à regagner, des clubs de football, de rugby, de hand, de basket, à regagner des titres européens, les mettre dans les conditions idéales et aider tous les sportifs de haut niveau, ceux qui nous ont fait tant rêver durant les Jeux Olympiques mais qui ne sont pas nécessairement professionnels, si on prend le cas de Steeve Guénot, champion olympique de lutte, il n'est pas professionnel, il travaille à la RATP et il s'entraîne en parallèle. Eh bien, le mettre dans les meilleures conditions, pour à nouveau glaner des victoires et des médailles.
 
On a aussi vu des douaniers aux championnats du monde de ski, c'est également la voie que vous voulez suivre ?
 
C'est exactement la même chose, faire en sorte d'accompagner, d'aider ces sportifs qui travaillent à côté.
 
On va parler des nombreux dossiers qui intéressent votre secrétariat d'Etat aux Sports. On le sait depuis hier, les paris sportifs et autres jeux de hasard sur Internet vont être légalisés, c'est un projet du ministère du Budget mais auquel vous êtes associé. Quel est l'intérêt pour le monde sportif ?
 
Nous sommes associés, tout simplement parce qu'il y a des paris sportifs, donc des paris qui sont fait sur des compétitions sportives.
 
Mais qu'est-ce que ça va rapporter au monde du sport, concrètement ?
 
Ça va leur rapporter 1 % des mises engagées par tous les parieurs. Donc aujourd'hui, E. Woerth estimait qu'il y avait pratiquement deux milliards d'euros de joués. 1 %, cela fait 20 millions d'euros pour le sport. Nous ciblerons bien cette manne financière, et là aussi nous l'attribuerons aux fédérations qui en ont besoin, celles qui ont le moins de ressources, nous les aiderons et nous les accompagnerons.
 
Ceux qui avaient l'air très contents, hier, au ministère des Finances, c'est quand même les patrons des casinos. Eux aussi ils vont avoir intérêt à cette réforme ?
 
Eux, ils vont développer, effectivement, ceux qui auront des licences, qui seront agréés, vont développer les jeux par Internet qui leur rapporteront des valeurs supplémentaires.
 
Je me permets, à ce stade, de vous poser cette question : vous, B. Laporte, vous avez encore des parts dans des casinos ?
 
Moi, je suis actionnaire d'un casino, mais je n'ai pas les moyens de m'engager pour obtenir une licence, ça coûte beaucoup d'argent.
 
Très bien. On va parler d'une autre mesure qui intéresse votre ministère, c'est - c'est un petit peu surprenant - la Coupe d'Europe de football de 2016. On vient d'apprendre que la France était candidate. Pourquoi ? Pourquoi la France veut-elle organiser un nouvel évènement sportif ? Est-ce que c'est une priorité en ces temps de crise ?
 
Mais, c'est une bonne chose de vouloir organiser des évènements internationaux. D'abord, parce que ça amène du bonheur et du plaisir aux Français. On va se rappeler de 1998 en football, de 2003 en athlétisme, de 2007 en rugby, l'engouement que cela a créé, cela a apporté 40 % de plus de licenciés. Donc ça veut dire que ça a incité les jeunes à aller pratiquer ce sport, le rugby en l'occurrence. Là, ce sera le football puisque l'Euro 2016, il est question de football. Et puis, vous savez, dans cette période de crise, pour répondre à la candidature de l'Euro 2016, il faut neuf grands stades. Vous savez combien on en a aujourd'hui ? Un, le Stade de France ! Ça veut dire qu'il faudrait construire ou rénover 8 stades, et ça c'est 15.000 emplois immédiats. Donc, je crois que pour répondre à la situation difficile aujourd'hui, c'est une bonne chose.
 
Et 100 millions d'euros... Mais on est un peu surpris, parce qu'effectivement, on nous avait dit en 1998 que la France avait organisé une très belle Coupe du monde et on découvre un peu avec stupeur qu'elle est très en retard dans ses stades. Pourquoi ? Les grandes villes n'ont pas asse investi ?
 
Non, on ne va pas revenir sur 98. Effectivement, on avait mis beaucoup... on avait fixé beaucoup d'argent sur le Stade de France, que l'on a créé pour l'occasion, et on a délaissé un petit peu les autres stades, on les a plus ou moins rénovés mais pas assez. Effectivement, aujourd'hui, nous sommes en retard. Quand on regarde l'Allemagne, par exemple, qui dispose de 15 stades de plus de 40 000 places, mais au-delà de la quantité, c'est la qualité des stades qui fait que, aujourd'hui, nous sommes très en retard.
 
Et encore une fois, vous pensez que c'est une priorité, aujourd'hui, vu que la France traverse une crise économique, quand même, sans précédent ?
 
Mais, je viens de vous expliquer : 15 000 emplois immédiats, c'est important.
 
Oui, 15 000 emplois, mais c'est aussi beaucoup d'investissements qui pourraient être placés ailleurs, actuellement.
 
Oui, mais, enfin, si on les place et qu'on crée aussi 15 000 emplois, je trouve que c'est une bonne idée, c'est pour ça que je dis que le sport a sa place dans ce plan de relance. Encore une fois, saisissons l'occasion, l'opportunité, pour nous remettre à jour au niveau de nos stades. Cela va créer des emplois et à terme, surtout, une fois que les stades seront créés, ça va créer, ça va fixer 4 500 emplois. Ce n'est pas rien.
 
Et la France est également candidate aux Jeux Olympiques d'hiver de 2018. On parle aussi maintenant d'une candidature de Paris pour le centenaire des derniers Jeux en France de 2024. Vrai ou faux ?
 
Ce serait bien. Encore une fois, vous savez, 2024 c'est loin. Ce qui est sûr c'est qu'il y a quatre villes qui ont déposé un dossier de candidature pour 2018. Il y a des « primaires », comme on dit chez nous, et le 18 mars, le CNOSF, le Centre national olympique du sport français, décidera lequel des quatre candidats sera retenu et après ce sera, je dirais, la candidature de la France.
 
On rappelle trois des principales villes : Annecy, Nice, Grenoble, Pelvoux aussi, je crois.
 
Pelvoux, tout à fait, Pelvoux et Ecrins.
 
Vous avez une préférence, vous ?
 
Non, moi je n'ai pas de préférence, j'ai assisté à la présentation des quatre dossiers. On a quatre bons dossiers, malheureusement il y aura trois déçus.
 
Et vous ne pouvez pas vous prononcer, bien entendu. Alors, vous êtes un grand nom du sport, B. Laporte, un autre grand nom, D. Douillet, vient d'être chargé des affaires sportives à l'UMP. Ça ne vous fait pas un peu de concurrence, franchement ? Ça vous fait plaisir que D. Douillet ...
 
D'abord, ça me fait plaisir, parce que David est un...
 
... vienne sur vos terres ?
 
Mais il ne vient pas sur mes terres, il vient dans un parti que j'aime, auquel je vais adhérer, prochainement, d'ailleurs, la semaine prochaine. Deuxièmement, David est un ami, ça c'est quelque chose d'important et il occupe un poste qui est important, puisqu'il sera force de propositions et il connaît le sport. Et moi, j'aime bien quand on met à ce poste-là quelqu'un qui a les compétences et qui connaît. Donc, David est quelqu'un, d'abord, de charismatique, et qui a les compétences requises pour ce poste-là.
 
Alors, il y a quelques semaines, il y a quelques mois, on avait confié le portefeuille de la Jeunesse à M. Hirsch. Est-ce que vous n'avez pas l'impression que l'on rogne un petit peu votre portefeuille, au fil des semaines et des mois, B. Laporte ?
 
Non, et j'avais dit d'ailleurs, et je le redis, que c'était une bonne chose, parce que j'avais vu l'expérience au Québec, mon alter ego de l'époque, donc, qui s'occupait de la Jeunesse, était relié directement au Premier ministre et il avait en charge tous les dossiers de la jeunesse. Or, moi quand j'avais ce portefeuille, j'avais en charge pratiquement aucun dossier de la jeunesse. Je portais effectivement la jeunesse, mais dès qu'on me parlait de permis de conduire, je disais : « attendez, je vais en parler au ministre concerné ». Quand on ne parlait de l'Emploi, je disais, « attendez, je vais en parler...
 
Donc, finalement, vous êtes très content d'avoir que le sport aujourd'hui.
 
Non, ce n'est pas que je suis très content, l'important c'est être efficace pour nos jeunes. On n'est pas là pour des problèmes d'ego, on est là pour être efficace. On est dans une équipe et je trouve la décision opportune.
 
B. Laporte, quelle est l'ambiance au gouvernement, en ce moment ? Il y a des difficultés, les prévisions économiques sont de plus en plus sombres, est-ce que l'ambiance reste bonne, si j'ose dire ?
 
Oui, elle reste bonne, tout le monde est concerné, tout le monde est déterminé, tout le monde est soudé, je dirais. Moi, j'ai appris ça dans le sport et je le vis aujourd'hui dans le gouvernement.
 
Il y a une ministre en particulier, R. Dati, qui est l'objet de nombreuses critiques. Vous lui apportez votre solidarité, vous êtes ami avec elle, qu'est-ce que vous lui dites, aujourd'hui ?
 
Bien sûr que je lui apporte ma solidarité. D'abord, il ne faut surtout pas oublier ce qu'elle a fait. Elle a été une grande - elle est toujours une grande - ministre de la Justice, elle a fait des choses considérables, le président de la République l'a d'ailleurs dit, donc moi je retiendrais ça, au-delà du fait que R. Dati est quelqu'un que j'aime, que j'aime beaucoup, mais je retiendrai, moi, surtout, que c'est une grande ministre de la Justice.
 
Merci beaucoup, B. Laporte.
 
W. Leymergie : Vous me gardez le petit livre ?
 
Oui, voilà, regardez, il est pour vous William.
 
W. Leymergie : Mais c'est incroyable ça ! Mais c'est la première fois que je vois ça, moi. Vous aviez déjà vu un ministre qui fait son auto-promo, comme ça ? C'est bien. Ce n'est pas une auto-promo, c'est qu'il faut avoir une relation avec les Français et les Français ont besoin de savoir ce que l'on fait, et donc il est pour eux et s'ils veulent, on leur envoie, qu'ils s'inscrivent sur le site du ministère et nous leur enverrons gratuitement.
 
W. Leymergie : Vous l'avez envoyé au Premier ministre et au Président ?
 
Bien sûr.
 
W. Leymergie : Ah oui ? Et alors, ils ont aimé ?
 
Ecoutez, on verra.
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 6 mars 2009