Texte intégral
Chers Amis, Chers Camarades,
On nous dit que nous ne sommes pas si nombreux, 1 500 personnes, sans doute même un peu plus. Ce n'est pas si mal pour un Parti qui reprend l'habitude de se retrouver, de travailler, de réfléchir entre deux élections -et pas seulement au moment des élections. Ce n'est pas si mal pour un Parti qui a le courage de parler, aujourd'hui, des libertés, avant qu'il ne soit trop tard. Et c'est un plaisir de voir notre Parti, grâce à tous ceux qui ont travaillé à cette journée autour de M.P. De La Gontrie, s'ouvrir à nouveau, ouvrir les portes et les fenêtres vers ceux qui n'auraient jamais dû s'éloigner de nous, si nous ne nous étions pas éloignés d'eux : les associations, les bénévoles, les acteurs de la solidarité... Ils étaient avec nous au cours de cette journée. C'est aussi un grand bonheur.
On nous dit « Vous parlez des libertés... mais ce n'est pas le sujet ! ». Je crois que ceux qui nous disent cela sont ceux qui nous disait, lorsque la loi TEPA a été votée, lorsque le bouclier fiscal a été voté, que nous étions trop durs avec Nicolas Sarkozy. Ils nous demandaient d'ailleurs d'attendre les effets de cette loi qui devait « libérer les initiatives »... Les effets, on les a vu et nous avions raison de nous y prendre au plut tôt. Là aussi, donc, nous avons raison d'être là sur le terrain des libertés, et je voulais vous remercier. Je suis heureuse que vous soyez là, un dimanche. Et je crois que,pour beaucoup de Français, savoir que le Parti socialiste était là jeudi dans les manifestations et aujourd'hui au Zénith pour parler des libertés est une bonne chose. Pas pour nous, mais pour ceux qui ont besoin de nous. Et c'est cela qui doit nous motiver.
Je veux remercier tous ceux qui étaient donc présents, et notamment les élus ce matin pour dire leurs inquiétudes face aux manipulations électorales, face à l'étranglement des collectivités locales. Mais aussi tous ceux qui, cet après-midi, sont venus nous dire pourquoi ils défendaient les libertés individuelles et collectives. Chacun des intervenants, avec sa passion, sa colère, nous apportait témoignage à la fois de son combat et des raisons de son engagement. Les échanges qui nous ont occupés n'étaient pas très gais. C'est vrai que c'est grave, que c'est un peu obscur. Mais, je crois que nous remplissons notre rôle quand nous sommes là pour dire pourquoi nous sommes contre le traitement répressif de la précarité dans notre pays, l'affaiblissement des contre-pouvoirs et même l'encadrement et le recul des libertés individuelles et collectives.
Ce qui se passe aujourd'hui dépasse ce que nous connaissions des discours traditionnels de la droite, en particulier en temps de crise sociale . Aujourd'hui, dans le fond, on a un peu l'impression que ce que le pouvoir, le Président de la République, ne donne pas de sa main gauche -vous savez cette main qui appelle au partage, à la tolérance, qui donne, qui appelle à l'égalité- lui permet de se servir plus de la main droite -celle qui veut faire croire qu'en limitant les libertés on va accroître l'efficacité d'une politique qui est déjà vouée à l'échec.
Nous sommes là pour dire que ces deux mains doivent agir ensemble, comme le triptyque de la devise de la République et nous n'accepterons pas que, sous quelque prétexte que ce soit, l'on brime les libertés pour soi-disant résoudre les problèmes de notre pays. Voilà pourquoi nous sommes là aujourd'hui.
Et alors que débute le printemps, il est vrai que l'on a un peu de mal à avoir le coeur léger parce que notre pays s'enfonce dans la crise, la crise économique et sociale ; parce que nous savons bien que le Président de la République -par idéologie- ne veut pas remettre en cause ce qui est maintenant un boulet pour notre pays : ce bouclier fiscal ; qu'il ne veut pas remettre en cause une politique qui pourtant nous conduit à une situation dramatique ; qu'il ne veut pas faire ce que les experts, ce que nos pays voisins (les Allemands, les Anglais, les Espagnols) font depuis plusieurs semaines et plusieurs mois. Les Français sont là pour dire leurs angoisses, leurs difficultés de vivre avec un pouvoir d'achat tel que celui des petites retraites, des salariés (petits et moyens) qui baisse ; ils sont là pour dire aussi -et nous l'avons vu jeudi dans les manifestations- leur angoisse de perdre leur emploi, alors que tout ce que l'on nous annonce -licenciements jour après jour- laisse le pouvoir sans voix, sans réaction.
À cette injustice extrêmement forte qui vise à aider ceux qui ont déjà tout en laissant de côté les autres. Mais, dans quel pays sommes-nous ? Ce bouclier fiscal qui a permis de donner un chèque de 368 000 euros en moyenne à 850 personnes : 30 ans de salaire de la vie d'un Smicard ! Voilà la France d'aujourd'hui ! Et on vient nous dire qu'il n'y a pas de lien entre les injustices et les libertés ! Nous, socialistes, hommes et femmes de gauche ; nous, citoyens des associations et des syndicats, nous avons toujours pensé qu'il n'y a pas de liberté sans égalité. Voilà pourquoi ces deux sujets sont intimement liés.
Et ce jeudi, devant ce mouvement historique dans lequel nous étions, à l'injustice, le gouvernement a ajouté le mépris par ce Premier ministre -car pour une fois ce n'était pas le Président de la République- qui est venu pour dire « circulez, il n'y a rien à voir. Nous ne changerons rien. Vous pouvez hurler, crier votre désespoir, il n'y a plus rien à dire, nous allons continuer ». Cela est d'autant plus étonnant qu'il y a, aujourd'hui, toutes les raisons de bouger.
Nous étions au lendemain, lors de cette manifestation, des prévisions de l'INSEE (organisme officiel du gouvernement) qui a dit au gouvernement que la crise était beaucoup plus profonde et beaucoup plus durable que ce qui était annoncé par le gouvernement lui-même.
La crise est une croissance qui va diminuer de 3 % dans notre pays. Alors qu'on nous annonce toujours - 1,5 %.
La crise, c'est surtout ces 400 000 chômeurs supplémentaires que nous aurons au 1er semestre de l'année, c'est-à-dire 300 000 de plus dans les trois mois qui viennent ! Et on nous dit que rien ne sera fait pour changer les choses. C'est pourquoi nous lançons une pétition pour obtenir l'annulation de ce bouclier fiscal, que cette loi TEPA qui finance les heures supplémentaires en période de chômage soit abrogée.
Que faudra-t-il au gouvernement pour comprendre ? Sûrement pas une opposition qui propose, car nous avons proposé un plan de relance massif, équilibré, ayant des conséquences directes, un peu à l'aune de ce qu'a fait Angela Merkel ou José Luis Zapatero... Ici, on nous dit : NON. Et, dans le fond, on se demande aujourd'hui si Nicolas Sarkozy ne joue pas le pourrissement, s'il n'attend pas on ne sait quoi d'ailleurs car nous savons bien, nous, que la France va continuer sur la pente du toboggan, avec le cortège de désespoir que cela va entraîner.
Et que fait Nicolas Sarkozy pendant que les Français souffrent, pendant que les Français lui lancent un SOS... Lui nous parle de sécurité . Il y a eu des actes inacceptables récemment, comme il y en a beaucoup ces derniers temps. Nous les condamnons tous avec une grande fermeté. Et c'est vrai que lorsque quelques jeunes ont pénétré dans un collège pour un règlement de compte personnel, le collège a eu droit à une visite présidentielle dans les deux jours, et ce n'est sans doute pas anormal. Quand un professeur, avec un grand courage, s'est interposé pour empêcher la violence d'élèves contre d'autres, il a été reçu dans les 24 h par le Président de la République -c'est sans doute utile pour conforter les enseignants qui ont bien du mal, aujourd'hui, à trouver des motifs d'espoir dans l'action du gouvernement. Mais, ne croyez-vous pas que les salariés licenciés à Continental, à Arcelor Mittal où Nicolas Sarkozy avait dit qu'il reviendrait et que la société ne fermerait pas, ont besoin du Président de la République ? Et comment se fait-il, face aux suicides de jeunes et de moins jeunes dans les prisons, faute d'être accompagnés, soignés, qu'aucun membre du gouvernement -en tout cas pas le Président de la République- ne s'y précipitent pour dire que dans une démocratie, « la façon dont sont traités les détenus, les malades mentaux, les exclus, montre le niveau de développement de la société ». C'est aussi ce que nous voulons dire lorsque nous nous réunissons pour parler des libertés.
Tout se passe comme si Nicolas Sarkozy voulait à nouveau mettre les projecteurs sur la sécurité pour nous détourner des questions économiques et sociales et de son propre échec. Cela ne nous surprend pas car nous sommes habitués à cette stratégie de contournement.
Mais, on ne nous y reprendra pas. Pour les socialistes, la sécurité est un droit fondamental, aussi important que l'accès à la santé, à l'école, au logement, au travail qui sont mis à bas aujourd'hui. Nous tous, élus, et notamment les maires, nous battons tous les jours parce que le nombre de policiers a été réduit sur le terrain, parce que la police de proximité a été supprimée, parce qu'il n'y a plus de prévention de la délinquance, parce qu'on limite les finances des conseils généraux, parce qu'il n'y a plus d'accompagnement dans les collèges, dans les lycées, parce que l'on a supprimé les études surveillées, parce qu'on limite les moyens dans les quartiers qui rendraient à ces jeunes leur dignité.
Certes, il faut améliorer la sécurité dans notre pays car, dans le fond cette fois-ci, il ne pourra pas botter en touche sur le thème « c'est de leur faute » ! Cela fait 7 ans qu'ils sont là, cela fait 7 ans que Nicolas Sarkozy s'est occupé de la sécurité, cela fait 7 ans qu'il a fait voter des lois toujours plus sécuritaires et sans aucun effet ! Rappelez-vous de ces lois qui correspondent généralement à un fait-divers : on veut rendre pénalement répréhensibles des jeunes qui se retrouvent dans les escaliers de leurs immeubles ; on veut rendre répréhensibles les jeunes qui, aujourd'hui, se retrouvent dans des « bandes »... J'aimerais savoir comment on peut mesurer ce qu'est une bande, lorsque des jeunes se baladent ensemble dans une ville ; on a fait les peines plancher. Ces lois qui nous laissent penser qu'il y a des réponses simples à des problèmes complexes, qui veulent empêcher que les juges puissent porter une appréciation en fonction de l'environnement, de la personne qu'ils ont face à eux, pour appliquer bêtement les directives du gouvernement. La voilà la réalité !
Et puis, 7 ans d'une politique du chiffre. Une politique du chiffre qui pousse à mettre les policiers dans le coeur des villes, préférant arrêter des hommes et des femmes qui conduisent sans ceinture, avec un portable à l'oreille (même si ce n'est pas bien), alors que je préférerais les voir dans les quartiers, là où il y a des trafics, là où il y a de sérieux problèmes, là où 95 % des Français qui y vivent attendent toujours cette police de proximité que l'on a supprimée. La voilà la vraie lutte contre l'insécurité !
Nicolas Sarkozy n'a pas réussi sur grand chose. En tout cas, s'il y a bien un domaine où il a échoué, c'est bien celui de l'insécurité . Il ne nous refera pas le coup : parler de la sécurité plutôt que de la crise et attendre peut-être, je le dis avec précaution mais aussi avec crainte, qu'un débordement ou qu'un acte violent lors de manifestation puisse permettre de dénoncer les conflits et les Français qui sont dans la rue, comme il l'a fait souvent en montrant du doigt l'ensemble de la jeunesse de ce pays. Nous ne nous laisserons pas faire. Nous avons des solutions et nous les porterons.
En parlant de cette réponse autoritaire de Nicolas Sarkozy, privilégiant cela aux réponses économiques et sociales, nous nous situons au coeur du sujet qui nous réunit aujourd'hui.
REPONDRE A L'ANGOISSE SOCIALE PAR LA DIMINUTION DES LIBERTES, faire croire aux Français qu'en restreignant le champ de la démocratie, en brimant les libertés, ils seront plus en sécurité, c'est ce qu'a dit Nicolas Sarkozy depuis son élection .
Nous refusons de rentrer dans un système de propagande par la peur, qui voudrait faire croire aux Français que ce n'est pas le progrès humain qui est la condition première de l'ordre, qu'il voudrait faire croire aux Français que la liberté et la fraternité peuvent être mises à mal pour un soi-disant objectif d'efficacité, et qu'un pouvoir même démocratique pourrait sans risque pour notre République se méfier de la Justice et de la liberté comme d'un piège, de l'idéal comme une duperie... C'est ce que disait Jaurès, il y a près d'un siècle.
Notre République, aujourd'hui désemparée par les crises, écornée par les obscurantismes, par les souffrances auxquelles elle doit faire face, doit porter haut ce qui la constitue. Ce qu'elle est, c'est-à-dire la liberté, l'égalité, la fraternité. Il ne convient pas de les brader, de les négocier, de les réduire. C'est, au contraire, aujourd'hui qu'il faut essayer de les développer.
Pourquoi ? Nous n'acceptons pas la mise sous coupe de la Justice, la restriction de l'indépendance de la presse, le fichage des Français, le dur traitement infligé aux plus modestes. L'heure n'est pas à la résignation. Nous devons le dire très simplement, mais aussi très fortement. Je crois, dans le fond, que ce que nous ont dit tous ceux qui étaient là aujourd'hui, c'est que des centaines de milliers de citoyens disent NON à cette reprise en main et se lèvent. Parfois seul, à 10, à 50, à quelques milliers, sur des pétitions, dans leurs quartiers ou pour défendre une cause au-delà de nos frontières. Ils montrent leur opposition à cette « France d'après » que Nicolas Sarkozy est en train de nous mettre en place depuis son arrivée au pouvoir.
La résignation n'est pas à l'ordre du jour et nous pouvons nous réjouir aujourd'hui que le Parti socialiste soit au coeur de ces militants du quotidien qui défendent, pas après pas, les libertés. Ces militants, on les connaît tous. Ils ont un visage, une voix, un combat. Permettez-moi d'en citer quelques-uns, en commençant par nos élus, ceux qui continuent à se battre bien qu'étranglés par l'Etat en matière de finances pour maintenir l'investissement en cette période de crise et aider les entreprises à conserver leurs emplois, pour aider les Français en cette période où le pouvoir d'achat stagne ou diminue, mais aussi ces élus qui ont parrainé avec le Réseau Education Sans Frontières ces enfants dont on voulait expulser les parents.
Combien j'ai été touchée, dans ma ville et ailleurs, de voir que beaucoup de Français, de toute catégorie sociale, de toute opinion politique, sont venus pour ces parrainages car ils ont considéré ces enfants assis à côté des leurs dans les classes comme leurs propres enfants. Ils n'ont pas accepté de voir qu'ils étaient traités comme des délinquants. Ils les ont considérés comme leurs enfants. C'est celle-là la France que nous aimons, Monsieur Sarkozy !
Le militantisme quotidien, c'est aussi le visage de cette femme retraitée qui chaque soir recharge chez elle quelques téléphones portables pour les migrants de Calais pour qu'ils puissent, cahin-caha, conserver une relation avec leur famille. Alors, elle est mise en garde à vue ! Alors, elle est poursuivie ! Alors, on l'inquiète !
Ce sont aussi ces assistants sociaux, ces psychiatres, ces visiteurs de prisons qui disent ne pas accepter la situation des prisons françaises et qui se battent pour donner des droits aux détenus et pour qu'ils soient soignés, non pas en sortant de prison, mais pendant le moment où ils sont en train de purger leur peine.
Ce sont aussi le combat de ces artistes, de ces internautes, alors que les pouvoirs publics abandonnent la création, qui n'admettent pas d'être criminalisés pour avoir accès à la culture et au savoir sur internet.
C'est aussi le combat, c'est aussi la voix, le visage des journalistes, des enseignants, des magistrats, des médecins -surtout dans les hôpitaux publics- qui en ont assez de voir leurs professions montrées du doigt, qui en ont assez qu'on leur dise qu'ils coûtent cher alors qu'ils font vivre la République. Cette République que nous défendons justement aujourd'hui.
Cette scène militante a amené à constituer des réseaux qui sont, aujourd'hui, efficaces, mobilisateurs, exigeants. Et ces réseaux dans lesquels nous sommes ne sont pas là uniquement pour dénoncer, mais aussi pour dire qu'un autre modèle de société est possible. C'est cela que nous devons préparer, en étant dans les mobilisations, mais aussi en proposant.
C'est ce que fait aujourd'hui le Parti socialiste. C'est ce que font nos élus, nos militants. Nous avons, avec les associations, avec les défenseurs de la République, dit pourquoi nous ne pouvions pas accepter le fichier EDVIGE. Nous avons participé à de nombreux appels, en apportant notre soutien à l'appel de la colline. Ce matin, Jean-Marc Ayrault a rappelé comment les parlementaires socialistes ont combattu avec vigueur et détermination et avec parfois des méthodes originales (chanter la Marseillaise aux pieds de la présidence de l'Assemblée nationale, ce n'est pas si courant). Mais, lorsque l'on n'est pas entendu, quand ils sont en train de faire voter des lois pour supprimer les droits de l'opposition, pour limiter le droit d'amendement, quand on met en place une loi sur l'audiovisuel qui perd son indépendance politique et financière, alors oui, il faut trouver les moyens de s'opposer et nos parlementaires l'ont fait. Il faut les en remercier.
Il va falloir nous mobiliser. Nos parlementaires ont pris l'initiative de supprimer cet article L 622-1 du code d'entrée et de séjour des étrangers qui considère que les hommes et les femmes qui apportent leur fraternité, leur solidarité aux immigrés peuvent être des « passeurs », organisateurs de réseaux clandestins, peuvent être considérés comme des chefs d'entreprises qui utilisent de la main d'oeuvre au noir ou comme des marchands de sommeil. Nous voulons que dans notre pays, le pays des Droits de l'Homme, je le rappelle, la solidarité ne soit plus un délit.
Nous allons lancer, avec beaucoup d'autres partis et beaucoup d'autres associations, je l'espère, une mobilisation des Français pour qu'ils disent NON, pour qu'ils disent que c'est de la solidarité dont nous avons besoin, que c'est de la fraternité dont nous avons besoin et non pas de nous condamner.
Le film de Philippe LIORET est très beau. Je connais bien la situation de Calais et il n'a fait qu'effleurer la situation de ces hommes et de ces femmes qui vivent parqués dans des bois, qui sont arrêtés lorsqu'on leur sert la soupe quotidienne, tant et si bien que les organisations et associations humanitaires ont fait la grève -il y a quelques semaines- parce qu'elles ne pouvaient plus supporter que leur action de solidarité soit l'occasion pour la police d'intervenir.
Ce film entraînera peut-être un sursaut de conscience vers lequel nous appelait Camus devant des situations qui ne pouvaient qu'être réprouvées. Peut-être que les Français vont montrer, comme ils l'ont fait avec RESF, que ceux qui sont en face d'eux -les étrangers, qu'ils soient les copains de leurs enfants, leurs parents ou ceux qui se battent pour passer en Grande-Bretagne ou ailleurs- ont la même part d'humanité que nous. Ils viennent de pays qu'ils ont quitté, souvent dans la douleur, en y laissant leur famille, fuyant la guerre, la misère. Ils ont eu une vie dure et ne sont pas en train de nous manger le pain sur le dos ou de mettre à bas notre sécurité sociale, toutes les statistiques montrent le contraire.
Il faut dire la vérité aux Français et il faut les laisser être ce qu'ils sont : des hommes et des femmes généreux qui ont envie de porter la devise de la France dans la réalité de nos quartiers, de toutes nos régions. Voilà ce pour quoi nous nous battons.
Les socialistes, mes chers camarades, sont dans ce combat, n'en déplaise à certains. Nous avons édité un livre qui n'est pas un pamphlet, qui dit malheureusement la réalité de ce que l'on vit aujourd'hui et il vaut mieux agir avant qu'il ne soit trop tard.
Et si beaucoup d'associations, d'institutions font ce travail, c'est à un parti politique de porter le projet politique qui doit remplacer cette situation, mais qui doit aussi dénoncer dans le court terme ce qui arrive de nos jours.
Nous allons recevoir dans quelques minutes des artistes, non pas parce que nous sommes organisateurs de concerts, mais parce que les artistes portent aussi le même message que nous, comme l'ont porté les voix des journalistes et des associations. Ils disent aussi, et souvent plus fort que d'autres et c'est sûrement pour cela que la culture n'est pas aimée par ceux qui n'aiment pas la liberté, ce qui fait mal. Ils nous disent pourquoi cette société est violente, ils nous disent pourquoi cette société est inégalitaire et ils sont là, aujourd'hui, avec nous tout simplement parce que nous défendons la même République et que nous avons envie d'une société plus douce.
Je veux leur dire merci. Dans quelques instants, nous allons recevoir AXIOM, un rappeur lillois et il va vous interpréter sa lettre au Président, cette lettre qu'il a écrite en plein milieu des violences urbaines. Je vous propose de bien écouter les paroles. Dans le fond, sa lettre au Président, c'est tout ce que nous avons dit aujourd'hui, c'est tout ce que nous voudrions dire haut et fort à tous les Français qui ont envie d'une société plus douce.
Moi aussi, j'ai envie ce soir d'adresser une lettre au Président de la République. J'ai envie de lui dire tout simplement que la France n'a jamais été aussi forte dans le monde et les Français aussi heureux que lorsqu'ils ont défendu les droits de l'Homme, que lorsqu'ils ont défendu la devise de la France partout, ici et ailleurs. Je veux aussi lui dire très solennellement que notre conviction est qu'il n'y a pas d'ordre sans justice et que cela commence par la justice. Nous lui redirons et nous lui demandons de développer la solidarité et la fraternité et non pas la peur, l'individualisme et le repli sur soi. Et nous lui demandons de faire rimer à nouveau égalité et liberté. C'est cela notre combat.
Merci
source http://www.parti-socialiste.fr, le 25 mars 2009
On nous dit que nous ne sommes pas si nombreux, 1 500 personnes, sans doute même un peu plus. Ce n'est pas si mal pour un Parti qui reprend l'habitude de se retrouver, de travailler, de réfléchir entre deux élections -et pas seulement au moment des élections. Ce n'est pas si mal pour un Parti qui a le courage de parler, aujourd'hui, des libertés, avant qu'il ne soit trop tard. Et c'est un plaisir de voir notre Parti, grâce à tous ceux qui ont travaillé à cette journée autour de M.P. De La Gontrie, s'ouvrir à nouveau, ouvrir les portes et les fenêtres vers ceux qui n'auraient jamais dû s'éloigner de nous, si nous ne nous étions pas éloignés d'eux : les associations, les bénévoles, les acteurs de la solidarité... Ils étaient avec nous au cours de cette journée. C'est aussi un grand bonheur.
On nous dit « Vous parlez des libertés... mais ce n'est pas le sujet ! ». Je crois que ceux qui nous disent cela sont ceux qui nous disait, lorsque la loi TEPA a été votée, lorsque le bouclier fiscal a été voté, que nous étions trop durs avec Nicolas Sarkozy. Ils nous demandaient d'ailleurs d'attendre les effets de cette loi qui devait « libérer les initiatives »... Les effets, on les a vu et nous avions raison de nous y prendre au plut tôt. Là aussi, donc, nous avons raison d'être là sur le terrain des libertés, et je voulais vous remercier. Je suis heureuse que vous soyez là, un dimanche. Et je crois que,pour beaucoup de Français, savoir que le Parti socialiste était là jeudi dans les manifestations et aujourd'hui au Zénith pour parler des libertés est une bonne chose. Pas pour nous, mais pour ceux qui ont besoin de nous. Et c'est cela qui doit nous motiver.
Je veux remercier tous ceux qui étaient donc présents, et notamment les élus ce matin pour dire leurs inquiétudes face aux manipulations électorales, face à l'étranglement des collectivités locales. Mais aussi tous ceux qui, cet après-midi, sont venus nous dire pourquoi ils défendaient les libertés individuelles et collectives. Chacun des intervenants, avec sa passion, sa colère, nous apportait témoignage à la fois de son combat et des raisons de son engagement. Les échanges qui nous ont occupés n'étaient pas très gais. C'est vrai que c'est grave, que c'est un peu obscur. Mais, je crois que nous remplissons notre rôle quand nous sommes là pour dire pourquoi nous sommes contre le traitement répressif de la précarité dans notre pays, l'affaiblissement des contre-pouvoirs et même l'encadrement et le recul des libertés individuelles et collectives.
Ce qui se passe aujourd'hui dépasse ce que nous connaissions des discours traditionnels de la droite, en particulier en temps de crise sociale . Aujourd'hui, dans le fond, on a un peu l'impression que ce que le pouvoir, le Président de la République, ne donne pas de sa main gauche -vous savez cette main qui appelle au partage, à la tolérance, qui donne, qui appelle à l'égalité- lui permet de se servir plus de la main droite -celle qui veut faire croire qu'en limitant les libertés on va accroître l'efficacité d'une politique qui est déjà vouée à l'échec.
Nous sommes là pour dire que ces deux mains doivent agir ensemble, comme le triptyque de la devise de la République et nous n'accepterons pas que, sous quelque prétexte que ce soit, l'on brime les libertés pour soi-disant résoudre les problèmes de notre pays. Voilà pourquoi nous sommes là aujourd'hui.
Et alors que débute le printemps, il est vrai que l'on a un peu de mal à avoir le coeur léger parce que notre pays s'enfonce dans la crise, la crise économique et sociale ; parce que nous savons bien que le Président de la République -par idéologie- ne veut pas remettre en cause ce qui est maintenant un boulet pour notre pays : ce bouclier fiscal ; qu'il ne veut pas remettre en cause une politique qui pourtant nous conduit à une situation dramatique ; qu'il ne veut pas faire ce que les experts, ce que nos pays voisins (les Allemands, les Anglais, les Espagnols) font depuis plusieurs semaines et plusieurs mois. Les Français sont là pour dire leurs angoisses, leurs difficultés de vivre avec un pouvoir d'achat tel que celui des petites retraites, des salariés (petits et moyens) qui baisse ; ils sont là pour dire aussi -et nous l'avons vu jeudi dans les manifestations- leur angoisse de perdre leur emploi, alors que tout ce que l'on nous annonce -licenciements jour après jour- laisse le pouvoir sans voix, sans réaction.
À cette injustice extrêmement forte qui vise à aider ceux qui ont déjà tout en laissant de côté les autres. Mais, dans quel pays sommes-nous ? Ce bouclier fiscal qui a permis de donner un chèque de 368 000 euros en moyenne à 850 personnes : 30 ans de salaire de la vie d'un Smicard ! Voilà la France d'aujourd'hui ! Et on vient nous dire qu'il n'y a pas de lien entre les injustices et les libertés ! Nous, socialistes, hommes et femmes de gauche ; nous, citoyens des associations et des syndicats, nous avons toujours pensé qu'il n'y a pas de liberté sans égalité. Voilà pourquoi ces deux sujets sont intimement liés.
Et ce jeudi, devant ce mouvement historique dans lequel nous étions, à l'injustice, le gouvernement a ajouté le mépris par ce Premier ministre -car pour une fois ce n'était pas le Président de la République- qui est venu pour dire « circulez, il n'y a rien à voir. Nous ne changerons rien. Vous pouvez hurler, crier votre désespoir, il n'y a plus rien à dire, nous allons continuer ». Cela est d'autant plus étonnant qu'il y a, aujourd'hui, toutes les raisons de bouger.
Nous étions au lendemain, lors de cette manifestation, des prévisions de l'INSEE (organisme officiel du gouvernement) qui a dit au gouvernement que la crise était beaucoup plus profonde et beaucoup plus durable que ce qui était annoncé par le gouvernement lui-même.
La crise est une croissance qui va diminuer de 3 % dans notre pays. Alors qu'on nous annonce toujours - 1,5 %.
La crise, c'est surtout ces 400 000 chômeurs supplémentaires que nous aurons au 1er semestre de l'année, c'est-à-dire 300 000 de plus dans les trois mois qui viennent ! Et on nous dit que rien ne sera fait pour changer les choses. C'est pourquoi nous lançons une pétition pour obtenir l'annulation de ce bouclier fiscal, que cette loi TEPA qui finance les heures supplémentaires en période de chômage soit abrogée.
Que faudra-t-il au gouvernement pour comprendre ? Sûrement pas une opposition qui propose, car nous avons proposé un plan de relance massif, équilibré, ayant des conséquences directes, un peu à l'aune de ce qu'a fait Angela Merkel ou José Luis Zapatero... Ici, on nous dit : NON. Et, dans le fond, on se demande aujourd'hui si Nicolas Sarkozy ne joue pas le pourrissement, s'il n'attend pas on ne sait quoi d'ailleurs car nous savons bien, nous, que la France va continuer sur la pente du toboggan, avec le cortège de désespoir que cela va entraîner.
Et que fait Nicolas Sarkozy pendant que les Français souffrent, pendant que les Français lui lancent un SOS... Lui nous parle de sécurité . Il y a eu des actes inacceptables récemment, comme il y en a beaucoup ces derniers temps. Nous les condamnons tous avec une grande fermeté. Et c'est vrai que lorsque quelques jeunes ont pénétré dans un collège pour un règlement de compte personnel, le collège a eu droit à une visite présidentielle dans les deux jours, et ce n'est sans doute pas anormal. Quand un professeur, avec un grand courage, s'est interposé pour empêcher la violence d'élèves contre d'autres, il a été reçu dans les 24 h par le Président de la République -c'est sans doute utile pour conforter les enseignants qui ont bien du mal, aujourd'hui, à trouver des motifs d'espoir dans l'action du gouvernement. Mais, ne croyez-vous pas que les salariés licenciés à Continental, à Arcelor Mittal où Nicolas Sarkozy avait dit qu'il reviendrait et que la société ne fermerait pas, ont besoin du Président de la République ? Et comment se fait-il, face aux suicides de jeunes et de moins jeunes dans les prisons, faute d'être accompagnés, soignés, qu'aucun membre du gouvernement -en tout cas pas le Président de la République- ne s'y précipitent pour dire que dans une démocratie, « la façon dont sont traités les détenus, les malades mentaux, les exclus, montre le niveau de développement de la société ». C'est aussi ce que nous voulons dire lorsque nous nous réunissons pour parler des libertés.
Tout se passe comme si Nicolas Sarkozy voulait à nouveau mettre les projecteurs sur la sécurité pour nous détourner des questions économiques et sociales et de son propre échec. Cela ne nous surprend pas car nous sommes habitués à cette stratégie de contournement.
Mais, on ne nous y reprendra pas. Pour les socialistes, la sécurité est un droit fondamental, aussi important que l'accès à la santé, à l'école, au logement, au travail qui sont mis à bas aujourd'hui. Nous tous, élus, et notamment les maires, nous battons tous les jours parce que le nombre de policiers a été réduit sur le terrain, parce que la police de proximité a été supprimée, parce qu'il n'y a plus de prévention de la délinquance, parce qu'on limite les finances des conseils généraux, parce qu'il n'y a plus d'accompagnement dans les collèges, dans les lycées, parce que l'on a supprimé les études surveillées, parce qu'on limite les moyens dans les quartiers qui rendraient à ces jeunes leur dignité.
Certes, il faut améliorer la sécurité dans notre pays car, dans le fond cette fois-ci, il ne pourra pas botter en touche sur le thème « c'est de leur faute » ! Cela fait 7 ans qu'ils sont là, cela fait 7 ans que Nicolas Sarkozy s'est occupé de la sécurité, cela fait 7 ans qu'il a fait voter des lois toujours plus sécuritaires et sans aucun effet ! Rappelez-vous de ces lois qui correspondent généralement à un fait-divers : on veut rendre pénalement répréhensibles des jeunes qui se retrouvent dans les escaliers de leurs immeubles ; on veut rendre répréhensibles les jeunes qui, aujourd'hui, se retrouvent dans des « bandes »... J'aimerais savoir comment on peut mesurer ce qu'est une bande, lorsque des jeunes se baladent ensemble dans une ville ; on a fait les peines plancher. Ces lois qui nous laissent penser qu'il y a des réponses simples à des problèmes complexes, qui veulent empêcher que les juges puissent porter une appréciation en fonction de l'environnement, de la personne qu'ils ont face à eux, pour appliquer bêtement les directives du gouvernement. La voilà la réalité !
Et puis, 7 ans d'une politique du chiffre. Une politique du chiffre qui pousse à mettre les policiers dans le coeur des villes, préférant arrêter des hommes et des femmes qui conduisent sans ceinture, avec un portable à l'oreille (même si ce n'est pas bien), alors que je préférerais les voir dans les quartiers, là où il y a des trafics, là où il y a de sérieux problèmes, là où 95 % des Français qui y vivent attendent toujours cette police de proximité que l'on a supprimée. La voilà la vraie lutte contre l'insécurité !
Nicolas Sarkozy n'a pas réussi sur grand chose. En tout cas, s'il y a bien un domaine où il a échoué, c'est bien celui de l'insécurité . Il ne nous refera pas le coup : parler de la sécurité plutôt que de la crise et attendre peut-être, je le dis avec précaution mais aussi avec crainte, qu'un débordement ou qu'un acte violent lors de manifestation puisse permettre de dénoncer les conflits et les Français qui sont dans la rue, comme il l'a fait souvent en montrant du doigt l'ensemble de la jeunesse de ce pays. Nous ne nous laisserons pas faire. Nous avons des solutions et nous les porterons.
En parlant de cette réponse autoritaire de Nicolas Sarkozy, privilégiant cela aux réponses économiques et sociales, nous nous situons au coeur du sujet qui nous réunit aujourd'hui.
REPONDRE A L'ANGOISSE SOCIALE PAR LA DIMINUTION DES LIBERTES, faire croire aux Français qu'en restreignant le champ de la démocratie, en brimant les libertés, ils seront plus en sécurité, c'est ce qu'a dit Nicolas Sarkozy depuis son élection .
Nous refusons de rentrer dans un système de propagande par la peur, qui voudrait faire croire aux Français que ce n'est pas le progrès humain qui est la condition première de l'ordre, qu'il voudrait faire croire aux Français que la liberté et la fraternité peuvent être mises à mal pour un soi-disant objectif d'efficacité, et qu'un pouvoir même démocratique pourrait sans risque pour notre République se méfier de la Justice et de la liberté comme d'un piège, de l'idéal comme une duperie... C'est ce que disait Jaurès, il y a près d'un siècle.
Notre République, aujourd'hui désemparée par les crises, écornée par les obscurantismes, par les souffrances auxquelles elle doit faire face, doit porter haut ce qui la constitue. Ce qu'elle est, c'est-à-dire la liberté, l'égalité, la fraternité. Il ne convient pas de les brader, de les négocier, de les réduire. C'est, au contraire, aujourd'hui qu'il faut essayer de les développer.
Pourquoi ? Nous n'acceptons pas la mise sous coupe de la Justice, la restriction de l'indépendance de la presse, le fichage des Français, le dur traitement infligé aux plus modestes. L'heure n'est pas à la résignation. Nous devons le dire très simplement, mais aussi très fortement. Je crois, dans le fond, que ce que nous ont dit tous ceux qui étaient là aujourd'hui, c'est que des centaines de milliers de citoyens disent NON à cette reprise en main et se lèvent. Parfois seul, à 10, à 50, à quelques milliers, sur des pétitions, dans leurs quartiers ou pour défendre une cause au-delà de nos frontières. Ils montrent leur opposition à cette « France d'après » que Nicolas Sarkozy est en train de nous mettre en place depuis son arrivée au pouvoir.
La résignation n'est pas à l'ordre du jour et nous pouvons nous réjouir aujourd'hui que le Parti socialiste soit au coeur de ces militants du quotidien qui défendent, pas après pas, les libertés. Ces militants, on les connaît tous. Ils ont un visage, une voix, un combat. Permettez-moi d'en citer quelques-uns, en commençant par nos élus, ceux qui continuent à se battre bien qu'étranglés par l'Etat en matière de finances pour maintenir l'investissement en cette période de crise et aider les entreprises à conserver leurs emplois, pour aider les Français en cette période où le pouvoir d'achat stagne ou diminue, mais aussi ces élus qui ont parrainé avec le Réseau Education Sans Frontières ces enfants dont on voulait expulser les parents.
Combien j'ai été touchée, dans ma ville et ailleurs, de voir que beaucoup de Français, de toute catégorie sociale, de toute opinion politique, sont venus pour ces parrainages car ils ont considéré ces enfants assis à côté des leurs dans les classes comme leurs propres enfants. Ils n'ont pas accepté de voir qu'ils étaient traités comme des délinquants. Ils les ont considérés comme leurs enfants. C'est celle-là la France que nous aimons, Monsieur Sarkozy !
Le militantisme quotidien, c'est aussi le visage de cette femme retraitée qui chaque soir recharge chez elle quelques téléphones portables pour les migrants de Calais pour qu'ils puissent, cahin-caha, conserver une relation avec leur famille. Alors, elle est mise en garde à vue ! Alors, elle est poursuivie ! Alors, on l'inquiète !
Ce sont aussi ces assistants sociaux, ces psychiatres, ces visiteurs de prisons qui disent ne pas accepter la situation des prisons françaises et qui se battent pour donner des droits aux détenus et pour qu'ils soient soignés, non pas en sortant de prison, mais pendant le moment où ils sont en train de purger leur peine.
Ce sont aussi le combat de ces artistes, de ces internautes, alors que les pouvoirs publics abandonnent la création, qui n'admettent pas d'être criminalisés pour avoir accès à la culture et au savoir sur internet.
C'est aussi le combat, c'est aussi la voix, le visage des journalistes, des enseignants, des magistrats, des médecins -surtout dans les hôpitaux publics- qui en ont assez de voir leurs professions montrées du doigt, qui en ont assez qu'on leur dise qu'ils coûtent cher alors qu'ils font vivre la République. Cette République que nous défendons justement aujourd'hui.
Cette scène militante a amené à constituer des réseaux qui sont, aujourd'hui, efficaces, mobilisateurs, exigeants. Et ces réseaux dans lesquels nous sommes ne sont pas là uniquement pour dénoncer, mais aussi pour dire qu'un autre modèle de société est possible. C'est cela que nous devons préparer, en étant dans les mobilisations, mais aussi en proposant.
C'est ce que fait aujourd'hui le Parti socialiste. C'est ce que font nos élus, nos militants. Nous avons, avec les associations, avec les défenseurs de la République, dit pourquoi nous ne pouvions pas accepter le fichier EDVIGE. Nous avons participé à de nombreux appels, en apportant notre soutien à l'appel de la colline. Ce matin, Jean-Marc Ayrault a rappelé comment les parlementaires socialistes ont combattu avec vigueur et détermination et avec parfois des méthodes originales (chanter la Marseillaise aux pieds de la présidence de l'Assemblée nationale, ce n'est pas si courant). Mais, lorsque l'on n'est pas entendu, quand ils sont en train de faire voter des lois pour supprimer les droits de l'opposition, pour limiter le droit d'amendement, quand on met en place une loi sur l'audiovisuel qui perd son indépendance politique et financière, alors oui, il faut trouver les moyens de s'opposer et nos parlementaires l'ont fait. Il faut les en remercier.
Il va falloir nous mobiliser. Nos parlementaires ont pris l'initiative de supprimer cet article L 622-1 du code d'entrée et de séjour des étrangers qui considère que les hommes et les femmes qui apportent leur fraternité, leur solidarité aux immigrés peuvent être des « passeurs », organisateurs de réseaux clandestins, peuvent être considérés comme des chefs d'entreprises qui utilisent de la main d'oeuvre au noir ou comme des marchands de sommeil. Nous voulons que dans notre pays, le pays des Droits de l'Homme, je le rappelle, la solidarité ne soit plus un délit.
Nous allons lancer, avec beaucoup d'autres partis et beaucoup d'autres associations, je l'espère, une mobilisation des Français pour qu'ils disent NON, pour qu'ils disent que c'est de la solidarité dont nous avons besoin, que c'est de la fraternité dont nous avons besoin et non pas de nous condamner.
Le film de Philippe LIORET est très beau. Je connais bien la situation de Calais et il n'a fait qu'effleurer la situation de ces hommes et de ces femmes qui vivent parqués dans des bois, qui sont arrêtés lorsqu'on leur sert la soupe quotidienne, tant et si bien que les organisations et associations humanitaires ont fait la grève -il y a quelques semaines- parce qu'elles ne pouvaient plus supporter que leur action de solidarité soit l'occasion pour la police d'intervenir.
Ce film entraînera peut-être un sursaut de conscience vers lequel nous appelait Camus devant des situations qui ne pouvaient qu'être réprouvées. Peut-être que les Français vont montrer, comme ils l'ont fait avec RESF, que ceux qui sont en face d'eux -les étrangers, qu'ils soient les copains de leurs enfants, leurs parents ou ceux qui se battent pour passer en Grande-Bretagne ou ailleurs- ont la même part d'humanité que nous. Ils viennent de pays qu'ils ont quitté, souvent dans la douleur, en y laissant leur famille, fuyant la guerre, la misère. Ils ont eu une vie dure et ne sont pas en train de nous manger le pain sur le dos ou de mettre à bas notre sécurité sociale, toutes les statistiques montrent le contraire.
Il faut dire la vérité aux Français et il faut les laisser être ce qu'ils sont : des hommes et des femmes généreux qui ont envie de porter la devise de la France dans la réalité de nos quartiers, de toutes nos régions. Voilà ce pour quoi nous nous battons.
Les socialistes, mes chers camarades, sont dans ce combat, n'en déplaise à certains. Nous avons édité un livre qui n'est pas un pamphlet, qui dit malheureusement la réalité de ce que l'on vit aujourd'hui et il vaut mieux agir avant qu'il ne soit trop tard.
Et si beaucoup d'associations, d'institutions font ce travail, c'est à un parti politique de porter le projet politique qui doit remplacer cette situation, mais qui doit aussi dénoncer dans le court terme ce qui arrive de nos jours.
Nous allons recevoir dans quelques minutes des artistes, non pas parce que nous sommes organisateurs de concerts, mais parce que les artistes portent aussi le même message que nous, comme l'ont porté les voix des journalistes et des associations. Ils disent aussi, et souvent plus fort que d'autres et c'est sûrement pour cela que la culture n'est pas aimée par ceux qui n'aiment pas la liberté, ce qui fait mal. Ils nous disent pourquoi cette société est violente, ils nous disent pourquoi cette société est inégalitaire et ils sont là, aujourd'hui, avec nous tout simplement parce que nous défendons la même République et que nous avons envie d'une société plus douce.
Je veux leur dire merci. Dans quelques instants, nous allons recevoir AXIOM, un rappeur lillois et il va vous interpréter sa lettre au Président, cette lettre qu'il a écrite en plein milieu des violences urbaines. Je vous propose de bien écouter les paroles. Dans le fond, sa lettre au Président, c'est tout ce que nous avons dit aujourd'hui, c'est tout ce que nous voudrions dire haut et fort à tous les Français qui ont envie d'une société plus douce.
Moi aussi, j'ai envie ce soir d'adresser une lettre au Président de la République. J'ai envie de lui dire tout simplement que la France n'a jamais été aussi forte dans le monde et les Français aussi heureux que lorsqu'ils ont défendu les droits de l'Homme, que lorsqu'ils ont défendu la devise de la France partout, ici et ailleurs. Je veux aussi lui dire très solennellement que notre conviction est qu'il n'y a pas d'ordre sans justice et que cela commence par la justice. Nous lui redirons et nous lui demandons de développer la solidarité et la fraternité et non pas la peur, l'individualisme et le repli sur soi. Et nous lui demandons de faire rimer à nouveau égalité et liberté. C'est cela notre combat.
Merci
source http://www.parti-socialiste.fr, le 25 mars 2009