Texte intégral
Monsieur le Président,
Madame la Haut Commissaire,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Excellences, Mesdames et Messieurs,
M. Karel Schwarzenberg, Ministre des Affaires étrangères de la République tchèque, interviendra demain au nom de l'Union européenne.
Le Conseil des droits de l'Homme achèvera dans quelques semaines les trois premières années de son existence. En trois ans, il aura tenu dix sessions régulières et se sera réuni également à dix reprises en session extraordinaire.
Ainsi, avec le Conseil des droits de l'Homme, la communauté internationale dispose aujourd'hui d'un organe réactif qui doit lui permettre de renforcer de manière continue le respect des droits de l'Homme à travers le monde. Si l'on se retourne sur les trois dernières années, on constatera que beaucoup de travail a été accompli. A cet égard, l'Examen périodique universel s'il a fait des débuts prometteurs, doit corriger certains dysfonctionnements, constatés notamment lors de la dernière session. Il en va de sa crédibilité et de son efficacité.
Ainsi, nous devons sans cesse nous interroger : l'énergie que nous déployons, les procédures que nous mettons en place, les débats que nous engageons, les résolutions que nous adoptons, contribuent-ils à améliorer concrètement la situation des hommes et des femmes dont les droits sont bafoués ? Répondent-ils aux attentes des populations qui demandent plus de protection contre l'arbitraire ?
Alors que nous sommes réunis aujourd'hui pour l'ouverture de cette nouvelle session du Conseil, mes pensées vont d'abord à ceux et celles qui, au jour le jour, vivent dans l'incertitude du lendemain, sans garantie pour leur sécurité et leurs droits. Je pense en particulier aux défenseurs des droits de l'Homme qui, trop souvent encore, paient de leur vie un juste engagement.
Force est de reconnaître que le Conseil des droits de l'Homme peine encore à s'affirmer, à peser sur les évolutions, à participer à la protection efficace des individus. Or le Conseil des droits de l'Homme, c'est à la fois nous tous et chacun de nous.
La réponse aux situations de violations les plus graves des droits de l'Homme doit rester l'une de nos priorités communes. Je veux réaffirmer aujourd'hui avec force l'importance que mon pays accorde aux procédures spéciales et, en particulier, aux mandats pays. Durant cette session, nous aurons à examiner le renouvellement des mandats des rapporteurs sur les situations des droits de l'Homme en Corée du Nord, en Birmanie et en Somalie. La France, avec ses partenaires de l'Union Européenne, appuiera le renouvellement de ces mandats et appelle l'ensemble des membres du Conseil à agir dans le même sens. Il ne s'agit pas de condamner tel ou tel pays. Il s'agit, face à des situations très préoccupantes et qui ne connaissent pas d'évolutions positives, de créer les conditions d'un dialogue entre ces pays et les Nations unies pour promouvoir le respect des droits de l'Homme. J'enjoins les autorités de ces pays à accueillir les rapporteurs désignés et à entretenir avec eux un dialogue constructif, orienté vers la recherche de solutions concrètes et la coopération.
Nous devons également envisager de recourir à ces procédures pour d'autres situations graves de violations des droits de l'Homme. Une réflexion collective s'impose à ce sujet.
Je vous soutiens Mme la Haut Commissaire quand vous demandez que le Conseil accorde une importance accrue aux situations de violations chroniques des droits de l'Homme. Durant cette session, le Conseil se penchera sur la situation en République démocratique du Congo et nous écouterons avec la plus grande attention ce que nous dirons les rapporteurs qui avaient été désignés lors de la session spéciale consacrée à ce pays. La situation demeure en effet très préoccupante, notamment en ce qui concerne les violences commises à l'encontre des femmes. Ce que j'ai vu lors de mon déplacement en RDC l'an dernier est tout simplement révoltant, indicible. Il est du devoir du Conseil des droits de l'Homme de rester engagé.
Autre situation qui doit retenir notre attention, celle du Zimbabwe où la situation en matière de droits de l'Homme est d'autant plus dramatique qu'elle se conjugue avec une grave épidémie de choléra. La formation d'un gouvernement d'union nationale constitue la première tentative de sortie de crise. Elle est donc porteuse d'espoir. Nous attendons du nouveau gouvernement qu'il agisse de manière déterminée pour la protection des droits de l'Homme, en particulier pour la libération des prisonniers politiques et des défenseurs des droits de l'Homme, et nous l'encourageons à recourir aux procédures spéciales du Conseil pour l'aider à mettre en oeuvre les réformes qui s'imposent.
La situation à Sri lanka est également très préoccupante. Je pense notamment à la population civile, prise au piège des combats et démunie face aux violations des droits de l'Homme et du droit international humanitaire.
D'autres grandes échéances attendent le Conseil des droits de l'Homme et nécessiteront de notre part à tous un sens des responsabilités accru et un esprit d'ouverture et de coopération pour être à la hauteur des attentes que nous suscitons.
La préparation de la conférence d'examen de Durban, qui se tiendra ici à Genève en avril prochain, est à cet égard un rendez-vous capital. La France, avec ses partenaires de l'Union européenne, participe actuellement à la préparation de cette conférence de manière active. La lutte contre le racisme et l'antisémitisme est un impératif pour notre pays qui est fondé sur les valeurs de tolérance et de respect mutuel. Elle est un impératif pour l'ensemble de la communauté internationale. Je tiens à cet égard à souligner le rôle actif et constructif que vous jouez, Madame la Haut Commissaire. Alors que nous abordons les dernières semaines de négociation, la France entend, aux côtés de ses partenaires de l'Union européenne, agir de manière constructive.
Elle demeure toutefois très vigilante et, en aucun cas, ne pourra accepter que cette conférence soit à nouveau le prétexte à des dérives inacceptables, que des pays particuliers ou des régions du monde soient à cette occasion stigmatisés, que le principe de la liberté d'expression, au fondement de la démocratie, soit remis en cause.
Le Conseil des droits de l'Homme doit jouer un rôle accru en faveur de la promotion et de la protection des droits des femmes. A ce jour, un seul mandat, celui du Rapporteur spécial sur les violences à l'encontre des femmes, dont je salue l'action, concerne les droits des femmes, ce qui est manifestement insuffisant au regard de la situation inacceptable et complexe dans laquelle se trouve la moitié de l'humanité. Aussi, la France considère que le moment est venu de créer un mécanisme contre les lois et pratiques discriminatoires à l'égard des femmes, dont le mandat serait notamment d'engager un dialogue continu avec les Etats, de faire un suivi des recommandations du CEDAW et de l'examen périodique universel, de diffuser les bonnes pratiques, d'apporter une assistance technique aux pays, lorsque celle-ci pourrait se révéler opportune. La France est prête à agir dans ce sens avec les Etats intéressés, dans une approche trans-régionale.
La France, qui a proposé, lors de sa présidence de l'Union européenne, à ses partenaires l'adoption de lignes directrices sur les violences faites aux femmes, entend rester totalement mobilisée sur cette question. Le 30ème anniversaire du CEDAW cette année, le 10ème anniversaire de la résolution 1325, le 15ème anniversaire de la Conférence de Pékin en 2010 sont autant de dates pour nous rappeler les avancées réalisées ces dernières décennies. Elles soulignent autant le chemin qui reste à parcourir, les défis qui restent à relever pour que les droits des femmes soient pleinement respectés, partout dans le monde. Ces dates nous incitent à réfléchir à un bilan d'étape pour mieux préparer l'avenir.
La promotion et la protection des droits de l'Homme sont une invitation permanente à la remise en cause de l'évidence. C'est pourquoi il est important de rappeler parfois ce qui apparaît pourtant comme acquis. L'interdiction des violations des droits de l'homme fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre devrait, à la lecture des instruments internationaux, aller de soi.
Et pourtant, plus de 80 pays dans le monde pénalisent encore l'homosexualité. Une déclaration, signée par 66 pays, a été prononcée le 18 décembre dernier devant l'Assemblée générale des Nations unies pour appeler l'attention de la communauté internationale sur cette question difficile. Un séminaire international se tiendra à Paris en mai prochain pour approfondir la réflexion sur ce thème.
La France présentera, à cette session du Conseil, une résolution appelant les Etats à signer et ratifier dans les meilleurs délais la Convention pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, afin que cette convention, premier grand texte adopté par le Conseil des droits de l'Homme en 2006, puisse entrer en vigueur dans les meilleurs délais.
Le Conseil des droits de l'Homme demeure un organe clé des Nations unies pour la promotion des libertés fondamentales. Ses membres, qui ont été élus, doivent se montrer à la hauteur de leur responsabilité. L'instrumentalisation des droits de l'Homme à d'autres fins que la protection de la dignité humaine nuit à la qualité de ses travaux et pourrait saper la légitimité d'une institution indispensable.
La réforme qui se profile à l'horizon 2011 offrira l'opportunité de réfléchir au bilan du Conseil et à la manière dont son action pourrait être rendue plus efficace. Cependant, il faut garder à l'esprit que le Conseil est d'abord ce qu'en font les Etats. Nous devons donc tous nous engager de bonne foi à participer de manière constructive à ses travaux pour permettre au Conseil d'accomplir l'ambitieux mandat qui lui a été donné. La France entend prendre toute sa part à cette réflexion.
Je vous remercie.
Source http://www.delegfrance-onu-geneve.org, le 22 avril 2009
Madame la Haut Commissaire,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Excellences, Mesdames et Messieurs,
M. Karel Schwarzenberg, Ministre des Affaires étrangères de la République tchèque, interviendra demain au nom de l'Union européenne.
Le Conseil des droits de l'Homme achèvera dans quelques semaines les trois premières années de son existence. En trois ans, il aura tenu dix sessions régulières et se sera réuni également à dix reprises en session extraordinaire.
Ainsi, avec le Conseil des droits de l'Homme, la communauté internationale dispose aujourd'hui d'un organe réactif qui doit lui permettre de renforcer de manière continue le respect des droits de l'Homme à travers le monde. Si l'on se retourne sur les trois dernières années, on constatera que beaucoup de travail a été accompli. A cet égard, l'Examen périodique universel s'il a fait des débuts prometteurs, doit corriger certains dysfonctionnements, constatés notamment lors de la dernière session. Il en va de sa crédibilité et de son efficacité.
Ainsi, nous devons sans cesse nous interroger : l'énergie que nous déployons, les procédures que nous mettons en place, les débats que nous engageons, les résolutions que nous adoptons, contribuent-ils à améliorer concrètement la situation des hommes et des femmes dont les droits sont bafoués ? Répondent-ils aux attentes des populations qui demandent plus de protection contre l'arbitraire ?
Alors que nous sommes réunis aujourd'hui pour l'ouverture de cette nouvelle session du Conseil, mes pensées vont d'abord à ceux et celles qui, au jour le jour, vivent dans l'incertitude du lendemain, sans garantie pour leur sécurité et leurs droits. Je pense en particulier aux défenseurs des droits de l'Homme qui, trop souvent encore, paient de leur vie un juste engagement.
Force est de reconnaître que le Conseil des droits de l'Homme peine encore à s'affirmer, à peser sur les évolutions, à participer à la protection efficace des individus. Or le Conseil des droits de l'Homme, c'est à la fois nous tous et chacun de nous.
La réponse aux situations de violations les plus graves des droits de l'Homme doit rester l'une de nos priorités communes. Je veux réaffirmer aujourd'hui avec force l'importance que mon pays accorde aux procédures spéciales et, en particulier, aux mandats pays. Durant cette session, nous aurons à examiner le renouvellement des mandats des rapporteurs sur les situations des droits de l'Homme en Corée du Nord, en Birmanie et en Somalie. La France, avec ses partenaires de l'Union Européenne, appuiera le renouvellement de ces mandats et appelle l'ensemble des membres du Conseil à agir dans le même sens. Il ne s'agit pas de condamner tel ou tel pays. Il s'agit, face à des situations très préoccupantes et qui ne connaissent pas d'évolutions positives, de créer les conditions d'un dialogue entre ces pays et les Nations unies pour promouvoir le respect des droits de l'Homme. J'enjoins les autorités de ces pays à accueillir les rapporteurs désignés et à entretenir avec eux un dialogue constructif, orienté vers la recherche de solutions concrètes et la coopération.
Nous devons également envisager de recourir à ces procédures pour d'autres situations graves de violations des droits de l'Homme. Une réflexion collective s'impose à ce sujet.
Je vous soutiens Mme la Haut Commissaire quand vous demandez que le Conseil accorde une importance accrue aux situations de violations chroniques des droits de l'Homme. Durant cette session, le Conseil se penchera sur la situation en République démocratique du Congo et nous écouterons avec la plus grande attention ce que nous dirons les rapporteurs qui avaient été désignés lors de la session spéciale consacrée à ce pays. La situation demeure en effet très préoccupante, notamment en ce qui concerne les violences commises à l'encontre des femmes. Ce que j'ai vu lors de mon déplacement en RDC l'an dernier est tout simplement révoltant, indicible. Il est du devoir du Conseil des droits de l'Homme de rester engagé.
Autre situation qui doit retenir notre attention, celle du Zimbabwe où la situation en matière de droits de l'Homme est d'autant plus dramatique qu'elle se conjugue avec une grave épidémie de choléra. La formation d'un gouvernement d'union nationale constitue la première tentative de sortie de crise. Elle est donc porteuse d'espoir. Nous attendons du nouveau gouvernement qu'il agisse de manière déterminée pour la protection des droits de l'Homme, en particulier pour la libération des prisonniers politiques et des défenseurs des droits de l'Homme, et nous l'encourageons à recourir aux procédures spéciales du Conseil pour l'aider à mettre en oeuvre les réformes qui s'imposent.
La situation à Sri lanka est également très préoccupante. Je pense notamment à la population civile, prise au piège des combats et démunie face aux violations des droits de l'Homme et du droit international humanitaire.
D'autres grandes échéances attendent le Conseil des droits de l'Homme et nécessiteront de notre part à tous un sens des responsabilités accru et un esprit d'ouverture et de coopération pour être à la hauteur des attentes que nous suscitons.
La préparation de la conférence d'examen de Durban, qui se tiendra ici à Genève en avril prochain, est à cet égard un rendez-vous capital. La France, avec ses partenaires de l'Union européenne, participe actuellement à la préparation de cette conférence de manière active. La lutte contre le racisme et l'antisémitisme est un impératif pour notre pays qui est fondé sur les valeurs de tolérance et de respect mutuel. Elle est un impératif pour l'ensemble de la communauté internationale. Je tiens à cet égard à souligner le rôle actif et constructif que vous jouez, Madame la Haut Commissaire. Alors que nous abordons les dernières semaines de négociation, la France entend, aux côtés de ses partenaires de l'Union européenne, agir de manière constructive.
Elle demeure toutefois très vigilante et, en aucun cas, ne pourra accepter que cette conférence soit à nouveau le prétexte à des dérives inacceptables, que des pays particuliers ou des régions du monde soient à cette occasion stigmatisés, que le principe de la liberté d'expression, au fondement de la démocratie, soit remis en cause.
Le Conseil des droits de l'Homme doit jouer un rôle accru en faveur de la promotion et de la protection des droits des femmes. A ce jour, un seul mandat, celui du Rapporteur spécial sur les violences à l'encontre des femmes, dont je salue l'action, concerne les droits des femmes, ce qui est manifestement insuffisant au regard de la situation inacceptable et complexe dans laquelle se trouve la moitié de l'humanité. Aussi, la France considère que le moment est venu de créer un mécanisme contre les lois et pratiques discriminatoires à l'égard des femmes, dont le mandat serait notamment d'engager un dialogue continu avec les Etats, de faire un suivi des recommandations du CEDAW et de l'examen périodique universel, de diffuser les bonnes pratiques, d'apporter une assistance technique aux pays, lorsque celle-ci pourrait se révéler opportune. La France est prête à agir dans ce sens avec les Etats intéressés, dans une approche trans-régionale.
La France, qui a proposé, lors de sa présidence de l'Union européenne, à ses partenaires l'adoption de lignes directrices sur les violences faites aux femmes, entend rester totalement mobilisée sur cette question. Le 30ème anniversaire du CEDAW cette année, le 10ème anniversaire de la résolution 1325, le 15ème anniversaire de la Conférence de Pékin en 2010 sont autant de dates pour nous rappeler les avancées réalisées ces dernières décennies. Elles soulignent autant le chemin qui reste à parcourir, les défis qui restent à relever pour que les droits des femmes soient pleinement respectés, partout dans le monde. Ces dates nous incitent à réfléchir à un bilan d'étape pour mieux préparer l'avenir.
La promotion et la protection des droits de l'Homme sont une invitation permanente à la remise en cause de l'évidence. C'est pourquoi il est important de rappeler parfois ce qui apparaît pourtant comme acquis. L'interdiction des violations des droits de l'homme fondées sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre devrait, à la lecture des instruments internationaux, aller de soi.
Et pourtant, plus de 80 pays dans le monde pénalisent encore l'homosexualité. Une déclaration, signée par 66 pays, a été prononcée le 18 décembre dernier devant l'Assemblée générale des Nations unies pour appeler l'attention de la communauté internationale sur cette question difficile. Un séminaire international se tiendra à Paris en mai prochain pour approfondir la réflexion sur ce thème.
La France présentera, à cette session du Conseil, une résolution appelant les Etats à signer et ratifier dans les meilleurs délais la Convention pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, afin que cette convention, premier grand texte adopté par le Conseil des droits de l'Homme en 2006, puisse entrer en vigueur dans les meilleurs délais.
Le Conseil des droits de l'Homme demeure un organe clé des Nations unies pour la promotion des libertés fondamentales. Ses membres, qui ont été élus, doivent se montrer à la hauteur de leur responsabilité. L'instrumentalisation des droits de l'Homme à d'autres fins que la protection de la dignité humaine nuit à la qualité de ses travaux et pourrait saper la légitimité d'une institution indispensable.
La réforme qui se profile à l'horizon 2011 offrira l'opportunité de réfléchir au bilan du Conseil et à la manière dont son action pourrait être rendue plus efficace. Cependant, il faut garder à l'esprit que le Conseil est d'abord ce qu'en font les Etats. Nous devons donc tous nous engager de bonne foi à participer de manière constructive à ses travaux pour permettre au Conseil d'accomplir l'ambitieux mandat qui lui a été donné. La France entend prendre toute sa part à cette réflexion.
Je vous remercie.
Source http://www.delegfrance-onu-geneve.org, le 22 avril 2009