Texte intégral
G. Cahour.- On va parler, bien évidemment de la politique familiale et des enjeux des élections européennes dans la politique familiale. On verra si le fait de voter gauche ou droite, cela peut changer quelque chose, puisque c'est quand même l'enjeu des prochaines semaines, ces élections, le 7 juin. D'abord sur les enfants disparus, premier élément, est-ce que vous avez des nouvelles de ce dossier « Elise » qui a tant agité l'actualité. Est-ce que l'alerte enlèvement était justifiée pour cette affaire qui était finalement une querelle familiale ?
Oui, l'alerte enlèvement a été justifiée, parce qu'à partir du moment où un enfant est enlevé du territoire national, dont le père a eu la garde par la justice française, il était légitime, d'ailleurs dans le cadre des circonstances de l'enlèvement de cet enfant, qu'il puisse y avoir mis en place par les services de la Justice et de l'Intérieur, le dispositif "Alerte - Enlèvement".
Donc, il était justifié ?
Bien sûr !
Est-ce qu'il faut l'améliorer ce dispositif "Alerte - Enlèvement" ?
C'est un dispositif national, mais il nous faut agir de façon très concrète aussi au niveau international et notamment européen. C'est pourquoi nous allons lancer aujourd'hui avec B. Hortefeux, le numéro européen, 116 000, qui est déjà en activité dans 8 pays de l'Union européenne et avec la Fondation pour l'Enfance, qui est présidée par Madame Giscard d'Estaing, nous allons, tout à l'heure, à midi, lancer le dispositif qui sera opérationnel dès lundi, puisque vous le savez, lundi c'est la Journée internationale des enfants disparus. Et la mobilisation... vous voyez que l'Europe sert aussi à quelque chose, elle sert à la protection des enfants, on n'en parle pas suffisamment, et ce dispositif du numéro 116 000, on peut appeler dans n'importe quel pays de l'Union lorsqu'on a un problème avec la disparition d'un enfant. C'est un soutien psychologique pour les familles, puisque quand vous appelez le 116 000 d'abord, on vous met en relation avec la police, on vous demande de prendre relations avec la police.
Donc, le 116 000, c'est : mon enfant disparaît, j'appelle ce numéro là.
Voilà, et c'est un dispositif européen.
Est-ce que c'est aussi le numéro, si moi je vois la photo d'un enfant disparu, je le vois, j'ai des doutes sur un enfant que je croise dans la rue, c'est aussi ce numéro là qu'il faut appeler ?
Vous pouvez l'appeler mais appeler aussi la police, parce qu'il ne doit pas y avoir concurrence entre le numéro de la police, qui est un dispositif très particulier, et le numéro 116 000, qui encore une fois est un dispositif européen mis en place pour aider les parents lorsqu'ils sont dans une situation de disparition d'enfant. Pour avoir tout de suite un réflexe et normalement un numéro connu, parce que vous voyez bien, lorsque vous êtes dans un pays européen et que vous êtes en difficulté, votre enfant disparaît dans la rue ou dans un magasin, eh bien vous pouvez avoir ce réflexe d'appeler le 116 000.
A quoi cela sert d'avoir un 116 000, un numéro européen ?
Cela sert à avoir une mobilisation internationale et surtout européenne. On vit dans un territoire maintenant sans frontières avec la libre circulation des personnes et de biens. Nous avons besoin de nous mobiliser, à Vingt-sept, sur beaucoup, beaucoup de dispositifs. A la fois économiques, on l'a vu lorsque le président N. Sarkozy exerçait la présidence de l'Union européenne. Lorsqu'il a fallu mettre en place des dispositifs face à la crise, face à la crise en Géorgie. Il y a des compétences évidemment strictes de l'Union européenne et puis, il y a des bonnes pratiques partagées. C'est le cas de la politique familiale dans le cadre de l'Union européenne et ce numéro 116 000, qui était extrêmement réclamé d'ailleurs par les commissaires européens. Je rappelle que c'est une directive aussi de la Commission européenne qui date de 2002, qui a un peu traîné à se mettre en oeuvre. Et avec B. Hortefeux nous avons décidé de booster ce dispositif et de le mettre en oeuvre en France.
Est-ce que vous voulez toujours durcir les conditions de sortie du territoire des enfants, pour éviter justement les disparitions comme cela a été le cas pour Elise ?
Oui, c'est-à-dire que dans le cadre du texte sur l'autorité parentale et le droit des tiers... Vous savez aujourd'hui, lorsque vous avez besoin d'un papier d'identité pour un enfant, un passeport, une carte d'identité ou une autorisation de sortie de territoire, seule la signature d'un parent est nécessaire. Dans le texte que nous avons préparé, il faudra la signature des deux parents. C'est évidemment, parce qu'un papier d'identité c'est un acte important dans la vie de l'enfant. Et nous souhaitons vraiment responsabiliser les parents. D'ailleurs pour prévenir les enlèvements d'enfants, nous en avons eu quelques 250 l'année passée qui sont sortis du territoire, parce qu'ils ne disposaient que d'un papier d'identité signé que par un seul parent.
N. Morano, vous avez annoncé aussi hier une plus grande facilité de garde d'enfants pour les demandeurs d'emploi. En quoi cela consiste précisément ?
Nous avons avec Pôle Emploi, avec le président du Pôle Emploi, mis en place un groupe de travail, nous nous sommes rencontrés pour évoquer un dispositif que nous pourrions mettre en place - donc c'est à l'état de groupes de travail - de mettre en place pour aider les demandeurs d'emploi. Il y a déjà des dispositifs qui existent. Mais on voit bien les grandes difficultés pour ceux qui ont besoin de répondre à un entretien d'embauche ou de pouvoir aller travailler, lorsqu'ils n'ont pas de mode de garde à disposition, c'est un frein vers le retour à l'emploi. C'est pour ça que nous sommes en train de réfléchir à mettre en place des conventions locales.
Donc ce sera un mode de garde provisoire de quelques heures pour aller à un entretient.
Voilà. D'urgence, temporaire et cette convention locale...
Alors c'est quoi, c'est une garderie dans les Pôles Emploi ?
Ah non, cela ne sera pas dans les Pôles Emploi, ce sera une convention qui serait signée entre Pôle Emploi, donc avec le dispositif Pôle Emploi local et les collectivités locales. Par exemple avec une mairie, une communauté de communes, pour vraiment que chacun des acteurs s'engage pour les demandeurs d'emploi à réserver des places d'urgence pour pouvoir faire garder les enfants. Ce dispositif est à l'état de réflexion, il nous semble nécessaire d'accompagner par tous les moyens les demandeurs d'emploi. D'ailleurs j'ajoute que dans le cadre de la nouvelle convention d'objectif et de gestion que nous avons signée avec B. Hortefeux et la Caisse Nationale d'Allocations Familiales, nous avons, comme vous le savez, mis un budget de près de 1,3 milliards d'euros pour développer 100 000 places de crèches. 200.000 places de garde d'ailleurs sur l'ensemble du territoire, tout confondu. Et 1 800 places dans les 215 quartiers prioritaires avec F. Amara.
Ce serait gratuit pour les demandeurs d'emploi ?
Eh bien nous sommes en train de regarder comment va être en oeuvre ce dispositif.
Vous êtes favorable à la gratuité ?
Pas spécialement la gratuité, il faut voir quels sont les revenus des personnes, on ne peut pas tout faire toujours tout gratuit dans la vie, vous savez, cela a un coût. Donc nous sommes en train de réfléchir, comment est-ce que l'on peut accompagner, en fonction des revenus de la personne et d'aider à l'accompagnement sur le mode de garde.
La semaine dernière, vous avez lancé une procédure justement à propos des gardes d'enfants pour permettre aux collectivités locales, aux entreprises, aux administrations d'ouvrir des jardins d'éveil. Qu'est-ce que c'est qu'un jardin d'éveil ?
Un jardin d'éveil, c'est un dispositif très souple et rapide à mettre en oeuvre, qui s'adresse aux 2-3 ans, qui doit être un dispositif qui mutualise des moyens. Je vous prends un exemple : vous avez un maire dans une commune, petite commune, notamment souvent en milieu rural, il n'y a pas de mode de garde à proximité mais il a, on va dire, une école, un groupe scolaire, un accueil péri scolaire et il lui reste de l'espace pour accueillir les tout petits qui ont besoin d'être beaucoup plus encadrés que lorsqu'ils sont à l'école maternelle. Les 2-3 ans ont besoin d'être beaucoup mieux encadrés, puisque ce sont encore des bébés - et là, l'encadrement est pour des modules de 24 enfants, maximum, vous avez des modules de 12, des modules de 24 - par trois adultes, en permanence et deux personnels encadrants.
C'est plus que les maternelles, mais c'est moins que les crèches, donc c'est une sous crèche ?
Non, ce n'est pas une sous crèche, c'est un dispositif complémentaire, cela n'a rien à voir avec une crèche, parce que les crèches...
Eh bien quel intérêt ? Autant aller en crèche !
Mais les crèches, ce sont les bébés, là je vous ai parlé d'accueil pour les 2-3 ans. Donc les bébés de 0 à 3 ans, peuvent aller en crèche, mais ils peuvent aussi bénéficier de jardins d'éveil. Là, on pourra les mettre en place, parce qu'il s'agit de mutualiser les moyens, là vous n'avez pas besoin de construire.
Mais le problème en France, ce n'est pas des jardins d'éveil pour les 2-3 ans, que je sache, le problème c'est qu'il n'y a pas assez de places en crèche.
Non, le problème, c'est que le fait de raisonner "tout crèche" et uniquement un mode de garde, a fait que justement nous sommes en retard sur l'offre que nous devons proposer aux parents. Donc nous avons décidé...
Cela veut dire qu'il n'y a pas assez de moyens et qu'on n'arrive pas à créer suffisamment de places en crèche, donc on va faire des jardins d'éveil.
Non, ce n'est pas ça, c'est que vous vous limitez aux places de crèches, qui je le rappelle sont des dispositifs lourds et intéressants, mais qui coûtent 13 000euros la place de crèche à l'année. Et vous savez bien que le milieu rural et le milieu urbain ce n'est pas la même chose. Donc il nous faut développer des modes de garde adaptés au territoire, aux contraintes professionnelles des parents et aussi, en fonction des personnels de la petite enfance.
Donc, vous voulez inventer une transition entre la crèche et la maternelle.
Non, mais il y a beaucoup de dispositifs, vous vous limitez à certains dispositifs. Il y a la crèche, il y aura les jardins d'éveil en expérimentation, il y a aussi les crèches d'entreprises que nous sommes en train de développer par le crédit impôt que nous nettement élevé - maintenant il est passé à 50 %. Nous avons aussi les dispositifs avec les assistantes maternelles et le regroupement d'assistances maternelles. Et pour l'ensemble de ce panel de dispositifs, il nous faudra recruter 60 000 emplois de la petite enfance.
En tout cas, il n'y en aura pas à Paris. A Paris, on a dit "le jardin d'éveil, c'est de la sous crèche, on n'en veut pas".
Il n'a pas dit que c'était de la sous crèche, mais je trouve...
En substance c'est ça !
Eh bien je trouve un peu dommage, alors que beaucoup d'élus se précipitent au ministère de la Famille pour pouvoir mettre en place des jardins d'éveil, et donc offrir des places supplémentaires, que la Ville de Paris renoncent à offrir des panels qui coûtent moins cher, qui sont facilement opérationnels, parce qu'on peut les faire dans des locaux qui existent déjà, donc cela coûte moins cher, plutôt que de construire et de bâtir, puisque ce sont des modules de petite taille, que la Ville de Paris n'ait pas envie d'offrir à ses citoyens des dispositifs qui sont en plus très bien aidés.
Merci beaucoup N. Morano.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 20 mai 2009