Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Directeur Général,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
L'an dernier, en ouverture de vos travaux, j'avais eu le plaisir de vous présenter l'esprit de la réforme de notre aide publique au développement, ainsi que les grands chantiers qui nous ont mobilisés tout au long de l'année écoulée.
Je vais tenter d'en faire aujourd'hui rapidement le bilan. Je vous dirai également en quelques mots les priorités sur lesquelles il nous faudra mettre l'accent dans les mois à venir.
Mais d'abord, je voudrais vous dire ma gratitude pour le travail remarquable que vous faites partout dans le monde, souvent dans des conditions difficiles.
Au fil de mes nombreux déplacements depuis plus d'un an, une quarantaine au total, j'ai sollicité nombre d'entre vous et j'ai pu constater votre enthousiasme, même si souvent vous m'avez fait part des difficultés que vous rencontrez.
Je veux ici vous exprimer ici toute ma reconnaissance.
Qu'avons-nous fait ensemble au cours de l'année écoulée ?
Dans le droit fil du "Livre blanc", des recommandations de la RGPP, et surtout en parfaite cohérence avec la feuille de route du président de la République, nous avons réorienté notre coopération dans quatre grandes directions :
- une claire priorité à l'Afrique ;
- des réponses à la hauteur d'une crise sans précédent ;
- des chantiers concrets impliquant directement nos concitoyens ;
- un pilotage plus efficace de notre aide.
La priorité à l'Afrique.
Cette priorité est aujourd'hui actée. Conformément aux conclusions du dernier CICID, l'Afrique subsaharienne se verra allouer 60 % des ressources budgétaires de l'aide française. C'est un choix majeur. Il est salué par nos partenaires et par la communauté des ONG. Il est conforme aux engagements souscrits par la France au plus haut niveau. Il nous appartient désormais de le faire savoir et de le valoriser.
Pour la première fois également, nous avons arrêté une liste nominative de pays coeur de cible de la coopération française. Les quatorze pays qui la composent sont sans exception en Afrique sub-saharienne et dans leur immense majorité, à l'exception du Ghana, des pays francophones. Nous avons ainsi marqué de manière concrète les liens très forts qui nous unissent à cette partie du monde. C'est une façon très claire également de donner un contenu à l'engagement francophone de la France.
La croissance économique, le soutien à l'initiative privée.
Conformément aux engagements pris par le président Sarkozy au Cap, la France a augmenté en 2009 de 25 % ses engagements via l'AFD en direction des pays du Sud, soit un effort d'1,5 milliard d'euros.
D'ores et déjà, l'Afrique en a été la principale bénéficiaire. Les moyens consacrés au développement du continent africain ont doublé entre 2008 et 2009, passant de 1 à 2 milliards d'euros d'engagements.
Les instruments mis en place, fonds de garantie et fonds d'investissement, sont désormais opérationnels : les projets démarrent et je ne doute pas que l'objectif de créer grâce à eux 370.000 emplois puisse être atteint.
La relance des agricultures africaines.
Sous présidence française de l'Union européenne, et dans le contexte des "émeutes de la faim", nous avons remis cette priorité, malheureusement sortie des écrans radar de l'aide, au coeur de l'agenda international.
Depuis la "facilité financière", proposée par le président, l'an dernier, jusqu'aux dernières décisions prises par le G8, que de chemin parcouru ! La déclaration conjointe sur la sécurité alimentaire de l'Aquila constitue une avancée notable. Elle est le fruit en partie de l'obstination de notre pays qui de longue date milite pour une spécificité agricole. Au G8, la France a pris des engagements : 1 milliard d'euros sur 5 ans.
Le Fonds d'investissement pour l'Agriculture africaine, que j'ai eu l'honneur de lancer, sera opérationnel dès la fin de cette année. Il contribuera au financement des projets privés de développement de l'agriculture vivrière.
Des chantiers concrets impliquant directement nos concitoyens.
Je vous avais indiqué également, l'an dernier, que je souhaitais mettre en oeuvre des chantiers concrets impliquant directement nos concitoyens. Pour trois d'entre eux, les choses ont bien avancé.
Le volontariat, d'abord.
Vous vous en souvenez peut-être, j'avais souhaité que l'on fasse preuve d'un peu d'ambition en la matière. Les candidats au volontariat international dans notre pays sont nombreux, les opportunités encore trop limitées. Nous nous étions fixé comme objectif de tripler leur nombre d'ici la fin du quinquennat soit 15.000 au total, contre 5000 aujourd'hui. Cet objectif a été acté par le CICID. Il nous appartient désormais de le réaliser collectivement. Je compte sur vous pour nous aider à déterminer les secteurs où leur présence est souhaitée. Pour l'Afrique, par exemple, face à la décrue de notre assistance technique, le volontariat peut constituer le creuset des experts de demain. En tout état de cause, qu'il s'agisse du volontariat des juniors ou des seniors, c'est pour nous un lien majeur, un pont entre les sociétés civiles.
Je vous questionnerai prochainement par écrit pour évaluer les besoins.
Les ONG, ensuite.
Là encore, des orientations majeures ont été données.
Je ne reviens pas sur la réforme de nos institutions en charge de la relation avec les ONG, avec notamment la création d'une Mission de relations avec la société civile au sein de la DGM. Vous savez également que le CICID a entériné la création d'un conseil stratégique pour la coopération non gouvernementale. Ce sera un instrument essentiel de dialogue, d'échange, de rapprochement et de cohérence entre les interventions publiques et celles de nos sociétés civiles.
L'essentiel désormais est de confirmer, chaque année, notre engagement à faire de nos ONG des acteurs importants de notre aide. Cela doit se traduire de deux manières.
Budgétairement, avec le doublement d'ici fin 2012 de notre aide via les ONG. Il nous faudra ainsi maintenir l'effort enregistré au cours des dernières années, pour atteindre l'objectif confirmé par le président de la République de porter à 2 % la part de notre APD qui transite par les organisations de solidarité internationale.
Nous devons également renforcer notre dialogue avec les ONG. Le Conseil stratégique y contribuera. Et je crois, de manière plus générale, qu'il nous faut avoir le réflexe de les associer en amont des grandes échéances de politique étrangère et de coopération. C'est dans cet esprit que j'ai réuni les grandes organisations françaises de solidarité internationale à la veille du G8 développement, également au lendemain du CICID.
Les collectivités territoriales, enfin.
En 2009, j'ai commencé un tour de France des régions. J'en ai déjà visité une douzaine. Avec près de 8000 projets de coopération portés par plus de 3800 collectivités françaises dans 132 pays, nous devons être conscients que nous disposons de relais et de leviers d'influence exceptionnels.
Tout en reconnaissant pleinement l'autonomie de la coopération décentralisée, j'ai souhaité à travers ces contacts directs renforcer les synergies entre l'action de l'Etat et de ses territoires. La coopération décentralisée a tissé un réseau d'une extraordinaire densité ; les informations et les bonnes pratiques de cette coopération de proximité doivent irriguer nos programmes.
Les contrats de plan Etat-Région sont la parfaite illustration de cette nécessaire complémentarité de nos actions.
Un pilotage plus efficace de notre aide.
C'est un volet essentiel des réformes en cours. L'urgence était à la cohérence, aux synergies. Parce que la sphère d'intervention de nos politiques d'aide est très étendue, nous avions eu tendance dans le passé à laisser les structures proliférer, quand nous ne les encouragions pas nous-mêmes !
A l'issue de la réforme, nous aurons quatre grands opérateurs, correspondant à nos principaux métiers :
- la mobilité et l'expertise technique internationale ;
- le rayonnement culturel ;
- l'enseignement du français ;
- l'APD.
Je ne reviens pas sur les trois grands chantiers de la réforme de notre action culturelle extérieure. Bernard Kouchner vous a rappelé hier les enjeux qui s'y attachaient dans un environnement particulièrement concurrentiel.
La réforme du Département avec la création de la DGM était un préalable. Je n'ai pas besoin de vous dire que nous sommes tous très mobilisés derrière Bernard Kouchner pour réussir ensemble cette grande réforme et doter notre pays des instruments dont il a besoin pour faire rayonner notre langue, notre culture, nos idées. Et je pense bien sûr à la grande agence culturelle, dont Bernard Kouchner vous a parlé hier. Son contenu, et notamment la nature de la relation avec le réseau, reste à décider. Vos contributions nous seront précieuses.
Pour l'APD et son opérateur-pivot qu'est l'AFD, je souhaite préciser les choses.
La réforme en cours de la gouvernance de l'AFD constitue une marque d'intérêt de la puissance publique. L'AFD fait un travail remarquable, elle a su développer des outils diversifiés et modernes, permettant à la fois de s'adapter aux différentes géographies, de tenir compte des évolutions politiques et d'anticiper sur les grands enjeux du développement de demain, je pense notamment à l'environnement.
Il ne saurait y avoir de transferts importants de compétences sans que cela ne s'accompagne logiquement d'un renforcement de la tutelle. Celle-ci, au terme même des décisions du CICID, s'exerce désormais, en étroite coordination avec les ministères compétents, par le ministre des Affaires étrangères, en charge de la coopération, dont le rôle de chef de file est réaffirmé.
La création par décret d'un conseil d'orientation stratégique, présidé par le ministre des Affaires étrangères en charge de la coopération, ainsi que les modifications qui ont dû être apportées aux statuts de l'AFD, s'inscrivent dans cette logique. Sur le terrain, il appartiendra à l'ambassadeur de porter cette réforme, en jouant pleinement son rôle de coordonnateur et d'animateur de l'ensemble de nos politiques publiques, seule garantie d'une action efficace de l'Etat à l'étranger.
A l'avenir et dans les prochains moins, quels seront les principaux défis qu'il nous faudra relever ?
Le premier d'entre eux, vous le connaissez tous. C'est l'ampleur de la crise internationale.
Selon les dernières estimations, le taux de croissance moyen pour les pays en développement en 2009 s'établirait entre 2,1 % et 1,4 %. Pour l'Afrique sub-saharienne, la croissance pourrait être nulle.
Après une décennie de croissance soutenue, c'est une très mauvaise nouvelle pour l'Afrique. Les conséquences humaines, sociales, voire politiques, risquent d'être désastreuses : le revenu par habitant devrait chuter de 2,4 % ; 60 à 100 millions de personnes pourrait passer sous le seuil de pauvreté ; les progrès réalisés au cours de la décennie écoulée dans l'atteinte des OMD pourraient bien être réduits à néant.
Plus que jamais, notre réseau doit être aux avant-postes de l'analyse. Vous ne devez pas hésiter à nous faire remonter les informations de terrain. L'évolution du cadre budgétaire de vos pays de résidence doit être suivie de près, de même que l'impact social de la crise, ou encore les politiques ou les biais qui seront trouvés sur place pour limiter l'impact de la crise sur les populations. Vos propositions d'action, cela va sans dire, seront également les bienvenues.
Pour nous, cette crise sans précédent nous met face à un triple défi : poursuivre la réforme de la gouvernance mondiale ; jouer tout notre rôle au sein des institutions multilatérales pour orienter au mieux la réponse à la crise ; tenir nos engagements.
Réformer la gouvernance mondiale.
L'onde de choc de la crise sur les pays en développement justifie pleinement de poursuivre les efforts de rénovation de la gouvernance mondiale.
Le G20 de Londres a consacré la participation de l'Afrique aux côtés des pays émergents. Plus récemment, le G8 de l'Aquila a également permis d'entendre le continent africain.
Il faudra aller plus loin. La représentation des pays africains au sein même des institutions de Bretton Woods doit être renforcée.
Sur le fond, nous devrons rester vigilants pour que les engagements pris dans le cadre de ces sommets soient tenus.
Sachons également valoriser l'effort de notre pays dans la solidarité manifestée par la communauté internationale pour aider les pays en développement. Nous avons ainsi contribué à l'augmentation des ressources du FMI pour au moins 16 milliards de dollars dont 1 milliard de dollars en financements concessionnels. Nous avons soutenu une allocation de droits de tirage spéciaux de 250 milliards de dollars dont 15 milliards de dollars destinés aux pays à faible revenu. Nous soutiendrons enfin le fonds contre les vulnérabilités de la Banque mondiale pour 1,2 milliard d'euros de cofinancements.
Réorienter la réponse multilatérale à la crise.
L'importance de nos contributions aux principaux fonds multilatéraux justifie que nous soyons plus efficaces dans l'orientation et le contrôle qui est fait de l'argent public. Qu'il s'agisse du FED, de la Banque Mondiale (AID) ou du Fonds mondial Sida, avec respectivement, 850, 410 et 300 millions d'euros annuels, nous avons collectivement une obligation de résultat. Je souhaite vraiment que les postes en fassent l'une de leurs grandes priorités. C'est un enjeu majeur de l'influence de notre pays et du maintien à long terme de notre effort.
Notre engagement multilatéral fera d'ailleurs l'objet, conformément aux décisions du CICID, d'un examen d'ensemble de l'efficacité des différents canaux de notre aide. Une mission de réflexion sur notre politique de coopération, notamment multilatérale, a été confiée à Mme Henriette Martinez, députée, dont les conclusions nourriront les travaux d'élaboration du document général de stratégie de la coopération française au développement prévu pour 2010 et qui seront coordonnés par la DGM. N'hésitez pas à vous emparer de ce sujet majeur et faites-nous parvenir vos analyses.
Au-delà et face à l'ampleur de la crise, il nous faut également accroître le spectre de nos interventions. C'est le sens de l'approche dite "globale", qui a été défendue par l'Italie au dernier G8. Parallèlement à l'aide publique traditionnelle, nous devons désormais agir sur tous les fronts susceptibles de jouer un rôle contra-cyclique :
- le financement du commerce ;
- l'encouragement des investissements directs étrangers ;
- l'épargne des migrants ;
- les financements innovants.
Mais cette démarche n'aura de chance d'être comprise et acceptée, notamment de la communauté des ONG, qu'à la condition que nous puissions être "irréprochables" sur les engagements souscrits par notre pays.
Tenir nos engagements.
Des efforts importants sont faits par notre pays dans un contexte budgétaire difficile :
- notre effort budgétaire durant l'actuel triennum est maintenu ;
- notre APD entre 2008 et 2009 progressera : nous passerons ainsi de 0,39 à 0,44 % de notre RNB ;
- nos engagements sur l'Afrique sont tenus : l'AFD a doublé ses engagements sur ce seul continent entre 2008 et 2009 ;
- en additionnant notre aide bilatérale et multilatérale, la France est le 2ème contributeur des pays du G8 en proportion de sa richesse nationale derrière le Royaume-Uni, mais devant l'Allemagne, le Japon et les Etats-Unis. Elle est également le pays qui aura au total fait le plus grand effort pour l'Afrique en 2007 avec 39 % du total de notre APD (27 % moyenne G7 ; 26 % pour le Royaume-Uni).
Il nous faudra toutefois maintenir le cap dans la durée.
Le CICID a rappelé l'engagement pris par le président de la République : l'Europe doit être au rendez-vous des 0,7 % en 2015.
Avec Bernard Kouchner, nous avons indiqué au Premier ministre que la politique engagée de diversification de nos outils permettra de limiter le risque de décroissance de notre APD au-delà de l'actuel triennum.
Voilà, Mesdames et Messieurs, en quelques mots, les principaux défis auxquels il nous faudra faire face dans les prochains mois. Je ne doute pas que nous pourrons compter sur vous, sur votre engagement sans faille, sur votre enthousiasme et votre professionnalisme pour trouver ensemble les meilleures réponses.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 juillet 2009
Monsieur le Directeur Général,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
L'an dernier, en ouverture de vos travaux, j'avais eu le plaisir de vous présenter l'esprit de la réforme de notre aide publique au développement, ainsi que les grands chantiers qui nous ont mobilisés tout au long de l'année écoulée.
Je vais tenter d'en faire aujourd'hui rapidement le bilan. Je vous dirai également en quelques mots les priorités sur lesquelles il nous faudra mettre l'accent dans les mois à venir.
Mais d'abord, je voudrais vous dire ma gratitude pour le travail remarquable que vous faites partout dans le monde, souvent dans des conditions difficiles.
Au fil de mes nombreux déplacements depuis plus d'un an, une quarantaine au total, j'ai sollicité nombre d'entre vous et j'ai pu constater votre enthousiasme, même si souvent vous m'avez fait part des difficultés que vous rencontrez.
Je veux ici vous exprimer ici toute ma reconnaissance.
Qu'avons-nous fait ensemble au cours de l'année écoulée ?
Dans le droit fil du "Livre blanc", des recommandations de la RGPP, et surtout en parfaite cohérence avec la feuille de route du président de la République, nous avons réorienté notre coopération dans quatre grandes directions :
- une claire priorité à l'Afrique ;
- des réponses à la hauteur d'une crise sans précédent ;
- des chantiers concrets impliquant directement nos concitoyens ;
- un pilotage plus efficace de notre aide.
La priorité à l'Afrique.
Cette priorité est aujourd'hui actée. Conformément aux conclusions du dernier CICID, l'Afrique subsaharienne se verra allouer 60 % des ressources budgétaires de l'aide française. C'est un choix majeur. Il est salué par nos partenaires et par la communauté des ONG. Il est conforme aux engagements souscrits par la France au plus haut niveau. Il nous appartient désormais de le faire savoir et de le valoriser.
Pour la première fois également, nous avons arrêté une liste nominative de pays coeur de cible de la coopération française. Les quatorze pays qui la composent sont sans exception en Afrique sub-saharienne et dans leur immense majorité, à l'exception du Ghana, des pays francophones. Nous avons ainsi marqué de manière concrète les liens très forts qui nous unissent à cette partie du monde. C'est une façon très claire également de donner un contenu à l'engagement francophone de la France.
La croissance économique, le soutien à l'initiative privée.
Conformément aux engagements pris par le président Sarkozy au Cap, la France a augmenté en 2009 de 25 % ses engagements via l'AFD en direction des pays du Sud, soit un effort d'1,5 milliard d'euros.
D'ores et déjà, l'Afrique en a été la principale bénéficiaire. Les moyens consacrés au développement du continent africain ont doublé entre 2008 et 2009, passant de 1 à 2 milliards d'euros d'engagements.
Les instruments mis en place, fonds de garantie et fonds d'investissement, sont désormais opérationnels : les projets démarrent et je ne doute pas que l'objectif de créer grâce à eux 370.000 emplois puisse être atteint.
La relance des agricultures africaines.
Sous présidence française de l'Union européenne, et dans le contexte des "émeutes de la faim", nous avons remis cette priorité, malheureusement sortie des écrans radar de l'aide, au coeur de l'agenda international.
Depuis la "facilité financière", proposée par le président, l'an dernier, jusqu'aux dernières décisions prises par le G8, que de chemin parcouru ! La déclaration conjointe sur la sécurité alimentaire de l'Aquila constitue une avancée notable. Elle est le fruit en partie de l'obstination de notre pays qui de longue date milite pour une spécificité agricole. Au G8, la France a pris des engagements : 1 milliard d'euros sur 5 ans.
Le Fonds d'investissement pour l'Agriculture africaine, que j'ai eu l'honneur de lancer, sera opérationnel dès la fin de cette année. Il contribuera au financement des projets privés de développement de l'agriculture vivrière.
Des chantiers concrets impliquant directement nos concitoyens.
Je vous avais indiqué également, l'an dernier, que je souhaitais mettre en oeuvre des chantiers concrets impliquant directement nos concitoyens. Pour trois d'entre eux, les choses ont bien avancé.
Le volontariat, d'abord.
Vous vous en souvenez peut-être, j'avais souhaité que l'on fasse preuve d'un peu d'ambition en la matière. Les candidats au volontariat international dans notre pays sont nombreux, les opportunités encore trop limitées. Nous nous étions fixé comme objectif de tripler leur nombre d'ici la fin du quinquennat soit 15.000 au total, contre 5000 aujourd'hui. Cet objectif a été acté par le CICID. Il nous appartient désormais de le réaliser collectivement. Je compte sur vous pour nous aider à déterminer les secteurs où leur présence est souhaitée. Pour l'Afrique, par exemple, face à la décrue de notre assistance technique, le volontariat peut constituer le creuset des experts de demain. En tout état de cause, qu'il s'agisse du volontariat des juniors ou des seniors, c'est pour nous un lien majeur, un pont entre les sociétés civiles.
Je vous questionnerai prochainement par écrit pour évaluer les besoins.
Les ONG, ensuite.
Là encore, des orientations majeures ont été données.
Je ne reviens pas sur la réforme de nos institutions en charge de la relation avec les ONG, avec notamment la création d'une Mission de relations avec la société civile au sein de la DGM. Vous savez également que le CICID a entériné la création d'un conseil stratégique pour la coopération non gouvernementale. Ce sera un instrument essentiel de dialogue, d'échange, de rapprochement et de cohérence entre les interventions publiques et celles de nos sociétés civiles.
L'essentiel désormais est de confirmer, chaque année, notre engagement à faire de nos ONG des acteurs importants de notre aide. Cela doit se traduire de deux manières.
Budgétairement, avec le doublement d'ici fin 2012 de notre aide via les ONG. Il nous faudra ainsi maintenir l'effort enregistré au cours des dernières années, pour atteindre l'objectif confirmé par le président de la République de porter à 2 % la part de notre APD qui transite par les organisations de solidarité internationale.
Nous devons également renforcer notre dialogue avec les ONG. Le Conseil stratégique y contribuera. Et je crois, de manière plus générale, qu'il nous faut avoir le réflexe de les associer en amont des grandes échéances de politique étrangère et de coopération. C'est dans cet esprit que j'ai réuni les grandes organisations françaises de solidarité internationale à la veille du G8 développement, également au lendemain du CICID.
Les collectivités territoriales, enfin.
En 2009, j'ai commencé un tour de France des régions. J'en ai déjà visité une douzaine. Avec près de 8000 projets de coopération portés par plus de 3800 collectivités françaises dans 132 pays, nous devons être conscients que nous disposons de relais et de leviers d'influence exceptionnels.
Tout en reconnaissant pleinement l'autonomie de la coopération décentralisée, j'ai souhaité à travers ces contacts directs renforcer les synergies entre l'action de l'Etat et de ses territoires. La coopération décentralisée a tissé un réseau d'une extraordinaire densité ; les informations et les bonnes pratiques de cette coopération de proximité doivent irriguer nos programmes.
Les contrats de plan Etat-Région sont la parfaite illustration de cette nécessaire complémentarité de nos actions.
Un pilotage plus efficace de notre aide.
C'est un volet essentiel des réformes en cours. L'urgence était à la cohérence, aux synergies. Parce que la sphère d'intervention de nos politiques d'aide est très étendue, nous avions eu tendance dans le passé à laisser les structures proliférer, quand nous ne les encouragions pas nous-mêmes !
A l'issue de la réforme, nous aurons quatre grands opérateurs, correspondant à nos principaux métiers :
- la mobilité et l'expertise technique internationale ;
- le rayonnement culturel ;
- l'enseignement du français ;
- l'APD.
Je ne reviens pas sur les trois grands chantiers de la réforme de notre action culturelle extérieure. Bernard Kouchner vous a rappelé hier les enjeux qui s'y attachaient dans un environnement particulièrement concurrentiel.
La réforme du Département avec la création de la DGM était un préalable. Je n'ai pas besoin de vous dire que nous sommes tous très mobilisés derrière Bernard Kouchner pour réussir ensemble cette grande réforme et doter notre pays des instruments dont il a besoin pour faire rayonner notre langue, notre culture, nos idées. Et je pense bien sûr à la grande agence culturelle, dont Bernard Kouchner vous a parlé hier. Son contenu, et notamment la nature de la relation avec le réseau, reste à décider. Vos contributions nous seront précieuses.
Pour l'APD et son opérateur-pivot qu'est l'AFD, je souhaite préciser les choses.
La réforme en cours de la gouvernance de l'AFD constitue une marque d'intérêt de la puissance publique. L'AFD fait un travail remarquable, elle a su développer des outils diversifiés et modernes, permettant à la fois de s'adapter aux différentes géographies, de tenir compte des évolutions politiques et d'anticiper sur les grands enjeux du développement de demain, je pense notamment à l'environnement.
Il ne saurait y avoir de transferts importants de compétences sans que cela ne s'accompagne logiquement d'un renforcement de la tutelle. Celle-ci, au terme même des décisions du CICID, s'exerce désormais, en étroite coordination avec les ministères compétents, par le ministre des Affaires étrangères, en charge de la coopération, dont le rôle de chef de file est réaffirmé.
La création par décret d'un conseil d'orientation stratégique, présidé par le ministre des Affaires étrangères en charge de la coopération, ainsi que les modifications qui ont dû être apportées aux statuts de l'AFD, s'inscrivent dans cette logique. Sur le terrain, il appartiendra à l'ambassadeur de porter cette réforme, en jouant pleinement son rôle de coordonnateur et d'animateur de l'ensemble de nos politiques publiques, seule garantie d'une action efficace de l'Etat à l'étranger.
A l'avenir et dans les prochains moins, quels seront les principaux défis qu'il nous faudra relever ?
Le premier d'entre eux, vous le connaissez tous. C'est l'ampleur de la crise internationale.
Selon les dernières estimations, le taux de croissance moyen pour les pays en développement en 2009 s'établirait entre 2,1 % et 1,4 %. Pour l'Afrique sub-saharienne, la croissance pourrait être nulle.
Après une décennie de croissance soutenue, c'est une très mauvaise nouvelle pour l'Afrique. Les conséquences humaines, sociales, voire politiques, risquent d'être désastreuses : le revenu par habitant devrait chuter de 2,4 % ; 60 à 100 millions de personnes pourrait passer sous le seuil de pauvreté ; les progrès réalisés au cours de la décennie écoulée dans l'atteinte des OMD pourraient bien être réduits à néant.
Plus que jamais, notre réseau doit être aux avant-postes de l'analyse. Vous ne devez pas hésiter à nous faire remonter les informations de terrain. L'évolution du cadre budgétaire de vos pays de résidence doit être suivie de près, de même que l'impact social de la crise, ou encore les politiques ou les biais qui seront trouvés sur place pour limiter l'impact de la crise sur les populations. Vos propositions d'action, cela va sans dire, seront également les bienvenues.
Pour nous, cette crise sans précédent nous met face à un triple défi : poursuivre la réforme de la gouvernance mondiale ; jouer tout notre rôle au sein des institutions multilatérales pour orienter au mieux la réponse à la crise ; tenir nos engagements.
Réformer la gouvernance mondiale.
L'onde de choc de la crise sur les pays en développement justifie pleinement de poursuivre les efforts de rénovation de la gouvernance mondiale.
Le G20 de Londres a consacré la participation de l'Afrique aux côtés des pays émergents. Plus récemment, le G8 de l'Aquila a également permis d'entendre le continent africain.
Il faudra aller plus loin. La représentation des pays africains au sein même des institutions de Bretton Woods doit être renforcée.
Sur le fond, nous devrons rester vigilants pour que les engagements pris dans le cadre de ces sommets soient tenus.
Sachons également valoriser l'effort de notre pays dans la solidarité manifestée par la communauté internationale pour aider les pays en développement. Nous avons ainsi contribué à l'augmentation des ressources du FMI pour au moins 16 milliards de dollars dont 1 milliard de dollars en financements concessionnels. Nous avons soutenu une allocation de droits de tirage spéciaux de 250 milliards de dollars dont 15 milliards de dollars destinés aux pays à faible revenu. Nous soutiendrons enfin le fonds contre les vulnérabilités de la Banque mondiale pour 1,2 milliard d'euros de cofinancements.
Réorienter la réponse multilatérale à la crise.
L'importance de nos contributions aux principaux fonds multilatéraux justifie que nous soyons plus efficaces dans l'orientation et le contrôle qui est fait de l'argent public. Qu'il s'agisse du FED, de la Banque Mondiale (AID) ou du Fonds mondial Sida, avec respectivement, 850, 410 et 300 millions d'euros annuels, nous avons collectivement une obligation de résultat. Je souhaite vraiment que les postes en fassent l'une de leurs grandes priorités. C'est un enjeu majeur de l'influence de notre pays et du maintien à long terme de notre effort.
Notre engagement multilatéral fera d'ailleurs l'objet, conformément aux décisions du CICID, d'un examen d'ensemble de l'efficacité des différents canaux de notre aide. Une mission de réflexion sur notre politique de coopération, notamment multilatérale, a été confiée à Mme Henriette Martinez, députée, dont les conclusions nourriront les travaux d'élaboration du document général de stratégie de la coopération française au développement prévu pour 2010 et qui seront coordonnés par la DGM. N'hésitez pas à vous emparer de ce sujet majeur et faites-nous parvenir vos analyses.
Au-delà et face à l'ampleur de la crise, il nous faut également accroître le spectre de nos interventions. C'est le sens de l'approche dite "globale", qui a été défendue par l'Italie au dernier G8. Parallèlement à l'aide publique traditionnelle, nous devons désormais agir sur tous les fronts susceptibles de jouer un rôle contra-cyclique :
- le financement du commerce ;
- l'encouragement des investissements directs étrangers ;
- l'épargne des migrants ;
- les financements innovants.
Mais cette démarche n'aura de chance d'être comprise et acceptée, notamment de la communauté des ONG, qu'à la condition que nous puissions être "irréprochables" sur les engagements souscrits par notre pays.
Tenir nos engagements.
Des efforts importants sont faits par notre pays dans un contexte budgétaire difficile :
- notre effort budgétaire durant l'actuel triennum est maintenu ;
- notre APD entre 2008 et 2009 progressera : nous passerons ainsi de 0,39 à 0,44 % de notre RNB ;
- nos engagements sur l'Afrique sont tenus : l'AFD a doublé ses engagements sur ce seul continent entre 2008 et 2009 ;
- en additionnant notre aide bilatérale et multilatérale, la France est le 2ème contributeur des pays du G8 en proportion de sa richesse nationale derrière le Royaume-Uni, mais devant l'Allemagne, le Japon et les Etats-Unis. Elle est également le pays qui aura au total fait le plus grand effort pour l'Afrique en 2007 avec 39 % du total de notre APD (27 % moyenne G7 ; 26 % pour le Royaume-Uni).
Il nous faudra toutefois maintenir le cap dans la durée.
Le CICID a rappelé l'engagement pris par le président de la République : l'Europe doit être au rendez-vous des 0,7 % en 2015.
Avec Bernard Kouchner, nous avons indiqué au Premier ministre que la politique engagée de diversification de nos outils permettra de limiter le risque de décroissance de notre APD au-delà de l'actuel triennum.
Voilà, Mesdames et Messieurs, en quelques mots, les principaux défis auxquels il nous faudra faire face dans les prochains mois. Je ne doute pas que nous pourrons compter sur vous, sur votre engagement sans faille, sur votre enthousiasme et votre professionnalisme pour trouver ensemble les meilleures réponses.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 juillet 2009