Déclaration de Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d'Etat chargée de l'outre-mer, sur la coopération entre les entreprises et l'Etat pour le développement économique des départements d'outre-mer, Paris le 5 septembre 2009.

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Circonstance : Journée Outre-mer développement à Paris le 5 septembre 2009

Texte intégral

Vous venez de passer une journée entière à échanger et débattre du développement économique des Antilles et de la Guyane et du rôle que chacun d'entre nous peut y jouer.
Je salue cette initiative. J'apprécie particulièrement de voir réunis tant d'ultramarins de métropole soucieux de l'avenir de leurs territoires d'origine. Je reconnais beaucoup de visages familiers. Notamment nos amis de la FEDOM qui m'ont invitée aujourd'hui à leur assemblée. C'est décidément une journée placée sous le signe de l'entreprise et du développement économique !
Je ne vous l'apprends pas, l'outre-mer vit une période particulière, marquée par une double crise, économique et sociale.
Dans ce contexte, l'adoption de la LODEOM réoriente profondément le modèle de développement économique des DOM. D'une croissance qui naît des transferts publics et de la consommation, le Gouvernement ambitionne de passer à une économie qui crée davantage de valeur ajoutée locale.
Les acteurs économiques, que nous avons consultés à ce sujet, ont fait le choix de concentrer les efforts sur certains secteurs prioritaires touchant à l'environnement, aux technologies de l'information, à l'agro nutrition, aux énergies renouvelables, au tourisme et à la recherche et développement.
Cela implique de refonder l'approche de la ressource humaine.
En effet qui sont les acteurs de cette économie endogène ? Ce sont les entrepreneurs, les salariés du secteur privé qu'il va falloir former à de nouveaux métiers.
Il va falloir former des chercheurs, des ingénieurs, des spécialistes de l'environnement. Ce ne sont pas uniquement des BAC+5 dont ces secteurs ont besoin mais aussi beaucoup de techniciens issus de BTS, des IUT ou des filières spécialisées de l'université.
N'oublions pas en effet dans nos projets de développement la jeunesse : dans la LODEOM, nous avons ainsi créé un fonds spécifique d'expérimentation pour la jeunesse, qui sera financé par les entreprises en contrepartie des exonérations d'impôt sur les sociétés.
Mais je pense aussi à l'encadrement des entreprises, les petites comme les grandes. Nombre de nos compatriotes, parvenus à un certain niveau de responsabilité, constatent que l'ascenseur professionnel s'arrête pour eux, mais qu'il continue à s'élever pour d'autres, à qualification et compétences égales. Ils se heurtent au « plafond de verre ».
Souvent, et je pense à l'administration par exemple, des conditions sont mises à la promotion professionnelle : il faut être mobile, c'est-à-dire avoir exercé ailleurs. La mobilité est une vraie richesse, notamment dans nos territoires qui sont, par leur nature, ouverts sur le monde. Mais, du fait de l'éloignement, cette exigence est incontestablement plus lourde, plus pénalisante, pour un ultramarin que pour un métropolitain.
Nous devons réfléchir au rôle que l'ANT pourrait jouer dans ce domaine. Elle oeuvre déjà pour la formation en mobilité des étudiants, pour celle des jeunes professionnels. Elle doit soutenir les initiatives du monde de l'entreprise qui viseraient à accompagner pendant une durée déterminée la formation voire l'acquisition d'une expérience avant de retourner exercer dans leur territoire. C'est en quelque sorte un programme « Cadres + ».
Nous avons aussi besoin d'entrepreneurs, d'investisseurs, de créateurs d'entreprises. Il y en a beaucoup parmi vous. C'est dans vos entreprises que réside le potentiel de création d'emplois. Le rôle du Gouvernement est de leur donner les moyens de se développer.
Certains d'entre vous ont créé des entreprises en métropole. Nous avons besoin de votre retour d'expérience. Pour mieux vous accompagner. Je vous propose de réunir régulièrement rue Oudinot un « club des entrepreneurs » qui serait un lieu d'échanges informels sur le climat des affaires outre-mer.
J'en profite pour vous dire que c'est toujours un plaisir de vous recevoir au sein du S.E.O.M. pour entendre vos préoccupations et mieux appréhender les difficultés auxquelles les ultramarins sont confrontés. Cette proximité est essentielle pour une action politique concrète et efficace.
« la Réunion économique » est un exemple intéressant de regroupement des représentants des entreprises qui souhaitent parler d'une seule voix pour mieux peser dans les décisions qui les concernent. Ainsi s'instaure un dialogue constructif avec les élus locaux, l'Etat, les partenaires étrangers.
Vous êtes pour la plupart des leaders dans vos domaines respectifs. Cela entraîne des responsabilités. Un engagement. Cet événement, par exemple, n'aurait pu se faire sans des hommes et des femmes soucieux de l'avenir de leurs territoires.
Les thèmes que vous avez abordés aujourd'hui tournent tous autour de l'avenir, d'un avenir que vous voulez construire ensemble. Ce souci d'un avenir partagé, d'un avenir juste, votre implication, tout cela engendre la confiance.
Parmi les traits de la crise que nous avons connue au premier semestre dans les Antilles, certains ont pu relever les doutes de nos compatriotes à l'égard du monde économique, je dirais même plus une certaine défiance.
Comment restaurer la confiance dans l'entreprise ?
On parle volontiers d'entreprise citoyenne, de sa responsabilité sociale. Certes. Mais l'attente en outre-mer me semble d'une autre nature : elle se manifeste par exemple dans la demande d'un Etat plus fort, plus présent dans la régulation des circuits économiques.
La transparence et la concurrence, ces deux objectifs de la régulation, créent un climat favorable au développement économique. Elles restaurent également la confiance dans le système économique. L'Etat a prouvé ces derniers mois son engagement en la matière.
La transparence et la concurrence, ce n'est pas seulement l'affaire de l'Etat. Vous pouvez y contribuer, vous le faites déjà. J'ai la conviction que c'est une question qui doit nourrir le dialogue social.
J'ai été particulièrement frappée par la présentation du rapport de l'ARACT sur le prix des carburants en Martinique, lorsque j'ai présidée l'observatoire des prix mercredi dernier. Voilà une institution gérée à parité entre les organisations patronales et les syndicats de salariés qui décide d'aborder ce sujet éminemment complexe, éminemment sensible.
L'étude de l'ARACT détaille, décrypte, explicite les mécanismes de formation des prix du carburant qui, du coup, deviennent accessibles à tous. Et ce travail de transparence et de pédagogie, il est porté par les partenaires sociaux regroupés dans cette institution emblématique du dialogue social en Martinique.
J'en conclus que le dialogue social ne peut se réduire à la prévention et au règlement des conflits - tout cela est nécessaire mais ce n'est pas suffisant compte tenu des attentes de nos concitoyens. Il doit être aussi un vecteur pour que nos compatriotes, c'est-à-dire vos clients, vos voisins, vos proches, aient à nouveau confiance dans l'entreprise.
Vous qui investissez, vous qui prenez des risques pour créer de la valeur, vous savez que la confiance ne se décrète pas, qu'elle se construit et qu'elle est fragile.
Les travaux qui ont été engagés depuis six mois, en particulier par les Etats généraux de l'outre-mer, contribuent eux aussi à rebâtir la confiance, confiance dans l'avenir mais aussi confiance en chacun de nous pour forger cet avenir commun ou, devrais-je dire, ces avenirs, divers comme les outre-mer sont divers.

Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 10 septembre 2009