Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Je vais tenter de répondre aux questions que vous avez évoquées, mais je vous prie de bien vouloir m'excuser si j'en oublie quelques-unes car je me suis engagée à me rendre devant la Commission des Affaires économiques.
Sur les paradis fiscaux, je répondrai à M. Cahuzac et à ceux d'entre vous qui ont évoqué ce point. Il ne faut pas se voiler la face. Nous avons fait une partie du chemin, mais cette partie-là est historique. Vous avez raison de dire que ce n'est qu'une partie du chemin, que tout n'a pas été fait, mais 150 conventions, accords, amendements ont été signés par des pays, quels qu'ils soient - il ne faut avoir de mépris pour aucun, ni pour le Qatar ni pour d'autres ! Il ne faut pas porter de jugement de valeur. La détermination de certains pays à communiquer de l'information, à mettre définitivement fin au secret bancaire est une avancée phénoménale. On peut considérer ce mouvement comme historique.
Le fait que certains Etats renoncent à s'abriter derrière le secret bancaire pour refuser de délivrer des informations est déterminant. Si tout n'est pas acquis, le sommet de Pittsburgh fixe du moins un calendrier. Les pays du G20 se sont engagés à appliquer des sanctions à partir de mars 2010. Nous y travaillons, Eric Woerth et moi. Ce matin, un premier arrêté a été publié au Journal officiel, en application d'un amendement du président de la Commission des Finances, précisant les informations que les banques devront fournir au sujet de leur activité dans les paradis fiscaux. N'est-ce pas le début de la transparence ? Par ailleurs, nous sommes déterminés à proposer, dans la loi de finances rectificative, des règles en matière de fiscalité, de prélèvements et de taxation des plus-values, ainsi que des avenants à certaines dispositions bien connues du code général des impôts, afin de taxer lourdement les activités en lien avec les paradis fiscaux.
S'il reste du chemin à faire sur le plan tant national qu'international, je me réjouis que François d'Aubert ait été nommé président du groupe d'évaluation des juridictions non coopératives du forum global de l'OCDE. Le travail de "peer review" mené par cette instance permettra de vérifier que les pays respectent leurs engagements. Une telle avancée présente un caractère historique, même s'il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. En effet, il faudra toujours rester vigilant, tant la tentation est grande pour chacun de s'affranchir peu à peu des règles qu'il s'était engagé à respecter.
Certains d'entre vous paraissent dépités que la France ait été à l'origine de telles initiatives. Je le regrette. Le 2 avril, à Londres, tout comme à Pittsburgh, notre pays était à la manoeuvre. Il a fixé les impulsions déterminantes pendant la Présidence européenne. Par ailleurs, pendant le Sommet de Londres, le président de la République a fait preuve de ténacité pour imposer l'échéance de mars 2010 et le principe des sanctions.
Quant à la question des bonus, je pense comme le président de la Commission des Finances qu'elle est moins déterminante que celle des règles de capitalisation ou l'harmonisation de l'interprétation des règles en matière de fonds propres. Elle est cependant symbolique. Il est pour le moins inattendu que les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne aient rallié la position française en acceptant d'encadrer les bonus et d'interdire les bonus garantis, le différé de 40 % à 60 % de la part de bonus variable, le paiement en actions et en instaurant le clawback, c'est-à-dire le remboursement en cas de mauvaise performance. Ces Etats ont manifesté leur volonté de mettre fin à une culture du risque, dont les abus ont conduit à la crise économique, financière, puis sociale. Il n'y a donc pas lieu de dédaigner ces avancées.
Si le Premier ministre n'a pas rappelé le rôle de M. Camdessus, contrôleur des rémunérations des opérateurs de marché, c'est que cette autorité a été instituée sur un plan national. De même, un "czar" des rémunérations américaines a été désigné en son temps par les Etats-Unis. La nomination de M. Camdessus éclaire toutefois la démarche française. Le 25 août, en effet, nous avons choisi de demander aux secteurs bancaire et financier de jouer un rôle pionnier, et de prendre le risque de l'impératif catégorique. En agissant ainsi, nous espérions que nous serions bientôt rejoints par les autres pays. Ce fut le cas en matière de bonus. Pour les paradis fiscaux, en revanche, les banques ont pris des engagements sans même attendre le Sommet de Pittsburgh.
J'en viens à un point sur lequel je ne peux partager l'avis de M. Cahuzac. J'écoute toujours M. Cahuzac, car je considère que la vérité n'est jamais uniquement d'un côté ou de l'autre. Mais on doit se garder de toute mauvaise foi. Quand nous avons créé la Société de prises de participation de l'Etat, afin de renforcer les capitaux des banques françaises, parce qu'il en allait de la santé de notre secteur financier, il ne me serait jamais venu à l'idée que l'on devait spéculer, boursicoter ou prendre des participations qui engendreraient des plus-values. L'affaire est sérieuse. Imaginez un instant que les banques aient remboursé au moment où leurs actions étaient au plus bas, la perte se serait chiffrée à 1,5 milliard. On ne peut courir un tel risque avec l'argent des Français. Il faut au contraire l'engager dans les conditions les plus raisonnables en s'assurant du point de sortie. Sur ce point, je ne peux donc pas accepter vos allégations. On ne peut parler d'une perte, par rapport à l'espérance de plus-values qu'aurait générées un placement.
Jean-François Copé a évoqué tout à l'heure à juste titre la transparence des marchés. Nous avons demandé la création d'un registre, pour que la compensation puisse être effectuée au vu de tous. La transparence est en effet la condition première pour permettre le contrôle et la supervision dans un secteur qui en a besoin. C'est la décision que je défendrai au niveau européen. Nous avons besoin, notamment dans la zone euro, de chambres de compensation permettant de traiter l'ensemble du marché des dérivés. J'espère que nous serons entendus.
M. Sandrier a souligné la nécessité de réduire l'hiatus entre la spéculation et l'économie réelle. Nous nous engageons précisément dans cette voie, sous l'impulsion du président de la République. Il faut éviter l'effet des bulles financières et limiter la finance à ce qui devrait être son rôle : financer l'économie, qu'il s'agisse des ménages ou des entreprises.
M. Perruchot a mentionné la nécessité de coordonner les superviseurs. Il est indispensable que cette coordination s'exerce au niveau européen. Je me réjouis que la Présidence française ait oeuvré pour mettre en oeuvre le rapport Larosière, qui plaide pour une bonne coordination entre les niveaux de compétence pour la Bourse, la banque et l'assurance. Les systèmes de coordination issus de cette réforme et ceux qui procéderont de celle menée actuellement aux Etats-Unis - avec un succès modéré, dû à l'importance que prend le dossier de l'assurance santé - devront également être coordonnés. Le G20, qui réunit des ministres des Finances, consacre désormais la place des pays émergents, de certains pays comme l'Espagne ou les Pays-Bas, à la participation desquels le président de la République était attaché, et la présence de M. Somabia, président de l'Organisation internationale du travail. Cette instance pourra, je l'espère, organiser la nécessaire coordination entre les superviseurs dans les domaines politiques, économiques et financiers.
En la matière, une répartition des rôles s'est opérée, aboutissant à une sorte de Yalta de la finance. D'un côté, le FMI est en situation de supervision et d'alerte sur les risques financiers du monde. Il peut aussi venir au secours des pays les plus affectés par la crise. De l'autre, le Conseil de stabilité financière, que le G20 de Londres a élargi, peut réfléchir à des règles et travailler en étroit pilotage avec le comité de Bâle II.
M. Perruchot et M. Migaud ont eu raison d'évoquer le problème des exigences en capital. Dans ce domaine, nous devons être vigilants. En matière de capital, d'interprétation des règles, de ratio ou de détermination de l'effet de levier utilisé comme ratio, les règles ne doivent pas être fixées en dehors de l'Europe, mais respecter au contraire les exigences de l'Union. On ne peut laisser un secteur géographique prévaloir sur les autres, sous prétexte qu'il a été fortement recapitalisé à l'occasion de la crise internationale, début 2009. Il ne serait pas acceptable que cette sorte d'avantage comparatif s'exerce au détriment des banques françaises et européennes. Comptez sur ma détermination à faire valoir ce point de vue.
M. Migaud a également évoqué la nécessité de rappeler le rôle des normes comptables, qui ne naissent pas sui generis, hors de toute réalité économique et politique. Au niveau tant de l'IASB, l'International Accounting Standards Board, que de la Commission européenne, elles doivent enregistrer les valeurs réelles, sans être accrochées de manière définitive à la valeur de marché. D'autres méthodes doivent en effet être utilisées lorsqu'elles sont plus appropriées.
M. Jacob m'a interrogée plus particulièrement sur l'environnement. Je note tout d'abord que c'est sous la Présidence française que l'Union européenne a fait adopter le paquet énergie-climat. C'est la seule zone du monde qui ait pris des engagements forts et concertés en matière de réduction des émissions de CO2. D'autre part, le nouveau gouvernement japonais s'est engagé à réduire lui aussi une part de ses émissions des CO2.
Enfin, le président de la République a pris conscience de la nécessité de donner une impulsion politique, pour faire aboutir le paquet énergie-climat au niveau européen. Il a donc suggéré à ses partenaires du G20 de prévoir une réunion entre chefs d'Etat et de gouvernement avant le Sommet de Copenhague, organisé sur le mode onusien, afin de faciliter l'adoption des points en débat, qui font l'objet de 2 800 formules. Espérons que cette initiative sera suivie d'effet. Le chef de l'Etat a proposé une initiative du même type pour l'OMC. Le cycle du développement de Doha, en chantier depuis sept ans, n'avance pas. Une impulsion politique forte est sans doute souhaitable.
M. Lequiller, M. Poniatowski et M. Migaud ont relevé que la grande absente du G20 est sans doute la question des déséquilibres. Deux informations sont cependant à noter. D'une part, les Chinois ont manifesté la volonté de modifier leur modèle économique et de privilégier désormais le marché intérieur, sachant que l'exportation ne peut, à elle seule, faire fonctionner le moteur de l'économie. D'autre part, le taux d'épargne des ménages américains a augmenté. Si l'on place ces éléments en regard l'un de l'autre, en espérant qu'ils soient durables, on peut souhaiter que s'atténue le déséquilibre entre les balances des paiements. C'est à mon sens un préalable à la réflexion que devra mener le G20 des années 2010 et 2011 sur les rééquilibrages monétaires.
Une initiative franco-britannique a été prise il y a quatre jours, grâce à l'aide de Dominique Strauss-Kahn. Compte tenu de l'augmentation des DTS, les droits de tirages spéciaux, intervenue au sein du FMI, la France et la Grande-Bretagne ont décidé de consacrer chacune 2 milliards de dollars de tirages spéciaux à un prêt au fonds fiduciaire du FMI. Ces sommes seront mises à la disposition des pays les plus pauvres, notamment de l'Afrique subsaharienne, pour qu'ils puissent financer leur développement et leurs infrastructures. Je ne prétendrai pas que cette réalisation concrétise la vision keynésienne dans sa forme la plus aboutie, mais il s'agit tout de même d'un nouveau mode de financement instituant le DTS comme unité monétaire.
En conclusion, la France peut être fière, nous pouvons tous être fiers de ce qui a été réalisé collectivement à Pittsburgh. La France a joué son rôle, parfois de pionnier, parfois de locomotive, mais toujours avec le souci de rétablir de la discipline, de l'ordre, des règles dans un marché qui en a besoin et qui est toujours tenté de les transgresser.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 octobre 2009
Mesdames, Messieurs les Députés,
Je vais tenter de répondre aux questions que vous avez évoquées, mais je vous prie de bien vouloir m'excuser si j'en oublie quelques-unes car je me suis engagée à me rendre devant la Commission des Affaires économiques.
Sur les paradis fiscaux, je répondrai à M. Cahuzac et à ceux d'entre vous qui ont évoqué ce point. Il ne faut pas se voiler la face. Nous avons fait une partie du chemin, mais cette partie-là est historique. Vous avez raison de dire que ce n'est qu'une partie du chemin, que tout n'a pas été fait, mais 150 conventions, accords, amendements ont été signés par des pays, quels qu'ils soient - il ne faut avoir de mépris pour aucun, ni pour le Qatar ni pour d'autres ! Il ne faut pas porter de jugement de valeur. La détermination de certains pays à communiquer de l'information, à mettre définitivement fin au secret bancaire est une avancée phénoménale. On peut considérer ce mouvement comme historique.
Le fait que certains Etats renoncent à s'abriter derrière le secret bancaire pour refuser de délivrer des informations est déterminant. Si tout n'est pas acquis, le sommet de Pittsburgh fixe du moins un calendrier. Les pays du G20 se sont engagés à appliquer des sanctions à partir de mars 2010. Nous y travaillons, Eric Woerth et moi. Ce matin, un premier arrêté a été publié au Journal officiel, en application d'un amendement du président de la Commission des Finances, précisant les informations que les banques devront fournir au sujet de leur activité dans les paradis fiscaux. N'est-ce pas le début de la transparence ? Par ailleurs, nous sommes déterminés à proposer, dans la loi de finances rectificative, des règles en matière de fiscalité, de prélèvements et de taxation des plus-values, ainsi que des avenants à certaines dispositions bien connues du code général des impôts, afin de taxer lourdement les activités en lien avec les paradis fiscaux.
S'il reste du chemin à faire sur le plan tant national qu'international, je me réjouis que François d'Aubert ait été nommé président du groupe d'évaluation des juridictions non coopératives du forum global de l'OCDE. Le travail de "peer review" mené par cette instance permettra de vérifier que les pays respectent leurs engagements. Une telle avancée présente un caractère historique, même s'il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. En effet, il faudra toujours rester vigilant, tant la tentation est grande pour chacun de s'affranchir peu à peu des règles qu'il s'était engagé à respecter.
Certains d'entre vous paraissent dépités que la France ait été à l'origine de telles initiatives. Je le regrette. Le 2 avril, à Londres, tout comme à Pittsburgh, notre pays était à la manoeuvre. Il a fixé les impulsions déterminantes pendant la Présidence européenne. Par ailleurs, pendant le Sommet de Londres, le président de la République a fait preuve de ténacité pour imposer l'échéance de mars 2010 et le principe des sanctions.
Quant à la question des bonus, je pense comme le président de la Commission des Finances qu'elle est moins déterminante que celle des règles de capitalisation ou l'harmonisation de l'interprétation des règles en matière de fonds propres. Elle est cependant symbolique. Il est pour le moins inattendu que les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne aient rallié la position française en acceptant d'encadrer les bonus et d'interdire les bonus garantis, le différé de 40 % à 60 % de la part de bonus variable, le paiement en actions et en instaurant le clawback, c'est-à-dire le remboursement en cas de mauvaise performance. Ces Etats ont manifesté leur volonté de mettre fin à une culture du risque, dont les abus ont conduit à la crise économique, financière, puis sociale. Il n'y a donc pas lieu de dédaigner ces avancées.
Si le Premier ministre n'a pas rappelé le rôle de M. Camdessus, contrôleur des rémunérations des opérateurs de marché, c'est que cette autorité a été instituée sur un plan national. De même, un "czar" des rémunérations américaines a été désigné en son temps par les Etats-Unis. La nomination de M. Camdessus éclaire toutefois la démarche française. Le 25 août, en effet, nous avons choisi de demander aux secteurs bancaire et financier de jouer un rôle pionnier, et de prendre le risque de l'impératif catégorique. En agissant ainsi, nous espérions que nous serions bientôt rejoints par les autres pays. Ce fut le cas en matière de bonus. Pour les paradis fiscaux, en revanche, les banques ont pris des engagements sans même attendre le Sommet de Pittsburgh.
J'en viens à un point sur lequel je ne peux partager l'avis de M. Cahuzac. J'écoute toujours M. Cahuzac, car je considère que la vérité n'est jamais uniquement d'un côté ou de l'autre. Mais on doit se garder de toute mauvaise foi. Quand nous avons créé la Société de prises de participation de l'Etat, afin de renforcer les capitaux des banques françaises, parce qu'il en allait de la santé de notre secteur financier, il ne me serait jamais venu à l'idée que l'on devait spéculer, boursicoter ou prendre des participations qui engendreraient des plus-values. L'affaire est sérieuse. Imaginez un instant que les banques aient remboursé au moment où leurs actions étaient au plus bas, la perte se serait chiffrée à 1,5 milliard. On ne peut courir un tel risque avec l'argent des Français. Il faut au contraire l'engager dans les conditions les plus raisonnables en s'assurant du point de sortie. Sur ce point, je ne peux donc pas accepter vos allégations. On ne peut parler d'une perte, par rapport à l'espérance de plus-values qu'aurait générées un placement.
Jean-François Copé a évoqué tout à l'heure à juste titre la transparence des marchés. Nous avons demandé la création d'un registre, pour que la compensation puisse être effectuée au vu de tous. La transparence est en effet la condition première pour permettre le contrôle et la supervision dans un secteur qui en a besoin. C'est la décision que je défendrai au niveau européen. Nous avons besoin, notamment dans la zone euro, de chambres de compensation permettant de traiter l'ensemble du marché des dérivés. J'espère que nous serons entendus.
M. Sandrier a souligné la nécessité de réduire l'hiatus entre la spéculation et l'économie réelle. Nous nous engageons précisément dans cette voie, sous l'impulsion du président de la République. Il faut éviter l'effet des bulles financières et limiter la finance à ce qui devrait être son rôle : financer l'économie, qu'il s'agisse des ménages ou des entreprises.
M. Perruchot a mentionné la nécessité de coordonner les superviseurs. Il est indispensable que cette coordination s'exerce au niveau européen. Je me réjouis que la Présidence française ait oeuvré pour mettre en oeuvre le rapport Larosière, qui plaide pour une bonne coordination entre les niveaux de compétence pour la Bourse, la banque et l'assurance. Les systèmes de coordination issus de cette réforme et ceux qui procéderont de celle menée actuellement aux Etats-Unis - avec un succès modéré, dû à l'importance que prend le dossier de l'assurance santé - devront également être coordonnés. Le G20, qui réunit des ministres des Finances, consacre désormais la place des pays émergents, de certains pays comme l'Espagne ou les Pays-Bas, à la participation desquels le président de la République était attaché, et la présence de M. Somabia, président de l'Organisation internationale du travail. Cette instance pourra, je l'espère, organiser la nécessaire coordination entre les superviseurs dans les domaines politiques, économiques et financiers.
En la matière, une répartition des rôles s'est opérée, aboutissant à une sorte de Yalta de la finance. D'un côté, le FMI est en situation de supervision et d'alerte sur les risques financiers du monde. Il peut aussi venir au secours des pays les plus affectés par la crise. De l'autre, le Conseil de stabilité financière, que le G20 de Londres a élargi, peut réfléchir à des règles et travailler en étroit pilotage avec le comité de Bâle II.
M. Perruchot et M. Migaud ont eu raison d'évoquer le problème des exigences en capital. Dans ce domaine, nous devons être vigilants. En matière de capital, d'interprétation des règles, de ratio ou de détermination de l'effet de levier utilisé comme ratio, les règles ne doivent pas être fixées en dehors de l'Europe, mais respecter au contraire les exigences de l'Union. On ne peut laisser un secteur géographique prévaloir sur les autres, sous prétexte qu'il a été fortement recapitalisé à l'occasion de la crise internationale, début 2009. Il ne serait pas acceptable que cette sorte d'avantage comparatif s'exerce au détriment des banques françaises et européennes. Comptez sur ma détermination à faire valoir ce point de vue.
M. Migaud a également évoqué la nécessité de rappeler le rôle des normes comptables, qui ne naissent pas sui generis, hors de toute réalité économique et politique. Au niveau tant de l'IASB, l'International Accounting Standards Board, que de la Commission européenne, elles doivent enregistrer les valeurs réelles, sans être accrochées de manière définitive à la valeur de marché. D'autres méthodes doivent en effet être utilisées lorsqu'elles sont plus appropriées.
M. Jacob m'a interrogée plus particulièrement sur l'environnement. Je note tout d'abord que c'est sous la Présidence française que l'Union européenne a fait adopter le paquet énergie-climat. C'est la seule zone du monde qui ait pris des engagements forts et concertés en matière de réduction des émissions de CO2. D'autre part, le nouveau gouvernement japonais s'est engagé à réduire lui aussi une part de ses émissions des CO2.
Enfin, le président de la République a pris conscience de la nécessité de donner une impulsion politique, pour faire aboutir le paquet énergie-climat au niveau européen. Il a donc suggéré à ses partenaires du G20 de prévoir une réunion entre chefs d'Etat et de gouvernement avant le Sommet de Copenhague, organisé sur le mode onusien, afin de faciliter l'adoption des points en débat, qui font l'objet de 2 800 formules. Espérons que cette initiative sera suivie d'effet. Le chef de l'Etat a proposé une initiative du même type pour l'OMC. Le cycle du développement de Doha, en chantier depuis sept ans, n'avance pas. Une impulsion politique forte est sans doute souhaitable.
M. Lequiller, M. Poniatowski et M. Migaud ont relevé que la grande absente du G20 est sans doute la question des déséquilibres. Deux informations sont cependant à noter. D'une part, les Chinois ont manifesté la volonté de modifier leur modèle économique et de privilégier désormais le marché intérieur, sachant que l'exportation ne peut, à elle seule, faire fonctionner le moteur de l'économie. D'autre part, le taux d'épargne des ménages américains a augmenté. Si l'on place ces éléments en regard l'un de l'autre, en espérant qu'ils soient durables, on peut souhaiter que s'atténue le déséquilibre entre les balances des paiements. C'est à mon sens un préalable à la réflexion que devra mener le G20 des années 2010 et 2011 sur les rééquilibrages monétaires.
Une initiative franco-britannique a été prise il y a quatre jours, grâce à l'aide de Dominique Strauss-Kahn. Compte tenu de l'augmentation des DTS, les droits de tirages spéciaux, intervenue au sein du FMI, la France et la Grande-Bretagne ont décidé de consacrer chacune 2 milliards de dollars de tirages spéciaux à un prêt au fonds fiduciaire du FMI. Ces sommes seront mises à la disposition des pays les plus pauvres, notamment de l'Afrique subsaharienne, pour qu'ils puissent financer leur développement et leurs infrastructures. Je ne prétendrai pas que cette réalisation concrétise la vision keynésienne dans sa forme la plus aboutie, mais il s'agit tout de même d'un nouveau mode de financement instituant le DTS comme unité monétaire.
En conclusion, la France peut être fière, nous pouvons tous être fiers de ce qui a été réalisé collectivement à Pittsburgh. La France a joué son rôle, parfois de pionnier, parfois de locomotive, mais toujours avec le souci de rétablir de la discipline, de l'ordre, des règles dans un marché qui en a besoin et qui est toujours tenté de les transgresser.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 octobre 2009