Interview de M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, à La Chaîne Info le 23 octobre 2009, sur l'abandon de la candidature de Jean Sarkozy à la présidence de l'EPAD, l'égalité salariale entre les femmes et les hommes et sa candidature aux élections régionales 2010 pour la région Aquitaine.

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C. Barbier.- J. Sarkozy renonce donc à présider l'EPAD. Regrettez-vous ce recul ?
 
Ce n'est pas un recul, il a montré hier, je trouve, beaucoup d'élégance, beaucoup de maturité, beaucoup de sang-froid, et pour ceux qui doutaient de ses capacités, je pense qu'ils ont dû un peu ravaler leurs critiques parce que on a vu là, me semble-t-il, quelqu'un qui avait beaucoup de hauteur de vue ?
 
"Campagne de manipulations et de désinformation", a-t-il dénoncé. Quelle campagne, d'où, de qui ?
 
Lorsqu'on le voyait hier soir, on pouvait constater que les critiques qui étaient faites à cet élu du peuple, étaient tout à fait injustes, puisqu'on a vu quelqu'un qui avait beaucoup de hauteur de vue, un sens extrêmement aigu de sa mission, et je trouve que sa prestation d'hier soir a montré à quel point les critiques faites étaient injustes.
 
Samedi dernier, à Mérignac, vous avez déclaré : "il y a un petit jeu de la calomnie, une déstabilisation organisée par les médias, en particulier". Vous maintenez ce diagnostic ?
 
Je maintiens qu'on traite aujourd'hui beaucoup trop d'affaires à titre personnel, ad hominem, alors que la France a d'autres sujets à envisager devant elle. Nous avons de vastes difficultés à surmonter, nous avons une crise à traverser, et qu'il y a presque toutes les semaines maintenant, une espèce de cristallisation sur telle ou telle personne, d'une manière que je trouve tout à fait excessive.
 
Souhaitez-vous que P. Devedjian soit prolongé au-delà de la limite d'âge à l'EPAD, et que dans deux ans, il passe la main à J. Sarkozy ?
 
Ce sont des questions qu'il faut poser au conseil d'administration de l'EPAD. Evidemment, je ne m'en mêlerai pas.
 
Est-ce que l'UMP n'aurait pas été plus utile au Président Sarkozy, en lui disant "attention, l'opinion réagit mal", plutôt que d'obéir mécaniquement" et de défendre J. Sarkozy comme un seul homme ?
 
Nous avons défendu J. Sarkozy parce que nous étions convaincus, et je le suis toujours, qu'une élection ça se joue dans les urnes et non pas dans les livrets de familles, et que la situation objective de cette élection répondait aux lois démocratiques.
 
C'est une cinglante défaite quand même pour N. Sarkozy !
 
Non, c'est la preuve que son fils est digne de lui.
 
"Plus on boit, plus on a soif", c'est Ovide, l'un de vos auteurs préférés, qui disait ça. Est-ce que N. Sarkozy n'a pas trop soif de pouvoir, il veut tout contrôler ?
 
Il n'en était rien. Je ne veux pas revenir sur cette affaire, il s'agissait d'un élu du peuple, un conseiller général, président de son groupe au sein d'un Conseil général, qui était proposé pour être membre d'un conseil d'administration. Et on a vu hier, je le répète, que J. Sarkozy en était tout à fait capable. Que lui reprochait-on ? Son âge ? Il y a près de 12.000 élus en France qui ont moins de 25 ans. Que lui reprochait-on ? Son nom ? Est-ce qu'il y a un délit de sale nom en politique ? Tout ceci était évidemment une campagne destinée à fragiliser le président de la République. Et J. Sarkozy, parce qu'il aime son père aussi, je crois, a décidé hier d'arrêter cette situation qui mettait tout le monde en difficulté.
 
A l'Assemblée, pendant ce temps-là, les députés UMP ont renoncé à une cotisation complémentaire de valeur ajoutée sur les PME. Ils voulaient compenser la suppression de la taxe professionnelle. Pourquoi ce cadeau au patronat au détriment des collectivités locales ?
 
Non, je crois que... d'abord, cet amendement ne sera pas retenu finalement comme vous le savez. Je crois qu'il faut rester dans l'esprit de ce qui a été souhaité au début : il faut en France alléger les charges qui pèsent sur les entreprises, et en particulier sur l'investissement des entreprises.
 
Mais ce sont les collectivités locales qui payent ?
 
Oui, mais il faut à tout prix alléger les charges sur les entreprises. Par ailleurs, il faut trouver des systèmes de compensation. Comme vous le savez, pour la première année l'Etat compensera à l'euro près ce que les collectivités auront perdu, et que sur l'année n+1 divers dispositifs qui permettront de prélever une contribution économique territoriale, à partir du foncier ou à partir de la plus-value, sera mis en place, les choses vont se discuter. Mais évidemment, les collectivités doivent retrouver des ressources.
 
Doit-on s'attendre lundi à une communication sur la hausse du chômage en septembre très négative, mauvais chiffres ?
 
Nous allons attendre lundi les chiffres du chômage, je ne peux pas parler des chiffres que je n'ai pas. Ce que nous savons tous, c'est que la France a retrouvé un peu de croissance au cours du second semestre, seules la France et l'Allemagne en Europe sont dans cette situation, mais qu'il faudra une croissance assez soutenue pour que nous commencions à recréer de l'emploi. Et donc, nous aurons un décalage, un léger décalage, entre la reprise de la croissance et le retour à l'emploi.
 
Vous vous battez pour l'égalité homme-femme dans les entreprises, notamment en matière de salaires...
 
Absolument.
 
...Autoriserez-vous la délation, c'est-à-dire que les femmes puissent dénoncer leur employeur s'il ne respecte pas la règle, s'il ne fait pas d'effort ?
 
J'autoriserai toutes les transparences. Mais rappelons surtout la situation : dans un pays comme le nôtre en France, aujourd'hui en 2009, les femmes, en moyenne, ont une rémunération de 27 % inférieure à celle des hommes pour le même métier, avec la même durée, avec les mêmes responsabilités. Est-ce que quelqu'un de raisonnable, indépendamment de la question de l'égalité homme-femme, pourrait l'accepter, cette injustice-là ? Et donc, je veux à tout prix que nous débouchions sur ce sujet, je suis tout à fait déterminé, et parmi les méthodes que nous proposons, parmi le travail que nous allons proposer, je vais réunir la commission nationale de négociation collective, et je présenterai un texte d'orientation, que nous allons ensuite discuter, ce texte d'orientation demandera une très grande transparence aux entreprises, il demandera qu'une meilleure représentation des femmes à due proportion se fasse dans les conseils d'administration, dans les divers dispositifs, dans les diverses instances représentatives, et que l'on puisse vérifier si les salaires sont équilibrés entre les hommes et les femmes. Et si les choses ne se font pas, évidemment, je créerai des dispositifs incitatifs par la loi.
 
Vous êtes ministre également de la Solidarité. Est-ce que, au nom de la solidarité, vous ne devriez pas vous opposer aux charters d'Afghans qui retournent vers Kaboul ? 44 % des Français sont contre ces charters, 36 %, pour ?
 
Ce que je sais c'est que tout ceci se fait dans un cadre légal. On peut comprendre l'émotion des gens qui voient des gens renvoyés chez eux, surtout dans un pays qui est en guerre. Mais ceci correspond à des accords internationaux et se fait dans le cadre de la légalité la plus totale.
 
"Risque de conflit d'intérêts", estime J. Arthuis, à propos du cumul par H. Proglio, de la présidence d'EDF et de celle de Veolia. C'est votre sentiment ?
 
Je ne crois pas, je crois que le nouveau président d'EDF gardera un oeil sur Veolia. Mais clairement, petit à petit, il faudra qu'il se consacre surtout à EDF.
 
Confirmez-vous officiellement ce matin que vous serez à la tête des listes UMP en Aquitaine pour les régionales de mars prochain ?
 
Mais bien entendu, je vous le confirme, c'est une campagne dans laquelle d'ailleurs j'ai déjà commencé à me lancer. Quand on fait de la politique, on le fait surtout pour les autres, on ne le fait pas seulement pour soi. Les militants sont derrière moi, nous avons un joli projet pour les Aquitains, c'est une région qui a besoin de bouger, qui a besoin de retrouver un nouveau souffle, et je suis très heureux de m'engager dans cette campagne.
 
L'Aquitaine est sur la liste des cinq régions où H. Morin veut qu'une liste Nouveau Centre soit indépendante. C'est votre souhait aussi ? Ca ferait baisser le MoDem - il pourrait être éliminé du deuxième tour - ou vous voulez une liste unique ?
 
Non, je crois qu'il faut faire des listes uniques, je l'ai déjà dit à J. Dionis du Séjour qui est tête de liste Nouveau Centre en Aquitaine. Nous allons en discuter, ce sont des amis, ils font partie de la majorité. Je crois qu'il vaut mieux que nous partions unis, d'autant qu'en face de nous, nous aurons quand même deux groupes qui vont s'opposer, deux pôles qui vont s'opposer, que ce seront les socialistes et les Verts.
 
Marie Bové justement, ville de José, ça vous impressionne de l'affronter ?
 
Pas du tout, je suis très heureux qu'on puisse parler de cette question absolument centrale qui est la question de l'environnement, du développement durable, de l'écologie. Je suis content que ce soit avec M. Bové, et je serais content si c'était avec quelqu'un d'autre. Je ne juge pas les gens à partir de...
 
C'est parce qu'elle est fille de son père qu'elle est là ?
 
Non, je vous l'ai dit tout à l'heure, l'élection ce n'est pas dans les livrets de famille que ça se décide. Je serai très content de parler de ce sujet absolument majeur que visiblement les socialistes ne traitent pas.
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 23 octobre 2009