Interview de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, à "Radio Classique" le 8 décembre 2009, sur la suppression de la taxe professionnelle, le montant de l'emprunt d'Etat, ainsi que sur le climat politique, notamment au sein de la majorité.

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Média : Radio Classique

Texte intégral

G. Durand.- Et avec C. Lagarde. Bonjour Madame. Vous êtes ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi, tout le monde le sait. On va parler évidemment d'une conjoncture qui n'est pas facile en commençant par cette menace des conflits sociaux. Est-ce qu'il faut accéder aux augmentations réclamées notamment par les routiers, à partir du moment où ils menacent de bloquer les grands centres de distribution pour les fêtes ?

La menace n'est jamais une très bonne solution pour parvenir à un accord. Je crois que mon collègue D. Bussereau est en négociation avec eux, en tout cas aide et tente de catalyser un accord. Je crois qu'il faut surtout travailler sur les termes d'un accord pour parvenir à une solution qui soit apaisée et qui ne prenne pas les Français en otages. Je crois que c'est la chose la plus importante.

Vous avez vu que ça concerne les routiers, mais ça concerne aussi les chauffeurs de taxi cet après-midi. On parle de l'IUFM, on parle de la SNCF. Est-ce que vous avez le sentiment, puisque vous connaissez bien le tissu social français, que quelque chose est peut-être en train de se dégrader ?

Vous savez, on est dans un moment qui est évidemment compliqué puisque nous sommes toujours en situation de crise. Pour autant, l'économie française a commencé à repasser en positif puisque depuis maintenant deux trimestres, l'économie est à nouveau créatrice de valeurs et destructrice d'emplois, et c'est un moment qui est évidemment difficile, difficile à comprendre d'abord, difficile à gérer pour tout le monde et où nous, nous essayons par tous les moyens de cantonner le chômage, de limiter les pertes d'emplois, et de nous orienter le plus vite possible vers une économie qui soit à nouveau créatrice d'emplois, ce qui sera évidemment le signal de la sortie de crise à tous égards, à la fois en création de valeurs, création d'emplois.

Madame Lagarde, mais sortie de crise pour quand et chiffre de croissance lequel, parce que c'est quand même ça le fond de l'affaire ?

Chiffre de croissance, on sera en 2009 toujours en négatif puisqu'on sera à moins 2,2, ce qui est, on peut s'en consoler, deux fois mieux que la moyenne de la zone euro, deux fois mieux que nos voisins Allemands, parce qu'on a subi un choc monumental en 2009 et qu'on accuse le choc. On est positif très légèrement depuis le deuxième trimestre 2009. Et je pense que le dernier trimestre 2009 le sera également, peut-être un peu mieux que les deux précédents.

Quel chiffre ?

Je ne peux pas vous le dire parce que je ne le sais pas encore, on est encore en train de créer de la valeur aujourd'hui.

Mais une estimation ?

Non, on n'a pas de chiffre. Les différents indices que j'ai ici ou là sur la base de la production industrielle, sur la base de l'indice de confiance des entreprises, sur la base de la consommation, me laissent penser que ça sera un peu mieux que le deuxième et le troisième trimestre. Mais, on est en sortie de crise, d'abord très douce, avec des retombées ici ou là, notamment dans le domaine des inscriptions comme demandeurs d'emploi de Français qui perdent leur emploi. Pour autant, on a stabilisé le chômage. Donc, tout ça est assez... nous incite à beaucoup, beaucoup d'attention à tous les signaux parce que on n'est pas sorti de la crise, parce qu'il faut que l'économie se remette à créer de l'emploi, parce qu'il y a un certain nombre de petites et moyennes entreprises qui sont en difficulté aujourd'hui et que nous ce qu'on essaie de faire par tous les moyens c'est de les soutenir, de leur tenir la tête hors de l'eau, même en termes de trésorerie pour un certain nombre d'entre elles, et d'amener les entreprises vers de la création d'emplois.

Mais, Madame Lagarde, récemment on a vu qu'aux Etats-Unis, il y avait des recréations d'emplois qui étaient relativement massives. On sait qu'en France on est protégés par les systèmes sociaux justement quand la crise s'est déclenchée, mais est-ce que ce n'est pas le système français qui va empêcher justement plus facilement au redémarrage ?

Non, ça je crois pas ! D'abord, regardons les choses en face. Aujourd'hui, les Etats-Unis sont à peu près 10 % de chômage officiel. Nous, en France, on a réussi à stabiliser à 9,1 %. Donc, pour la première fois, c'est totalement différent de ce qu'on a toujours eu, pour la première fois les pays européens sont à un taux de chômage inférieur au taux de chômage américain. Donc, les Etats-Unis subissent la crise de manière beaucoup plus difficile.

Beaucoup plus violente, beaucoup plus franche.

Et beaucoup plus violente qu'en Europe.

Mais ils repartent plus vite, semble-t-il.

Bon, d'abord, écoutez, ils sont pas encore repartis, il y a eu un trimestre bon, et tant mieux parce qu'on est dans un rapport très étroit avec les Etats-Unis, quand les Etats-Unis repartent ça donne une impulsion dans le reste du monde, mais c'est un pays qui est encore sous tension, sous pression, et en situation de crise économique. Vous savez, nos stabilisateurs sociaux c'est quoi ? C'est le régime d'Assurance chômage, ce sont les régimes de santé, ça amortit les crises, bien entendu. Donc, on subit moins violemment la crise, on repartira aussi, on repartira peut-être moins brutalement et je pense qu'on aura eu le mérite de proposer un certain nombre de mesures qui sont imitées. Je vous donne un exemple : on est en ce moment en train de vivre un moment absolument fascinant parce qu'il y a des rééquilibrages qui se font. Deux exemples : la prime à la casse dont on a dit, « oh là, là, il ne faut pas faire une chose pareille, c'est très très mauvais pour cette espèce de relance, ça sera sans effet ». Tous les pays du monde pratiquement l'ont adoptée : les Etats-Unis, l'Allemagne, la Grande- Bretagne, etc. Deuxième institution, qu'on a lancée un petit peu à l'aveuglette et dont le président de la république a eu l'inspiration : le Médiateur du crédit ; l'Allemagne vient de mettre en place un médiateur du crédit. Donc, on s'aperçoit que les modèles qui rentraient dans des boîtes, dont on disait que l'un était le modèle continental européen avec amortisseurs sociaux et l'autre était le modèle libéral, violent et brutal, on voit un certain nombre de nos idées, de nos propositions, séduire d'autres pays, y compris les Etats-Unis.

Alors, beaucoup de questions importantes concernant justement l'actualité. D'abord, la taxe professionnelle qui est passée au Sénat. Ça été un combat dur parce qu'une partie des sénateurs, emmenés par J.-P. Raffarin, étaient extrêmement critiques. D'ailleurs, ils le restent. Ce qui a été voté c'est quoi exactement ? C'est un passage définitif qui va aboutir à un vote définitif ou il y a encore une surveillance prévue ?

C'est d'abord un grand pas en avant puisque pour la première fois depuis trente ans, on supprime un impôt dont tout le de monde a dit que c'était un impôt imbécile, y compris le président de la République F. Mitterrand en son temps, parce que c'était un impôt qui taxait les entreprises...

... ça s'est passé dans la nuit de samedi à dimanche.

Oui, ça été un combat de week-end et de nuit, vous avez raison. On avait un impôt qui taxait les investissements, c'est-à-dire que dès qu'une entreprise investissait, qu'elle utilise la machine dans laquelle elle investissait ou pas, elle payait de l'impôt. Donc, comme encouragement à l'investissement du secteur privé, on ne pouvait pas trouver mieux. On a donc supprimé cette taxe professionnelle qui était assise sur l'investissement productif. Pourquoi ? Pas pour le plaisir, parce qu'on a besoin aujourd'hui que les entreprises françaises investissent et on a besoin d'une politique industrielle qui soit fondée sur un secteur industriel fort. Et on la remplace par ce qu'on appelle une cotisation sur la valeur ajoutée qui est beaucoup plus faible puisque les entreprises en solde net vont y gagner à peu près 11 milliards d'euros sur 2010 par des effets successifs de mesures anciennes, et en rythme constant à peu près 4,3 milliards d'allègements de charges sur investissement.

Et est-ce que ça va augmenter ou faciliter la reprise, parce que c'est ça la grande question qui est aussi posée, qui a été posée dans le débat la nuit dernière ?

Bien sûr, bien sûr !

Enfin, il y a deux jours.

Moi, je n'ai pas de garantie absolue. En revanche, ce dont je suis certaine c'est que taxer l'investissement ce n'est certainement pas l'encourager. Et aujourd'hui, on a besoin que l'investissement du secteur privé prenne le relais de l'investissement public qui a alimenté la relance. Donc, il faut qu'on fasse tout ce qu'on peut pour encourager les entreprises à investir dans l'appareil productif français. C'est aussi toute l'idée du grand emprunt, vous savez, de la grande stratégie d'investissement pour la France.

Voyage du Président de la République en Alsace, qui va en parler. Tout à fait ! Décision attendue la semaine prochaine.

Tout à fait ! Mais pourquoi ? Parce que on a peu investi pour l'avenir dans notre pays, qu'il s'agisse du secteur public ou du secteur privé. Et on a besoin, si on veut jouer la carte France dans un moment où les échanges continueront de manière intensive, on a besoin de jouer la carte de l'innovation, de la recherche et du développement, et cela ça ne pourra se faire que si on investit.

On reste sur le même chiffre, 35 milliards, pour le grand emprunt, parce que ça sera l'arbitrage définitif, le chiffre définitif donné par le Président ?

Ca, je ne sais pas, mais je voudrais juste revenir un instant sur la taxe professionnelle parce que, vous savez, c'est quand même un moment important, où d'un côté on allège la charge sur l'investissement productif, de l'autre on dit : attention, il va falloir penser au carbone et à notre intensité carbone, et on introduit une taxe carbone, et puis au passage on dit aux collectivités territoriales « ne vous faites pas de souci, vos finances seront respectées, non seulement elles seront respectées mais elles vont être garanties dans la durée ».

Mais ils ont mis une condition, ils vous demande un rapport, ils demandent au Gouvernement qu'un rapport soit fait sur justement la façon dont les finances seront perpétuées pour les collectivités territoriales, sinon pas de vote définitif, en gros.

D'abord, c'est dans le projet de loi de finances, donc ça sera...

... il faut que le rapport arrive en juin, et à ce moment-là, si le rapport est satisfaisant, ils voteront en juillet.

Voilà ! C'est ce qu'on appelle une clause de revoyure, c'est-à-dire que la loi va bien être votée dans le projet de loi de finances, puis déférée à toutes les instances appropriées, et puis elle entrera en vigueur. On se revoit au mois de juin pour examiner si la façon dont la répartition a été faite entre les collectivités territoriales, les communes, les conseils généraux, les conseils régionaux, est bonne, si on ne s'est pas trompés et si on a bien mis les curseurs là où il fallait. Si on s'est trompés, on pourra revoir, bien sûr. C'est un peu ce que Monsieur Raffarin a appelé la période probatoire. Il n'en demeure pas moins que la loi va être votée et sera applicable à compter du début de l'année 2010 et qu'on pourra se donner la chance de revoir, de réexaminer, ce qui me paraît une bonne idée. Il y a eu un travail énorme, vous savez, parce que c'est un impôt qui...

... mais qui a été extraordinairement critiquée.

... très critiquée.

... non seulement par la gauche mais par la majorité.

Absolument ! Très critiquée...

...donc, c'est un ouf de soulagement.

Très compliquée, et qui a nécessité un travail itératif énorme, avec les commission des finances, en particulier. Je dois dire qu'elles ont été extrêmement productives.

C. Lagarde, les chiffres sont donnés depuis plusieurs jours : surendettement croissant des Français, non seulement en nombre de couples ou de familles qui sont endettés mais aussi sur le niveau de l'endettement qui est supérieur à 40 000 euros. Est-ce que tout ça vous inquiète ?

Là, vous parlez du surendettement et c'est un point qui non seulement m'inquiète mais m'inquiète depuis un certain temps. C'est pour ça que depuis le mois de juillet, je travaille à un projet de loi qui viendra devant l'Assemblée nationale au tout début du mois de janvier, qui va d'une part encadrer le crédit à la consommation, et d'autre part mieux organiser la situation du surendettement, et en particulier permettre aux familles surendettées qui réorganisent leur situation, tiennent leurs engagements de remboursement, de s'en sortir plus vite et en particulier de redémarrer avec un espèce de bilan ramené à zéro. Mais, moi ce qui m'importe aujourd'hui c'est de lutter...

... mais c'est le signe que ça donne.

... contre un crédit à la consommation fou, mal encadré, qui incite à la consommation sans tenir compte de la situation des ménages.

Mais ça veut dire aussi, Madame Lagarde, que dans la situation d'aujourd'hui, il y a quand même un contexte social qui est extrêmement fragile. On parlait des conflits sociaux, là on parle de surendettement, on pourrait donner le nombre de SDF qui sont morts depuis le début de l'année, enfin il y a quand même dans la France qui ne triomphe pas, dans la France qui n'a pas d'argent, une souffrance considérable. Je ne parle même pas des chiffres du chômage qui sont quand même là aussi très inquiétants.

On est dans une situation de crise économique, c'est évident, et il y a des situations de souffrance et il y a des ménages qui se trouvent en grande difficulté et c'est bien pour ça que, un, nous essayons de lutter le plus possible contre le chômage et de maintenir en emploi ceux de salariés qui sont actuellement en emploi. Vous savez, si on a pris des mesures pour allonger le chômage partiel, pour augmenter les indemnisations, si on a incité les entreprises à créer de l'emploi en mettant un système de zéro charge pour les entreprises de moins de dix salariés, qui a permis la création au titre de l'année 2009 de 600 000 nouveaux emplois, c'est précisément pour ça parce qu'on sait très bien qu'en face des problèmes de pouvoir d'achat, des problèmes de surendettement, des difficultés rencontrées par les ménages, c'est la solution de l'emploi qui est la seule réponse.

Et RTL, 7 h 51, H. de Charette explique pourquoi il quitte l'UMP. On l'écoute.

H. de Charrette (extrait interview à RTL). : L'UMP n'est pas à mes yeux devenu le grand parti de la Droite et du Centre. Je constate que l'UDF, aujourd'hui, manque cruellement à la vie politique, et je crois que c'est une explication, en tout cas une des explications fortes du malaise politique qui existe actuellement dans la majorité. Et je pense que, pour les prochaines échéances politiques, reconstituer l'UDF - naturellement l'UDF d'aujourd'hui, l'UDF nouvelle - c'est une priorité.

Voilà. H. de Charette c'est évidemment un épiphénomène mais estce que vous n'avez pas le sentiment que les deux ans et demi de sarkozysme actuellement - c'est H. de Charette qui emploie ce mot - il y a une sorte de malaise ; est-ce qu'il faut que le Président parle, il y a des conseillers qui quittent l'Elysée, on parle d'E. Mignon... Qu'est-ce qui se passe exactement de votre point de vue ?

Ecoutez, qu'H. de Charette ait envie de reconstituer l'UDF, comme le suggère déjà d'ailleurs mon collègue Morin, c'est très bien, pourquoi pas ?

Mais il parle de malaise.

C'est un sigle qui existe, qui a une histoire, et dans lequel il se retrouvera mieux.

Non mais, il parle de malaise dans la majorité.

Moi, je vais vous dire...

... est-ce qu'il y a un malaise dans l'équipe Sarkozy ? Question claire !

Moi, je ne l'ai pas vécu, je ne l'ai pas rencontré le malaise. Ce qui est évident c'est qu'on mène un rythme de réformes très accéléré, que deuxièmement on a été obligés de continuer à relancer l'économie et que ça ça nécessite de l'action et de l'énergie en permanence. Donc, c'est dur de tenir, c'est normal, mais c'est pour le pays qu'il faut le faire. Et il faut impérativement qu'on continue. Pour moi, j'ai trois R, voilà, c'est pas très compliqué : c'est relance parce qu'on doit continuer à relancer l'économie ; c'est 2, réformes parce qu'on peut ne pas s'arrêter en bon chemin et qu'il faut que le pays se réforme et soit plus agile, plus flexible, plus incitatif, qu'il donne envie aux jeunes de rester chez nous, d'innover et de créer des entreprises ; et 3e, il faut qu'on arrive à restaurer nos finances publiques parce que à terme on doit pas laisser un poids de dettes important aux générations futures, de même qu'on doit leur laisser une planète un peu plus propre, voilà.

Et est-ce qu'on a, justement, à propos de planète un peu plus propre, réfléchi à ce que pourrait coûter à la France un accord éventuel signé à Copenhague, et est-ce que Copenhague ça sera d'abord et avant tout une déclaration ou un accord réel ? Cela va nous coûter combien cette aventure ?

La plupart des experts s'accordent pour considérer qu'il y aura dans le meilleur des cas un bon accord politique solide, avec des engagements de tout le monde. Il n'y aura pas un traité international avec une force obligatoire, un peu type traité protocole de Kyoto qui a dû être ratifié laborieusement pour devenir applicable.

Mais alors, ce sera des mots !

Mais ça sera déjà pas mal ...

... ben, si ce ne sont que des mots !

...parce que si vous avez la Chine et les Etats-Unis qui déclarent officiellement à la face du monde que pour les uns ils vont avoir une croissance moins carbonée, et que pour les autres ils vont diminuer leurs émissions de CO² dans des proportions sérieuses, ça sera déjà quelque chose d'important. Si, troisièmement, on arrive à trouver un accord pour bien mesurer les contributions des uns et des autres dans des termes comparables, parce qu'aujourd'hui on parle de carottes et de choux, les Européens font de très gros efforts en se basant par rapport à une année 1997, les Européens se basent référence 2005, donc ça entraîne un certain nombre de difficultés. Mais, si on arrive à avoir des accords forts des grands pollueurs de la planète, plus un engagement des pays les plus développés vis-à-vis des pays les moins développés pour les aider à passer à des économies différentes, je crois qu'on aura fait un grand pas en avant qui sera en plus source de croissance, parce que ça aura un coût mais ça aura aussi un retour sur investissement. Parce que quand vous changez de modèle de croissance, ça été historiquement vrai dans toutes les grandes évolutions, vous avez un coût initial et puis vous avez ensuite un retour sur investissement. Passer à une croissance décarbonée à une croissance plus durable, ça nécessitera des investissements, ça nécessitera, certes, de l'argent, mais ça voudra dire aussi du retour derrière.

Deux petites questions extrêmement précises et simples. Est-ce que les 800 000 euros de Domenech ça choque la ministre de l'Economie qui est chargée d'expliquer la crise tous les jours aux Français ? Je sais bien que ce n'est pas de votre ressort, mais est-ce que vous êtes moralement choquée ?

Non, vous savez, j'ai commis quelques commentaires...

... vous vouliez rejouer le match.

Non, je suggérais vivement que les règles soient réexaminées pour permettre dans un tel cas de figure de rejouer le match, oui, ça c'est vrai. Mais vous savez, moi, je viens d'un monde sportif amateur...

... mais est-ce que ça vous choque ?

... où on mouillait la chemise et on engageait ses propres sous pour payer les maillots.

Donc, ça vous choque !

Oui, je crois que trop d'argent dans le sport c'est pas une bonne chose.

Une dernière question : est-ce que vous serez Premier ministre, est-ce que vous le souhaitez ?

Mais non, je suis très, très bien là où je suis, j'ai beaucoup à faire.

On dit toujours ça ! Tous ceux qui sont devenus Premier ministre disent toujours... et c'est toujours très bien...

...oui, mais, écoutez, c'est bien que je vous dise que je suis bien où je suis plutôt que je suis très, très mal et j'ai envie de m'en aller.

Mais est-ce que ça vous intéresse ?

Pas du tout !

On l'écrit.

Ecoutez, si ça fait vendre du papier, tant mieux pour la presse parce qu'elle en a besoin.

Mais est-ce que ça vous fait plaisir qu'on l'écrive ?

Ca fait plutôt plaisir qu'on vous dise « vous faites du bon travail, et on est plutôt contents de ce qui se passe en ce moment », plutôt que « il vaudrait mieux la voir prendre la porte ».

Merci C. Lagarde d'avoir été l'invitée de Radio Classique ce matin.

Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 15 décembre 2009