Texte intégral
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Directeur Général,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Un mot tout d'abord pour vous présenter tous mes voeux de bonheur à la fois personnel et professionnel à l'occasion de cette nouvelle année. Une année 2010 qui ne pouvait pas mieux commencer pour vous puisqu'elle débute par une « première mondiale », à savoir l'inauguration de l'un des tout premiers démonstrateurs intégrés de captage et stockage de CO2 (CSC).
Je voudrais particulièrement féliciter et remercier les ingénieurs, les techniciens, les ouvriers ainsi que l'ensemble des équipes techniques qui ont travaillé sur ce projet révolutionnaire.
Jean-Louis BORLOO qui est actuellement retenu dans le cadre du lancement de l'année de la biodiversité, m'a chargée de vous faire part de sa fierté pour Lacq, pour le département des Pyrénées-Atlantiques et pour toute la région Aquitaine. Dans quelques temps, Lacq sera un site connu et reconnu dans le monde entier et fera sans doute école. Au fond, ce que certains considéraient au départ comme un pari un peu fou, est en passe de devenir, un pari réussi, voire un pari gagnant pour l'avenir de notre pays et je tiens cher M. de Margerie, à travers vous, à en féliciter la société Total, fleuron de notre industrie.
Bien entendu, ce n'est pas à vous que je vais expliquer que notre avenir à tous passe nécessairement par la sobriété en carbone. Ainsi, depuis maintenant plus de deux ans, notre pays se prépare à cette échéance, en investissant massivement dans un nouveau modèle de croissance - la croissance verte- fondée sur la sobriété en carbone et en énergie. Il s'agit à la fois de répondre à des urgences présentes très fortes- je pense par exemple à la précarité énergétique - tout en dotant notre pays des infrastructures dont il aura besoin dans les cinq ou dix années à venir.
Il s'agit tout d'abord d'une question morale, presque éthique quand on sait que de nombreux pays souffrent déjà des conséquences du changement climatique, conséquences qui sont, ne l'oublions pas, le prix de notre confort et de notre prospérité économique.
Mais il s'agit également d'une question économique, dans la mesure où nous ne sommes pas les seuls au monde à avoir fait le pari de la croissance verte. Je sais que les préjugés ont la vie dure mais il faut voir ce que font en ce moment même, les Chinois, les Indiens, les Brésiliens, pour se convaincre que la bataille de la croissance verte se prépare dès aujourd'hui, dans nos laboratoires, dans nos usines, dans nos centres de recherche, dans nos écoles et nos universités !
Dans ce contexte, le captage et le stockage du carbone constituent un enjeu absolument majeur. Et pas seulement pour notre pays. Comme vous le savez, pour le Groupement international des experts sur le climat (GIEC) et l'Agence internationale de l'énergie (AIE), cette technologie pourrait contribuer à hauteur de 20% à la réduction des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) d'ici 2050. Ainsi, sans le CSC, diviser par deux de nos émissions de GES d'ici 2050, coûterait environ 70% de plus, ce qui aurait sans doute pour effet de décourager ou de ralentir les initiatives.
Donc, même si le CSC n'est pas « la » solution miracle à tous nos problèmes - la priorité absolue du Grenelle Environnement reste la recherche de l'efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables - il n'en constitue pas moins une réponse importante aux enjeux de la lutte contre le changement climatique, une technologie sur laquelle nous ne pouvons pas raisonnablement décider de faire l'impasse.
Et puis, ne nous voilons pas la face : il s'agit aussi d'un marché potentiel considérable pour notre pays, avec à la clef, des emplois, de l'activité, de la valeur ajoutée et de la croissance. Ainsi, d'après les hypothèses communément admises, le marché potentiel pourrait s'élever à environ 600 milliards d'euros à l'horizon 2030, essentiellement en raison de la forte demande issue des grands pays émergents.
Nous nous situons donc aujourd'hui à la croisée des chemins, d'autant plus que nous avons tout pour réussir à savoir :
- Une longue tradition d'excellence dans deux filières clefs : l'énergie et le sous-sol.
- Des établissements de recherche à la pointe de la technologie : le BRGM, l'IFP, l'école des Mines de Paris,...
- Des entreprises expertes en génie géologique comme Total ou Technip,...
- Des acteurs industriels majeurs : je pense à EDF, à Veolia, Air Liquide ou à Alstom...
Et puis, grâce au Grenelle Environnement, nous disposerons bientôt d'un cadre financier et règlementaire satisfaisant :
- C'est la mise en place du fonds démonstrateur de l'ADEME doté de 450 millions d'euros et qui finance déjà des projets sur le CSC.
- C'est l'élaboration d'un cadre juridique adapté dans le projet de loi Grenelle II. Je rappelle que le texte a déjà été examiné en première lecture au Sénat et qu'il devrait être adopté au cours du premier semestre 2010 par l'Assemblée Nationale.
Dans le même temps, les choses se mettent également en place au niveau communautaire. Ainsi, le Paquet Energie Climat adopté sous Présidence Française contient de nombreuses dispositions en faveur du CSC :
- C'est la mise en place de fonds supplémentaires dans le cadre du Programme cadre de recherche et développement (PCRD) de l'Union européenne.
- C'est la création d'un fonds doté de 300 millions de quotas de CO2, soit d'environ 9 milliards d'euros, dont le but sera de financer 12 démonstrateurs d'échelle industrielle.
- Inutile de vous dire que nous allons nous battre avec Jean-Louis BORLOO, pour que des projets français soient retenus.
- Enfin, c'est une directive permettant de règlementer de façon claire et harmonisée sur le territoire européen, le stockage géologique du CO2...
Bref, en moins de deux ans, nous avons posé les bases d'une filière industrielle totalement nouvelle. Je précise d'ailleurs que le CSC fait partie des 18 filières prioritaires identifiées par le Commissariat Général au Développement durable dont le but est de favoriser l'émergence de champions nationaux de dimension internationale.
Mais avant cela, et pour en revenir au sujet qui nous réunit aujourd'hui, il nous reste encore trois verrous à lever, ou trois conditions à remplir, avant de pouvoir passer à une phase véritablement industrielle :
1/ La première condition, c'est celle de la viabilité économique : pour être rentable, le CSC a besoin d'un marché du carbone fiable, structuré et efficace. Je ne vous cache pas que ce n'est pas encore le cas au niveau international : nous ne sortons pas de Copenhague avec un prix du carbone au niveau mondial. Mais au niveau européen nous sommes bien en phase, avec une directive « quotas » extrêmement claire, et une généralisation de la mise aux enchères des quotas à partir de 2013.
2/ La deuxième condition, c'est celle de la sécurité : nous sommes face à un procédé totalement nouveau, ce qui nous oblige collectivement, à faire preuve d'une vigilance absolue.
Je voudrais préciser, à cette occasion, que les sites de stockage de CO2 sont évidemment sélectionnés sur des critères très stricts de sécurité.
De plus, les projets de stockage font l'objet d'expertises extrêmement approfondies et sont encadrés, comme c'est le cas à Lacq, par des programmes de surveillance et de prévention des risques, sous le contrôle de l'inspection des installations classées.
J'ajoute enfin que nous avons demandé à Total de faire en sorte que le stockage du CO2 soit réversible de façon à ne pas hypothéquer l'avenir : même s'il s'agit d'une mesure extrême, je crois que c'est aussi ça, le principe de précaution.
3/ Et puis, la troisième condition, qui est en partie liée à la précédente, c'est celle de l'acceptabilité : nous devons mener, sur chaque projet, la concertation la plus large possible.
L'acceptabilité, ça ne se décide pas d'en haut, ça ne décrète pas, ça se gagne : ça se gagne par la confiance, par la transparence, par la discussion et par la pédagogie. On ne fera jamais rien de bon et surtout de durable, sans le soutien des populations locales.
Je sais que pour le projet de Lacq, une commission locale d'information et de suivi a été mise en place dès 2008, c'est-à-dire avant même la mise en service du projet.
Que cette commission, regroupant des élus, des associations, des représentants des salariés, les services de l'Etat et Total, s'est réunie à sept reprises et que ses comptes-rendus ont été régulièrement mis en ligne sur le site Internet de la Préfecture.
Je voudrais donc remercier toutes celles et tous ceux qui ont participé à cette commission afin d'essayer de rapprocher les points de vue et de trouver des solutions acceptables par tous.
En tout état de cause, lorsque le Grenelle II sera définitivement adopté, les règles seront claires : une concertation locale forte, un régime spécial d'autorisation, un contrôle très strict de l'Etat, une surveillance quotidienne de l'environnement et des garanties financières solides pour les exploitants de tels dispositifs.
C'est à ce prix que nous pourrons enfin développer une filière compétitive, de surcroit créatrice d'emplois et dont nous serons fiers.
Voilà ce que je voulais vous dire à l'occasion de cette inauguration. Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter à tous une très bonne continuation et surtout beaucoup de réussite.
Je vous remercie.Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 12 janvier 2010