Entretien de M. Pierre Lellouche, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, avec l'AFP le 4 février 2010, sur les relations franco-allemandes.

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Q - Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont approuvé 80 projets communs, mais ce paquet de mesures n'est-il pas en retrait par rapport aux attentes - idée d'un ministre franco-allemand notamment - et suffira-t-il à assurer une vraie coordination entre gouvernements ?
R - La philosophie générale, ce sont beaucoup de projets concrets. On a travaillé très solidement sur la totalité de la palette de nos relations et des problèmes posés à l'Europe pour essayer de voir comment mettre notre force commune au service de l'Europe dans la mondialisation.
L'idée d'un ministre franco-allemand n'avait jamais été déposée sur la table officiellement. Il y avait là un problème de nationalité et de légitimité politique. On a préféré s'orienter vers une solution beaucoup plus pragmatique. Ce sera la première fois qu'un gouvernement d'un Etat souverain sera ouvert à la présence sur invitation du ministre des Affaires européennes de l'autre, et, le cas échéant, d'un autre ministre sur un sujet d'intérêt commun.
Q - Est-on plus près d'une approche commune franco-allemande sur le front économique et industriel, qui a si longtemps manqué ?
R -L'idée maîtresse est celle de coordination et de propositions communes pour la stratégie commune européenne de sortie de crise et d'emploi. Travailler à une stratégie industrielle commune est nouveau. Cela met le doigt sur le risque majeur que court l'Europe, celui de son déclassement industriel.
Un comité des sages commun est ainsi prévu. L'idée est une sorte d'observatoire des analystes, des économistes pour veiller à la convergence. C'est important qu'à côté de l'action des gouvernements, il y ait une sorte de tour de contrôle extérieure.
Q - La France et l'Allemagne ne s'impatientent-elles pas face au manque de visibilité des nouvelles institutions européennes ?
R - On surveille ensemble cette période de rodage. On a une conscience aiguë côté français du moment de l'Histoire dans lequel nous sommes. L'Europe s'assume ou ne s'assume pas. Depuis les élections européennes, on n'arrête pas d'installer les nouvelles institutions, c'est très lourd, une gestation de neuf mois ! Et, dans cette phase le monde ne s'arrête pas: la Chine, Copenhague, Haïti, les Etats-Unis, autant de défis quotidiens à une Europe qui n'est toujours pas complètement en place. La moitié de mon temps est consacré à l'installation des nouvelles structures européennes. Le monde ne nous attend pas, d'où l'impression de vide. Ajoutée à cela, la complexité des nouvelles institutions. Là-dedans le couple franco-allemand comme force d'impulsion est encore plus important.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 février 2010