Texte intégral
Q - Pourquoi s'attaquer maintenant à la question des tarifs bancaires ?
R - Nous avons déjà beaucoup travaillé depuis 2007 sur cette question, qui est un symbole fort de la relation entre les banques et leurs clients personnes physiques. Nous avons imposé un plafonnement des incidents de paiement, nous avons mis en place le mécanisme du relevé des frais bancaires annuels, que les particuliers ont reçu pour la première fois en janvier 2009, puis une nouvelle fois en janvier 2010. C'est donc un sujet que l'on suit de près. Mais, pendant cette crise, nous nous sommes aperçus que des pans entiers revenaient sous les projecteurs, que des consommateurs nous faisaient remonter de nombreuses préoccupations. L'étude de la Commission européenne, dans laquelle les banques françaises semblent mal placées, a naturellement servi d'aiguillon. Le Premier ministre m'a demandé de faire des propositions en la matière.
(...)
Q - Les futures normes prudentielles préparées par le Comité de Bâle inquiètent les banquiers. Pensez-vous qu'elles pourraient menacer le financement de l'économie ?
R - Je comprends les régulateurs du Comité de Bâle qui souhaitent éviter qu'une pareille crise ne se reproduise. Mais leurs recommandations en matière de liquidité et de fonds propres sont très sévères et, cumulées, risquent de menacer sérieusement le financement de l'économie. Nous ne voulons pas qu'en soignant le malade, on le tue et qu'on l'empêche ainsi de faire son métier de prêteur. Les banques françaises font un intense travail de lobbying sur le sujet, mais cette préoccupation est plus largement partagée dans l'Union. Nous sommes conscients du problème et c'est pourquoi les ministres des Finances européens ont demandé au Conseil de stabilité financière et au Comité de Bâle que soit menée une étude d'impact global, et non-thème par thème, pour évaluer les conséquences macroéconomiques de ces recommandations. Ainsi, nous pourrons éventuellement rectifier le tir d'ici à juin avant de transposer ces nouvelles normes dans la directive européenne. Tout l'enjeu est de parvenir à un dosage satisfaisant entre le renforcement nécessaire des liquidités et des fonds propres des banques et le financement de l'économie.
Q - Pensez-vous toujours possible une réforme financière internationale ? On a l'impression que les Etats-Unis et l'Europe s'éloignent de plus en plus...
R - Tim Geithner, le secrétaire au Trésor américain, a répété plusieurs fois que les Etats-Unis appliqueraient Bâle 2 modifié d'ici à fin 2011. Mais on ne voit, c'est vrai, pour l'heure guère de signe d'une préparation des banques américaines à ce changement de normes. Je retourne aux Etats-Unis à la fin du mois et je reposerai très directement la question à mes interlocuteurs. S'il s'avérait que les Américains tardent à entrer dans ce processus, la France, qui présidera le G20 en 2011, n'hésitera pas à remettre le chantier sur la table. Nous serons très attentifs à ce que les engagements pris par les Américains au G20 de Pittsburgh en septembre dernier soient appliqués. Nous n'imaginons pas un autre scénario pour l'instant.
Q - Les Etats-Unis se sont attaqués dans leur projet de réforme financière à la question du "too big to fail". Pourrait-il en être de même en France ?
R - Tout l'enjeu est d'avoir une régulation de qualité - elle l'est, incontestablement, en France, et en sortira renforcée avec la mise en place de la nouvelle autorité de contrôle prudentiel que j'ai installée le 9 mars dernier - et des fonds propres suffisants et de qualité. Nous sommes sur le bon chemin.
Q - Une taxe bancaire globale vous paraît-elle plus pertinente ?
R - C'est une notion intéressante qui peut prendre plusieurs formes. Le Fonds monétaire international (FMI) travaille sur un projet qui devrait être dévoilé fin avril ; Gordon Brown, le Premier ministre britannique, se penche aussi sur la question ; ainsi que la Commission européenne. Je pense que nous allons plutôt converger vers l'analyse du FMI, qui s'oriente soit vers la création d'un fonds affecté, une sorte d'assurance en cas de nouvelle crise, soit vers une affectation budgétaire destinée à prendre en compte le risque systémique. Personnellement, je penche pour cette seconde solution car la première ne me semble pas un bon rempart contre l'aléa moral.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 mars 2010
R - Nous avons déjà beaucoup travaillé depuis 2007 sur cette question, qui est un symbole fort de la relation entre les banques et leurs clients personnes physiques. Nous avons imposé un plafonnement des incidents de paiement, nous avons mis en place le mécanisme du relevé des frais bancaires annuels, que les particuliers ont reçu pour la première fois en janvier 2009, puis une nouvelle fois en janvier 2010. C'est donc un sujet que l'on suit de près. Mais, pendant cette crise, nous nous sommes aperçus que des pans entiers revenaient sous les projecteurs, que des consommateurs nous faisaient remonter de nombreuses préoccupations. L'étude de la Commission européenne, dans laquelle les banques françaises semblent mal placées, a naturellement servi d'aiguillon. Le Premier ministre m'a demandé de faire des propositions en la matière.
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Q - Les futures normes prudentielles préparées par le Comité de Bâle inquiètent les banquiers. Pensez-vous qu'elles pourraient menacer le financement de l'économie ?
R - Je comprends les régulateurs du Comité de Bâle qui souhaitent éviter qu'une pareille crise ne se reproduise. Mais leurs recommandations en matière de liquidité et de fonds propres sont très sévères et, cumulées, risquent de menacer sérieusement le financement de l'économie. Nous ne voulons pas qu'en soignant le malade, on le tue et qu'on l'empêche ainsi de faire son métier de prêteur. Les banques françaises font un intense travail de lobbying sur le sujet, mais cette préoccupation est plus largement partagée dans l'Union. Nous sommes conscients du problème et c'est pourquoi les ministres des Finances européens ont demandé au Conseil de stabilité financière et au Comité de Bâle que soit menée une étude d'impact global, et non-thème par thème, pour évaluer les conséquences macroéconomiques de ces recommandations. Ainsi, nous pourrons éventuellement rectifier le tir d'ici à juin avant de transposer ces nouvelles normes dans la directive européenne. Tout l'enjeu est de parvenir à un dosage satisfaisant entre le renforcement nécessaire des liquidités et des fonds propres des banques et le financement de l'économie.
Q - Pensez-vous toujours possible une réforme financière internationale ? On a l'impression que les Etats-Unis et l'Europe s'éloignent de plus en plus...
R - Tim Geithner, le secrétaire au Trésor américain, a répété plusieurs fois que les Etats-Unis appliqueraient Bâle 2 modifié d'ici à fin 2011. Mais on ne voit, c'est vrai, pour l'heure guère de signe d'une préparation des banques américaines à ce changement de normes. Je retourne aux Etats-Unis à la fin du mois et je reposerai très directement la question à mes interlocuteurs. S'il s'avérait que les Américains tardent à entrer dans ce processus, la France, qui présidera le G20 en 2011, n'hésitera pas à remettre le chantier sur la table. Nous serons très attentifs à ce que les engagements pris par les Américains au G20 de Pittsburgh en septembre dernier soient appliqués. Nous n'imaginons pas un autre scénario pour l'instant.
Q - Les Etats-Unis se sont attaqués dans leur projet de réforme financière à la question du "too big to fail". Pourrait-il en être de même en France ?
R - Tout l'enjeu est d'avoir une régulation de qualité - elle l'est, incontestablement, en France, et en sortira renforcée avec la mise en place de la nouvelle autorité de contrôle prudentiel que j'ai installée le 9 mars dernier - et des fonds propres suffisants et de qualité. Nous sommes sur le bon chemin.
Q - Une taxe bancaire globale vous paraît-elle plus pertinente ?
R - C'est une notion intéressante qui peut prendre plusieurs formes. Le Fonds monétaire international (FMI) travaille sur un projet qui devrait être dévoilé fin avril ; Gordon Brown, le Premier ministre britannique, se penche aussi sur la question ; ainsi que la Commission européenne. Je pense que nous allons plutôt converger vers l'analyse du FMI, qui s'oriente soit vers la création d'un fonds affecté, une sorte d'assurance en cas de nouvelle crise, soit vers une affectation budgétaire destinée à prendre en compte le risque systémique. Personnellement, je penche pour cette seconde solution car la première ne me semble pas un bon rempart contre l'aléa moral.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 mars 2010