Point de presse de M. François Fillon, Premier ministre, à l'issue de la réunion des ministres sur les suites de la tempête Xynthia et l'indemnisation des victimes des inondations, Paris le 13 avril 2010.

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Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
La tempête Xynthia a provoqué un terrible drame humain. Cinquante-trois personnes ont perdu la vie dans ce drame. Mon devoir, le devoir du Gouvernement, c'est de tout faire pour que cette catastrophe ne puisse plus se reproduire. L'Etat et les collectivités locales n'ont pas le droit de prendre le risque de laisser des personnes se réinstaller dans des zones où elles pourraient courir un danger mortel.
Pour faire face à cette situation inédite, nous avons mis en place des moyens de solidarité sans précédent. C'est dans cet esprit que nous avons défini des zones dans lesquelles va s'exercer pleinement la solidarité nationale. Dans ces zones, les habitants qui le souhaitent peuvent, dès maintenant, demander l'acquisition amiable par l'Etat de leur maison et du terrain sur lequel cette maison est bâtie. Cette acquisition se fera, c'est un engagement que je prends, au prix du marché avant la tempête, pour la maison comme pour le terrain. C'est une situation sans précédent dans l'histoire de notre pays. Cette procédure, nous l'avons choisie parce que c'est la seule qui permet d'aller vite et c'est donc la seule qui permet d'éviter de laisser des personnes, de laisser des familles dans l'incertitude et dans l'attente. Notre responsabilité, c'est d'être à l'écoute des sinistrés. Quitter sa maison, abandonner ses souvenirs, abandonner une partie de sa vie, c'est un traumatisme et nous devons le comprendre. Nous devons expliquer à ceux qui ont pris de plein fouet cette catastrophe, pourquoi nous sommes amenés à prendre ces décisions difficiles. Dans les 48 heures, je nommerai des Délégués à la solidarité. Ces Délégués à la solidarité, sous l'autorité des Préfets - auxquels je veux rendre hommage pour le travail difficile qu'ils ont accompli -, ces Délégués à la solidarité recevront toutes les personnes qui souhaitent des explications sur les critères qui ont été choisis par l'Etat, sur les procédures d'indemnisation et qui souhaitent aussi faire valoir leurs arguments lorsqu'ils contestent ces critères. Je veux une prise en charge individuelle de chaque cas et je donnerai aux Préfets les moyens pour garantir cette prise en charge.
Cette procédure, c'est la seule qui permet d'aller vite. C'est la seule qui permet de gagner de précieux mois par rapport aux procédures classiques d'expropriation. Je veux dire que cette procédure exceptionnelle ne remet en aucun cas en cause les droits des personnes. Le zonage qui permettra, le cas échéant lorsqu'il n'y aura pas d'accord amiable, l'expropriation, ce zonage devra faire l'objet, dans les prochains mois, d'une déclaration d'utilité publique. Il y aura donc, et c'est le deuxième temps, une enquête publique au cours de laquelle chacun pourra se faire entendre et faire valoir ses arguments. Et en cas de désaccord, les collectivités et les particuliers, pourront, bien entendu, faire valoir leurs droits, selon les procédures classiques devant le juge.
Enfin, je voudrais dire un mot concernant les assurances. J'ai souhaité le renforcement du dispositif de médiation sur le terrain, avec la présence de médiateurs délégués dans les départements de Vendée et de Charente-Maritime. Madame Lagarde a indiqué, au cours de notre réunion, que près de 500 experts étaient mobilisés sur le terrain. Et j'ai demandé à ce que les fédérations d'assureurs acceptent de réduire de trois mois à un mois les délais permettant l'indemnisation.
Voilà, il s'agit d'un drame humain d'une extrême gravité. Les membres du Gouvernement auront à coeur dans les prochains jours de se rendre sur le terrain pour écouter et pour soutenir les victimes de ce drame.
Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions, si toutefois vous en avez.
Question : ...Il n'est pas question de réviser, comme le demandent certains maires, les critères des zones ?
François Fillon : Je crois qu'il faut bien comprendre que ces zones sont destinées à permettre l'acquisition immédiate des maisons et des terrains. Le zonage qui permettra le cas échéant, la destruction, l'expropriation, ce zonage-là, il va devoir faire l'objet d'une procédure longue, avec des enquêtes publiques et donc, cette procédure elle va se dérouler normalement et tous ceux qui ont des contestations par rapport aux critères vont pouvoir les faire valoir. Mais, dans l'immédiat, ce qui compte, c'est que tous ceux - et ils sont déjà très nombreux - qui veulent quitter ces zones parce qu'elles sont dangereuses, puissent le faire. L'Etat aurait pu laisser les procédures normales courir. Cela veut dire que les habitants auraient été pendant des mois et des mois dans l'incertitude sur la question de savoir où ils allaient habiter, comment se reloger, s'ils devaient réparer ou ne pas réparer leur maison. Donc, je crois qu'il faut bien distinguer les choses : ces zones noires pour l'instant sont des zones de solidarité, ce sont des zones dans lesquelles, tous ceux qui s'y trouvent, ont le droit à une indemnisation exceptionnelle de la part de l'Etat, des assurances, de l'ensemble du dispositif. Et dans un deuxième temps, il y aura les procédures normales, avec la déclaration d'utilité publique, le décret en Conseil d'Etat précédé par les enquêtes. C'est à ce moment-là que, s'il y a des modifications à faire, elles seront faites.
Question : Quel est le calendrier prévu pour cette enquête d'utilité publique ?
François Fillon : Pour que cette procédure puisse se mettre en place, il faut une décision du Parlement. Cette décision du Parlement elle interviendra dans les prochaines semaines, et on peut imaginer que les procédures démarreront à partir de l'été.
Question : Monsieur le Premier ministre, vous étiez omniprésent pendant la campagne des régionales ; on vous a vu dans de nombreux meetings. Dans les quinze jours qui ont suivi, vous vous êtes fait beaucoup plus discret, beaucoup moins de sorties. Pourquoi ? Et est-ce que c'est parce que vous vous sentiez peut-être plus à l'aise, loin du tumulte médiatico-politique autour des fameuses rumeurs ? Quelle est la raison...
François Fillon : C'est sûr qu'après la campagne électorale, c'était difficile pour moi d'aller tenir des meetings lorsqu'elle était terminée. Pour le reste, j'assume mes responsabilités au Gouvernement, avec les choix personnels que j'ai faits, en terme de communication, et je travaille, et je mets en oeuvre les décisions qui doivent l'être.
Question : Les habitants des zones ont manifesté pendant des jours, et exigé plutôt des digues. Qu'est-ce qu'on fait par rapport à cette revendication ?
François Fillon : Les digues seront renforcées, mais une digue ne peut pas permettre d'assurer la protection, sur le long terme, d'habitations qui sont à des niveaux trop bas par rapport au niveau de la mer. Il y a eu des erreurs de commises dans le passé s'agissant des autorisations qui ont été données pour construire. Il ne faut pas les reproduire. Il y aura naturellement tout le travail de restauration des digues qui va être fait, mais ce travail ne doit pas nous empêcher d'amener les habitants qui sont en situation dangereuse, en zones dangereuses, à se reloger.
Question : Hier, le Conseil général de Charente-Maritime a fait voter une motion - motion qui a été votée à l'unanimité - pour justement restreindre ces zones noires. Est-ce que Dominique Bussereau vous a remis ce texte, ce matin, c'est ce qu'il nous avait dit, hier ? S'il vous l'a remis, en avez-vous pris connaissance et qu'en avez-vous pensé ?
François Fillon : Mais bien sûr que j'ai pris connaissance de cette motion du Conseil général, comme de tous les autres avis des élus qui m'ont été transmis. Cela ne change rien à la détermination qui est celle du Gouvernement d'assurer aujourd'hui, dans le cas le plus large possible, le relogement de toutes les personnes qui sont en zones dangereuses.
Question : Monsieur le Premier ministre, on a eu le sentiment ce week-end qu'il y avait, voilà, des paroles un petit peu divergentes. Deux ministres, Brice Hortefeux et Dominique Bussereau, ont parlé de " concertations ", de " cas par cas ". Cela veut dire que, là, aujourd'hui, les zones noires restent telles qu'elles ont été faites ?
François Fillon : D'abord, ce sont des situations qui sont extrêmement douloureuses pour les gens qui les vivent. Et donc il est parfaitement normal que chacun ait à coeur de répondre à cette émotion, de répondre à cette douleur, et le fasse avec les moyens qui sont les siens et à la responsabilité qui est la sienne. Je ne fais de reproche à personne. Le rôle du Premier ministre et le rôle du Gouvernement c'est de faire en sorte que la sécurité des personnes soit assurée. Et dans cet esprit, les critères qui ont été mis en oeuvre par l'Etat pour définir ces zones qui, je le rappelle, aujourd'hui sont des zones de solidarité, sont des critères objectifs, ce sont des critères qui sont basés sur des observations concrètes, précises, objectives, et qui n'appellent pas de remise en cause, en tout cas pas dans la phase actuelle. Voilà, merci beaucoup.
Source http://www.gouvernement.fr, le 14 avril 2010