Déclaration de M. Pierre Lellouche, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, sur l'action conjointe de la France et de l'Allemagne face à la crise économique, à Paris le 25 mai 2010.

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Circonstance : Ouverture du colloque "Le couple franco-allemand et l'Europe face à la crise", à Paris le 25 mai 2010

Texte intégral

Monsieur le Ministre, Cher Stephan Toscani,
Monsieur le Secrétaire général Hans Stark,
Monsieur le Directeur Jörg Wolff,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Je souhaite tout d'abord saluer Stephan Toscani, qui est devenu, au cours des derniers mois, l'un de mes interlocuteurs les plus fidèles en Allemagne car nous avons beaucoup travaillé ensemble sur un sujet qui me tient particulièrement à coeur et qui concerne 10 millions de nos concitoyens, à savoir les relations transfrontalières. Stephan Toscani a notamment représenté la Sarre et l'Allemagne au colloque que j'ai organisé sur cette question au Quai d'Orsay en février et j'ai inauguré avec lui, il y a trois semaines, le "GECT SaarMoselle" qui réunit les agglomérations de Sarrebruck et de Sarreguemines. On l'oublie trop souvent mais le transfrontalier, c'est une dimension capitale du franco-allemand, comme le sont les milliers de jumelages qui unissent depuis plus d'un demi-siècle des communes françaises et allemandes : car l'intimité franco-allemande ce n'est pas seulement celle des chefs d'Etat depuis Charles de Gaulle et Konrad Adenauer mais aussi celle de nos peuples.
Je souhaite remercier l'IFRI et la Fondation Konrad Adenauer, deux organisations avec lesquelles je travaille depuis longtemps, pour avoir organisé ce colloque au moment même où l'Europe vit une phase décisive pour son avenir, pour sa monnaie, pour son économie.
Il y a des coïncidences qui n'en sont pas : c'est le week-end du 7-9 mai dernier, au cours duquel nous avons célébré le 60ème anniversaire de la Déclaration Schuman, que l'Europe était confrontée à l'un des tests les plus graves de son histoire depuis sa fondation. Le 9 mai 1950, la Déclaration Schuman : c'était le début de la construction européenne. Le 9 mai 2010 : l'Europe avait rendez-vous avec son destin.
Ne nous y trompons pas : les attaques répétées contre la zone euro depuis cinq mois sont un moment de vérité pour l'Europe et bien entendu pour le couple franco-allemand qui la sous-tend.
Ce matin, mon propos n'est pas de revenir devant vous sur le détail de la contribution de la France et de l'Allemagne à la construction européenne, tout au long de ces six dernières décennies : elle est considérable.
Sans la France et l'Allemagne, il n'y aurait pas eu de Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), pas de marché unique, pas de serpent monétaire européen (SME), en un mot pas de construction européenne. Sans l'accord Kohl-Mitterrand, il n'y aurait pas eu d'accord sur la ligne Oder-Neisse, pas de réunification dans l'Union européenne et l'OTAN, pas de traité de Maastricht, pas d'élargissement.
De cette histoire, je retiens deux leçons qui s'appliquent pleinement aujourd'hui et au moins une réalité nouvelle.
Première leçon :
- Sans accord entre la France et l'Allemagne, il ne se passe rien en Europe, ou alors l'Histoire se fait sans elle. Les exemples sont là pour le prouver. C'est le désaccord sur le réarmement de l'Allemagne et l'échec de la CED en 1954 qui sonnent le glas de la "défense européenne" et expliquent aujourd'hui l'absence d'industrie d'armement européenne et donc de sous-marin européen, d'avion de combat commun. Sans accord franco-allemand c'est une Europe sans SME, sans monnaie unique, sans Traité de Lisbonne. De même, lorsque l'Allemagne et la France ne convergent pas, c'est le divorce Siemens-Areva, TKNS-DCNS.
- En revanche lorsqu'il y a un accord, cela donne Airbus, Ariane, EADS, l'ESA, le marché unique, le Traité de Lisbonne et bien sûr l'euro.
Deuxième leçon :
Il n'est jamais facile de parvenir à un accord. Nos pays sont différents. Un Etat fédéral d'un côté, un régime centralisé de l'autre, une coalition aux règles complexes d'un côté, un système, longtemps quelque peu monarchique, aujourd'hui présidentiel, de l'autre. Sans parler des conceptions industrielles ou bancaires, qui ne sont pas les mêmes en France et en Allemagne.
La réalité nouvelle est la suivante :
Ayons le courage de le dire, depuis 1989, ce n'est plus la "même" Allemagne que nous avons en face de nous.
Longtemps, l'idée même d'intérêts nationaux allemands était un tabou : l'intérêt de l'Allemagne n'existait que pour autant qu'il se confondait avec celui, supérieur, de l'Europe, et, au plan de la politique de défense, aux intérêts de l'Alliance.
"Premier de la classe" européenne, "premier de la classe" atlantique : comme s'il fallait à tout prix exorciser le démon du nationalisme du siècle précédent.
La fin de la guerre froide et des blocs, la réunification, l'arrivée de nouvelles générations qui s'estiment libérées de la faute des pères, mais aussi le défi de la mondialisation sur une nation en déclin démographique mais plus que jamais soudée autour de son modèle industriel et social : tout cela a profondément modifié l'équation allemande.
A présent, l'Allemagne est réunifiée, elle veut à juste titre être traitée à égalité de droit, elle aspire "comme tout le monde", si j'ose dire, à défendre son modèle économique et social. L'Allemagne ne craint plus, comme l'a souligné tout récemment Thomas de Maizière, ministre fédéral de l'Intérieur, d'affirmer clairement ses intérêts.
Comment tout cela s'applique-t-il dans la réalité de la gestion de la grande crise actuelle, la plus importante depuis 80 ans ?
J'ai lu, bien sûr, comme chacun de vous, plusieurs déclarations sur les tensions franco-allemandes dans les journaux ces derniers temps, avec des titres parfois sensationnalistes : on parle de "divorce", de "torchon qui brûle"...
Mesurons ensemble le chemin parcouru. En commençant, d'abord, par prendre la mesure de la crise.
- La crise que nous traversons est systémique et globale : elle a commencé en 2007 aux Etats-Unis avec la crise des sub-primes ; en 2008, nous sommes passés tout près de l'effondrement total du système bancaire, toujours à partir des Etats-Unis ; depuis le début de cette année 2010, nous sommes confrontés à la crise de l'euro et cette fois, c'est l'Europe qui est prise pour cible.
- Cette spéculation est alimentée par la défiance des investisseurs devant le niveau excessif des dettes publiques et privées et des déficits publics dans le monde occidental : les Etats-Unis (où tout a commencé) l'Union européenne mais aussi le Japon (ou le déficit dépasse 200% du PIB).
Face à cette crise, je rappelle tout de même, qu'en 2008, c'est grâce à un accord franco-allemand, que, sous Présidence française de l'Union européenne, trois décisions fondamentales ont pu être adoptées :
1) la coordination des plans de relance nationaux ;
2) l'intervention massive de l'Europe pour sauver le système bancaire ;
3) l'invention du G20 pour réguler le système financier international.
Certes, ces décisions n'ont pas été prises instantanément. Il a fallu discuter, batailler parfois, mais les réponses ont été trouvées entre Français et Allemands. Ainsi, je rappelle que le président Sarkozy a pu réunir, au coeur de la crise de l'automne 2008, pour la première fois, l'Eurogroupe au niveau des chefs d'Etat et de gouvernement, avec en prime si j'ose dire, la présence du Premier ministre britannique ; ceci n'était inscrit nulle part dans les Traités !
Tout ceci a été possible, car la France et l'Allemagne ont agi ensemble, ce qui n'allait pas de soi.
Dans la crise actuelle, qu'avons-nous fait ?
Les attaques contre la zone euro ont commencé au début de l'année. Elles ont donné lieu, sur initiative de la France et de l'Allemagne, à la première réunion du Conseil européen sous la présidence de Herman Van Rompuy, le11 février dernier. Le Traité de Lisbonne venait à peine d'entrer en vigueur et Herman Van Rompuy d'entrer en fonctions.
Dès le début de cette crise, la France, la première, a cherché à promouvoir un premier principe, le principe de solidarité. Il s'agissait en effet :
- de la défense de notre propre monnaie,
- de comprendre que la faillite d'un Etat membre serait mortelle pour la zone euro, et de construire en conséquence une barrière pour protéger un pays qui serait la cible d'attaques.
C'est finalement ce que nous avons fait pour la Grèce, avec l'adoption d'un plan de sauvetage de 110 milliards d'euros, dont 80 milliards pour les Européens - plus de la moitié de cette somme étant apportée, et votée, par la France et l'Allemagne.
Logiquement, l'Allemagne, mais également la France, ont souhaité que ces prêts soient assortis de conditions. C'est l'application du deuxième principe, celui de la responsabilité : ensemble nous avons conditionné ces prêts à un programme de remise en ordre des finances publiques grecques, un programme très dur, que le gouvernement de M. Papandréou, s'est engagé à mener à bien.
On a beaucoup dit, surtout en France, que ce plan grec avait tardé, beaucoup trop tardé, que l'Allemagne avait hésité des semaines durant, qu'elle avait été trop dure dans ses critiques de la Grèce, menaçant même de l'exclure de la zone euro, avant de se résoudre à l'aider.
Bref, que tout cela avait été trop long, et à l'arrivée trop cher, tout en donnant une impression de flottement européen que par la suite les marchés s'empressèrent d'utiliser contre d'autres cibles dans la zone euro, l'Espagne et le Portugal au cours de la 1ère semaine de mai notamment.
A chacun son métier :
- aux commentateurs de commenter,
- aux spéculateurs de se nourrir de ces spéculations intellectuelles pour multiplier leurs gains,
- mais aux acteurs politiques, dont je fais partie à ma modeste place, il appartient cependant de faire face à la tempête ensemble, tout en respectant des contraintes politiques, de temps démocratique de l'autre.
En tant que ministre de l'Europe, je suis aussi le coordonnateur des relations franco-allemandes. Mon rôle n'est pas de m'ériger en donneur de leçons, mais d'agir, à ma place, en décryptant pour le gouvernement la manière de voir de l'Allemagne.
De ce point de vue, une citation d'un homme d'Etat qui n'est ni Français ni Allemand, mais qui connaissait bien nos deux peuples n'est pas sans utilité pour guider notre analyse. Winston Churchill a écrit : "En Allemagne, tout est interdit, sauf ce qui est permis. En France, tout est permis, même ce qui est interdit".
Dois-je rappeler que le plan de soutien à la Grèce n'a pas été facile à obtenir, d'abord parce qu'il dérogeait au Traité de Lisbonne, en particulier à son article 125 et au principe du "no bail out" ?
Le principe de solidarité n'a pas posé de problème en France, où s'est manifestée une remarquable unité républicaine, gauche et droite confondues. Naturellement, ou presque, pour la France, la règle de l'article 125 devait s'effacer devant l'urgence et l'exigence de solidarité politique.
Mais en revanche, en Allemagne, il en va bien sûr tout autrement. Pour le comprendre, il faut revenir aux origines de Maastricht. Lorsque l'Allemagne réunifiée consentit, sous le leadership d'Helmut Kohl, de consacrer son ancrage à l'Europe en abandonnant son Deutsche Mark (DM) pour l'euro (en même temps qu'elle reconnaissant la ligne Oder-Neisse), elle le fit en exigeant dans le Traité de Maastricht des règles "allemandes" :
- indépendance de la Banque centrale européenne (BCE) ;
- responsabilité de chacun pour ses comptes et ses dettes ;
- critères de convergence ou de bonne gestion applicable à tous, et susceptibles de sanctions : les fameux 3% et 60%.
L'obsession allemande pour la vertu budgétaire ne vient pas seulement du souci de bonne gestion comptable comme on le caricature trop souvent chez nous.
Cette obsession est profondément ancrée dans l'Histoire.
Le DM était le symbole de la réussite, de l'espoir allemand de l'après guerre, le contre modèle de l'hyper-inflation et de la déstabilisation économique qui avaient contribué à l'élection d'Hitler en 1933.
Ajoutons l'Histoire récente :
- Face au premier choc pétrolier en 1973, face à la crise et à la mondialisation en 1999, la préférence allemande va à la compétitivité plutôt qu'à la consommation. Et ce sont deux gouvernements de gauche qui ont imposé des mesures de stabilité et de rigueur : Helmut Schmidt, en 1974, et Gerhard Schröder à partir de 1998 avec les plans Hartz.
- On peut comprendre dès lors que l'Allemagne ne se sente pas vocation à servir indéfiniment de "vache à lait" pour l'Europe. Surtout que cette Allemagne a fait des efforts sans équivalent depuis 10 ans : augmentation de la durée du travail, réduction des allocations chômage, report de l'âge de la retraite à 67 ans, réduction des coûts salariaux conduisant à un écart de 20 points dans les évolutions depuis 10 ans entre la France et l'Allemagne : depuis 1996, le coût du travail a augmenté de 5% en Allemagne, de 30% en France. De 2005 à 2010, le taux de chômage en Allemagne a baissé de 10,7 % à 7,5%, en France, il a augmenté de 9,3% à 9,5%.
Alors oui, nous, Français, nous sommes miraculeusement mis d'accord pour soutenir la Grèce, mais quid alors des réformes indispensables en France pour modérer nos dépenses, financer nos retraites, améliorer notre compétitivité en termes de coûts du travail ? Dois-je rappeler que, pendant que Gerhard Schröder augmentait la durée du travail, le gouvernement français de l'époque sous Lionel Jospin, Martine Aubry et Dominique Strauss Kahn instaurait les 35 heures ? Dois-je rappeler que c'est François Mitterrand qui a fait passer la retraite de 65 à 60 ans juste avant le fameux tournant de la rigueur ? Nous étions le 1er avril (cela ne s'invente pas !) 1983... Dois-je rappeler enfin que cela fait plus de 30 ans qu'en France, aucun budget n'a été voté en équilibre ?
Alors oui, après les efforts consentis, le processus consistant à changer les règles est plus difficile en Allemagne, et pourtant il a été fait.
Dans les semaines qui ont suivi l'attaque financière contre la Grèce, les marchés ont ciblé l'Espagne et le Portugal, créant un risque de crise systémique immédiate, qui a conduit le président de la République à proposer la tenue d'une réunion extraordinaire des 16 chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro dans la nuit du 7 mai et l'adoption d'un plan massif de sauvetage avant l'ouverture des bourses asiatiques le 10 mai au matin.
Là encore, ceci n'a été rendu possible que grâce à l'accord personnel entre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. Un accord d'autant plus spectaculaire qu'il est à la fois sans précédent sur le plan quantitatif (500 milliards d'euros mis sur la table par l'Europe complété par 250 milliards d'euros du FMI) et révolutionnaire sur le plan de l'intégration de la zone euro.
La tranche de 440 milliards d'euros de garantie qui a été inventée, c'est, en quelque sorte, "l'article 5" de l'OTAN appliqué à la monnaie unique, tous les Etats de la zone euro venant au secours de l'un des leurs en cas d'attaque Elle n'est fondée sur aucune disposition du Traité de Lisbonne.
La BCE a également décidé d'intervenir en achetant sur le marché secondaire des obligations de dettes souveraines, ce qu'elle s'était jusque là religieusement interdit.
Les règles de Maastricht qui existaient depuis 20 ans, ont été changées en un week-end !
A ceux qui parlent un peu vite de "divorce" et de "torchon qui brûle" je veux rappeler cela. Et leur demander de nous dire ce qui se serait passé sans cet accord franco-allemand !
Pour autant, nous ne sommes pas sortis de la crise. La crédibilité du système financier est un édifice qui reste à construire ensemble. Il sera doté de 3 étages :
1/ Premier étage : pour que les garanties ne soient pas appelées, les budgets doivent être mieux gérés : avec transparence, et avec le souci de réduction des dépenses publiques. Ce régime de surveillance mutuelle, c'est le corollaire de la garantie mutuelle apportée par chacun d'entre nous.
- En 2009, l'Allemagne a introduit un mécanisme de limitation des déficits dans sa "Loi fondamentale" qui oblige l'Etat fédéral à réduire progressivement son déficit structurel, puisqu'en 2016 le seuil d'endettement toléré sera de 0,35 % du PIB.
- Lors de la dernière conférence des déficits, la semaine dernière, le président de la République a souhaité qu'une nouvelle gouvernance en matière de finances publiques soit inscrite dans notre Constitution.
Cette réforme prévoit que, à partir de 2012, chaque gouvernement issu des urnes s'engage juridiquement, pour la durée de la législature, sur une trajectoire, ainsi que sur la date à laquelle l'équilibre doit être atteint. C'est une procédure qui respecte les droits fondamentaux du Parlement.
Par ces mesures, la France et l'Allemagne montrent l'exemple à l'ensemble de la zone euro et envoient un signal fort aux marchés sur leur engagement à réduire les déficits. La France et l'Allemagne ont ainsi créé un système d'auto-surveillance, dont les autres pays pourraient s'inspirer.
Quant à la mécanique de notre surveillance des budgets nationaux, plusieurs voies ont été proposées par la Commission et les Etats, c'est la mission du groupe des ministres des Finances présidé par Herman Van Rompuy. Il ne m'appartient pas de trancher à ce stade. Vous le comprendrez.
2/ Le deuxième étage de cette maison monétaire commune, c'est la convergence des politiques économiques, donc un minimum d'harmonisation fiscale et sociale, et le renforcement de notre compétitivité.
Pour ma part, je rappelle :
- Le gouvernement a réussi à contourner les 35 heures, nous avons supprimé 100.000 postes de fonctionnaires, nous allons réformer le système de retraites.
- Nous avons décidé le gel en volume des dépenses de l'Etat et des collectivités locales pour 3 ans.
Mais il faut aller au-delà :
- Le principe du gouvernement économique, que la France appelle de ses voeux. : c'est en effet qu'il n'y ait pas trop d'écart entre les économies peu compétitives et les économies très compétitives. Je rappelle que l'Allemagne réalise 70 % de ses exportations dans la zone euro.
- Nous souhaitons également mettre en place avec l'Allemagne et nos autres partenaires une véritable politique industrielle et énergétique, qui ne doit pas seulement être fondée sur l'amélioration de l'environnement des entreprises, mais aussi sur des projets concrets dans les secteurs stratégiques pour l'Europe de demain, que ce soit en matière d'espace, d'énergie, de transport, ou encore d'agenda numérique.
Un exemple : l'espace. J'ai réuni la semaine dernière tous les acteurs français et européens du secteur spatial au Quai d'Orsay.
Au coeur du spatial européen, il y a le franco-allemand. Le Conseil des ministres franco-allemand du 4 février a permis de rappeler la nécessité de poursuivre notre coopération dans le domaine spatial pour garantir l'accès de l'Europe à l'espace, avec la construction conjointe d'un satellite de détection du méthane - l'un des principaux gaz à effet de serre - qui doit être lancée en 2013-2014.
Or, à l'heure où nos concitoyens sont essentiellement préoccupés par le maintien de leur emploi, et attendent de l'Europe des mesures fortes et des projets concrets en faveur de la croissance, je note que la stratégie "Europe 2020" est insuffisante sur le fond et peu lisible sur la forme, avec pas moins de 5 objectifs, 7 initiatives, 10 lignes directrices intégrées, dont la lecture est absconse. Il faut enfin développer volet international de la stratégie, la loyauté dans les échanges internationaux, la réciprocité dans les marchés publics. C'est une dimension que la Commission doit davantage prendre en compte.
3/ Le troisième étage de cette maison, c'est la régulation financière internationale.
Là encore, elle ne peut pas être que franco-allemande et européenne. L'Europe ne peut pas taxer seule les transactions financières, comme elle ne peut pas seule interdire les ventes à découvert sur les obligations souveraines. On ne peut pas légiférer seuls sur les "hedge funds". Les Etats-Unis viennent d'adopter une loi historique sur la régulation du secteur financier, l'Europe doit faire de même, dans un contexte où la France présidera le G20 à partir de la fin 2010.
Je souhaite vous faire part de ma confiance dans le couple franco-allemand.
Je sais que c'est difficile. C'est à tort que l'on croit que la relation franco-allemande est un lit de roses. Lorsque l'on vante la relation franco-allemande, on oublie les efforts quotidiens que cela représente.
C'est toujours difficile de gouverner un pays. C'est encore plus difficile de coordonner l'action de deux pays démocratiques différents.
Par nature, le débat public, surtout s'il est anxiogène - c'est le cas de la crise - et s'il est donc très médiatisé, tend à voir s'affronter des slogans toujours réducteurs :
- attendre de l'Allemagne qu'elle doive "payer", encore et toujours ;
- ou à l'inverse, imposer, comme vertu cardinale une potion si amère qu'elle paralysera le malade au lieu de le guérir.
Lorsque Angela Merkel dit que l'on ne saurait réduire la construction européenne à "une Union faite de transferts financiers", elle a raison.
Et quand Nicolas Sarkozy dit vouloir résorber nos déficits et améliorer notre compétitivité sans alourdir nos impôts qui sont parmi les plus élevés en Europe, il a raison aussi.
La vérité, c'est que la France et l'Allemagne ne sortiront de la crise qu'ensemble, main dans la main. Et je leur fais confiance.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 mai 2010