Texte intégral
S. Paoli - L'opposition entend-elle l'appel à l'union lancé par A. Juppé au conseil national du RPR ? Le Rassemblement pour la République se veut le fer de lance de l'union, le socle d'un mouvement qui serait celui du Président élu ou plutôt réélu, a corrigé A. Juppé. Comment ce "tous derrière Chirac" est-il perçu par les candidats de l'opposition déjà déclarés pour la présidentielle ? "Pas de victoire sans l'union", dit A. Juppé. Qu'en pensez-vous ?
- "Il faut forcément l'union au second tour des élections présidentielles pour gagner et il faut l'union aux élections législatives. L'élection présidentielle est le premier grand débat du nouveau siècle, celui qui va dessiner une nouvelle France et il est normal qu'il y ait plusieurs projets qui s'affrontent. Pour ma part, j'entends bien porter le projet d'une nouvelle France moderne qui engagerait sans complexe et avec détermination les grandes réformes que partout on met en oeuvre autour de nous."
Votre réponse est très claire : l'union, c'est très bien, mais on verra ça plus tard ?
- "Non. Traditionnellement dans la Vème République, vous avez un premier tour qui veut que généralement, vous avez plusieurs visions de l'avenir qui s'affrontent. A un peu plus d'un an de l'élection présidentielle, bien malin peut dire ce qui sortira de ce premier tour. Et puis, il y a un deuxième tour qui rassemble."
Elle va se faire sur quoi cette présidentielle ?
- "La modernisation de la France. Je crois que chaque élection présidentielle a un enjeu. Je vois la prochaine comme étant une sorte de campagne sérieuse sur un enjeu sérieux. Nous, la France, entrons dans un nouveau monde, dans un nouveau siècle : est-ce qu'il n'y a pas un certain nombre d'archaïsmes qu'il nous faut soigner ? Est-ce qu'il n'y a pas un certain nombre de grandes réformes que l'on voit mises en oeuvre partout autour de nous et qu'à notre tour devrions accomplir ? Une grande réforme fiscale parce qu'on a besoin de modifier fortement la fiscalité de l'énergie individuelle pour retrouver une forte croissante et surtout le plein emploi pour assurer un filet de protection sociale plus juste, plus efficace que ce maquis des aides sociales ; la réforme de la décentralisation, mieux même, la révolution du pouvoir régional ; la réforme de l'Etat pour le recentrer, l'alléger pour lui permettre d'assurer ses vraies missions : la sécurité, la justice ; la réforme de l'éducation : plus d'autonomie dans les établissements scolaires et le choix de la confiance dans la liberté des parents de choisir l'école de leurs enfants. Ce que je viens de dire est ce qui est mis en oeuvre, encore une fois, partout autour de nous. Or, la France hésite et nous n'avons pas su faire ces réformes lorsque la croissance nous portait. C'est peut-être ce qui restera au passif de monsieur Jospin."
Vous dites "la France." Peut-on encore faire une campagne présidentielle sur la France ? Est-ce que le vrai défi politique n'est pas l'Europe ?
- "Une France forte a besoin d'une Europe forte. Mais l'Europe n'est pas la solution aux problèmes français, sauf à regarder ce qui se fait partout autour de nous. Dans cette campagne, je serai très audacieux et je proposerai des réformes qui auront l'air d'aller très en avant mais en réalité, je n'irai pas plus en avant que les Anglais, les Belges, les Allemands, les Italiens ou les Espagnols . On a besoin de réformes de structures en France et de réformes pour l'Europe de façon à ce que le destin de la France puisse se faire dans le cadre d'une Europe forte."
N'a-t-on pas besoin aussi d'hommes et de femmes qui nous disent la réalité des choses ? L'Europe est intéressante ? On nous parle d'élargissement européen mais il ne peut pas se faire ; les Irlandais ont dit "non." Qui va nous dire la réalité de ce qui se passe ?
- "Je pense que le vote irlandais pourra être sujet à révision. Ce vote avait un fort taux d'abstentionnisme et sans doute les Européens s'y sont-ils mal pris. Il y a eu des tentations de remettre en cause l'autonomie fiscale. L'Irlande est un formidable pays avec une forte croissance qui nous fait rêver. Mais si l'Irlande a cette situation, c'est parce qu'elle a réussi à baisser considérablement sa fiscalité. Juste à la veille de ce référendum, certaines autorités européennes ont dit que ce n'était pas juste que les Irlandais aient des impôts aussi bas et qu'il faudrait une harmonisation fiscale, les mêmes impôts pour tous. C'est notamment ce qu'a dit monsieur Jospin. Cela ne favorisait pas le "oui" de l'Irlande à l'Europe ! L'élargissement, la grande Europe, c'est le projet dont nous avons besoin parce qu'en se retrouvant nous tous, tous les pays européens, on sent bien que l'Europe change de nature. Elle ne change pas seulement de dimension, elle redevient un projet politique qui fait que nous, Européens, avons quelque chose à apporter au monde. C'est pourquoi je suis pour ma part un militant de l'élargissement le plus rapide possible de l'Europe."
Comment nous faire comprendre que des gens qui ont dit "non" ont peut-être dit "oui " sans le vouloir ?
- "Cela s'est déjà passé dans l'histoire de l'Europe..."
... mais cela ne passe pas dans l'opinion, c'est le problème, les gens ne comprennent pas...
- "C'est peut-être vous qui ne comprenez pas..."
Franchement, je ne comprends pas. Quand on a dit "non" on a dit "oui" ? Ca m'échappe.
- "Il y a eu 67 % d'abstention ; avec un petit bémol, je crois que les Irlandais pourront reconsidérer leur position comme les Danois l'avaient fait à une autre époque et que l'Europe pourra continuer à avancer. Sauf un vrai "non", un "non" définitif, très clair fait par un peuple, il est évident qu'on ne peut pas bloquer l'avancée de l'Europe et notamment l'avancée vers l'élargissement. La présidence belge, celle de mon ami, le jeune premier ministre libéral, G. Verhofstadt, est une présidence extrêmement importante qui devra résoudre tous ces problèmes et notamment essayer d'engager une vision plus claire de l'Europe. Je fais confiance à la présidence belge pour rattraper les ratés de Nice et de Göteborg."
Quelle Europe ? Est-ce que ce sera une Europe fédérale, une Europe des Nations, avec quelle géométrie ?
- "Ni l'une ni l'autre. Je reprends les propos de G. Verhofstadt, Président en exercice. Il parle d'une troisième voie, entre d'un côté les Eurosceptiques, ceux qui ne veulent pas d'Europe, et les Eurofanatiques, ceux qui veulent tellement d'Europe qu'elle ne se ferait pas. G. Verhofstadt a une vision très claire de ce que peut être une Europe fédérale, mais une Europe fédérale avec des compétences mieux définies, allégées par rapport à l'Europe actuelle. Je crois que G. Verhofstadt est capable de faire avancer l'Europe."
L'Europe, l'ouverture et aussi les positionnements. N. Sarkozy - pour revenir à ce que disaient les militants du RPR et les responsables du RPR ces dernières heures - dit : "quand on est de droite, on est de droite ; quand on est de gauche, on est de gauche. Il faut que chacun assume son positionnement." Est-ce que la politique, c'est aussi simple que cela aujourd'hui ?
- "Non, ce n'est pas aussi simple que cela. Vous avez une droite intelligente et une droite un peu ringarde ; une droite moderne et libérale, une droite techno, repliée sur elle-même. En réalité, parfois, il y a des problèmes qui bousculent un peu les frontières bien établies de la vie politique française. Particulièrement dans une élection présidentielle, ce n'est pas une affaire de partis. Une élection présidentielle donne l'occasion, et je le montrerai, de bousculer un peu les frontières trop bien établies de la vie politique."
Et de remonter le niveau. Beaucoup craignent une campagne qui va s'instruire en dessous de la ceinture : affaires contres affaires, cabinet contre cabinet ?
- "Cela va être assez difficile, mais effectivement, les enjeux de 2002, ce ne sont pas les vacances de monsieur Chirac ou le passé de monsieur Jospin. J'espère qu'on va pouvoir parler d'autre chose."
Comment percevez-vous la responsabilité politique, quand des hommes politiques, en l'occurrence autant à droite qu'à gauche d'ailleurs, sont confrontés à des questions de cette importance. Que faut-il faire face à l'opinion et au citoyen qui en demandent plus ?
- "Permettre à la justice de faire son travail. Le Président de la République a un statut spécial. Or, ce statut spécial qui le protège - et il est normal de protéger sa fonction - peut aboutir à une sorte de sentiment d'immunité et être ainsi source d'un malaise. C'est la raison pour laquelle, je ne pense pas qu'il faille faire de ces affaires un enjeu de l'élection présidentielle. J'ai dit et je renouvelle ma proposition de voir le Premier ministre et le Président de la République s'entendre sur une commission, éventuellement aussi avec les principaux candidats à l'élection présidentielle, qui pourrait faire des propositions bipartisanes de consensus, de façon à sortir ce dossier empoisonné de l'enjeu de la présidentielle."
(source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 2 juillet 2001)
- "Il faut forcément l'union au second tour des élections présidentielles pour gagner et il faut l'union aux élections législatives. L'élection présidentielle est le premier grand débat du nouveau siècle, celui qui va dessiner une nouvelle France et il est normal qu'il y ait plusieurs projets qui s'affrontent. Pour ma part, j'entends bien porter le projet d'une nouvelle France moderne qui engagerait sans complexe et avec détermination les grandes réformes que partout on met en oeuvre autour de nous."
Votre réponse est très claire : l'union, c'est très bien, mais on verra ça plus tard ?
- "Non. Traditionnellement dans la Vème République, vous avez un premier tour qui veut que généralement, vous avez plusieurs visions de l'avenir qui s'affrontent. A un peu plus d'un an de l'élection présidentielle, bien malin peut dire ce qui sortira de ce premier tour. Et puis, il y a un deuxième tour qui rassemble."
Elle va se faire sur quoi cette présidentielle ?
- "La modernisation de la France. Je crois que chaque élection présidentielle a un enjeu. Je vois la prochaine comme étant une sorte de campagne sérieuse sur un enjeu sérieux. Nous, la France, entrons dans un nouveau monde, dans un nouveau siècle : est-ce qu'il n'y a pas un certain nombre d'archaïsmes qu'il nous faut soigner ? Est-ce qu'il n'y a pas un certain nombre de grandes réformes que l'on voit mises en oeuvre partout autour de nous et qu'à notre tour devrions accomplir ? Une grande réforme fiscale parce qu'on a besoin de modifier fortement la fiscalité de l'énergie individuelle pour retrouver une forte croissante et surtout le plein emploi pour assurer un filet de protection sociale plus juste, plus efficace que ce maquis des aides sociales ; la réforme de la décentralisation, mieux même, la révolution du pouvoir régional ; la réforme de l'Etat pour le recentrer, l'alléger pour lui permettre d'assurer ses vraies missions : la sécurité, la justice ; la réforme de l'éducation : plus d'autonomie dans les établissements scolaires et le choix de la confiance dans la liberté des parents de choisir l'école de leurs enfants. Ce que je viens de dire est ce qui est mis en oeuvre, encore une fois, partout autour de nous. Or, la France hésite et nous n'avons pas su faire ces réformes lorsque la croissance nous portait. C'est peut-être ce qui restera au passif de monsieur Jospin."
Vous dites "la France." Peut-on encore faire une campagne présidentielle sur la France ? Est-ce que le vrai défi politique n'est pas l'Europe ?
- "Une France forte a besoin d'une Europe forte. Mais l'Europe n'est pas la solution aux problèmes français, sauf à regarder ce qui se fait partout autour de nous. Dans cette campagne, je serai très audacieux et je proposerai des réformes qui auront l'air d'aller très en avant mais en réalité, je n'irai pas plus en avant que les Anglais, les Belges, les Allemands, les Italiens ou les Espagnols . On a besoin de réformes de structures en France et de réformes pour l'Europe de façon à ce que le destin de la France puisse se faire dans le cadre d'une Europe forte."
N'a-t-on pas besoin aussi d'hommes et de femmes qui nous disent la réalité des choses ? L'Europe est intéressante ? On nous parle d'élargissement européen mais il ne peut pas se faire ; les Irlandais ont dit "non." Qui va nous dire la réalité de ce qui se passe ?
- "Je pense que le vote irlandais pourra être sujet à révision. Ce vote avait un fort taux d'abstentionnisme et sans doute les Européens s'y sont-ils mal pris. Il y a eu des tentations de remettre en cause l'autonomie fiscale. L'Irlande est un formidable pays avec une forte croissance qui nous fait rêver. Mais si l'Irlande a cette situation, c'est parce qu'elle a réussi à baisser considérablement sa fiscalité. Juste à la veille de ce référendum, certaines autorités européennes ont dit que ce n'était pas juste que les Irlandais aient des impôts aussi bas et qu'il faudrait une harmonisation fiscale, les mêmes impôts pour tous. C'est notamment ce qu'a dit monsieur Jospin. Cela ne favorisait pas le "oui" de l'Irlande à l'Europe ! L'élargissement, la grande Europe, c'est le projet dont nous avons besoin parce qu'en se retrouvant nous tous, tous les pays européens, on sent bien que l'Europe change de nature. Elle ne change pas seulement de dimension, elle redevient un projet politique qui fait que nous, Européens, avons quelque chose à apporter au monde. C'est pourquoi je suis pour ma part un militant de l'élargissement le plus rapide possible de l'Europe."
Comment nous faire comprendre que des gens qui ont dit "non" ont peut-être dit "oui " sans le vouloir ?
- "Cela s'est déjà passé dans l'histoire de l'Europe..."
... mais cela ne passe pas dans l'opinion, c'est le problème, les gens ne comprennent pas...
- "C'est peut-être vous qui ne comprenez pas..."
Franchement, je ne comprends pas. Quand on a dit "non" on a dit "oui" ? Ca m'échappe.
- "Il y a eu 67 % d'abstention ; avec un petit bémol, je crois que les Irlandais pourront reconsidérer leur position comme les Danois l'avaient fait à une autre époque et que l'Europe pourra continuer à avancer. Sauf un vrai "non", un "non" définitif, très clair fait par un peuple, il est évident qu'on ne peut pas bloquer l'avancée de l'Europe et notamment l'avancée vers l'élargissement. La présidence belge, celle de mon ami, le jeune premier ministre libéral, G. Verhofstadt, est une présidence extrêmement importante qui devra résoudre tous ces problèmes et notamment essayer d'engager une vision plus claire de l'Europe. Je fais confiance à la présidence belge pour rattraper les ratés de Nice et de Göteborg."
Quelle Europe ? Est-ce que ce sera une Europe fédérale, une Europe des Nations, avec quelle géométrie ?
- "Ni l'une ni l'autre. Je reprends les propos de G. Verhofstadt, Président en exercice. Il parle d'une troisième voie, entre d'un côté les Eurosceptiques, ceux qui ne veulent pas d'Europe, et les Eurofanatiques, ceux qui veulent tellement d'Europe qu'elle ne se ferait pas. G. Verhofstadt a une vision très claire de ce que peut être une Europe fédérale, mais une Europe fédérale avec des compétences mieux définies, allégées par rapport à l'Europe actuelle. Je crois que G. Verhofstadt est capable de faire avancer l'Europe."
L'Europe, l'ouverture et aussi les positionnements. N. Sarkozy - pour revenir à ce que disaient les militants du RPR et les responsables du RPR ces dernières heures - dit : "quand on est de droite, on est de droite ; quand on est de gauche, on est de gauche. Il faut que chacun assume son positionnement." Est-ce que la politique, c'est aussi simple que cela aujourd'hui ?
- "Non, ce n'est pas aussi simple que cela. Vous avez une droite intelligente et une droite un peu ringarde ; une droite moderne et libérale, une droite techno, repliée sur elle-même. En réalité, parfois, il y a des problèmes qui bousculent un peu les frontières bien établies de la vie politique française. Particulièrement dans une élection présidentielle, ce n'est pas une affaire de partis. Une élection présidentielle donne l'occasion, et je le montrerai, de bousculer un peu les frontières trop bien établies de la vie politique."
Et de remonter le niveau. Beaucoup craignent une campagne qui va s'instruire en dessous de la ceinture : affaires contres affaires, cabinet contre cabinet ?
- "Cela va être assez difficile, mais effectivement, les enjeux de 2002, ce ne sont pas les vacances de monsieur Chirac ou le passé de monsieur Jospin. J'espère qu'on va pouvoir parler d'autre chose."
Comment percevez-vous la responsabilité politique, quand des hommes politiques, en l'occurrence autant à droite qu'à gauche d'ailleurs, sont confrontés à des questions de cette importance. Que faut-il faire face à l'opinion et au citoyen qui en demandent plus ?
- "Permettre à la justice de faire son travail. Le Président de la République a un statut spécial. Or, ce statut spécial qui le protège - et il est normal de protéger sa fonction - peut aboutir à une sorte de sentiment d'immunité et être ainsi source d'un malaise. C'est la raison pour laquelle, je ne pense pas qu'il faille faire de ces affaires un enjeu de l'élection présidentielle. J'ai dit et je renouvelle ma proposition de voir le Premier ministre et le Président de la République s'entendre sur une commission, éventuellement aussi avec les principaux candidats à l'élection présidentielle, qui pourrait faire des propositions bipartisanes de consensus, de façon à sortir ce dossier empoisonné de l'enjeu de la présidentielle."
(source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 2 juillet 2001)