Interview de M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, à "France Info" le 1er septembre 2009, sur la nécessité pour le gouvernement de soutenir les filières bovine et porcine.

Prononcé le 1er septembre 2010

Intervenant(s) : 

Média : France Info

Texte intégral

Raphaëlle Duchemin : Alors on va parler agriculture, Bruno Le Maire. On a eu le sentiment aussi cet été que le chef de l'Etat voulait en quelque sorte reconquérir un électorat qui le boudait un petit peu depuis son arrivée à l'Elysée. Il y a eu un effort, c'est vrai, sur le prix du lait - vous en parliez - et du coup, évidemment, ça donne des idées aux autres filières. Je voudrais qu'on écoute ce que disait il y a quelques temps Elisabeth à son préfet. Elisabeth est éleveuse de vaches dans la Sarthe et, visiblement, le message aurait probablement été le même pour vous.
Elisabeth, agricultrice dans la Sarthe : Les laitiers vous on demandé un prix, ils ont demandé à l'Etat un prix et ils l'ont eu. Moi, aujourd'hui, je veux un prix fixe, mais chacun doit vivre de son métier, que ce soit du lait, que ce soient des porcs, que ce soient des volailles ou des vaches allaitantes, je ne vois pas pourquoi nous on est la cinquième roue du carrosse ! Ce n'est pas possible ! Si vous allez au supermarché, vous allez voir que le prix de la viande n'a jamais cessé d'augmenter dans les supermarchés, et chez nous il n'a jamais cessé de baisser, monsieur. Bon ben alors, il faut arrêter, quand même !
Raphaëlle Duchemin : Bon ben alors, Bruno Le Maire, qu'est-ce qu'on lui répond à Elisabeth ?
Bruno Le Maire : Ben alors, elle a raison.
Raphaëlle Duchemin : Oui.
Bruno Le Maire : Mais qu'est-ce que je constate, moi, en un an ? C'est qu'on avait une rentrée en 2009 qui était une rentrée - je pèse mes mots - calamiteuse, avec un effondrement complet des revenus des agriculteurs dans toutes les filières : le lait, l'élevage, les fruits et légumes, la viticulture, partout c'était un désastre. Nous avons fait, avec le président de la République et le Premier ministre, un travail colossal en un an. Le plan de soutien à l'agriculture - 1,8 milliards - la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche - en moins d'un an, nous avons travaillé sur cette loi et nous l'avons fait adopter - le renversement des positions en Europe pour maintenir le budget de la PAC et pour défendre l'idée de régulation alors que l'Europe était partie sur la libéralisation. Et on a des résultats aujourd'hui : la rentrée 2010 en agriculture et meilleure que la rentrée 2009. Maintenant, il reste des sujets de préoccupation majeurs. Mon premier sujet de préoccupation, et je rejoins ce que cette dame a dit sur votre antenne, c'est l'élevage ; élevage bovin, élevage porcin.
Raphaëlle Duchemin : Ça veut dire que vous allez aider les filières ovines, caprines, bovines ?
Bruno Le Maire : Nous allons aider les filières, en particulier les filières bovines et les filières porcines parce que ce sont celles qui souffrent aujourd'hui le plus. Je me rendrai au salon de l'élevage qui a lieu le 14 septembre prochain à Rennes pour annoncer un certain nombre de dispositions pour soutenir ces filières bovines et porcines qui ont besoin, effectivement, du soutien des pouvoirs publics. Elles ont besoin de plus d'organisation, elles ont besoin de soutien public pour mettre aux normes leurs installations, elles ont besoin de réfléchir à la commercialisation des produits, produits bovins ou produits porcins, parce qu'il y a une baisse de la consommation notamment de la viande bovine. Elles ont besoin aussi qu'on défende l'idée de la consommation de viande bovine face à toutes les attaques qu'on voit ici ou là, qui nous expliquent que ce ne serait pas bon de consommer de la viande bovine alors que l'équilibre nutritionnel, et dont la consommation de cette viande a toujours fait partie de nos traditions et de notre équilibre alimentaire. C'est tout ça que je veux défendre dans les semaines à venir, et j'ai parfaitement conscience que dans l'élevage les choses sont très difficiles. Le bonheur des uns fait souvent le malheur des autres, lorsque le prix des céréales flambe, ça veut dire que le coût de l'alimentation pour le bétail flambe aussi, ce qui est une mauvaise nouvelle pour les éleveurs.
Raphaëlle Duchemin : D'un mot, Bruno Le Maire, vous évoquiez la PAC, la Politique Agricole Commune. Vous avez un rendez-vous à la fin du mois de septembre avec les Allemands : est-ce que vous êtes en mesure aujourd'hui de dire et d'assurer que, malgré la pression de certains états membres, les budgets vont être maintenus ?
Bruno Le Maire : Nous nous battons avec l'Allemagne pour que le budget de la PAC ne soit pas renié et reste le même après 2013, au moment de la négociation des perspectives financières. C'est une bataille, je ne l'ai jamais caché, qui est très difficile, parce que les conceptions de la PAC en Europe sont très différentes. Vous avez une partie des Etats qui estime qu'il faut faire moins pour l'agriculture et importer des produits de l'étranger, et une autre partie des Etats qui, aujourd'hui, est majoritaire grâce aux efforts de la France qui estime qu'il faut être autonome en matière alimentaire, autonome en matière agricole, et donc garder un budget de la PAC significatif. Je pense que nous l'emporterons.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 2 septembre 2010