Entretien de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre des affaires étrangères et européennes, avec des représentants de la presse française le 25 novembre 2010 à Berlin, sur la coopération franco-allemande dans la gestion de la crise de l'euro.

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Circonstance : Voyage de Michèle Alliot-Marie en Allemagne, à Berlin le 25 novembre 2010

Texte intégral

Q - On a entendu à Paris des réactions un peu agacées à l'égard de la position allemande - ce qu'Angela Merkel a encore répété - à savoir qu'il serait nécessaire, dans la gestion de la crise, de faire payer les investisseurs privés. Qu'est-ce que vous en pensez ? En avez-vous parlé avec Mme Merkel et que vous a-t-elle répondu ?
R - Ce dont nous avons parlé avec le ministre des Affaires étrangères, et rapidement avec la chancelière, c'est de la nécessité de donner un signal fort - notamment à tous les spéculateurs qui aujourd'hui parient un peu sur la disparition de l'euro - que nous sommes attachés à un euro solide et que nous prendrons les mesures nécessaires pour ce faire.
Deuxièmement, nous avons également mis au point un système qui nous assure de notre réactivité et nous sommes en train de travailler sur un système qui nous donne les structures et les règles nécessaires pour répondre à toutes crises. C'est cela qui est essentiel. C'est le message qui est ainsi passé. Ensuite, bien entendu, et en liaison avec les travaux que fait également le président de l'Union européenne, il y a un certain nombre de points d'ajustement mais le message à passer, c'est que nous ne laisserons pas faire la spéculation et que nous sommes attachés à la solidité de l'euro.
Q - Les Français ne sont-ils pas un peu agacés par les Allemands en ce moment ?
R - Qu'il y ait des discussions c'est quelque chose qui peut être tout à fait normal. Ce n'est pas un problème si nous ne sommes pas d'accord forcément sur tout ; sinon on finirait par s'ennuyer d'ailleurs. Il y a des discussions et c'est dans ces discussions que chacun peut avancer effectivement ses arguments, mais le seul message qui doit être donné, à la fois aux opinions publiques qui ont besoin d'être rassurées aussi sur le devenir de leur pays et sur le devenir de l'Europe, comme le message que nous devons faire passer à l'égard de ceux qui organisent des spéculations contre tel ou tel pays dans l'idée d'affaiblir l'Europe et l'euro, c'est que nous ne les laisserons pas faire et que le couple franco-allemand dans ce domaine a un rôle solide et leader.
Q - Est-ce que ce que propose la chancelière à l'avenir - avoir des clauses qui fassent que ceux qui souscrivent des obligations d'Etat puissent être associés à la résolution de crises - vous parait faire partie de ces mesures nécessaires et de ce signal fort ?
R - Ne faisons pas passer les modalités avant les finalités et la finalité qui est recherchée - et unanimement recherchée - c'est effectivement celle de garantir la solidité de l'euro. Ensuite il y a des discussions qui auront lieu, il ne s'agit pas de les anticiper.
Q - Quand attendez-vous des prises de décisions ou des discussions sur ce sujet concrètement au niveau franco-allemand ou européen ?
R - Il y a des lieux qui sont destinés à ce type de discussions. Le prochain Conseil des ministres franco-allemand sera sans doute l'un de ces lieux. Il y a des lieux qui ne sont pas à ce niveau gouvernemental et qui continuent de fonctionner et puis, bien entendu, il y aura des rencontres européennes.
Q - Pourquoi avez-vous souhaité vous rendre en Allemagne pour cette première visite bilatérale ?
R - C'est un peu un symbole, un symbole des liens très étroits qui unissent la France et l'Allemagne, un symbole également de l'importance du couple franco-allemand dans la construction européenne. C'est pour moi aussi l'occasion de réaffirmer mon amitié vis-à-vis d'un certain nombre de mes partenaires allemands et notamment vis-à-vis de la chancelière que je connais depuis très longtemps.
Q - Ce sont également vos premiers pas au Quai d'Orsay Qu'est-ce qui vous paraît urgent ? Quels sont vos premiers dossiers, ceux auxquels vous allez vous atteler là dans les jours qui viennent ?
R - Vous savez, tout est urgent au Quai d'Orsay. On est en permanence dans des situations de crise. Je pense par exemple à Haïti et aux problèmes des enfants, mais également à la Corée et à un certain nombre d'autres dossiers de ce genre. Et d'un autre côté, on est également dans l'urgence de faire avancer des dossiers de fond, on est dans l'urgence de donner à ce ministère tous les moyens d'exprimer totalement son expertise et son rôle dans les relations internationales, en vue d'affirmer la présence et le rayonnement de la France.
Q - Ce soir vous vous rendez au Sénat pour défendre le budget d'un ministère qui est un peu en baisse - on en a beaucoup discuté cet été, il y a eu une polémique d'ailleurs autour de ce budget qui représente 1 % de celui de l'Etat. Comment faites-vous pour le défendre au mieux et est-ce que ce n'est pas une situation un peu difficile ce soir ?
R - Il est vrai que ce soir je vais défendre un budget auquel je n'ai pas du tout participé dans les discussions. C'est toujours quelque chose qui n'est pas très facile. Ce budget exprime des constantes et j'aurai à y ajouter ce qui fera partie de mes priorités. Ce sont des discussions que j'aurai avec le Premier ministre.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 novembre 2010