Texte intégral
Monsieur le Médiateur du cinéma, Cher Roch-Olivier Maistre,
Madame la Présidente du Centre national du cinéma et de l'image animée, Chère Véronique,
Mesdames et Messieurs les présidents,
Chers ami(e)s ,
« La transparence et l'obstacle » : c'est le titre d'un très beau livre que Jean Starobinski a consacré à Jean-Jacques Rousseau. Ce pourrait être la leçon tirée des longs mois de débats et de discussions que les signataires de cet accord ont menés pour parvenir à s'entendre sur ce protocole, d'abord sous l'égide du Centre national du cinéma et de l'image animée, puis sous la médiation éclairée du Médiateur du cinéma.
La transparence était l'objectif qu'ils s'étaient fixés. Et à force de patience et de concessions mutuelles - elles sont toujours nécessaires en ces circonstances -, les obstacles, nombreux, qui se dressaient entre les volontés des uns et les aspirations des autres sont tombés, et le désir de concorde a finalement primé sur toute autre considération.
Je me dois donc en premier lieu de féliciter tous les protagonistes de cette longue négociation.
Mais je voudrais aussi remercier ceux qui les ont guidés avec efficacité dans la recherche d'un compromis et d'un bon équilibre.
D'abord René Bonnell, qui a exposé avec lucidité et expertise les termes du débat sur la transparence des recettes et lancé des pistes pour le résoudre.
Ensuite le CNC, qui à lancé les premiers travaux autour des conclusions du rapport Bonnell, et enfin le Médiateur du cinéma qui a, en l'espèce, manifesté des talents de conciliateur qui vont bien au delà des types de conflits que la loi le charge habituellement de résoudre.
Je tiens donc à rendre un hommage tout particulier et très appuyé à l'implication personnelle de Roch-Olivier Maistre dans ce processus et, à la détermination tout autant qu'à l'habileté et la patience qui furent les siennes pour faire en sorte que cet accord soit conclu.
Car ce protocole est un moment, je crois pouvoir le dire sans exagérer, historique pour le cinéma.
D'abord parce que la volonté de transparence a toujours été dans le cinéma français la contrepartie naturelle du soutien économique considérable que l'Etat accorde à la filière cinématographique.
Cet impératif de transparence s'est traduit dans les institutions qui organisent et accompagnent le cinéma français depuis plus de soixante ans. Le principe des déclarations de recettes des exploitants au CNC, le registre public de la cinématographie et de l'audiovisuel qui assure la publicité des contrats et, par là, sécurise l'économie du secteur, la transparence et l'objectivité des conditions d'accès au soutien de l'Etat, assurée par la procédure d'agrément des films : tout cela participe de cette exigence renouvelée.
Aujourd'hui, un palier supplémentaire est franchi en faveur de la transparence de la filière. Et il est très important que cette avancée vienne des professionnels eux-mêmes, et ne soit pas une obligation imposée de l'extérieur.
J'y vois un double symbole. D'abord celui de l'unité de vos professions. Elle est toujours nécessaire - c'est une évidence de le dire - parce qu'un film est le fruit d'une entreprise collective. L'entente et la bonne intelligence au sein du couple auteur-producteur sont essentielles à la réussite de l'oeuvre. C'est une dialectique à la fois complexe et fructueuse, qui a d'ailleurs inspiré de nombreux scénarios...
Dans une optique plus générale, cette unité est plus que jamais nécessaire dans une période où nous sommes, à tous moments, confrontés à des tentatives de déstabilisation du principe d'exception culturelle- qui nous est si cher et fonde notre action commune.
Nous avons tous en tête deux exemples très récents où j'ai dû réagir avec zèle et énergie pour éviter la mise en péril de ce qui fait aujourd'hui une des composantes essentielle de la vitalité de notre cinéma, son système de financement.
Dans ces moments là, le ministre de la Culture et de la Communication doit avoir à ses côtés des professionnels unis, qui lui permettent d'appuyer et de légitimer les combats qu'il conduit.
Les manifestations d'union comme celle d'aujourd'hui renforcent le cinéma français et il est important que les professions du cinéma manifestent leur capacité à élaborer des compromis dans l'intérêt de tous. Cela rend plus actuel et plus légitime le soutien que leur accorde la puissance publique.
Par ailleurs, ce protocole d'accord définit pour la première fois avec clarté et limpidité - et j' en félicite tous ceux qui ont travaillé à sa rédaction - des mécanismes essentiels pour l'économie du cinéma.
En les détaillant avec une clarté et une précision toutes cartésiennes, il fait oeuvre de pédagogie et revêt un caractère normatif. En un mot, c'est un progrès, comme l'est par principe toute amélioration du niveau de transparence.
En établissant clairement les éléments qui définissent le coût du film, en proposant aussi de préciser une méthode claire de calcul de l'amortissement du coût du film, en prévoyant l'information des auteurs, la possibilité d'audits, la mise en place d'une commission de suivi, cet accord est de nature à rétablir un climat de confiance, là où subsistaient encore beaucoup de question sans réponses et de conflits potentiels.
Pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, mais aussi parce que toutes les conditions sont réunies pour le faire, j'envisage donc d'étendre cet accord par arrêté ministériel.
Enfin, votre signature à tous, apposée sur ce document, va permettre aussi que nous avancions de manière plus assurée sur deux autres chantiers engagés eux aussi depuis longtemps : la revalorisation du soutien au producteur délégué, la création d'une nouvelle aide aux auteurs, qui concrétisent les travaux du « Club des 13 », sans oublier l'avancement des négociations autour d'une nouvelle convention collective du cinéma.
Sur le premier point je signerai dans les prochains jours les textes préparés par le CNC qui font suite aux conclusion des travaux du « Club des 13 ». Ceux-ci vont permettre :
1- De renforcer le soutien à la production indépendante, notamment aux producteurs délégués, avec deux mesures qui se complètent : une revalorisation du barème du soutien automatique à la production jusqu'à 5 millions d'entrées et une augmentation de la part du soutien réservée au producteur délégué d'une oeuvre.
2- De renforcer aussi le soutien aux auteurs et d'améliorer leurs conditions de rémunération avec, là aussi, deux mesures : un bonus de 50% du soutien automatique lorsqu'un producteur investira dans les dépenses d'écriture d'un projet ; une aide forfaitaire aux auteurs dont le film précédent n'a pas bénéficié de financements de télévisions. Il s'agit en clair de leur permettre de lancer l'écriture et la conception d'un nouveau projet.
3- S'y ajoute l'augmentation du budget de l'avance sur recettes qui atteindra 30 millions d'euros en 2011. Pour y avoir contribué moi-même, je sais son importance pour les producteurs et les auteurs de cinéma. Je saisis cette occasion pour remercier Florence Malraux de sa remarquable présidence et saluer l'arrivée de Paul Otchalovsky-Laurens qui a accepté cette tâche avec enthousiasme.
Ces mesures entreront en vigueur dès le début de l'année 2011.
Sur la convention collective, qui est un autre champ de négociation décisif en lien avec le ministre du travail, de l'Emploi et de la Solidarité, je souhaite que sous la conduite du médiateur que j'ai désigné, Antoine Gosset Grainville, un compromis équilibré soit trouvé entre la juste rémunération des salariés de la production et la nécessité de préserver les films dont l'économie est fragile.
Enfin j'ai donné mon accord pour que, conformément, aux souhaits qui ont été exprimés, un nouveau chantier soit ouvert sur la question de la distribution des films.
Une page importante a été tournée, avec votre concours actif. Je vous en remercie encore car vos efforts nous permettront de porter une ambition : faire vivre et prospérer, ensemble, un cinéma créatif, audacieux, ouvert à la diversité mais aussi apprécié dans le monde entier. C'est le projet qui nous réunit, qui nous rassemble.
Merci de votre attention.
Source http://www.culture.gouv.fr, le 17 décembre 2010