Texte intégral
Q - Henri de Raincourt bonjour, merci d'être avec nous. Au Conseil des ministres de ce matin, le chef de l'Etat a édicté une nouvelle règle concernant les vacances des ministres. Désormais vous êtes cantonnés à la France, fini les vacances à l'étranger, sauf accord express de Matignon. Que pensez-vous de cette nouvelle règle ?
R - Je pense d'abord que ce n'est pas une punition parce que de passer ses vacances...
Q - Il ne faut pas le prendre comme cela.
R - Bien sûr que non... mais que de passer ses vacances en France, c'est un plaisir ! Il y a des paysages formidables, des régions qui ne le sont pas moins, des possibilités de découvertes innombrables.
Q - Vous-même à Noël, vous étiez en vacances à quel endroit ?
R - Je l'ai déjà dit, je vais en vacances soit dans l'Yonne chez moi, dans la maison où j'ai toujours habité, soit dans ma maison de vacances en Loire Atlantique. Mon univers estival, mon univers de vacances c'est cela, je n'ai donc pas de problème de transport !
Q - Pensez-vous que cette intervention du chef de l'Etat en Conseil des ministres est de nature à clore la polémique ?
R - Je l'espère bien entendu. En tout cas, il faut la resituer dans son contexte. C'était à la suite d'une communication du Premier ministre, qui lui-même ce matin nous disait dans quelle condition un prolongement serait donné au rapport qui a été présenté au gouvernement par le vice-président du Conseil d'Etat de façon à régler si possible définitivement - si tant est que l'on puisse agir définitivement sur toutes ces questions relatives aux conflits d'intérêt - la transparence de la vie politique, et des ministres en particulier. Ce qui semble bien, c'est que les choses aient évolué par rapport à ce qui se passait il y a 10, 15 ou 20 ans : ce qui alors était usuel et ne choquait personne, aujourd'hui soulève de vrais questionnements dans l'opinion publique. Il ne s'agit pas là-dessus de porter des jugements hâtifs, voire définitifs, il s'agit tout simplement de prendre en compte ce que l'opinion nous dit, en particulier à travers les média, et puis d'adopter les mesures nécessaires pour que la confiance existe sans arrière pensée entre les habitants et leurs élus.
Q - Le rapport Sauvet préconisait notamment un non-cumul très strict entre la fonction de ministre et l'élection, la fonction d'un maire ou de président de Conseil général. Vous, vous êtes favorable à ce non cumul très strict ?
R - Je pense qu'en matière de cumul en France, depuis déjà un certain temps, sous plusieurs gouvernements un certain nombre de modifications ont été apportées et qu'aujourd'hui il y a un équilibre qui existe entre un mandat national et un mandat local, éventuellement ce mandat local pouvant être une fonction exécutive locale. Je pense qu'il ne faut pas aller au-delà.
Q - Les ministres peuvent, dans l'exercice de leurs fonctions, garder quand même un mandat ?
R - Oui, je ne vois pas pourquoi les ministres ne pourraient pas garder un mandat. Je pense au contraire que c'est une manière de conserver un contact avec la population tous les jours, d'avoir des contacts très forts, presque affectifs avec les habitants. C'est donc un moyen d'échanger, il y a une grande réactivité. Pour ce qui me concerne, je ne crois pas qu'il soit souhaitable d'aller au-delà de ce que la réglementation prévoit aujourd'hui.
Q - François Bayrou était, ce matin, sur France Info. Il a fustigé les vacances de Michèle Alliot-Marie, de François Fillon mais aussi de Nicolas Sarkozy. Craignez-vous un impact négatif sur l'opinion publique des révélations de toutes ces vacances ?
R - Si les média reflètent le sentiment de l'opinion publique, au moins pour partie, on peut considérer effectivement que ces évènements ont un certain retentissement dans l'opinion publique. Néanmoins, je pense que François Bayrou aurait gagné en crédibilité lorsqu'il s'est exprimé sur ce sujet en disant que tout l'échiquier politique, de gauche comme de droite, va en vacances au Maroc, en Tunisie et en Egypte. Pourquoi ? J'ai envie de vous dire, pour des raisons très simples : il y a certaines périodes de l'année, pour nous qui vivons en France, et Dieu sait si c'est un pays formidable, où il est agréable, en plein hiver, d'aller dans un pays où le climat apparait plus tempéré, où le soleil brille peut-être un peu plus fort et où effectivement cela permet de passer des vacances agréables. Je crois qu'il ne faut pas donner plus d'importance, et en tout cas une importance politique, au fait que l'on aille en vacances au Maroc, en Tunisie, ou en Egypte. On y va parce que le climat y est bien agréable au milieu de l'hiver, c'est faire une coupure qui est reposante et roborative.
Q - Vous-même revenez d'un déplacement dans des endroits où les températures sont tempérées, mais ce n'était pas vos vacances. Renaud Muselier vous pose une question à ce propos : «Vous rentrez de Mauritanie, du Burkina Faso, c'est un pays classé par la diplomatie française en zone rouge ; on voit qu'en Mauritanie, il y a déjà eu des jeunes qui se sont immolés, quel peut être notre rôle, à nous Français, dans le cadre de votre ministère pour aider ces pays et faire en sorte que l'on puisse avancer ?»
R - Je constate, et je n'en suis pas surpris, que la question qui est posée par Renaud Muselier est non seulement d'une grande actualité, mais elle illustre également le fait qu'il a eu lui-même des responsabilités imminentes au ministère des Affaires étrangères et qu'il connait la situation. Chacun sait aujourd'hui qu'il y a des menaces terroristes dans cette partie de l'Afrique qui s'appelle le Sahel : cela concerne l'Algérie, le Mali, le Niger, la Mauritanie, une petite partie du Burkina Faso. Par rapport à cela, il faut adopter des mesures de vigilance, se déplacer dans ces zones que si l'on y est vraiment contraint et pour des raisons professionnelles, en ayant pris le soin, au préalable, de prévenir les autorités locales et/ou l'ambassade, de façon à ce que l'on puisse dire à la personne : «vous y allez» ou au contraire «vous n'y allez pas» ou «vous devez être accompagnée», en tout cas que les choses soient connues et sues.
Q - Vous avez dit que la France était à la disposition du Sahel pour lutter contre Al-Qaïda ? De quelle manière la France peut aider ces pays à lutter contre Al-Qaïda ?
R - La France peut aider de deux manières. Nous pouvons sur le plan technique aider les pays en matière de surveillance, de photographies puisque nous avons des satellites, des avions qui volent en permanence pour voir, si tant est que l'on puisse les apercevoir, quels sont les mouvements des terroristes et dans quel secteur. Ce que nous pouvons faire c'est favoriser tous les échanges d'informations entre les responsables des différents pays, c'est quelque chose d'extrêmement important. Nous pouvons aussi fournir du matériel pour écouter les conversations, par exemple téléphoniques, qui donnent toujours des informations extrêmement précieuses sur les intentions que peuvent avoir, dans tel ou tel domaine, dans tel ou tel secteur, les terroristes. Il s'agit d'interventions quotidiennes simples que les Français peuvent mettre à la disposition des responsables des différents pays concernés. Mais je prends toujours la précaution de dire que c'est à la demande expresse des autorités, parce que le temps, si tant est qu'il ait existé, où la France intervenait directement, certes en prévenant les gens sur le terrain concerné, est aujourd'hui révolu. La politique française à l'égard de l'Afrique, c'est une politique de respect mutuel où la France vient en aide à partir du moment où le pays concerné sollicite cette aide.
Q - Si on a des forces spéciales qui sont positionnées dans ces pays, si c'est le cas, c'est à la demande de ces pays ?
R - Si des forces spéciales à un moment ou à un autre sont amenées à être stationnées à tel ou tel endroit, effectivement cela ne peut être qu'à la demande de ces pays. Sur une opération spécifique, comme cela c'est fait récemment au Niger pour tenter de sauver nos deux jeunes compatriotes qui avaient été enlevés et qui ont été sauvagement assassinés, l'intervention de nos forces spéciales, là encore, ne peut être déclenchée que sur demande expresse des autorités locales.
Q - Avez-vous eu des nouvelles de nos cinq compatriotes qui sont otages dans cette région ?
R - Je dois dire que c'est très compliqué puisque vous savez qu'AQMI, qui est la branche locale d'Al-Qaïda, est en fait éclatée entre un certain nombre de groupes et de groupes rivaux. L'établissement d'un contact est déjà une opération extrêmement difficile mais quand on y parvient grâce à un certain nombre d'intermédiaires, on n'est pas sûr du tout d'avoir le bon interlocuteur au bon moment.
Q - Ce que vous nous dites, c'est que nos compatriotes sont otages dans plusieurs endroits et aux mains de différentes factions ?
R - Ce que je vous dis, c'est qu'il n'y a pas de solution figée et que tout cela est extrêmement fluctuant, un peu comme quand on est sur des sables mouvants, on croit que l'on est là mais en réalité c'est ailleurs que cela se passe. C'est très compliqué et il faut faire preuve de beaucoup de prudence et naturellement, mais chacun le comprendra, de beaucoup de discrétion.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 février 2011
R - Je pense d'abord que ce n'est pas une punition parce que de passer ses vacances...
Q - Il ne faut pas le prendre comme cela.
R - Bien sûr que non... mais que de passer ses vacances en France, c'est un plaisir ! Il y a des paysages formidables, des régions qui ne le sont pas moins, des possibilités de découvertes innombrables.
Q - Vous-même à Noël, vous étiez en vacances à quel endroit ?
R - Je l'ai déjà dit, je vais en vacances soit dans l'Yonne chez moi, dans la maison où j'ai toujours habité, soit dans ma maison de vacances en Loire Atlantique. Mon univers estival, mon univers de vacances c'est cela, je n'ai donc pas de problème de transport !
Q - Pensez-vous que cette intervention du chef de l'Etat en Conseil des ministres est de nature à clore la polémique ?
R - Je l'espère bien entendu. En tout cas, il faut la resituer dans son contexte. C'était à la suite d'une communication du Premier ministre, qui lui-même ce matin nous disait dans quelle condition un prolongement serait donné au rapport qui a été présenté au gouvernement par le vice-président du Conseil d'Etat de façon à régler si possible définitivement - si tant est que l'on puisse agir définitivement sur toutes ces questions relatives aux conflits d'intérêt - la transparence de la vie politique, et des ministres en particulier. Ce qui semble bien, c'est que les choses aient évolué par rapport à ce qui se passait il y a 10, 15 ou 20 ans : ce qui alors était usuel et ne choquait personne, aujourd'hui soulève de vrais questionnements dans l'opinion publique. Il ne s'agit pas là-dessus de porter des jugements hâtifs, voire définitifs, il s'agit tout simplement de prendre en compte ce que l'opinion nous dit, en particulier à travers les média, et puis d'adopter les mesures nécessaires pour que la confiance existe sans arrière pensée entre les habitants et leurs élus.
Q - Le rapport Sauvet préconisait notamment un non-cumul très strict entre la fonction de ministre et l'élection, la fonction d'un maire ou de président de Conseil général. Vous, vous êtes favorable à ce non cumul très strict ?
R - Je pense qu'en matière de cumul en France, depuis déjà un certain temps, sous plusieurs gouvernements un certain nombre de modifications ont été apportées et qu'aujourd'hui il y a un équilibre qui existe entre un mandat national et un mandat local, éventuellement ce mandat local pouvant être une fonction exécutive locale. Je pense qu'il ne faut pas aller au-delà.
Q - Les ministres peuvent, dans l'exercice de leurs fonctions, garder quand même un mandat ?
R - Oui, je ne vois pas pourquoi les ministres ne pourraient pas garder un mandat. Je pense au contraire que c'est une manière de conserver un contact avec la population tous les jours, d'avoir des contacts très forts, presque affectifs avec les habitants. C'est donc un moyen d'échanger, il y a une grande réactivité. Pour ce qui me concerne, je ne crois pas qu'il soit souhaitable d'aller au-delà de ce que la réglementation prévoit aujourd'hui.
Q - François Bayrou était, ce matin, sur France Info. Il a fustigé les vacances de Michèle Alliot-Marie, de François Fillon mais aussi de Nicolas Sarkozy. Craignez-vous un impact négatif sur l'opinion publique des révélations de toutes ces vacances ?
R - Si les média reflètent le sentiment de l'opinion publique, au moins pour partie, on peut considérer effectivement que ces évènements ont un certain retentissement dans l'opinion publique. Néanmoins, je pense que François Bayrou aurait gagné en crédibilité lorsqu'il s'est exprimé sur ce sujet en disant que tout l'échiquier politique, de gauche comme de droite, va en vacances au Maroc, en Tunisie et en Egypte. Pourquoi ? J'ai envie de vous dire, pour des raisons très simples : il y a certaines périodes de l'année, pour nous qui vivons en France, et Dieu sait si c'est un pays formidable, où il est agréable, en plein hiver, d'aller dans un pays où le climat apparait plus tempéré, où le soleil brille peut-être un peu plus fort et où effectivement cela permet de passer des vacances agréables. Je crois qu'il ne faut pas donner plus d'importance, et en tout cas une importance politique, au fait que l'on aille en vacances au Maroc, en Tunisie, ou en Egypte. On y va parce que le climat y est bien agréable au milieu de l'hiver, c'est faire une coupure qui est reposante et roborative.
Q - Vous-même revenez d'un déplacement dans des endroits où les températures sont tempérées, mais ce n'était pas vos vacances. Renaud Muselier vous pose une question à ce propos : «Vous rentrez de Mauritanie, du Burkina Faso, c'est un pays classé par la diplomatie française en zone rouge ; on voit qu'en Mauritanie, il y a déjà eu des jeunes qui se sont immolés, quel peut être notre rôle, à nous Français, dans le cadre de votre ministère pour aider ces pays et faire en sorte que l'on puisse avancer ?»
R - Je constate, et je n'en suis pas surpris, que la question qui est posée par Renaud Muselier est non seulement d'une grande actualité, mais elle illustre également le fait qu'il a eu lui-même des responsabilités imminentes au ministère des Affaires étrangères et qu'il connait la situation. Chacun sait aujourd'hui qu'il y a des menaces terroristes dans cette partie de l'Afrique qui s'appelle le Sahel : cela concerne l'Algérie, le Mali, le Niger, la Mauritanie, une petite partie du Burkina Faso. Par rapport à cela, il faut adopter des mesures de vigilance, se déplacer dans ces zones que si l'on y est vraiment contraint et pour des raisons professionnelles, en ayant pris le soin, au préalable, de prévenir les autorités locales et/ou l'ambassade, de façon à ce que l'on puisse dire à la personne : «vous y allez» ou au contraire «vous n'y allez pas» ou «vous devez être accompagnée», en tout cas que les choses soient connues et sues.
Q - Vous avez dit que la France était à la disposition du Sahel pour lutter contre Al-Qaïda ? De quelle manière la France peut aider ces pays à lutter contre Al-Qaïda ?
R - La France peut aider de deux manières. Nous pouvons sur le plan technique aider les pays en matière de surveillance, de photographies puisque nous avons des satellites, des avions qui volent en permanence pour voir, si tant est que l'on puisse les apercevoir, quels sont les mouvements des terroristes et dans quel secteur. Ce que nous pouvons faire c'est favoriser tous les échanges d'informations entre les responsables des différents pays, c'est quelque chose d'extrêmement important. Nous pouvons aussi fournir du matériel pour écouter les conversations, par exemple téléphoniques, qui donnent toujours des informations extrêmement précieuses sur les intentions que peuvent avoir, dans tel ou tel domaine, dans tel ou tel secteur, les terroristes. Il s'agit d'interventions quotidiennes simples que les Français peuvent mettre à la disposition des responsables des différents pays concernés. Mais je prends toujours la précaution de dire que c'est à la demande expresse des autorités, parce que le temps, si tant est qu'il ait existé, où la France intervenait directement, certes en prévenant les gens sur le terrain concerné, est aujourd'hui révolu. La politique française à l'égard de l'Afrique, c'est une politique de respect mutuel où la France vient en aide à partir du moment où le pays concerné sollicite cette aide.
Q - Si on a des forces spéciales qui sont positionnées dans ces pays, si c'est le cas, c'est à la demande de ces pays ?
R - Si des forces spéciales à un moment ou à un autre sont amenées à être stationnées à tel ou tel endroit, effectivement cela ne peut être qu'à la demande de ces pays. Sur une opération spécifique, comme cela c'est fait récemment au Niger pour tenter de sauver nos deux jeunes compatriotes qui avaient été enlevés et qui ont été sauvagement assassinés, l'intervention de nos forces spéciales, là encore, ne peut être déclenchée que sur demande expresse des autorités locales.
Q - Avez-vous eu des nouvelles de nos cinq compatriotes qui sont otages dans cette région ?
R - Je dois dire que c'est très compliqué puisque vous savez qu'AQMI, qui est la branche locale d'Al-Qaïda, est en fait éclatée entre un certain nombre de groupes et de groupes rivaux. L'établissement d'un contact est déjà une opération extrêmement difficile mais quand on y parvient grâce à un certain nombre d'intermédiaires, on n'est pas sûr du tout d'avoir le bon interlocuteur au bon moment.
Q - Ce que vous nous dites, c'est que nos compatriotes sont otages dans plusieurs endroits et aux mains de différentes factions ?
R - Ce que je vous dis, c'est qu'il n'y a pas de solution figée et que tout cela est extrêmement fluctuant, un peu comme quand on est sur des sables mouvants, on croit que l'on est là mais en réalité c'est ailleurs que cela se passe. C'est très compliqué et il faut faire preuve de beaucoup de prudence et naturellement, mais chacun le comprendra, de beaucoup de discrétion.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 février 2011