Texte intégral
C. Roux.- R. Bachelot, ministre de la Solidarité et de la cohésion sociale est notre invitée. Elle a en charge le dossier de la dépendance ; elle a lancé le débat depuis le mois de janvier. Ça tombe bien ! C'est aujourd'hui que N. Sarkozy posera les enjeux de la réforme au Conseil économique et social avec une certitude : rien ne sera bouclé avant la présidentielle de 2012. La question qui se pose ce matin, c'est pourquoi poser les enjeux d'un débat dont on sait que rien ne sera bouclé avant 2012 ?
Une première salve de mesures sera prise dès les lois de financement de la fin 2011 pour 2012. C'est un débat très important, il y a des familles qui souffrent. Vous savez, prendre en charge une personne très, très dépendante c'est un problème financier pour beaucoup de familles, mais de toute façon pour tout le monde c'est très dur. Je fais des réunions sur l'ensemble de la France et la première chose qu'on me dit c'est : devenir le parent de ses parents, c'est quelque chose de très difficile. Donc, c'est un enjeu de société, quelle place pour la personne âgée, c'est se demander ce que cela va devenir - demain on trouvera peut-être un vaccin contre la maladie d'Alzheimer, il y a quand même beaucoup d'équipes qui travaillent sur ce sujet - c'est une question de formation, d'aide aux aidants, de structures.
V. Rosso-Debord, UMP, qui a remis cet été un rapport sur la dépendance, dit : le problème n'est pas dramatique, il manque 8 milliards d'euros et il faut se détendre. Oui, elle a raison. Il faut "se détendre" alors ? R. Bachelot, il n'y a pas urgence ?
Il y a urgence parce que les solutions sont difficiles à prendre et elles doivent être prises longtemps à l'avance. C'est d'autant plus facile de régler un problème qu'on s'en occupe dès maintenant. Il y a des choses qui sont en difficulté, il y a des départements qui financent - 20 % de la dépendance certes - mais il y a des départements où il y a beaucoup de personnes âgées et où le potentiel fiscal est faible. Ces départements-là, il faut les aider. Et puis il y a des familles qui sont en difficulté, pas les plus pauvres, ni les plus aisées. Ce sont ceux qu'on appelle "les classes moyennes modestes", ces fameuses classes moyennes qui ont trop d'argent pour recevoir des aides et pas assez d'argent pour financer la dépendance, et c'est ce que veut régler le président de la République. Alors nous avons constitué des groupes de travail, il y aura un débat public, on va rendre les conclusions en juin. Cela permettra une première série de mesures d'urgence dès la fin de l'année et puis, le débat va être lancé pour d'autres mesures éventuellement.
Est-ce que c'est une réforme qui a des visées électoralistes comme on le lit parfois ?
Pourquoi le réduire à une vision aussi... j'allais dire aussi étroite ? Ce que je vois sur le terrain, c'est qu'il y a un certain nombre de centaines de milliers de personnes dépendantes, que cela pose des problèmes aux familles. Je suis ministre de la Cohésion sociale et des Solidarités, c'est ma responsabilité de répondre à ça. Vous ne pouvez pas dire à ces familles-là : écoutez, on s'occupera de votre cas à un autre moment. La solidarité nationale fait déjà beaucoup de choses. 22 milliards d'euros sont déjà sur la table, c'est à notre portée, et Valérie Rosso-Debord le dit très bien, alors occupons-nous de ce sujet.
Alors, mais c'est cela qu'on ne comprend pas parce qu'elle nous dit donc : "il faut se détendre". On a J. Attali qui nous dit : "la dépendance n'est pas un enjeu majeur aujourd'hui", et pourtant, N. Sarkozy nous dit : "ce sera la réforme majeure de la fin du quinquennat". C'est pour cela qu'on se dit : est-ce que ce ne serait pas une réforme à visée électoraliste ?
C'est un sujet qui est à notre portée, il faut le régler. C'est un sujet qui, si on ne fait rien, ne va pas s'améliorer.
Il y en a d'autres des sujets qui sont... !
Oui, mais je parle - vous m'interrogez sur la dépendance -...vous m'interrogez sur la dépendance. Savez-vous que notre espérance de vie l'année dernière a augmenté de quatre mois sur les douze mois de l'année ? Et que cette espérance de vie est porteuse d'espoir - c'est une bonne nouvelle que notre espérance de vie augmente. Mais c'est aussi un certain nombre d'obligations, et cette augmentation de l'espérance de vie avec l'augmentation des personnes âgées dépendantes. Plus nous nous en occupons tôt et plus nous avons l'occasion de bien résoudre le problème.
Alors N. Sarkozy va poser les enjeux. Les enjeux, ils sont juste financiers, non ?
Ah non ! Il y a des enjeux financiers, bien entendu, et il faut les résoudre. Mais je pense que les enjeux, ce sont aussi des enjeux de société, parce que la place de la personne âgée dans la société, c'est important. Je faisais une réunion sur le terrain. Quand j'ai vu un grand bonhomme d'un mètre quatre-vingt cinq s'effondrer en larmes en disant : "j'ai mon père atteint d'une maladie d'Alzheimer, je n'ai pas de problème de financement, c'est lourd, c'est dur pour moi, j'ai besoin d'être aidé, d'être pris en considération, d'être épaulé !!" Alors, c'est un problème de société, c'est un problème financier, c'est un problème d'aide aux aidants, c'est un problème de formation des personnels, c'est un problème de gouvernance. Comment concilier la proximité de la décision avec l'équité, avec la justice de cette décision ? C'est un beau sujet.
A la Une du Parisien-Aujourd'hui en France, je ne sais pas si vous l'avez vu aujourd'hui, on nous dit : "Ça va coûter très cher". Alors, nous, on vous pose la question qui suit : à qui ?
Alors ça, c'est un des enjeux du débat. J'ai reçu actuellement pratiquement l'ensemble des acteurs politiques, syndicaux, des grandes associations, le MEDEF, des assurances, tout le monde est d'accord pour dire : il faut que le socle qui fonde le financement soit un socle de solidarité nationale. Ce principe étant posé...
Cela veut dire que tout le monde va payer, que tout le monde va participer à l'effort.
Oui, enfin... cela veut dire que chacun va participer à l'effort, comme d'ailleurs actuellement, et ça c'est absolument fondamental. Il y a plusieurs pistes qui sont étudiées : il y a la CSG, il y a l'impôt sur le patrimoine, il y a l'alignement de la cotisation...
Ne passons pas trop vite sur les pistes, si vous le voulez bien.
Comme vous voulez !
Quelle est la piste qui a votre préférence ?
A partir de ce principe qui est le socle c'est la solidarité nationale, nous étudions toutes les pistes. D'abord, il faut faire une vraie étude du financement. Là, j'ai regardé le titre, avec beaucoup d'intérêt le titre du Parisien, « Ça va coûter cher », pour l'instant nous avons des maquettes financières qui ne sont pas encore stabilisées. C'est d'ailleurs un des sujets du groupe de travail et du débat - et du débat qui va fixer cela.
Ça veut dire que vous ne vous êtes pas arrêtés sur le chiffre ? C'est-à-dire on parle de 30 jusqu'à présent.
Cela demande à être vérifié encore.
Instaurer une journée de solidarité, oui ou non ?
C'est une des pistes, c'est une des pistes. Ne me faites pas répondre : toutes les solutions sont sur la table, donc, je n'ai pas de préférence à ce moment du débat.
Vous connaissez désormais très bien le dossier.
Oui.
Est-ce que sur la philosophie générale du financement vous pouvez nous en dire un peu plus ?
Non, pas pour l'instant.
"Non, pas pour l'instant" ?!! Parce que F. Chérèque dit qu'"il faut que tout le monde participe à l'effort".
Oui, effectivement.
Et il dit : "tous les revenus, sur tous les patrimoines".
Oui. F. Chérèque dit cela, B. Thibault dit autre chose, le MEDEF dit une troisième chose. Il faut absolument que nous laissions toutes les pistes ouvertes. À la fin du mois de juin, donc, très prochainement, si vous m'invitez je reviendrais vous voir et je vous dirais en priorité les pistes.
C'est intéressant sur la méthode. Cela veut dire que c'est l'anti-réforme des retraites que vous êtes en train de faire. C'est-à-dire, que vous donnez la parole à tout le monde et vous écoutez tout le monde.
J'écoute tout le monde effectivement, parce que c'est un débat qui est un débat très ouvert. Les retraites, les enjeux nous les connaissions. Le débat avait été ouvert il y a très longtemps ; il y a trente ans que le débat sur les retraites avait été ouvert et on avait beaucoup débattu. Il était temps de prendre des décisions, c'était urgent. Là, on le dit très bien : nous avons le temps d'instaurer un débat. Il faut que les Français s'approprient ce débat.
Et est-ce que vous pensez qu'on ira vers un consensus national ? Vous avez rencontré par exemple récemment M. Aubry. Est-ce que vous pensez que, sur ce sujet-là, il peut y avoir pas une union nationale mais en tout cas, une position commune ?
C'est difficile à dire pour l'instant. Ce que je note quand même, c'est qu'il y a un certain nombre de principes qui recueillent le consensus. Le fait que la solidarité doit être le socle du financement rencontre le consensus.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 8 février 2011
Une première salve de mesures sera prise dès les lois de financement de la fin 2011 pour 2012. C'est un débat très important, il y a des familles qui souffrent. Vous savez, prendre en charge une personne très, très dépendante c'est un problème financier pour beaucoup de familles, mais de toute façon pour tout le monde c'est très dur. Je fais des réunions sur l'ensemble de la France et la première chose qu'on me dit c'est : devenir le parent de ses parents, c'est quelque chose de très difficile. Donc, c'est un enjeu de société, quelle place pour la personne âgée, c'est se demander ce que cela va devenir - demain on trouvera peut-être un vaccin contre la maladie d'Alzheimer, il y a quand même beaucoup d'équipes qui travaillent sur ce sujet - c'est une question de formation, d'aide aux aidants, de structures.
V. Rosso-Debord, UMP, qui a remis cet été un rapport sur la dépendance, dit : le problème n'est pas dramatique, il manque 8 milliards d'euros et il faut se détendre. Oui, elle a raison. Il faut "se détendre" alors ? R. Bachelot, il n'y a pas urgence ?
Il y a urgence parce que les solutions sont difficiles à prendre et elles doivent être prises longtemps à l'avance. C'est d'autant plus facile de régler un problème qu'on s'en occupe dès maintenant. Il y a des choses qui sont en difficulté, il y a des départements qui financent - 20 % de la dépendance certes - mais il y a des départements où il y a beaucoup de personnes âgées et où le potentiel fiscal est faible. Ces départements-là, il faut les aider. Et puis il y a des familles qui sont en difficulté, pas les plus pauvres, ni les plus aisées. Ce sont ceux qu'on appelle "les classes moyennes modestes", ces fameuses classes moyennes qui ont trop d'argent pour recevoir des aides et pas assez d'argent pour financer la dépendance, et c'est ce que veut régler le président de la République. Alors nous avons constitué des groupes de travail, il y aura un débat public, on va rendre les conclusions en juin. Cela permettra une première série de mesures d'urgence dès la fin de l'année et puis, le débat va être lancé pour d'autres mesures éventuellement.
Est-ce que c'est une réforme qui a des visées électoralistes comme on le lit parfois ?
Pourquoi le réduire à une vision aussi... j'allais dire aussi étroite ? Ce que je vois sur le terrain, c'est qu'il y a un certain nombre de centaines de milliers de personnes dépendantes, que cela pose des problèmes aux familles. Je suis ministre de la Cohésion sociale et des Solidarités, c'est ma responsabilité de répondre à ça. Vous ne pouvez pas dire à ces familles-là : écoutez, on s'occupera de votre cas à un autre moment. La solidarité nationale fait déjà beaucoup de choses. 22 milliards d'euros sont déjà sur la table, c'est à notre portée, et Valérie Rosso-Debord le dit très bien, alors occupons-nous de ce sujet.
Alors, mais c'est cela qu'on ne comprend pas parce qu'elle nous dit donc : "il faut se détendre". On a J. Attali qui nous dit : "la dépendance n'est pas un enjeu majeur aujourd'hui", et pourtant, N. Sarkozy nous dit : "ce sera la réforme majeure de la fin du quinquennat". C'est pour cela qu'on se dit : est-ce que ce ne serait pas une réforme à visée électoraliste ?
C'est un sujet qui est à notre portée, il faut le régler. C'est un sujet qui, si on ne fait rien, ne va pas s'améliorer.
Il y en a d'autres des sujets qui sont... !
Oui, mais je parle - vous m'interrogez sur la dépendance -...vous m'interrogez sur la dépendance. Savez-vous que notre espérance de vie l'année dernière a augmenté de quatre mois sur les douze mois de l'année ? Et que cette espérance de vie est porteuse d'espoir - c'est une bonne nouvelle que notre espérance de vie augmente. Mais c'est aussi un certain nombre d'obligations, et cette augmentation de l'espérance de vie avec l'augmentation des personnes âgées dépendantes. Plus nous nous en occupons tôt et plus nous avons l'occasion de bien résoudre le problème.
Alors N. Sarkozy va poser les enjeux. Les enjeux, ils sont juste financiers, non ?
Ah non ! Il y a des enjeux financiers, bien entendu, et il faut les résoudre. Mais je pense que les enjeux, ce sont aussi des enjeux de société, parce que la place de la personne âgée dans la société, c'est important. Je faisais une réunion sur le terrain. Quand j'ai vu un grand bonhomme d'un mètre quatre-vingt cinq s'effondrer en larmes en disant : "j'ai mon père atteint d'une maladie d'Alzheimer, je n'ai pas de problème de financement, c'est lourd, c'est dur pour moi, j'ai besoin d'être aidé, d'être pris en considération, d'être épaulé !!" Alors, c'est un problème de société, c'est un problème financier, c'est un problème d'aide aux aidants, c'est un problème de formation des personnels, c'est un problème de gouvernance. Comment concilier la proximité de la décision avec l'équité, avec la justice de cette décision ? C'est un beau sujet.
A la Une du Parisien-Aujourd'hui en France, je ne sais pas si vous l'avez vu aujourd'hui, on nous dit : "Ça va coûter très cher". Alors, nous, on vous pose la question qui suit : à qui ?
Alors ça, c'est un des enjeux du débat. J'ai reçu actuellement pratiquement l'ensemble des acteurs politiques, syndicaux, des grandes associations, le MEDEF, des assurances, tout le monde est d'accord pour dire : il faut que le socle qui fonde le financement soit un socle de solidarité nationale. Ce principe étant posé...
Cela veut dire que tout le monde va payer, que tout le monde va participer à l'effort.
Oui, enfin... cela veut dire que chacun va participer à l'effort, comme d'ailleurs actuellement, et ça c'est absolument fondamental. Il y a plusieurs pistes qui sont étudiées : il y a la CSG, il y a l'impôt sur le patrimoine, il y a l'alignement de la cotisation...
Ne passons pas trop vite sur les pistes, si vous le voulez bien.
Comme vous voulez !
Quelle est la piste qui a votre préférence ?
A partir de ce principe qui est le socle c'est la solidarité nationale, nous étudions toutes les pistes. D'abord, il faut faire une vraie étude du financement. Là, j'ai regardé le titre, avec beaucoup d'intérêt le titre du Parisien, « Ça va coûter cher », pour l'instant nous avons des maquettes financières qui ne sont pas encore stabilisées. C'est d'ailleurs un des sujets du groupe de travail et du débat - et du débat qui va fixer cela.
Ça veut dire que vous ne vous êtes pas arrêtés sur le chiffre ? C'est-à-dire on parle de 30 jusqu'à présent.
Cela demande à être vérifié encore.
Instaurer une journée de solidarité, oui ou non ?
C'est une des pistes, c'est une des pistes. Ne me faites pas répondre : toutes les solutions sont sur la table, donc, je n'ai pas de préférence à ce moment du débat.
Vous connaissez désormais très bien le dossier.
Oui.
Est-ce que sur la philosophie générale du financement vous pouvez nous en dire un peu plus ?
Non, pas pour l'instant.
"Non, pas pour l'instant" ?!! Parce que F. Chérèque dit qu'"il faut que tout le monde participe à l'effort".
Oui, effectivement.
Et il dit : "tous les revenus, sur tous les patrimoines".
Oui. F. Chérèque dit cela, B. Thibault dit autre chose, le MEDEF dit une troisième chose. Il faut absolument que nous laissions toutes les pistes ouvertes. À la fin du mois de juin, donc, très prochainement, si vous m'invitez je reviendrais vous voir et je vous dirais en priorité les pistes.
C'est intéressant sur la méthode. Cela veut dire que c'est l'anti-réforme des retraites que vous êtes en train de faire. C'est-à-dire, que vous donnez la parole à tout le monde et vous écoutez tout le monde.
J'écoute tout le monde effectivement, parce que c'est un débat qui est un débat très ouvert. Les retraites, les enjeux nous les connaissions. Le débat avait été ouvert il y a très longtemps ; il y a trente ans que le débat sur les retraites avait été ouvert et on avait beaucoup débattu. Il était temps de prendre des décisions, c'était urgent. Là, on le dit très bien : nous avons le temps d'instaurer un débat. Il faut que les Français s'approprient ce débat.
Et est-ce que vous pensez qu'on ira vers un consensus national ? Vous avez rencontré par exemple récemment M. Aubry. Est-ce que vous pensez que, sur ce sujet-là, il peut y avoir pas une union nationale mais en tout cas, une position commune ?
C'est difficile à dire pour l'instant. Ce que je note quand même, c'est qu'il y a un certain nombre de principes qui recueillent le consensus. Le fait que la solidarité doit être le socle du financement rencontre le consensus.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 8 février 2011