Interview de M. Pierre Lellouche, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, à "Europe 1" le 24 février 2011, sur le principe, accepté par l'Union européenne, de sanctions contre le régime de M. Kadhafi et sur l'annonce par Dominique de Villepin de son départ de l'UMP.

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Média : Europe 1

Texte intégral

G. Cahour.- P. Lellouche, bonjour.

Bonjour.

Vous êtes secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur. Les États membres de l’Union européenne se sont entendus hier sur le principe : c’est un principe encore de sanctions à l’égard du régime de Kadhafi ? Quel type de sanctions, des sanctions économiques ?

Oui, je crois que le souhait du Président qui l’a évoqué hier en Conseil des ministres était de geler la totalité de nos relations avec la Libye. Il existe des textes aux Nations Unies qui imposent aux Etats un devoir de protection de leur population, là on est rentré dans une phase de massacre de masse par les forces armées d’un gouvernement contre sa population.

Donc ça veut dire qu’on ne fait plus de business, on ne fait plus d’affaire avec la Libye ?

Il y a une interruption totale dont le principe a été décidé côté français et qui comme vous le savez doit être visé au niveau européen puisque les relations commerciales de l’Europe, c’est une compétence de l’Europe.

Est-ce qu’il ne fallait pas y penser avant, avant de faire des affaires avec un Etat où on le sait le chef de l’Etat est à l’origine un terroriste ?

C’est une... d’abord Kadhafi dans les phases de son histoire a été soumis à des embargos. La controverse dure depuis 40 ans, 42 ans qu’il est au pouvoir, avec des phases successives. Nous avons eu le même débat pendant la guerre froide avec l’Union soviétique. C’est toujours un sujet extrêmement complexe parce que d’un côté on voit bien que le commerce fait évoluer les sociétés, ouvre les portes aux voyages, l’information à la télévision, un certain nombre de biens. La fermeture d’un autre côté peut fonctionner, regardez l’exemple de l’Afrique du Sud au moment de la transition de l’Apartheid, les démocraties sont tout le temps confrontées à ce genre de problème.

Donc la question suivante était, est-ce qu’il faut arrêter de faire des affaires avec les dictatures, votre réponse est non ?

L’essentiel du commerce de la France à plus de 60 % du commerce de la France se fait à l’intérieur de la zone euro. Pour l’essentiel nous avons comme d’autres, besoin d’énergie, besoin de matières premières, il y a aussi des grands pôles émergents qui ne sont pas toujours des démocraties telles que nous les imaginons en France ou en Royaume Uni, aux Etats-Unis, il n’empêche que le fonctionnement de nos économies a besoin d’énergie. D’ailleurs l’une des conséquences du gel des relations avec la Libye, c’est de clore à peu près 15 % des besoins énergétiques français. Donc il va falloir que d’autres fournisseurs prennent le relais.

P. Lellouche, pour rester dans l’actualité politique dont on parle beaucoup ce matin sur Europe 1, D. de Villepin sera reçu aujourd’hui par N. Sarkozy il a annoncé aussi qu’il quittait l’UMP. Qu’est-ce que vous lui dites, bonne route, bon débarras ou dommage ?

Je lui dis que j’en prends acte, je le connais bien et depuis très longtemps et je lui dis simplement que dans la situation présente qui n’est pas facile tout ce qui va dans le sens de la désunion de notre famille politique est un service rendu au camp d’en face, c’est tout.

Donc il a tort.

Et que chacun doit réfléchir à cela. Et au contraire essayer de s’unir dans une situation, je le redis qui n’est pas simple.

Vous avez entendu l’analyse d’O. Duhamel sur les intentions de vote des six derniers mois, est-ce que ça vous préoccupe pour votre candidat N. Sarkozy ?

J’en prends note là aussi, j’ai vécu moi à côté de F. Baroin l’élection de 95 de J. Chirac. On n’était pas franchement favori, pendant des mois et des mois. E. Balladur était déjà élu, et on a vu ce que cela a donné à l’arrivée, donc les sondages ont une valeur relative. Si D. Strauss-Kahn est candidat, nous aurons un débat avec lui sur le fond, projet contre projet et les Français se prononceront. C’est le sens de la démocratie, les sondages sont une indication, qu’on ne met pas du tout de côté. D’un autre côté la campagne, elle n’a pas commencé et il n’y a pas en ce moment ni un échange de projet, ni un échange de personnalité. Et je crois qu’il faudra se donner un peu de temps.

Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 4 mars 2011