Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
La Journée mondiale de la tuberculose que nous célébrerons demain 24 mars, commémore la présentation, par le Dr Robert Koch en 1882, à Berlin, de sa découverte du bacille de la tuberculose. Cette découverte a marqué le début des efforts entrepris pour diagnostiquer et traiter la maladie.
Car rappelons que la tuberculose est une des pathologies les plus anciennes. Elle est intiment liée à lhomme et jusquau début du 20ème siècle, elle était responsable dun décès sur 7 en Europe.
Dans ce domaine, laction de lOrganisation Mondiale de la santé (OMS) vise à réduire de moitié la prévalence et le nombre de décès dus à cette maladie dici à 2015.
1. Objectifs de la journée mondiale de la tuberculose
Grâce à lavènement de lantibiothérapie dans les années 50, nous avons cru, à tort, que cette pathologie pouvait disparaître. Malheureusement, le bacille de Koch na pas échappé au phénomène émergent de résistance aux antibiotiques, qui se développe et contre lequel nous ne cessons de lutter.
Le Partenariat « Halte à la tuberculose » de lOMS organise cette journée mondiale pour justement montrer lampleur de lépidémie, et présenter les moyens de prévention et de traitement.
Car aujourdhui, ce sont encore annuellement près de 9 millions de nouveaux cas de tuberculose maladie, et 1,8 million de décès qui sont enregistrés dans le monde.
2. Situation en France
La France est concernée par cette épidémie. Lincidence globale peut être considérée comme faible : 8 cas pour 100000 habitants et près de 5500 nouveaux cas par an.
Mais nous devons rester mobilisés dans la lutte contre cette maladie, car la tuberculose ne frappe pas au hasard.
Elle dépend de facteurs socio démographiques, qui appellent à la vigilance et à la continuité dans les actions menées, pour garantir le contrôle de lépidémie sur lensemble du territoire.
Ainsi, il existe de grandes disparités selon les zones géographiques. La Guyane et lÎle-de-France sont les zones où lincidence est la plus forte : respectivement 22,6 cas et 17,9 cas pour 100000 habitants en 2008.
Mais des disparités existent également selon les groupes de population. Ainsi elle est particulièrement élevée :
* chez migrants nés dans des pays à forte prévalence comme ceux de lAfrique sub-saharienne.
* chez les personnes sans domicile fixe,
* et dans une moindre mesure parmi chez les détenus en milieu pénitentiaire,
* ainsi que chez les personnes âgées de plus de 75 ans.
3. La politique vaccinale par le BCG depuis juillet 2007
Le 11 juillet 2007, après avis du Comité Technique des Vaccinations (CTV), le ministère la santé avait décidé de suspendre lobligation de vaccination des enfants par le BCG.
Parallèlement, un programme de lutte contre la tuberculose en France avait été lancé, dont lexistence était une condition indispensable à toute modification de cette politique vaccinale par le BCG.
Cette décision a été prise au regard de la baisse majeure de lincidence de la maladie au cours des dernières décennies, du rapport bénéfice-risque du vaccin qui devenait défavorable, et des limites de son efficacité ; le BCG nempêche pas la diffusion de la tuberculose, il en évite les formes graves chez le nourrisson et lenfant.
Cette obligation a été remplacée par une recommandation forte de vaccination des enfants les plus à risques. LInstitut de veille sanitaire a été missionné pour évaluer limpact de cette décision.
Les résultats du travail mené montrent en définitive que cette suppression de lobligation vaccinale na pas entrainée de hausse des cas dinfections.
Toutefois lévolution de lépidémie de tuberculose chez les enfants à risque et leurs niveaux de couverture vaccinale doivent être suivie avec la plus grande attention.
4. La stratégie nationale de lutte contre la tuberculose (LAT)
Cest pour cela que le programme national de lutte contre la tuberculose (PNLT), lancé en 2007 avait pour double objectif la consolidation de la diminution de lincidence de la maladie et la réduction des disparités.
Aujourdhui grâce à vos actions et à votre mobilisation en tant quacteurs de la lutte antituberculeuse, la maitrise de lincidence est assurée. Il est important de le souligner et de le valoriser.
Mais un nouvel enjeu soffre à nous avec le soutien des mesures visant à agir au plus prés des personnes à risque et aussi des mesures visant à réduire les inégalités, tant géographiques que populationnelles.
De plus, la prévention comme la lutte contre cette maladie au sein de ces groupes à risque se compliquent du fait de diagnostics tardifs, de transmissions qui senchainent et dune faible adhérence au traitement. Tout ceci débouche sur lapparition de souches de tuberculose résistantes aux antituberculeux.
Ainsi, les principaux obstacles rencontrés pour la bonne prise en charge de la tuberculose dans les populations vulnérables sont principalement :
* le retard de recours aux soins, qui se décline avec le retard à la réalisation des examens pour le diagnostic ou encore le retard à la mise sous traitement qui peuvent eux-mêmes être liés à un retard au diagnostic,
* linterruption du traitement ou un traitement inadéquat,
* la limitation de laccès au BCG et linsuffisance de traitement des infections tuberculeuses latentes (ITL) chez les enfants.
Les raisons de ces obstacles sont souvent multiples mais citons en quelques-uns :
* la méconnaissance des filières de soins et des droits en matière de couverture sociale,
* la peur de la stigmatisation ou lobstacle « culturel »,
* les problèmes psychiatriques engendrant des refus de soins,
* ou enfin la précarité socio-économique - notamment le manque de ressources financières, un hébergement instable et insalubre.
Différentes mesures sont à encourager pour organiser la prise en charge globale, médicale et sociale, des personnes en situation précaire. Car il est fondamental daller au devant de ces populations.
Ces mesures peuvent être par exemple :
* la mise en place déquipes pluridisciplinaires mobiles (médecin, infirmière, assistant social etc.) pour le suivi et la prise en charge des tuberculeux dans les populations précaires, comme en Ile-de-France avec le soutien du SAMU SOCIAL à Paris.
* lassurance dun soutien social dans la prise en charge de la tuberculose des populations en difficultés socio- économiques (SDF, logement précaire, personnes avec difficultés financières, etc.).
* la mise en place et la connaissance des structures dhospitalisation de longue durée pour la prise en charge de la tuberculose dans les populations difficiles à surveiller ou dans le cas de tuberculoses complexes et/ou multirésistante, sur le modèle du sanatorium de Bligny, que je visiterai demain. Cette structure a développé une expertise dans la prise en charge de ces patients au plan thérapeutique (antibiotiques et éducation thérapeutique) et médicosocial. Il apparait nécessaire de soutenir, valoriser et encourager son apport spécifique dans la prise en charge des cas complexes en relais des hospitalisations en court séjour.
Dans ce contexte, une mobilisation des différents acteurs tant en ARS que dans les CLAT est à maintenir pour maitriser le taux dincidence et réduire les inégalités daccès aux services de lutte antituberculeuse pour tous les territoires.
Mesdames et Messieurs,
Jusquau du 20ème siècle la tuberculose était responsable de la mort dune personne sur 7. Aujourdhui, dans lesprit de beaucoup de personnes, cette maladie est éradiquée, notamment grâce aux antibiotiques.
Eh bien non, la tuberculose nest pas vaincue vous le savez toutes et tous, elle connaît même une insidieuse résurgence.
Cest pourquoi nous devons la surveiller, pour en maîtriser le taux dincidence et réduire les inégalités daccès aux services de lutte antituberculeuse pour tous les territoires.
Cest aussi pourquoi nous devons mieux la prendre en charge médicalement, non seulement par la prévention, mais aussi par une observance vigilante de ses traitements.
Je vous remercie, vous et lensemble des acteurs de cette lutte, tant dans les agences régionales de santé que dans les centre de lutte contre la tuberculose pour leur mobilisation. Et je souhaite vivement que la journée mondiale de la tuberculose qui aura lieu demain, puisse contribuer à la sensibilisation de celles et ceux qui sous-estiment les dangers et les réalités de cette maladie. Cette sensibilisation, cest aussi un devoir de solidarité.
Source http://www.sante.gouv.fr, le 29 mars 2011