Conférence de presse de M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères et européennes, sur les dossiers internationaux, notamment la répression en Syrie, Luxembourg le 20 juin 2011.

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Circonstance : Réunion du Conseil Affaires étrangères à Luxembourg le 20 juin 2011

Texte intégral

Notre ordre du jour a été très chargé, je ne vais donc pas énumérer toutes les questions dont nous avons parlé.
Juste un mot sur la Syrie. La France a tenu à réaffirmer sa volonté de ne pas faire deux poids et deux mesures et nous sommes donc très attachés à une position très claire, très ferme, sur ce qui se passe en Syrie, et qui est absolument inacceptable puisqu'il s'agit d'une répression brutale qui se prolonge.
Nous avons donc beaucoup œuvré, vous le savez déjà, auprès de l'Union européenne pour avoir des sanctions fortes, pour inclure dans la liste des personnalités sanctionnées Bachar Al Assad lui-même, ce que nous avons d'ailleurs obtenu.
Nous souhaitons à nouveau un renforcement de ces sanctions. Nous avons reçu un soutien de l'ensemble de nos collègues, de même que, dans les conclusions, vous le verrez, il y a la volonté d'agir au Conseil de sécurité pour faire en sorte que le Conseil se prononce.
Pour moi, il serait absolument insupportable que les Nations unies ne puissent pas arriver à une expression forte sur ce qui se passe en Syrie. Je sais bien qu'il y a la menace du veto russe. Nous essayons de réunir la plus large majorité possible au sein du Conseil, et cette majorité réunie, eh bien, je pense qu'il faudra aller au vote.
Alors, j'ai bien pris note de la dernière déclaration du président syrien ; il n'y a aucune raison de le prendre au sérieux aujourd'hui plus qu'hier. Ce n'est pas la première fois qu'il annonce un programme de réformes ; il n'a jamais tenu sa parole. Par ailleurs, annoncer des élections alors que l'on continue à utiliser les tanks contre les populations civiles, cela n'a aucun sens. Si - ce que je crois difficilement réalisable - il arrêtait toute répression brutale, toute utilisation de la violence contre le peuple syrien, ce serait une autre chose, mais ce n'est pas le cas aujourd'hui. Par conséquent, nous restons sur notre position de sanctions européennes et d'action aux Nations unies pour obtenir une résolution.
Q - Sinon, quels autres moyens ? Peut-on avoir d'autres sanctions ? Pour l'instant on ne voit pas venir grand-chose.
R - Il y a eu des sanctions. Vous ne voyez rien venir, mais vous les avez vu venir quand on a mis des sanctions.
Q - Cela n'a pas vraiment fonctionné ?
R - Si, cela fonctionne. C'est-à-dire que les intéressés ne peuvent plus, par exemple, quitter la Syrie ; ils n'ont pas de visa pour entrer dans les pays européens, on ne peut donc pas dire que cela ne fonctionne pas.
Nous n'avons jamais prétendu que les sanctions allaient, du jour au lendemain, changer la face des choses. C'est un processus long et difficile qui correspond aussi à une volonté morale de bien expliquer ce que nous devons faire. Nous pouvons aller plus loin et envisager des sanctions économiques qui pourraient être plus efficaces. Je reconnais bien que le plus efficace, ce serait une prise de position du Conseil de sécurité des Nations unies, mais pour l'instant on n'avance pas.
Q - Et dans les conclusions on en parle de renforcer les sanctions ?
R - Absolument et vous le verrez dans les conclusions. Sur les sanctions économiques, on n'en a pas encore discuté, mais sur l'idée de renforcer les sanctions nous avons un soutien.
Q - En vue d'une adoption d'ici la fin de la semaine ?
R - Ah non, ce ne sera pas d'ici la fin de la semaine et le Conseil européen…
Q - N'y a t il pas quand même de «doubles standards» ?
R - Non, nous l'avons dit : il n'y a pas de raison, je le répète, d'avoir, comme on dit en anglais, des «doubles standards», en français «deux poids deux mesures». La répression a fait plus d'un millier de morts, on ne connaît pas les chiffres, elle a été d'une violence inouïe, on ne peut pas l'accepter sans réagir. Certains considèrent qu'il est encore temps pour lui de s'amender et d'engager un processus de réforme véritable. Pour ma part, j'en doute, je crois que le point de non retour a été atteint et, en tout cas, ce n'est pas la déclaration d'aujourd'hui qui change le contexte.
Q - Sur les sanctions contre la Syrie, faudrait il sanctionner l'Iran ou des Iraniens ?
R - Non, l'Iran c'est un autre dossier. Vous savez que sur l'Iran, la France là-aussi a dit des choses extrêmement claires et extrêmement fermes. Nous avons souhaité qu'il y ait aussi un renforcement des sanctions contre l'Iran tant que l'Iran ne respectera pas les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies et les décisions de l'AIEA.
Q - Derrière les sanctions contre la Syrie, vous pourriez inclure des Iraniens ?
R - Je vous ai dit que c'était deux problèmes différents et je vous ai dit ce que l'on pensait de l'Iran.
Q - Qu'avez vous dit sur l'Albanie ?
R - Sur l'Albanie, nous avons pris une position très claire. Si l'Albanie veut poursuivre sur la voie européenne, elle doit s'engager dans un dialogue politique qui permette de réconcilier les parties.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 juin 2011